Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société TSHYG Express a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge, en droits et majorations, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices 2015 et 2016 et du rappel de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2015 au 30 juin 2017.
Par un jugement n° 1904354 du 16 octobre 2020, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 16 décembre 2020, la société TSHYG Express, représentée par Me Gueunier, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1904354 du 16 octobre 2020 du tribunal administratif de Nice ;
2°) de prononcer la décharge demandée au tribunal ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 400 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est insuffisamment motivé ;
- les rappels de taxe sur la valeur ajoutée sont insuffisamment motivés ;
- elle est ainsi fondée à se prévaloir de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales ;
- le profit sur le Trésor n'est pas fondé ;
- la rectification fondée sur le 2 de l'article 38 du code général des impôts n'est pas justifiée.
Par un mémoire en défense enregistré le 28 avril 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués par la société TSHYG Express ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 6 septembre 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 25 septembre 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Platillero,
- et les conclusions de M. Ury, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La société TSHYG Express, qui exerce l'activité de transport de marchandises et de location de véhicules avec ou sans chauffeur, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle des propositions de rectification du 15 décembre 2017 et du 17 avril 2018 lui ont été notifiées. Au terme de la procédure, elle a été assujettie à une cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés au titre de la période 2015-2016 et à un rappel de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2014 au 30 juin 2017, assortis des intérêts de retard. La société TSHYG Express relève appel du jugement du 16 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et majorations, des impositions laissées à sa charge à la suite de ses réclamations.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".
3. Le tribunal, qui n'était pas tenu de répondre à l'ensemble des arguments avancés par la société TSHYG Express, a suffisamment répondu au point 3 du jugement attaqué au moyen tiré de l'insuffisante motivation de la proposition de rectification, dont la régularité ne dépendait pas du bien-fondé des motifs, en ce qui concerne le rappel de taxe sur la valeur ajoutée afférent aux prestations facturées à la société TSHYG Courses. Il a également suffisamment exposé, au point 5 du même jugement, les motifs sur lesquels il s'est fondé pour écarter le moyen dirigé contre la rectification en matière d'impôt sur les sociétés, relative à l'existence d'un crédit injustifié porté sur le compte courant du gérant dans la société. La société TSHYG Express n'est ainsi pas fondée à soutenir que ce jugement serait insuffisamment motivé.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
4. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) ". L'article R. 57-1 du même livre dispose que " la proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée (...) ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler utilement ses observations. En revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs.
5. D'une part, en ce qui concerne l'insuffisance de déclaration de la taxe sur la valeur ajoutée encaissée afférente aux factures cédées à une société d'affacturage, la proposition de rectification du 17 avril 2018 indique les dispositions légales dont il est fait application, notamment en matière d'exigibilité de la taxe sur la valeur ajoutée, précise que, dans le cadre d'un contrat avec une société d'affacturage, la taxe sur la valeur ajoutée est reversée à l'encaissement de la facture cédée, et mentionne que le vérificateur a obtenu de la société d'affacturage à la suite de l'exercice d'un droit de communication l'historique des relations avec les débiteurs cédés, comprenant leurs noms ainsi que les dates et montants des règlements. La proposition de rectification comprend également des tableaux qui détaillent avec précision les opérations en cause, en mentionnant notamment leurs montants hors taxes et toutes taxes comprises et les montants de taxe, ainsi que la date des encaissements, et récapitule le montant global de la taxe sur la valeur ajoutée encaissée. La proposition de rectification est ainsi suffisamment motivée sur ce point. A cet égard, dès lors que ce document mentionne les règles d'exigibilité appliquées et les dates des encaissements, la régularité de sa motivation n'était pas subordonnée à la mention de la date des paiements, à la supposer même distincte, et à l'indication du montant des factures cédées et de leur date de cession à la société d'affacturage. La régularité de la motivation n'était pas davantage subordonnée à ce que soient annexés à la proposition de rectification les documents obtenus de l'exercice du droit de communication, dont la communication relevait de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales et non de l'article L. 57 du même livre.
6. D'autre part, en ce qui concerne l'insuffisance de déclaration de taxe sur la valeur ajoutée afférente aux factures émises au nom d'un client, la société TSHYG Courses, la proposition de rectification, qui indique en préambule les dispositions applicables, mentionne les montants hors taxes et toutes taxes comprises des sommes facturées, identifie les écritures comptables correspondantes et leur date. Elle précise que ces factures ont été réglées par compensation de comptes clients/fournisseurs et par paiement sur un compte bancaire pour des montants hors taxes et toutes taxes comprises, montants qui sont précisés et détaillés dans des tableaux identifiant les écritures comptables et leur date, la différence étant justifié par trois opérations portées au débit d'un compte précisément identifié. Elle mentionne enfin qu'une facture afférente à l'exercice 2015 dont le montant est précisé n'a pas été encaissée à la fin de l'exercice. La proposition de rectification est ainsi également suffisamment motivée sur ce point. A cet égard, dès lors que la proposition de rectification identifie les écritures comptables, la société TSHYG Express ne saurait sérieusement prétendre qu'elle serait insuffisamment motivée faute de mentionner l'intitulé générique du compte. Par ailleurs, elle ne peut utilement contester le bien-fondé des motifs exposés à l'appui de son moyen tiré de l'irrégularité de procédure.
7. Compte tenu de ce qui précède, en l'absence d'irrégularité, la société TSHYG Express n'est pas fondée à se prévaloir de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales.
Sur le bien-fondé des impositions :
8. Aux termes de l'article 38 du code général des impôts : " (...) 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés (...) ".
9. L'administration a constaté que la société TSHYG Express a comptabilisé au crédit du compte courant ouvert au nom de son gérant, le 1er janvier 2016 une somme de 69 149,43 euros, provenant du débit d'un compte sur lequel transitaient les versements effectués par la société d'affacturage auquel elle avait recours, pour un montant identique. En l'absence de justification de la dette ainsi constatée à l'égard du gérant de la société TSHYG Express, le vérificateur a procédé à la rectification correspondant à ce passif injustifié, sur le fondement du 2 de l'article 38 du code général des impôts. Si la société TSHYG Express soutient que cette rectification n'est pas fondée, en l'absence de variation de l'actif net, les faits précédemment décrits constatent bien une comptabilisation d'une dette à l'égard du gérant, soit une créance d'un tiers, qui n'est pas justifiée et affecte le passif et, par suite, l'actif net.
10. Par ailleurs, si la société TSHYG Express soutient que la rectification relative au profit sur le Trésor n'est pas fondée, au motif que " les rappels de taxe sur la valeur ajoutée (...) étaient irréguliers ou, à tout le moins, mal fondés ", compte tenu de ce qui a été dit précédemment, le moyen doit en tout état de cause être écarté, la requérante ayant par ailleurs expressément limité son moyen à l'appréciation de la régularité de la procédure.
11. Il résulte de tout ce qui précède que la société TSHYG Express n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande. Ses conclusions aux fins d'annulation de ce jugement et de décharge, en droits et majorations, des impositions en litige doivent dès lors être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la société TSHYG Express demande au titre des frais qu'elle a exposés.
D E C I D E :
Article 1 : La requête de la société TSHYG Express est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée TSHYG Express et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.
Délibéré après l'audience du 9 novembre 2923, où siégeaient :
- Mme Paix, présidente,
- M. Platillero, président assesseur,
- Mme Mastrantuono, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 novembre 2023.
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N° 20MA04686