Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... C... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels elle a été assujettie au titre des années 2013 et 2014, pour un montant total de 25 888 euros.
Par un jugement n° 1700509 du 5 décembre 2018, le tribunal administratif de Bordeaux a fait droit à sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 15 mars 2019 et 23 octobre 2020, le ministre de l'action et des comptes publics demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 5 décembre 2018 avec toutes les conséquences de droit ;
2°) de rétablir Mme C... à l'impôt sur le revenu des années 2013 et 2014, dont la décharge a été indument ordonnée par le tribunal administratif.
Il soutient que :
- le tribunal a commis une erreur de droit au regard des dispositions de l'article 44 octies A du code général des impôts ;
- Mme C... ne justifie pas d'une implantation réelle en zone franche urbaine lui ouvrant droit au bénéfice de l'exonération dès lors que seule la SCM " SOS Médecins Rive droite " est implantée en zone franche urbaine ; Mme C... ne dispose dans le local mis à sa disposition par la SCM d'aucun secrétariat, et n'emploie aucun salarié sédentaire ; les locaux dont elle dispose ne lui appartiennent pas en propre ;
- l'intégralité de la partie administrative de son activité n'étant pas exercée à Cenon mais assurée en partie par la SCM H24 située hors ZFU et dont elle est également actionnaire, Mme C... qui ne satisfait pas aux quatre conditions cumulatives de l'assouplissement ministériel prévu par la réponse ministérielle Ciotti, ne peut se prévaloir de la réduction d'impôt sollicitée.
Par un mémoire en défense, enregistré le 1er juin 2019, Mme C..., représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens soulevés par le ministre ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 8 octobre 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 26 octobre 2020 à 12 heures.
Un mémoire présenté pour Mme C... a été enregistré le 25 novembre 2020, postérieurement à la clôture de l'instruction.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'action sociale et des familles ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de la santé publique ;
- la loi n° 66-879 du 29 novembre 1966 relative aux sociétés civiles professionnelles ;
- la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire ;
- la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Birsen Sarac-Deleigne, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme Sylvande Perdu, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C..., médecin généraliste, exerce son activité depuis le 1er septembre 2009 au sein de la société civile de moyens (SCM) " SOS Médecins Rive Droite " implantée dans la zone franche urbaine de Cenon, dont elle détient 20 parts. Elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre des bénéfices non commerciaux des années 2012 à 2014, à l'issue de laquelle l'administration a, par une proposition de rectification du 8 septembre 2015, remis en cause, au titre des années 2013 et 2014, le bénéfice du régime d'exonération prévu par les dispositions de l'article 44 octies A du code général des impôts en faveur des contribuables créant ou exerçant une activité dans une zone franche urbaine (ZFU). Mme C... a formé contre les suppléments d'impôt résultant de ce contrôle, une réclamation qui a été rejetée le 18 janvier 2016. Le ministre de l'action et des comptes publics relève appel du jugement du 5 décembre 2018, par lequel le tribunal administratif de Bordeaux en tant qu'il a déchargé Mme C... des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2013 et 2014.
Sur le bien-fondé des impositions :
2. En premier lieu, aux termes de l'article 44 octies A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable : " I.-Les contribuables qui, entre le 1er janvier 2006 et le 31 décembre 2014, créent des activités dans les zones franches urbaines (...) sont exonérés d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices provenant des activités implantées dans la zone jusqu'au 31 décembre 2010 pour les contribuables qui y exercent déjà une activité au 1er janvier 2006 ou, dans le cas contraire, jusqu'au terme du cinquante-neuvième mois suivant celui du début de leur activité dans l'une de ces zones. (...). / Lorsque l'activité non sédentaire d'un contribuable est implantée dans une zone franche urbaine mais est exercée en tout ou partie en dehors d'une telle zone, l'exonération s'applique si ce contribuable emploie au moins un salarié sédentaire à temps plein ou équivalent, exerçant ses fonctions dans les locaux affectés à l'activité, ou si ce contribuable réalise au moins 25 % de son chiffre d'affaires auprès de clients situés dans les zones franches urbaines. (...). ".
3. Il résulte de l'instruction que l'activité de Mme C... comporte, d'une part, la réalisation de consultations sur place, selon un système de garde auquel participent les autres médecins associés, d'autre part, de nombreuses visites de patients à domicile. Par suite, l'activité de la requérante présente un caractère non sédentaire au sens des dispositions précitées de l'article 44 octies A du code général des impôts. L'intéressée peut se prévaloir du dispositif fiscal de faveur prévu par les dispositions précitées, sous réserve de justifier, d'une part, que son activité était réellement implantée dans une zone franche urbaine et, d'autre part, qu'elle employait au moins un salarié sédentaire à temps plein ou équivalent ou qu'elle réalisait au moins 25 % de son chiffre d'affaires auprès de clients situés dans une telle zone.
4. Mme C... exerce son activité professionnelle de médecin généraliste dans le cadre de la SCM " SOS Médecins Rive droite " dont les locaux sont situés au 19 avenue Georges Clémenceau à Cenon (33150) dans l'une des ZFU définies par la loi du 4 février 1995 et dont la liste figure en annexe à la loi du 14 novembre 1996. Ces locaux comportent un cabinet de consultation loué par la SCM " SOS Médecins Rive droite " laquelle emploie une personne à temps plein, chargée de diverses tâches administratives. Mme C... soutient sans être valablement contredite, disposer d'une implantation matérielle et de moyens d'exploitation propres et notamment d'un cabinet individuel qui constitue son seul lieu d'exercice hors visites à domicile, et que toute la partie administrative de son activité comportant notamment les correspondances, les liaisons avec les administrations et les organismes de santé ainsi que l'établissement des plannings, hors appels téléphoniques, est gérée dans les locaux situés en ZFU. Par conséquent, et alors même que son activité est exercée dans le cadre d'une société civile de moyens et qu'elle est par ailleurs associée d'une autre SCM chargée de la gestion des appels téléphoniques, Mme C... doit être regardée comme justifiant d'une implantation réelle de son activité en zone franche urbaine. Mme C..., qui a produit en première instance le relevé de ses honoraires issu du Système National Inter Régime (SNIR) soutient, sans être contredite, avoir réalisé, au titre de l'année 2013, en zone franche urbaine 38,13% de son chiffre d'affaires, qu'il s'agisse de consultations sur place en cabinet qui représentent 18,36 % du chiffre d'affaires ou de consultations à domicile chez des patients résidant en zone franche urbaine soit 19,77% du chiffre d'affaires et avoir réalisé, au titre de l'année 2014, en zone franche urbaine 28,92% de son chiffre d'affaires, au titre des seules consultations sur place au cabinet. Au regard de ces éléments, la condition tenant à la réalisation d'au moins 25 % du chiffre d'affaires auprès de clients situés dans la zone franche urbaine est satisfaite, ce que l'administration fiscale ne conteste pas. Dès lors, elle était éligible à l'exonération prévue par les dispositions de l'article 44 A octies du code général des impôts.
5. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'action et des comptes publics, qui ne soulève aucune contestation s'agissant des prélèvements sociaux, n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles Mme C... a été assujettie au titre des années 2013 et 2014.
Sur les frais liés au litige :
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au bénéfice de Mme C... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête du ministre de l'action et des comptes publics est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à Mme C... la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance. Copie en sera adressée à la direction du contrôle fiscal sud-ouest.
Délibéré après l'audience du 1er décembre 2020 à laquelle siégeaient :
Mme E... A..., présidente,
M. Frédéric Faïck, président assesseur,
Mme Birsen Sarac-Deleigne, premier conseiller,
Rendu public par mise à la disposition du greffe, le 15 décembre 2020.
La présidente,
Elisabeth A... La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 19BX01048