Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société civile immobilière du Clos Gaillac et la société par actions simplifiée Solmar ont demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la délibération du 12 décembre 2017 par laquelle le conseil communautaire de la communauté d'agglomération Rodez Agglomération a approuvé la révision n° 5 du plan local d'urbanisme intercommunal en tant que ce plan comporte un " volet commercial " en annexe 4 du règlement dont les dispositions sont reproduites à l'article 3 du règlement applicable à chacune des zones définies par le même plan.
La société civile immobilière Pierjeandabri a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler cette même délibération en ce qu'elle déclasse de la zone commerciale les parcelles cadastrées section AO numéros 362 à 367 ainsi que la décision du 28 mars 2018 du président de la communauté d'agglomération Rodez Agglomération rejetant son recours gracieux.
Par un jugement nos 1800209, 1802461 du 13 novembre 2020, le tribunal administratif de Toulouse a, d'une part, fait droit à la demande des sociétés du Clos Gaillac et Solmar, d'autre part, prononcé un non-lieu à statuer sur la demande de la société Pierjeandabri et, enfin, mis à la charge de la communauté d'agglomération Rodez Agglomération une somme globale de 1 500 euros à verser aux sociétés Clos Gaillac et Solmar ainsi qu'une somme de 1 500 euros à verser à la société Pierjeandabri au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par une requête, une requête d'appel rectificative et un mémoire en réplique, enregistrés les 15 et 19 janvier 2021 et le 22 septembre 2021 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux sous le n° 21BX00204 et ensuite sous le n° 21TL20204 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, la communauté d'agglomération Rodez Agglomération, représentée par la SARL Martin Avocats, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de rejeter les demandes des sociétés Clos Gaillac, Solmar et Pierjeandabri présentées devant le tribunal administratif de Toulouse ;
3°) de mettre à la charge des sociétés Clos Gaillac, Solmar et Pierjeandabri la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
Sur la régularité du jugement :
- la motivation du jugement attaqué ne permet pas de comprendre la nature de l'erreur de droit retenue par le tribunal pour annuler la délibération en litige ;
Sur le bien-fondé du jugement :
- " le volet commercial " du plan local d'urbanisme intercommunal, qui constitue un zonage spécifique à l'implantation et au développement commercial sur le territoire concerné, n'est motivé que par des considérations d'urbanisme et n'empiète pas sur le domaine d'intervention de la législation sur l'aménagement commercial ;
- la possibilité de délimiter pour des motifs d'urbanisme des zones dans lesquelles l'implantation de certains établissements commerciaux est interdite ou réglementée ne permet pas de conclure à l'erreur de droit retenue par le tribunal ;
- c'est à tort que le tribunal a considéré que le " volet commercial " du plan local d'urbanisme intercommunal est distinct et se superpose au zonage prévu par l'article L. 151-9 du code de l'urbanisme ; il s'agit d'un sous-zonage intégré à chaque règlement de zone synthétisé en annexe du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal ;
- l'article L. 151-9 du code de l'urbanisme autorise les auteurs du plan local d'urbanisme intercommunal à interdire l'implantation de certains établissements commerciaux ; les interdictions de construire prévues par le plan local d'urbanisme intercommunal ne sont ni générales, ni absolues ; le principe du " volet commercial " est un principe d'autorisation et non d'interdiction ;
- ce " volet commercial " ne méconnaît pas le principe de proportionnalité prévu au paragraphe 3 de l'article 15 de la directive n° 2006/123 du 12 décembre 2006 au regard des objectifs prévus par le rapport de présentation et le projet d'aménagement et de développement durables ; ce volet n'empêche pas l'établissement des commerces sur l'ensemble du territoire ; il ne s'applique pas à certains types de commerces et prévoit différentes règles d'établissement des commerces en fonction du zonage concerné ;
- les articles L. 2121-10 et L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales ne sont pas méconnus dès lors que les membres de l'organe délibérant ont été régulièrement convoqués et qu'une notice de synthèse leur a été remise ;
- le moyen tiré de la méconnaissance des articles L. 151-6 et L. 151-16 du code de l'urbanisme doit être écarté dès lors que le " volet commercial " du plan local d'urbanisme intercommunal ne rentre pas dans le champ d'application de ces dispositions ; le volet en litige fait application des dispositions des articles L. 151-8 et L. 151-9 du même code ;
- le moyen tiré de l'irrégularité de l'enquête publique en méconnaissance des dispositions des articles L. 13-6 du code de l'environnement est inopérant dès lors que ces dispositions n'existent pas ; ce moyen est insuffisamment précis pour en apprécier le bien-fondé ;
- le classement des parcelles cadastrées section AO numéros 362 à 367 en sous-secteur UXa de la zone UX, dont est propriétaire la société Pierjeandabri, n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- il n'existe pas de droit acquis au maintien des classements et prescriptions d'urbanisme antérieurs ; la zone UXa reste dédiée à l'activité économique.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 mai 2021, la société du Clos Gaillac et la société Solmar, représentées par Me Jauffret, concluent au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la communauté d'agglomération Rodez Agglomération une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que :
- la délibération litigieuse a été prise en méconnaissance des articles L. 2121-10, L. 2121-12 et L. 5211-1 du code général des collectivités territoriales ;
- cette délibération est entachée d'une erreur de droit dès lors que le plan local d'urbanisme intercommunal contient une annexe 4 prévoyant un " volet commercial " qui n'autorise la création de commerces en dehors des centres-villes et des centre-bourgs que de manière limitée ;
- cette annexe n°4 n'est pas contenue au sein de la liste des annexes d'un plan local d'urbanisme prévues par les articles R. 151-51, R. 151-52 et R. 151-53 du code de l'urbanisme ;
- l'objet de l'annexe 4 du règlement méconnaît les dispositions de l'article L. 151-37 du code de l'urbanisme dès lors qu'il va au-delà de la seule délimitation des " quartiers, îlots et voies dans lesquels est préservée ou développée la diversité commerciale " ;
- la délibération en litige a été adoptée en violation des articles L. 151-8, L. 151-9 et L. 151-16 du code de l'urbanisme ;
- cette délibération est entachée d'une erreur de droit au regard des articles L. 141-16, L. 141-17, L. 142-1 et L. 151-6 du code de l'urbanisme en ce que seul le document d'orientation et d'aménagement du schéma de cohérence territoriale peut contenir des orientations relatives à l'équipement commercial et artisanal ; le rapport de présentation précise que l'opposabilité des orientations commerciales se retrouve au niveau du plan local d'urbanisme intercommunal en l'absence de schéma de cohérence territoriale y compris pour les dossiers non soumis à l'avis favorable de la commission départementale d'aménagement commercial ;
- la communauté d'agglomération Rodez Agglomération a commis une erreur de droit en intégrant ce " volet commercial " au sein de l'annexe 4 du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal, ce volet a un caractère prescriptif qui empiète sur le domaine d'intervention de la législation de l'équipement commercial en méconnaissance des articles L. 750-1 et suivants du code de commerce ;
- l'annexe n° 4 méconnaît les articles 43 et 49 du traité instituant la Communauté européenne et l'article 15 de la directive 2006/123 du 12 décembre 2006 au regard de l'arrêt du 30 janvier 2018 de la Cour de justice de l'Union européenne n° C360-15 et C n° 31-16 en ce qu'elle ne respecte pas la condition de proportionnalité.
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 octobre 2021, la société Pierjeandabri, représentée par Me Saules, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de la communauté d'agglomération Rodez Agglomération le versement d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la délibération en litige méconnaît les articles L. 141-16, 141-17, 151-6, 151-9, R. 151-30, R. 151-37 du code de l'urbanisme dès lors que l'annexe 4 du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal contient un " volet commercial " qui présente un caractère règlementaire en ce qu'il prévoit des secteurs commerciaux et non des zones préférentielles d'implantation ;
- elle ne respecte pas le principe de proportionnalité prévu par l'article de 15 la directive 2006/123 du 12 décembre 2006 ;
- la communauté d'agglomération Rodez Agglomération a commis une erreur manifeste d'appréciation en déclassant les parcelles dont elle propriétaire en zone blanche où est interdite toute création de surfaces commerciales par construction neuve, dès lors que ses parcelles jouxtent la parcelle où se situent les commerces Mac Donald's et Aldi et sont situées en continuité d'une zone commerciale construite ; la zone commerciale permettait avant l'approbation de la délibération en litige des activités de commerce de détail non soumises à autorisation d'exploitation commerciale ce qui n'est plus possible au regard du " volet commercial " de l'annexe 4.
Par une ordonnance du 27 septembre 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 25 octobre 2021 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la directive 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur ;
- le code de commerce ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Chabert, président,
- les conclusions de Mme Meunier-Garner, rapporteure publique,
- les observations de Me Santos-Pires, représentant la communauté d'agglomération Rodez Agglomération ;
- les observations de Me Jauffret, représentant les société Clos Gaillac et Solmar,
- et les observations de Me Saules, représentant la société Pierjeandabri.
Une note en délibéré, présentée par la communauté d'agglomération Rodez Agglomération, représentée par la SARL Martin Avocats, a été enregistrée le 10 novembre 2023.
Considérant ce qui suit :
1. Par une délibération du 18 juin 2013, le conseil communautaire de la communauté d'agglomération Rodez Agglomération a prescrit la révision de son plan local d'urbanisme intercommunal. Par une délibération du 12 décembre 2017, le même conseil a approuvé la révision n° 5 de ce plan local d'urbanisme intercommunal. Par la présente requête, la communauté d'agglomération Rodez Agglomération relève appel du jugement du 13 novembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Toulouse, a, d'une part, annulé à la demande des sociétés du Clos Gaillac et Solmar la délibération du 12 décembre 2017 en tant que le plan local d'urbanisme intercommunal comporte un " volet commercial " en annexe 4 du règlement dont les dispositions sont reprises aux articles 3 des règlements des différentes zones, d'autre part, prononcé un non-lieu à statuer sur la demande présentée par la société Pierjeandabri tendant à l'annulation de cette même délibération en tant qu'elle déclasse de la zone commerciale les parcelles cadastrées section AO numéros 362 à 367 ainsi que la décision du 28 mars 2018 rejetant son recours gracieux et, enfin, mis à la charge de la communauté d'agglomération Rodez Agglomération une somme globale de 1 500 euros à verser aux sociétés du Clos Gaillac et Solmar ainsi qu'une somme de 1 500 euros à verser à la société Pierjeandabri au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Sur la régularité du jugement :
2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".
3. Après avoir relevé aux points 3 et 4 de leur jugement que le volet commercial du plan local d'urbanisme intercommunal en litige ne constitue ni un document d'orientation et d'objectifs ni un document d'aménagement artisanal et commercial pouvant figurer dans un plan local d'urbanisme intercommunal en l'absence de schéma de cohérence territoriale, les premiers juges ont cité au point 5 notamment les article L. 151-9 et L. 151-16 du code de l'urbanisme relatifs au règlement du plan local d'urbanisme et précisé aux points 6 à 7 les raisons pour lesquelles ce même " volet commercial " est entaché d'une erreur de droit dès lors qu'il constitue un zonage spécifique à l'implantation et au développement commercial ayant pour objet de réglementer et d'interdire l'implantation de certains établissements commerciaux. Le jugement, qui n'a pas à faire état de l'ensemble des arguments soulevés par les parties, est ainsi suffisamment motivé. Si l'appelante soutient que ces motifs ne permettent pas de comprendre en quoi l'erreur de droit retenue est constituée, un tel moyen se rattache au bien-fondé du jugement et non à sa régularité.
Sur le bien-fondé du jugement :
4. En application des dispositions de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, il appartient au juge d'appel, saisi d'un jugement par lequel un tribunal administratif a prononcé l'annulation d'un acte intervenu en matière d'urbanisme, de se prononcer sur le bien-fondé des différents motifs d'annulation retenus par les premiers juges, dès lors que ceux-ci sont contestés devant lui, et d'apprécier si l'un au moins de ces moyens justifie la solution d'annulation.
5. Le tribunal administratif de Toulouse a, sur la demande des sociétés du Glos Gaillac et Solmar, annulé la délibération du conseil communautaire de la communauté d'agglomération Rodez Agglomération du 12 décembre 2017 approuvant la révision n° 5 du plan local d'urbanisme en tant qu'elle approuve le volet commercial figurant à l'annexe 4 du règlement de ce plan au motif d'une erreur de droit commise dans l'application des articles L. 151-19, L. 151-16, R. 151-30 et R. 151-37 du code de l'urbanisme. Les premiers juges ont également relevé que ce volet commercial a été adopté en violation du principe de proportionnalité défini par l'article 15 de la directive 2006/123 du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur.
En ce qui concerne l'erreur de droit retenue par le tribunal administratif :
S'agissant des dispositions du code de l'urbanisme applicables :
6. Aux termes de l'article L. 151-9 du code de l'urbanisme : " Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger. / Il peut préciser l'affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être faits ou la nature des activités qui peuvent y être exercées et également prévoir l'interdiction de construire. / Il peut définir, en fonction des situations locales, les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées. ". Aux termes de l'article L. 151-16 du même code, relatif à la mixité sociale et fonctionnelle en zones urbaines ou à urbaniser, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Le règlement peut identifier et délimiter les quartiers, îlots et voies dans lesquels est préservée ou développée la diversité commerciale, notamment à travers les commerces de détail et de proximité, et définir, le cas échéant, les prescriptions de nature à assurer cet objectif. ". Aux termes de l'article R. 151-30 de ce code : " Pour des raisons de sécurité ou salubrité ou en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, le règlement peut, dans le respect de la vocation générale des zones, interdire : / 1° Certains usages et affectations des sols ainsi que certains types d'activités qu'il définit ; / 2° Les constructions ayant certaines destinations ou sous-destinations (...) ". Enfin, aux termes de l'article R. 151-37 dudit code : " Afin d'assurer la mise en œuvre des objectifs de mixité sociale et fonctionnelle, le règlement peut : / (...) 4° Identifier et délimiter, dans le ou les documents graphiques, les quartiers, îlots et voies dans lesquels doit être préservée ou développée la diversité commerciale, notamment à travers les commerces de détail et de proximité, et définir, le cas échéant, les règles spécifiques permettant d'atteindre cet objectif (...) ".
7. Il résulte des dispositions précitées que les auteurs des plans locaux d'urbanisme peuvent délimiter, pour des motifs d'urbanisme, des zones dans lesquelles l'implantation de certains établissements commerciaux est interdite ou réglementée.
S'agissant du volet commercial défini par le plan local d'urbanisme intercommunal :
8. Il ressort des pièces du dossier, en particulier du projet d'aménagement et de développement durables de la 5ème révision du plan local d'urbanisme intercommunal, que la communauté d'agglomération Rodez Agglomération a souhaité notamment maîtriser les développements commerciaux en périphérie afin de redynamiser le commerce en centre-ville de Rodez en favorisant en particulier la diversité commerciale. Pour la mise en œuvre de l'objectif de mixité fonctionnelle, les auteurs du plan local d'urbanisme intercommunal ont entendu rééquilibrer les activités économiques entre le nord et le sud pour développer et conforter les services de proximité en centres bourgs et centres villes. Un volet commercial a été ainsi arrêté par les auteurs du plan dont l'objet est, selon le projet d'aménagement et de développement durables, " de réglementer l'implantation des commerces sur le territoire Rodez Agglomération : certaines zones sont jugées prioritaires et d'autres incompatibles avec le volet commercial. Ce volet commercial est un outil de planification qui permet de concentrer l'offre commerciale sur des secteurs précis et localisés pour éviter l'éparpillement commercial et donc le manque d'attractivité (...) ". Le lexique du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal précise que : " sont concernés par les plans de polarité commerciale du volet commercial du Plan Local d'Urbanisme, les activités relevant du champ commerce de l'INSEE, à l'exception du commerce de réparation automobile, de la restauration, de l'hôtellerie et du commerce de gros (codifié par la Nomenclature statistique des Activités Economiques dans la Communauté Européenne). (...) ".
9. L'annexe 4 du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal en litige, dénommée " Volet commercial du PLUi ", fixe des règles relatives aux possibilités de création ou d'extension de surfaces commerciales ayant vocation à s'appliquer " aux différents secteurs commerciaux " répartis en quatre zones distinctes dénommées " zones de centralité ", " zones intermédiaires ", " zones commerciales " et " zones non commerciales ". Figurent également dans cette annexe 4 du règlement onze documents graphiques intitulés " cartes du volet commercial " qui identifient pour différentes parties du territoire des communes membres de la communauté d'agglomération, les secteurs commerciaux en fonction des quatre zones distinctes précitées.
10. Pour les zones dites " zones intermédiaires ", les prescriptions du volet commercial fixent une " limite de 300 m² de plancher maximum (surface de vente) par unité commerciale ". Pour les " zones commerciales ", les règles du volet commercial en litige distinguent un pôle départemental ZC 1 Le Comtal et deux pôles majeurs, ZC 2 Les Balquières et ZC 3 Sud Expo, dans lesquels s'applique un plafond global de surface de vente pour l'ensemble du pôle concerné sous la forme d'un potentiel de développement. Il ressort toutefois du tableau applicable à ces " zones commerciales " que seul le pôle majeur ZC 3 Sud Expo présente un potentiel de surface de vente fixé à 7 500 m², le potentiel de développement des deux autres pôles étant fixé à zéro. Pour les zones sans création ou développement de surface commerciale, soit les " zones non commerciales ", le volet commercial en litige doit être regardé comme interdisant toute création de surface commerciale par construction neuve et prévoit, pour l'extension des commerces existants, un plafond de 100 m² maximum de surface de vente nouvelle pour les commerces dont la surface de vente existante est inférieure ou égale à 400 m² et de 150 m² maximum de surface de vente nouvelle pour les commerces dont la surface de vente existante est supérieure à 400 m². A l'inverse, pour les " zones de centralité ", les prescriptions du volet commercial ne fixent aucun plafond de développement commercial et autorisent sans limitation la création de nouvelles surfaces commerciales par construction neuve, réaffectation ou extension de bâti existant y compris les unités de plus de 1 000 m² " sous réserve des règles générales d'urbanisme applicables sur ces périmètres ". Enfin, pour rendre applicables ces prescriptions particulières du volet commercial au sein de chacune des zones délimitées par le plan local d'urbanisme intercommunal en application de l'article L. 151-9 du code de l'urbanisme, les auteurs de ce plan les ont reproduites dans leur intégralité à l'article 3 du règlement propre à chacune des zones urbaines, à urbaniser, naturelles, agricoles et forestières ainsi définies par le plan local d'urbanisme intercommunal.
11. Il ressort des pièces du dossier que si les secteurs commerciaux dits " zones de centralité " identifient et délimitent des quartiers, îlots ou voies au sein des communes concernées, l'annexe 4 du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal ne fixe, pour ces zones, aucune condition ni limite pour la création ou l'extension des commerces relevant du champ du volet commercial en litige. Par ailleurs, en dehors de la délimitation des secteurs commerciaux dénommés " zones intermédiaires " et " zones commerciales ", où sont seulement fixés des plafonds de surfaces de vente nouvelles compris entre 300 m² et 7 500 m², les documents graphiques de l'annexe 4 du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal classent en " zones non commerciales " le reste du territoire des communes concernées où est interdite toute création de surface commerciale par construction neuve, seule une extension des surfaces de vente étant autorisée à hauteur de 100 ou 150 m² selon que la surface de vente existante est inférieure ou supérieure à 400 m² ainsi qu'il a été exposé ci-dessus.
12. S'il est vrai, ainsi que le souligne l'appelante, que la création de surface de vente nouvelle reste possible par changement de destination de constructions existantes dans les " zones non commerciales " définies par l'annexe 4 en litige, ces zones sont seulement délimitées par défaut au regard des trois autres zones et ne procèdent pas ainsi d'une identification et d'une délimitation de quartiers, îlots et voies au sens et pour l'application des dispositions du code de l'urbanisme citées au point 6 du présent arrêt relatives à la mixité sociale et fonctionnelle. Il en résulte que les prescriptions particulières du volet commercial du plan local d'urbanisme intercommunal ont pour objet et pour effet, à l'exception des " zones de centralité " qui ne sont soumises à aucune règle, soit d'interdire la création de toute surface commerciale par construction neuve, soit de limiter les opérations de création ou d'extension de surfaces de vente par la détermination d'un plafond maximal de surface de vente nouvellement créée pouvant varier de 150 m² par extension de surfaces existantes dans les " zones non commerciales " à 7 500 m² par création pour le seul pôle majeur ZC 3 Sud Expo classé en " zones commerciales ". Dans ces conditions, les zones identifiées par le volet commercial de l'annexe 4 du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal, qui ont vocation à se superposer aux zones urbaines, à urbaniser, agricoles et naturelles définies par le même plan, ainsi que les règles particulières qui y sont applicables, ne peuvent être regardées comme procédant de l'application des articles L. 151-16 et R. 151-37 du code de l'urbanisme. Par suite, en adoptant ce volet commercial, les auteurs du plan local d'urbanisme intercommunal ont commis une erreur de droit dans l'application de ces dispositions.
En ce qui concerne la méconnaissance du principe de proportionnalité retenue par le tribunal administratif :
13. Aux termes de l'article 15 de la directive 2006/123 du 12 décembre 2006 susvisée : " 1. Les États membres examinent si leur système juridique prévoit les exigences visées au paragraphe 2 et veillent à ce que ces exigences soient compatibles avec les conditions visées au paragraphe 3. Les États membres adaptent leurs dispositions législatives, règlementaires ou administratives afin de les rendre compatibles avec ces conditions. / 2. Les États membres examinent si leur système juridique subordonne l'accès à une activité de service ou son exercice au respect de l'une des exigences non discriminatoires suivantes : / a) les limites quantitatives ou territoriales sous forme, notamment, de limites fixées en fonction de la population ou d'une distance géographique minimum entre prestataires (...) / ; 3. Les États membres vérifient que les exigences visées au paragraphe 2 remplissent les conditions suivantes : / a) non-discrimination: les exigences ne sont pas directement ou indirectement discriminatoires en fonction de la nationalité ou, en ce qui concerne les sociétés, de l'emplacement de leur siège statutaire ; / b) nécessité : les exigences sont justifiées par une raison impérieuse d'intérêt général ; / c) proportionnalité : les exigences doivent être propres à garantir la réalisation de l'objectif poursuivi, ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif et d'autres mesures moins contraignantes ne doivent pas permettre d'atteindre le même résultat. ".
14. Par l'arrêt C-360/15 et C-31/16 du 30 janvier 2018, la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que les dispositions du chapitre III de la directive 2006/123, relatif à la liberté d'établissement des prestataires, au sein duquel figure l'article 15 précité, doivent être interprétées en ce sens qu'elles s'appliquent également à une situation dont tous les éléments pertinents se cantonnent à l'intérieur d'un seul État membre. Elle a également dit pour droit que l'article 15, paragraphe 1, de la directive 2006/123 doit être interprété en ce sens qu'il ne s'oppose pas à ce que des règles contenues dans un plan local d'urbanisme d'une commune interdisent l'activité de commerce de détail de produits non volumineux dans des zones géographiques situées en dehors du centre-ville de cette commune, pourvu que l'ensemble des conditions énoncées à l'article 15, paragraphe 3, de cette directive soient remplies, ce qu'il incombe à la juridiction de renvoi de vérifier.
15. Ainsi qu'il a été exposé aux points 8 à 12 du présent arrêt, le volet commercial du plan local d'urbanisme intercommunal couvrant le territoire des communes membres a pour objet et pour effet, à l'exception des " zones de centralité ", de fixer des surfaces de vente maximales nouvelles par extension ou création applicables aux commerces entrant dans le champ de l'annexe 4, c'est-à-dire toutes " les activités relevant du champ commerce de l'INSEE, à l'exception du commerce de réparation automobile, de la restauration, de l'hôtellerie et du commerce de gros (codifié par la Nomenclature statistique des Activités Economiques dans la Communauté Européenne). (...) ". Compte tenu de l'étendue des " zones non commerciales " délimitées par défaut par le volet commercial en litige au regard des autres zones ainsi qu'il a été exposé au point 12 et des restrictions qui y sont applicables pour la création ou le développement des activités de commerce entrant dans son champ, les prescriptions du volet commercial revêtent, dans les circonstances de l'espèce, le caractère d'une restriction générale qui n'apparaît pas proportionnée au regard de l'objectif affiché par les auteurs du plan local d'urbanisme intercommunal de maîtriser les développements commerciaux en périphérie afin de redynamiser le commerce en centre-ville de Rodez en favorisant en particulier la diversité commerciale. Dans ces conditions, c'est à bon droit que les premiers juges ont accueilli le moyen fondé sur la méconnaissance du principe de proportionnalité prévu au paragraphe 3 de l'article 15 de la directive du 12 décembre 2006 précité.
16. Il résulte de tout ce qui précède que la communauté d'agglomération Rodez Agglomération n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a, à la demande des sociétés du Clos Gaillac et Solmar, annulé la délibération du 12 décembre 2017 du conseil communautaire approuvant la cinquième révision du plan local d'urbanisme intercommunal en tant que ce plan comporte un " volet commercial " en annexe 4 du règlement dont les dispositions sont reprises aux articles 3 des règlements des différentes zones.
17. Le juge de l'excès de pouvoir ne peut, en principe, déduire d'une décision juridictionnelle rendue par lui-même ou par une autre juridiction qu'il n'y a plus lieu de statuer sur des conclusions à fin d'annulation dont il est saisi, tant que cette décision n'est pas devenue irrévocable. Il en va toutefois différemment lorsque, faisant usage de la faculté dont il dispose dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, il joint les requêtes pour statuer par une même décision, en tirant les conséquences nécessaires de ses propres énonciations. Dans cette hypothèse, toutes les parties concernées seront, en cas d'exercice d'une voie de recours, mises en cause et celle à laquelle un non-lieu a été opposé, mise à même de former, si elle le souhaite, un recours incident contre cette partie du dispositif du jugement.
18. Les premiers juges, qui ont joint les demandes présentées respectivement par les société du Clos Gaillac et Solmar d'une part, et par la société Perjeandabri d'autre part, ont prononcé à un non-lieu à statuer sur les conclusions à fin d'annulation de cette dernière société tendant à obtenir l'annulation de la délibération en litige en tant qu'elle déclasse de la zone commerciale les parcelles cadastrées section AO numéros 362 à 367 ainsi que la décision du 28 mars 2018 du président de la communauté d'agglomération Rodez Agglomération rejetant son recours gracieux. Il résulte de ce qui a été exposé ci-dessus que le présent arrêt confirme l'annulation prononcée par le tribunal administratif de Toulouse du volet commercial du plan local d'urbanisme intercommunal en ce compris la délimitation des différents secteurs commerciaux en litige dont les " zones non commerciales " où se trouvaient incluses les parcelles de la société Pierjeandabri. Par suite, la communauté d'agglomération Rodez Agglomération n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a prononcé un non-lieu sur les conclusions à fin d'annulation de la demande de cette société.
Sur les frais liés au litige :
19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge des sociétés du Clos Gaillac, Solmar et Pierjeandabri qui ne sont pas dans la présente instance les parties perdantes, la somme demandée par la communauté d'agglomération Rodez Agglomération au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la communauté d'agglomération de Rodez Agglomération une somme globale de 1 500 euros à verser aux sociétés du Glos Gaillac et Solmar au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ainsi qu'une somme de 1 500 euros à verser à la société Pierjeandabri sur le même fondement.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la communauté d'agglomération Rodez Agglomération est rejetée.
Article 2 : La communauté d'agglomération Rodez Agglomération versera une somme globale de 1 500 euros aux sociétés du Clos Gaillac et Solmar sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La communauté d'agglomération Rodez Agglomération versera une somme de 1 500 euros à la société Pierjeandrabi sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la communauté d'agglomération Rodez Agglomération, à la société civile immobilière du Clos Gaillac, à la société par actions simplifiée Solmar et à la société civile immobilière Pierjeandabri.
Copie en sera adressée au préfet de l'Aveyron.
Délibéré après l'audience du 9 novembre 2023, où siégeaient :
- M. Chabert, président de chambre,
- M. Haïli, président assesseur,
- Mme Lasserre, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 décembre 2023.
Le président-rapporteur,
D. Chabert
Le président assesseur,
X. Haïli La greffière,
N. Baali
La République mande et ordonne au préfet de l'Aveyron en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 21TL20204