Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. G... A... et Mme D... E... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2013, pour un montant de 14 118 euros.
Par un jugement n° 1700841 du 28 décembre 2017, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 19 février 2018, M. A... et Mme E..., représentés par Me C..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 28 décembre 2017 ;
2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2013, pour un montant total de 14 118 euros ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- l'article 44 octies du code général des impôts retient l'implantation en zone franche urbaine (ZFU) au regard de l'activité, sans considération du titre d'occupation du contribuable exerçant son activité dans cette implantation ;
- il n'est pas contesté que M. A... dispose, pour la part sédentaire de son activité, d'un cabinet à sa disposition en ZFU, mis à sa seule disposition, sans partage avec quiconque pour l'exercice de ses consultations ;
- la circonstance que l'implantation soit rattachée en premier lieu, à la SCM et seulement indirectement au contribuable, est sans incidence dès lors que l'activité exercée par le contribuable et non par la SCM est bien implantée en ZFU ; en application de l'article 36 de la loi n° 66-879 du 29 novembre 1966 la SCM ne peut juridiquement exercer elle-même une activité ; la SCM qui sert seulement de relais pour la prise en charge des frais professionnels est transparente au regard de l'exercice professionnel et au plan fiscal ;
- le jugement ne pouvait se fonder sur l'absence de preuve de ce que 25 % au moins de ses recettes proviendraient d'une activité déployée dans le périmètre de la ZFU dès lors que l'administration n'a jamais contesté ce point et que cette preuve a été apportée par la note en délibérée adressée après l'audience, en réaction aux conclusions du rapporteur public.
Par un mémoire en défense, enregistré le 17 août 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 21 mai 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 1er juillet 2019 à 12 heures.
Un mémoire présenté pour M. A... et Mme E... a été enregistré le 24 novembre 2020, postérieurement à la clôture de l'instruction.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de la santé publique ;
- la loi n° 66-879 du 29 novembre 1966 relative aux sociétés civiles professionnelles ;
- la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire ;
- la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Birsen Sarac-Deleigne, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme Sylvande Perdu, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., médecin généraliste, a exercé, du 14 janvier 2013 au 30 juin 2014, son activité au sein de la société civile de moyens (SCM) " SOS Médecins Rive Droite " implantée dans la zone franche urbaine de Cenon et dont il détenait 21 parts. Il a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014, à l'issue de laquelle l'administration a remis en cause, au titre de l'année 2013, le bénéfice du régime d'exonération prévu par les dispositions de l'article 44 octies A du code général des impôts en faveur des contribuables créant ou exerçant une activité dans une zone franche urbaine (ZFU). M. A... et sa partenaire civile de solidarité, Mme E..., ont formé contre cette imposition une réclamation qui a été rejetée le 25 janvier 2017. Ils relèvent appel du jugement du 28 décembre 2017, par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis et des pénalités dont elles ont été assorties.
Sur le bien-fondé de l'imposition :
2. En premier lieu, aux termes de l'article 44 octies A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable : " I.- Les contribuables qui, entre le 1er janvier 2006 et le 31 décembre 2014, créent des activités dans les zones franches urbaines (...) sont exonérés d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices provenant des activités implantées dans la zone jusqu'au 31 décembre 2010 pour les contribuables qui y exercent déjà une activité au 1er janvier 2006 ou, dans le cas contraire, jusqu'au terme du cinquante-neuvième mois suivant celui du début de leur activité dans l'une de ces zones. (...). / Lorsque l'activité non sédentaire d'un contribuable est implantée dans une zone franche urbaine mais est exercée en tout ou partie en dehors d'une telle zone, l'exonération s'applique si ce contribuable emploie au moins un salarié sédentaire à temps plein ou équivalent, exerçant ses fonctions dans les locaux affectés à l'activité, ou si ce contribuable réalise au moins 25 % de son chiffre d'affaires auprès de clients situés dans les zones franches urbaines. (...). ".
3. Il résulte de l'instruction qu'au cours de la période considérée, M. A... qui intervenait pour une part majoritaire de son activité au domicile de ses patients, exerçait une activité de type non sédentaire. L'intéressé peut se prévaloir du dispositif fiscal de faveur prévu par les dispositions précitées, sous réserve de justifier, d'une part, que son activité était réellement implantée dans une zone franche urbaine et, d'autre part, qu'il employait au moins un salarié sédentaire à temps plein ou équivalent ou qu'il réalisait au moins 25 % de son chiffre d'affaires auprès de clients situés dans une telle zone.
4. Au cours de l'année 2013, M. A... a exercé sa profession dans le cadre de la SCM " SOS Médecins Rive droite " dont les locaux sont situés au 19 avenue Georges Clémenceau à Cenon (33150) dans l'une des ZFU définies par la loi du 4 février 1995 et dont la liste figure en annexe à la loi du 14 novembre 1996. Ces locaux comportent un cabinet de consultation loué par la SCM " SOS Médecins Rive droite ", laquelle emploie une personne à temps plein, chargée de diverses tâches administratives. L'administration fiscale a remis en cause un abattement de 40 569 euros pratiqué sur les bénéfices non commerciaux de 2013 au motif que M. A... ne disposait pas d'une implantation matérielle propre en ZFU et que la SCM " SOS Médecins Rive Droite " n'exerçait pas l'intégralité de la partie administrative de l'activité du cabinet au moyen d'au moins un agent salarié sédentaire exerçant une activité à plein temps et à titre exclusif dans les locaux de cette zone, dès lors qu'elle faisait appel à une société gérant un centre d'appel téléphonique, établie hors ZFU et dont l'intéressé était également actionnaire, et qu'en outre, faute d'en respecter les quatre conditions cumulatives, l'assouplissement prévu par la réponse ministérielle Ciotti ne lui était pas applicable.
5. Toutefois, il est constant que des consultations médicales sont assurées dans les locaux sis à Cenon, notamment dans le cadre du dispositif de permanence de soins en médecine ambulatoire prévu à l'article L. 6314-l du code de la santé publique afin de satisfaire aux besoins des demandes de soins aux heures de fermeture des cabinets libéraux et que les médecins assurent également des visites au domicile des patients. M. A... soutient sans être valablement contredit avoir disposé d'une implantation matérielle et de moyens d'exploitation propres et notamment d'un cabinet individuel, sans partage avec les autres médecins, pour l'exercice de son activité au sein des locaux mis à sa disposition par la SCM et que toute la partie administrative de son activité comportant notamment les correspondances, les liaisons avec les administrations et les organismes de santé ainsi que l'établissement des plannings, était gérée dans les locaux situés en ZFU. A ce titre M. A... justifie avoir effectué au cours de l'année 2013, 919 consultations sur place contre 1621 visites au domicile, soit 36 % de son activité. En outre, il résulte du relevé d'activité et de prescriptions de 2013, que parmi les visites, un nombre significatif a été effectué chez des patients domiciliés en ZFU. Par conséquent, et alors même que son activité était exercée dans le cadre d'une société civile de moyens et qu'il était par ailleurs associé d'une autre SCM chargée de la gestion des appels téléphoniques, M. A... doit être regardé comme justifiant d'une implantation réelle de son activité en zone franche urbaine. Par ailleurs, M. A... qui produit le relevé d'activité et de prescriptions de 2013, reprenant la liste des visites et consultations avec l'indication de l'adresse des patients, soutient justifier qu'il remplit la condition tendant à la réalisation d'au moins 25 % du chiffre d'affaires auprès de patients situés dans la zone franche urbaine, ce que l'administration fiscale ne conteste pas. Dès lors, il était éligible à l'exonération prévue par les dispositions de l'article 44 octies A du code général des impôts.
6. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A... et Mme E... sont fondés à soutenir que c'est à tort, que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux, a refusé de prononcer la décharge en droits et en pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2013.
Sur les frais liés au litige :
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme globale de 1 000 euros au bénéfice de M. A... et Mme E... en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n°°1700841 du 28 décembre 2017 du tribunal administratif de Bordeaux est annulé.
Article 2 : M. A... et Mme E... sont déchargés, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2013, pour un montant total de 14 118 euros.
Article 3 : L'Etat versera à M. A... et à Mme E... la somme globale de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... A..., à Mme D... E... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance. Copie en sera adressée à la direction du contrôle fiscal sud-ouest.
Délibéré après l'audience du 1er décembre 2020 à laquelle siégeaient :
Mme F... B..., présidente,
M. Frédéric Faïck, président assesseur,
Mme Birsen Sarac-Deleigne, premier conseiller,
Rendu public par mise à la disposition au greffe le 15 décembre 2020.
La présidente,
Elisabeth B... La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 18BX00712