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07/12/2023 | FRANCE | N°22PA00482

France | France, Cour administrative d'appel, 1ère chambre, 07 décembre 2023, 22PA00482


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :



M. C... E... et les autres requérants ont demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté n° 75-2019-12-12-001 du 12 décembre 2019 du préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris, en tant qu'il a déclaré cessible pour cause d'utilité publique, au profit de la société SNCF Réseau, l'emprise en tréfonds de la parcelle cadastrée BU

n° 23, sise 8, rue de l'Isly dans le VIIIème arrondissement de Paris.





Par un jugement n°

2002836 du 29 novembre 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté la requête.



Procédure devant ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... E... et les autres requérants ont demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté n° 75-2019-12-12-001 du 12 décembre 2019 du préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris, en tant qu'il a déclaré cessible pour cause d'utilité publique, au profit de la société SNCF Réseau, l'emprise en tréfonds de la parcelle cadastrée BU

n° 23, sise 8, rue de l'Isly dans le VIIIème arrondissement de Paris.

Par un jugement n° 2002836 du 29 novembre 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté la requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 2 février 2022, M. C... E..., Mme B... E..., Mme A... E... et Mme F..., représentés par Me Aaron, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°2002836 du 29 novembre 2021 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté préfectoral n° 75-2019-12-001 du 12 décembre 2019, en tant qu'il a déclaré cessible l'emprise en tréfonds de la parcelle cadastrée BU n°23, 8, rue de l'Isly à Paris ;

3°) de mettre à l'État le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Les requérants soutiennent que :

- le jugement attaqué est entaché d'une erreur de droit au regard de l'article L. 132-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ainsi que d'une erreur de fait, en ne justifiant pas la nécessité d'exproprier le tréfonds de la parcelle en cause sans fixer une limite inférieure ;

- les premiers juges ont, à tort, estimé que les requérants ne contestaient pas la nécessité pour SNCF Réseau de s'assurer de la maîtrise totale du tréfonds ;

- la circonstance que l'emprise du projet ait figuré dans le dossier d'enquête parcellaire ne permet pas de caractériser la légalité de l'arrêté en litige ;

- ce jugement a renversé la charge de la preuve, en considérant qu'il appartenait aux requérants de démontrer que l'arrêté de cessibilité porterait sur une emprise qui excèderait celle nécessaire à la réalisation du projet litigieux ;

- l'arrêté contesté est illégal pour les mêmes moyens que ceux soulevés en première instance.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er juin 2022, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par les requérants n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Par une ordonnance du 16 août 2023, la clôture de l'instruction a été prononcée le

4 septembre 2023 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

- le décret n° 55-22 du 4 janvier 1955 portant réforme de la publicité foncière ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Jasmin-Sverdlin,

- les conclusions de M. Doré, rapporteur public,

- et les observations de Me Aaron, avocat des requérants.

Une note en délibéré a été produite par les requérants le 21 novembre 2023.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté interpréfectoral du 31 janvier 2013, le préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris, le préfet des Hauts-de-Seine, le préfet des Yvelines et le préfet du Val d'Oise ont déclaré d'utilité publique le prolongement à l'Ouest de la ligne E du RER, dit projet " EOLE ", de la gare Hausmann-Saint Lazare à Mantes-la-Jolie. Par un arrêté du 24 juillet 2015, le préfet de la région d'Île-de-France, préfet de Paris, a déclaré cessibles les emprises en tréfonds situées dans les VIIIème et XVIIème arrondissements de Paris, la parcelle BU n°23, dont M. E... et les autres requérantes sont propriétaires, n'étant alors pas incluse dans le périmètre de cet arrêté. Une enquête parcellaire complémentaire a été ouverte du 15 janvier au 2 février 2018, afin d'acquérir de nouvelles parcelles situées dans le VIIIème arrondissement, dans le quartier de Saint Lazare, la parcelle BU n° 23 figurant sur le plan parcellaire. Par un arrêté du 12 décembre 2019, le préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris, a déclaré cessibles au profit de SNCF Réseau les emprises en tréfonds situées dans le VIIIème arrondissement de Paris, dont celle de la parcelle cadastrée BU 23. Par un jugement du 29 novembre 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande des requérants tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 132-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : " L'autorité compétente déclare cessibles les parcelles ou les droits réels immobiliers dont l'expropriation est nécessaire à la réalisation de l'opération d'utilité publique. Elle en établit la liste, si celle-ci ne résulte pas de la déclaration d'utilité publique ".

3. D'une part, les requérants soutiennent que l'arrêté litigieux a été pris en méconnaissance de ces dispositions, en l'absence de fixation d'une limite de profondeur, alors qu'une telle limite a été fixée pour les parcelles voisines de la leur et que cette absence de limite n'est pas justifiée par la nécessité pour SNCF Réseau de s'assurer de la maîtrise de la totalité du tréfonds située sous le tunnel.

4. Toutefois, s'il ressort de l'état parcellaire annexé à l'arrêté litigieux que l'expropriation de la parcelle BU n° 23 appartenant aux consorts E... porte sur l'emprise du tréfonds à partir de la cote altimétrique (NGF) de 14,79 mètres, limite supérieure du tunnel, jusqu'à une cote altimétrique (NGF) inférieure non délimitée, la limite basse du tunnel étant fixée à

28 mètres de profondeur, il ressort précisément des mentions de l'état descriptif de division en volumes, annexé à l'arrêté litigieux, que les sept parcelles voisines font également l'objet d'une expropriation de leur tréfonds sans limite de profondeur, la cote altimétrique inférieure retenue y étant mentionnée pour le sous-sol de chacune des emprises concernées, d'une part, dans la colonne " Niveau " : " Tréfonds ", et, d'autre part dans celle : " Description du volume "/Cotes Altimétriques (NGF)/Inférieure : " Non délimitée ". Dès lors, l'identification et la consistance du tréfonds exproprié étant définies, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'arrêté litigieux méconnaît les dispositions précitées de l'article L. 132-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique et est entaché d'une erreur de fait.

5. D'autre part, les requérants, qui se bornent à soutenir que l'expropriation de leur emprise sans délimitation inférieure excéderait celle nécessaire à la réalisation des travaux, n'apportent aucun élément à l'appui de leurs allégations, alors que, comme il a été indiqué au point précédent, les parcelles voisines font également l'objet d'une expropriation de leur tréfonds sans limite de profondeur.

6. En deuxième lieu, ni l'article L. 132-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, ni aucune autre disposition législative ou règlementaire n'imposent que l'ensemble des immeubles à exproprier pour la réalisation d'un projet déclaré d'utilité publique fasse l'objet d'un unique arrêté de cessibilité. Des arrêtés de cessibilité peuvent dès lors être pris successivement si l'expropriation de nouvelles parcelles se révèle nécessaire pour la réalisation de l'opération déclarée d'utilité publique.

7. Par suite, la circonstance qu'un premier arrêté de cessibilité soit intervenu le 24 juillet 2015 est, à elle seule, sans incidence sur la légalité de l'arrêté du 12 décembre 2019 en litige. En outre, si les requérants soutiennent que le périmètre de l'arrêté du 24 juillet 2015 excluait leur parcelle, alors que celle-ci avait été incluse dans le périmètre de l'enquête parcellaire, il ressort des pièces du dossier que, comme cela a été exposé au point 1, une enquête parcellaire complémentaire a été ouverte du 15 janvier au 2 février 2018, à l'issue de laquelle le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, a pris l'arrêté litigieux. Par conséquent, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que cet arrêté serait entaché d'un vice de procédure les ayant privés d'une garantie.

8. En dernier lieu, il y a lieu d'écarter par adoption des motifs retenus par les premiers juges au point 4 de leur jugement, le moyen tiré d'une erreur de consistance du bien, en méconnaissance des articles R. 132-2 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique et 7 du décret du

4 janvier 1955 portant réforme de la publicité foncière.

9. Il résulte de ce qui précède que les consorts E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral n° 75-2019-12-001 du 12 décembre 2019, en tant qu'il a déclaré cessible l'emprise en tréfonds de la parcelle cadastrée BU n° 23, 8, rue de l'Isly à Paris. Il y a donc lieu de rejeter leurs conclusions d'appel dirigées tant contre ce jugement que contre cet arrêté.

10. L'État n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, les conclusions présentées par les requérants tendant à ce qu'une somme soit mise à sa charge sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. D... E..., de Mme B... E..., de Mme A... E... et de Mme F... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... E..., premier dénommé pour l'ensemble des requérants, à la société SNCF Réseau, et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Copie en sera adressée, pour information, au préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris.

Délibéré après l'audience du 16 novembre 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Diémert, président de la formation de jugement en application des articles L. 234-3 (1er alinéa) et R. 222-6 (1er alinéa) du code de justice administrative,

- Mme Jasmin-Sverdlin, première conseillère,

- M. Gobeill, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 décembre 2023.

La rapporteure, Le président,

I. JASMIN-SVERDLIN S. DIÉMERT

La greffière

C. POVSE

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA00482


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22PA00482
Date de la décision : 07/12/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DIEMERT
Rapporteur ?: Mme Irène JASMIN-SVERDLIN
Rapporteur public ?: M. DORE
Avocat(s) : CGCB ET ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-07;22pa00482 ?
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