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19/12/2023 | FRANCE | N°23NC00589

France | France, Cour administrative d'appel, 5ème chambre, 19 décembre 2023, 23NC00589


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 24 mars 2022 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire sans délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an, et l'arrêté du 24 mars 2022 par lequel le préfet du Haut-Rhin a prononcé son assignation à rés

idence.



Par un jugement n° 2201991 du 2 mai 2022, le président du tribunal admini...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 24 mars 2022 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire sans délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an, et l'arrêté du 24 mars 2022 par lequel le préfet du Haut-Rhin a prononcé son assignation à résidence.

Par un jugement n° 2201991 du 2 mai 2022, le président du tribunal administratif de Strasbourg a renvoyé à une formation collégiale les conclusions dirigées contre la décision portant refus de titre de séjour et a rejeté le surplus de la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 23 février et 5 juillet 2023, M. A..., représenté par Me Chebbale, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 2 mai 2022 en tant qu'il a rejeté les conclusions relatives aux décisions portant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixation du pays de renvoi et interdiction de retour ;

2°) d'annuler les décisions du 24 mars 2022 par lesquels le préfet du Haut-Rhin l'a obligé à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé le pays de renvoi et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an ;

3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous une astreinte de 100 euros par jour de retard, subsidiairement de réexaminer sa situation en lui délivrant, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour, dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 400 euros TTC à verser à son conseil en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- cette décision est fondée sur une décision portant refus de séjour elle-même illégale ;

- l'avis des médecins de l'office français d'immigration et d'intégration (OFII) est irrégulier et la décision portant refus de séjour a été prise au terme d'une procédure irrégulière ;

- la décision portant refus de séjour méconnait les stipulations de l'article 6-7 de l'accord franco-algérien ;

- la décision méconnait l'article 6.5 de l'accord franco-algérien ;

- la décision méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- dès lors qu'il remplissait les conditions pour se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement des articles 6-7 et 6-5 de l'accord franco-algérien, il ne pouvait faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ;

- la décision méconnait les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- en obligeant M. A... à quitter le territoire français, le préfet porte à son droit de mener une vie privée et familiale une atteinte disproportionnée ;

- la décision emporte des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur sa situation personnelle ;

S'agissant de la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire :

- l'annulation de cette décision s'impose comme la conséquence de l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français ;

- la décision est insuffisamment motivée et est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;

- la décision méconnait les dispositions des articles L. 612-2 et L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

S'agissant de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

- l'annulation de cette décision s'impose comme la conséquence de l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français ;

- la décision est insuffisamment motivée et est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;

- la décision est entachée d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :

- l'annulation de cette décision s'impose comme la conséquence de l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français ;

- la décision méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 mai 2023, le préfet du Haut-Rhin conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête de M. A... ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 27 janvier 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Peton, première conseillère,

- et les observations de Me Carraud, substituant Me Chebbale, représentant M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant algérien né le 27 octobre 1972 est entré en France le 6 octobre 2016 sous couvert de son passeport et d'un visa de court séjour espagnol. Par un arrêté du 17 avril 2019, le préfet du Haut-Rhin a rejeté sa demande d'admission exceptionnelle au séjour et l'a obligé à quitter le territoire français. Cette décision a été confirmée par un jugement du tribunal administratif de Strasbourg en date du 3 octobre 2019. En 2021, M. A... a déposé une demande de titre de séjour eu égard à son état de santé. Par un arrêté du 24 mars 2022, le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée d'un an. M. A... relève appel du jugement du 2 mai 2022, par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français, interdiction de retour sur le territoire français et fixant le pays de renvoi.

Sur la légalité de l'arrêté du 24 mars 2022 :

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

S'agissant de l'exception d'illégalité de la décision portant refus de séjour :

2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Les dispositions du présent article ainsi que celles des deux articles suivants, fixent les conditions de délivrance et de renouvellement du certificat de résidence aux ressortissants algériens établis en France ainsi qu'à ceux qui s'y établissent, sous réserve que leur situation matrimoniale soit conforme à la législation française. / Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. (...) ".

3. Aux termes du premier alinéa de l'article 5 de l'arrêté susvisé du 27 décembre 2016 : " Le collège de médecins à compétence nationale de l'office comprend trois médecins instructeurs des demandes des étrangers malades, à l'exclusion de celui qui a établi le rapport. ". Aux termes de l'article 6 du même arrêté : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; d) la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. / (...) ".

4. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que le collège de médecins de l'OFII a rendu un avis circonstancié le 4 février 2022 précisant que l'état de santé de l'intéressé nécessitait une prise en charge médicale, dont le défaut ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité, et que M. A... peut être soigné dans son pays, vers lequel il peut voyager sans risque. Dans ces conditions, le collège n'était pas tenu de se prononcer sur la possibilité pour M. A... de bénéficier d'un accès effectif à un traitement approprié dans son pays d'origine.

5. En deuxième lieu, s'il est saisi, à l'appui de conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus, d'un moyen relatif à l'état de santé du demandeur, aux conséquences de l'interruption de sa prise en charge médicale ou à la possibilité pour lui d'en bénéficier effectivement dans le pays dont il est originaire, il appartient au juge administratif de prendre en considération l'avis médical rendu par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Si le demandeur entend contester le sens de cet avis, il appartient à lui seul de lever le secret relatif aux informations médicales qui le concernent, afin de permettre au juge de se prononcer en prenant en considération l'ensemble des éléments pertinents, notamment l'entier dossier du rapport médical au vu duquel s'est prononcé le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, en sollicitant sa communication, ainsi que les éléments versés par le demandeur au débat contradictoire.

6. En l'espèce, le préfet, s'appropriant le sens de l'avis du collège des médecins de OFII émis le 4 février 2022, estime qu'un défaut de soins ne devrait pas entraîner pour M. A... de conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'au vu des éléments du dossier, son état de santé lui permet de voyager sans risque vers son pays d'origine. Si le requérant fait valoir qu'il souffre de pathologies somatique et psychiatriques dont des troubles de l'équilibre, instabilité postural, hémiparésie du corps gauche, spasticité douloureuse du membre inférieur gauche, aucun des éléments qu'il produit n'est de nature à remettre en cause le bien-fondé du motif de refus dès lors que les certificats médicaux, s'ils mentionnent une aggravation ponctuelle, ne comportent aucun élément de nature à établir qu'un défaut de prise en charge pourrait emporter des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations citées au point 2 du présent arrêt ne peut qu'être écarté.

7. En troisième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ". Aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

8. M. A... soutient qu'il réside de manière continue et habituelle en France depuis son arrivée en octobre 2016, qu'il n'a plus aucun lien dans son pays d'origine, n'a plus de contact avec ses deux enfants et n'entretient plus aucun lien avec les membres de sa famille résidant en Algérie, qu'il est hébergé chez sa sœur, à Colmar. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que M. A... est entré sur le territoire français à l'âge 43 ans après avoir toujours vécu en Algérie, il s'est maintenu sur le territoire français sans autorisation de séjour a refusé de se soumettre aux mesures d'éloignement dont il a déjà fait l'objet. Alors même qu'il réside chez sa sœur, il n'établit pas de l'effectivité d'une vie privée en France. Par suite, le préfet du Haut Rhin n'a pas porté une atteinte excessive au droit du requérant à une vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la CEDH et de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien, et n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la décision portant refus de séjour n'est pas entachée d'illégalité. Et, par suite, la décision portant obligation de quitter le territoire n'a pas été prise sur le fondement d'une décision illégale. Le moyen tiré d'une telle exception d'illégalité ne peut, dès lors, qu'être écarté.

S'agissant des autres moyens dirigés contre la décision portant obligation de quitter le territoire français :

10. En premier lieu, il a été constaté que l'état de santé de M. A... ne justifiait pas que lui soit délivré un titre de séjour, le préfet ayant notamment constaté, sans que ceci ne soit utilement contesté, que l'état de santé de l'intéressé nécessitait une prise en charge médicale, dont le défaut ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité. En conséquence, M. A... n'est pas fondé à se prévaloir des dispositions de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

11. En deuxième lieu, le préfet ne peut légalement obliger un étranger à quitter le territoire français si celui-ci réunit les conditions d'attribution de plein droit d'un titre de séjour. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus, que M. A... ne peut prétendre à la délivrance de plein droit d'un titre de séjour sur les fondements des stipulations des articles 6-5 et 6-7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Par suite, le moyen tiré de ce que ces stipulations faisaient obstacle à ce que le préfet l'oblige à quitter le territoire français doit dès lors être écarté.

12. En troisième lieu, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 8.

En ce qui concerne la décision portant refus de délai de départ volontaire :

13. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire.

14. En deuxième lieu, la décision comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. En conséquence, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation manque en fait. Cette motivation révèle également que le préfet a procédé à un examen réel et sérieux de la situation personnelle du requérant et le moyen tiré du défaut d'examen doit être écarté.

15. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : (...) 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet ". Aux termes de l'article L. 612-3 du même code : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) 5° L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement (...) ".

16. Il est constant que M. A... s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français à l'expiration de son visa espagnol, qu'il a fait l'objet le 17 avril 2019 d'un premier arrêté l'obligeant à quitter le territoire français auquel il n'a pas déféré. Il se trouvait ainsi dans le cas, prévu par les dispositions du 5° de l'article L. 612-3 citées au point précédent, dans lequel le risque qu'il se soustraie à la nouvelle mesure d'éloignement pouvait être regardé comme établi et le préfet, pour ce seul motif, pouvait refuser de lui accorder un délai de départ volontaire. Par ailleurs, il ne justifie pas de circonstance particulière justifiant qu'un tel délai lui soit accordé.

En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

17. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant interdiction de retour.

18. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. (...) ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".

19. Il résulte des dispositions des articles L. 612-6 et L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux et, le cas échéant, la menace pour l'ordre public que constitue sa présence sur le territoire.

20. En l'espèce, pour justifier de la mesure d'interdiction de retour sur le territoire français à l'encontre de M. A..., le préfet a fait mention de son entrée récente sur le territoire français, de l'absence de justification de l'intensité de ses liens privés et familiaux en France, de l'absence d'activité professionnelle stable en France et de l'absence d'atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale. La décision comporte ainsi les considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement et cette motivation atteste de l'examen réel et sérieux de la situation personnelle du requérant, au regard des critères fixés par la loi.

21. En troisième lieu, au regard de ce qui a déjà été constaté précédemment concernant la durée et les conditions de séjour de M. A... ainsi que ses liens avec le territoire français, l'interdiction de retour n'est pas entachée d'erreur d'appréciation pas plus que la durée d'un an qu'elle prévoit.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

22. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination.

23. En second lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 8, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de renvoi du requérant méconnaitrait l'articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

24. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses demandes.

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

25. Le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, il y a lieu de rejeter les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par M. A....

Sur les frais liés à l'instance :

26. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., Me Chebbale et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet du Haut-Rhin.

Délibéré après l'audience du 12 décembre 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Kohler, présidente,

- M. Denizot, premier conseiller,

- Mme Peton, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 19 décembre 2023.

La rapporteure,

Signé : N. Peton La présidente,

Signé : J. Kohler

La greffière,

Signé : M. C...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

S. Robinet

2

N° 23NC00589


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NC00589
Date de la décision : 19/12/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme KOHLER
Rapporteur ?: Mme Nolwenn PETON
Rapporteur public ?: Mme PICQUE
Avocat(s) : CHEBBALE

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-19;23nc00589 ?
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