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19/12/2023 | FRANCE | N°21NC02152

France | France, Cour administrative d'appel, 4ème chambre, 19 décembre 2023, 21NC02152


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 11 septembre 2018 par lequel le ministre de l'intérieur lui a retiré ses agréments d'employé de jeux et de membre du comité de direction des jeux.



Par un jugement n° 1900030 du 22 juin 2021, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.





Procédure devant la cour :



Par une requête enregistrée le 26 juillet 2021, M

. C... représenté par Me Sebag, demande à la cour :



1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy du 22 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 11 septembre 2018 par lequel le ministre de l'intérieur lui a retiré ses agréments d'employé de jeux et de membre du comité de direction des jeux.

Par un jugement n° 1900030 du 22 juin 2021, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 26 juillet 2021, M. C... représenté par Me Sebag, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy du 22 juin 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 11 septembre 2018 pris à son encontre par le ministre de l'intérieur ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté contesté constitue une sanction et non une mesure de police administrative ; par voie de conséquence, le ministre de l'intérieur n'était pas compétent pour prendre une telle mesure ;

- en méconnaissance des articles L. 121-1 et L. 121-2 du code des relations entre le public et l'administration, il n'a pas obtenu la communication préalable de son dossier ;

- subsidiairement, les faits motivant les décisions entreprises ont fait l'objet d'une appréciation inexacte.

Un mémoire en défense, enregistré le 24 novembre 2023, présenté pour le ministre de l'intérieur et des outre-mer conclut au rejet de la requête. Il n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de la sécurité intérieure ;

- l'arrêté du 14 mai 2007 relatif à la règlementation des jeux dans les casinos ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Denizot, premier conseiller,

- les conclusions de M. Michel, rapporteur public,

- et les observations de Me Sebag pour M. C....

Considérant ce qui suit :

1. Sur la base d'un agrément ministériel délivré le 4 juillet 2006, M. C... a exercé la profession d'employé de jeux. En vertu d'un second agrément délivré le 24 juillet 2013, M. C... a également exercé les fonctions de membre du comité de direction au sein du casino de Contrexéville. Parallèlement, par une décision du 8 juin 2017, le ministre de l'intérieur a refusé de délivrer un agrément à M. C... en qualité de directeur responsable. Par un courrier du même jour, le ministre de l'intérieur a également informé l'intéressé de ce qu'il envisageait de lui retirer ses deux agréments d'employé de jeux et de membre de comité de direction de casino et l'invitait à présenter des observations. Si cette procédure n'a donné lieu à aucune décision, le ministre de l'intérieur a, par un courrier du 27 juin 2018, de nouveau engagé une procédure visant à procéder au retrait de ces deux agréments. Par un arrêté du 11 septembre 2018, le ministre de l'intérieur a retiré à M. C... les agréments d'employé de jeux et de membre du comité de direction. Par un jugement du 22 juin 2021, dont M. C... relève appel, le tribunal administratif de Nancy a rejeté la demande de

M. C... tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 septembre 2018.

2. En premier lieu, aux termes du dernier alinéa de l'article L. 321-4 du code de la sécurité intérieure : " Le directeur et les membres du comité de direction et les personnes employées à un titre quelconque dans les salles de jeux sont agréés par le ministre de l'intérieur ". Aux termes du V de l'article 12 de l'arrêté interministériel du 14 mai 2007 relatif à la réglementation des jeux dans les casinos, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " Le directeur responsable et les membres du comité de direction sont agréés par le ministre de l'intérieur sous réserve de ne point remplir des fonctions électives dans la commune siège de l'établissement. (...) Les décisions du ministre de l'intérieur comportant agrément, retrait d'agrément (...) du directeur responsable ou d'un membre du comité de direction sont notifiées en toute hypothèse au directeur responsable et, le cas échéant, aux intéressés ".

3. Une décision de retrait d'agrément peut, compte tenu du but qu'elle poursuit avoir, selon le cas, le caractère d'une mesure de police ou celui d'une sanction. Il résulte des dispositions précitées que le ministre de l'intérieur, qui assure la police des cercles de jeux et des casinos, peut, à ce titre, retirer tout agrément délivré par lui sur le fondement l'article L. 321-4 du code de la sécurité intérieure au directeur, aux membres du comité de direction et, plus généralement, aux personnes employées à un titre quelconque dans les casinos et salles de jeu, lorsque leur titulaire ne remplit plus les conditions mises à son octroi ou pour des motifs d'ordre public, ainsi que le prévoit d'ailleurs désormais l'article R. 321-32-1 du même code. Il en va notamment ainsi lorsque le titulaire de l'agrément ne présente plus les garanties de probité et de moralité requises pour l'exercice de fonctions de direction, de membre de comité de direction ou d'employé de jeux au sein d'un casino.

4. Il ressort des rapports du service central des courses et des jeux des 14 mars 2017 et

25 juin 2018, ainsi que des courriers du ministre de l'intérieur des 8 juin 2017 et 27 juin 2018, que le ministre de l'intérieur a clairement souhaité engager des mesures de retrait d'agrément d'employé de jeux et de membre du comité de direction en raison du danger que M. C... représentait pour l'ordre public. Si le motif retenu par le ministre de l'intérieur relatif à la dissimulation d'information ne peut caractériser l'existence d'une mesure de police, il ressort toutefois des termes mêmes de l'arrêté contesté que les faits de violence, de conduite sous emprise d'un état alcoolique ou après usage de stupéfiants, ont été regardés par le ministre de l'intérieur comme révélant un comportement constitutif de troubles à l'ordre public, d'absence de garanties d'ordre public et en particulier de moralité publique. Il ne ressort nullement des pièces du dossier que, alors que les motifs liés à l'ordre public se sont montrés déterminants pour l'édiction de l'arrêté contesté, le ministre de l'intérieur ait souhaité infliger à M. C... une sanction. Par suite, M. C... n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté contesté ne constituerait pas une mesure de police administrative et que le ministre de l'intérieur n'était pas compétent pour lui retirer les agréments d'employés de jeux et de membre de comité de direction.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration, applicable, en vertu de l'article L. 211-2 du même code, notamment aux mesures individuelles défavorables constituant une sanction ou une mesure de police : " Les décisions mentionnées à l'article L. 211-2 n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix. / L'administration n'est pas tenue de satisfaire les demandes d'audition abusives, notamment par leur nombre ou leur caractère répétitif ou systématique ". L'article L. 122-2 du même code dispose que : " Les mesures mentionnées à l'article L. 121-1 à caractère de sanction ne peuvent intervenir qu'après que la personne en cause a été informée des griefs formulés à son encontre et a été mise à même de demander la communication du dossier la concernant ".

6. D'une part, ainsi qu'il vient d'être dit, il ne ressort ni des pièces du dossier ni des termes de l'arrêté contesté, que les retraits d'agrément d'employé de jeux et de membre de comité de direction auraient revêtu, en l'espèce, le caractère d'une sanction. Par suite, M. C... ne peut utilement soutenir que, en méconnaissance de la procédure prévue par les dispositions de l'article

L. 122-2 du code des relations entre le public et l'administration applicable uniquement en matière de sanction, l'arrêté contesté n'aurait pas été précédé d'une invitation à consulter son dossier et qu'il n'aurait pas été informé précisément des griefs retenus à son encontre. Pour les mêmes motifs, à supposer même que le requérant soit regardé comme s'en prévalant, le principe général des droits de la défense n'est pas applicable à une mesure de police.

7. D'autre part, contrairement à ce que soutient le requérant, il ressort des termes du courrier du 27 juin 2018 que M. C... a pu connaître le détail des motifs sur la base desquels le ministre de l'intérieur entendait prononcer une mesure de retrait des agréments dont il bénéficiait et a pu faire valoir utilement ses observations, tant écrites le 11 juillet 2018, qu'orales, le 5 septembre 2018. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 122-1 doit être écarté comme manquant en fait.

8. En dernier lieu, ainsi qu'il a été dit précédemment, l'arrêté contesté retirant à M. C... son agrément a revêtu le caractère d'une mesure de police administrative destinée à préserver le bon ordre d'un établissement de jeux. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir de rechercher si une telle mesure repose sur des motifs de nature à la justifier légalement. Si M. C... soutient, à titre subsidiaire, que le ministre de l'intérieur aurait fait une inexacte application des dispositions précitées en lui retirant ses agréments d'employé de jeux et de membre du comité de direction, il n'assortit cependant ce moyen d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Délibéré après l'audience du 28 novembre 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Ghisu-Deparis, présidente,

- Mme Roussaux, première conseillère,

- M. Denizot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 décembre 2023.

Le rapporteur,

Signé : A. DenizotLa présidente,

Signé : V. Ghisu-Deparis

La greffière,

Signé : M. B...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

M. B...

2

N° 21NC02152


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NC02152
Date de la décision : 19/12/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme GHISU-DEPARIS
Rapporteur ?: M. Arthur DENIZOT
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : SEBAG

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-19;21nc02152 ?
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