Vu la procédure suivante :
Par une requête et un mémoire enregistrés le 28 novembre 2024 et le 22 mai 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme A... C... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite par laquelle le Premier ministre a rejeté sa demande tendant à ce que soit pris l'arrêté prévu par le deuxième alinéa de l'article L. 433-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
2°) d'enjoindre au Premier ministre et au ministre de l'intérieur d'édicter l'arrêté mentionné au 1° dans un délai d'un mois à compter de la décision à intervenir sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution, notamment son article 21 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018 ;
- l'ordonnance n° 2020-1733 du 16 décembre 2020 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jérôme Goldenberg, conseiller d'Etat en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Clément Malverti, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. Le 2° du I de l'article 63 de la loi du 10 septembre 2018 pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie a ajouté à l'article L. 311-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version alors en vigueur un alinéa aux termes duquel " Dans des départements dont la liste est fixée par arrêté du ministre chargé de l'immigration, l'étranger qui a déposé une demande de renouvellement de sa carte de séjour temporaire ou de sa carte de séjour pluriannuelle autre que celle mentionnée au deuxième alinéa du présent article, avant l'expiration de celle-ci, peut justifier, dans la limite de trois mois à compter de cette date d'expiration, de la régularité de son séjour par la présentation de la carte arrivée à expiration. Pendant cette période, il conserve l'intégralité de ses droits sociaux ainsi que son droit d'exercer une activité professionnelle ". Ces dispositions ont été reprises en substance au deuxième alinéa de l'article L. 433-3 du même code dans sa version issue de l'ordonnance du 16 décembre 2020 portant partie législative de ce code, entrée en vigueur le 1er mai 2021.
2. Par une lettre du 20 septembre 2024, Mme C... a demandé au Premier ministre et au ministre de l'intérieur de prendre l'arrêté prévu par les dispositions de l'article L. 433-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Mme C... demande l'annulation de la décision implicite de rejet de sa demande.
3. L'autorité disposant du pouvoir réglementaire et chargée d'assurer l'exécution d'une disposition législative est tenue de prendre dans un délai raisonnable les mesures qu'implique nécessairement l'application de la loi, hors le cas où le respect des engagements internationaux de la France y ferait obstacle.
4. L'effet utile de l'annulation pour excès de pouvoir du refus du pouvoir réglementaire de prendre les mesures qu'implique nécessairement l'application de la loi réside dans l'obligation, que le juge peut prescrire d'office en vertu des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, pour le pouvoir réglementaire, de prendre ces mesures. Il s'ensuit que lorsqu'il est saisi de conclusions aux fins d'annulation du refus d'une autorité administrative d'édicter les mesures nécessaires à l'application d'une disposition législative, le juge de l'excès de pouvoir est conduit à apprécier la légalité d'un tel refus au regard des règles applicables et des circonstances prévalant à la date de sa décision.
5. D'une part, aux termes du II de l'article 63 de la loi du 10 septembre 2018 : " Le dernier alinéa de l'article L. 311-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction résultant du I du présent article est applicable jusqu'au 31 décembre 2020 ". D'autre part, l'article 3 de l'ordonnance du 16 décembre 2020 portant partie législative du code de l'entrée et du séjour des étrangers et de l'asile dispose que " Les références à des dispositions abrogées par la présente ordonnance sont remplacées par les références aux dispositions correspondantes du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction annexée à la présente ordonnance ". Il résulte de ces dispositions que les dispositions citées au point 1 ont cessé d'être applicables le 31 décembre 2020. Par suite le ministre chargé de l'immigration, qui ne disposait plus à la date de sa demande, de la compétence conférée par ces dispositions pour fixer la liste des départements où elles étaient applicables, était tenu de rejeter la demande présentée par Mme C....
6. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision qu'elle attaque. Ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent par suite qu'être également rejetées.
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme A... C..., au Premier ministre et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Délibéré à l'issue de la séance du 5 juin 2025 où siégeaient : M. Nicolas Boulouis, président de chambre, présidant ; M. Jean-Yves Ollier, conseiller d'Etat et M. Jérôme Goldenberg, conseiller d'Etat en service extraordinaire-rapporteur.
Rendu le 26 juin 2025.
Le président :
Signé : M. Nicolas Boulouis
Le rapporteur :
Signé : M. Jérôme Goldenberg
La secrétaire :
Signé : Mme Sandrine Mendy