Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme G... F... a demandé au tribunal administratif de la Guyane d'annuler l'arrêté du 13 juin 2019 par lequel le préfet de la Guyane a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.
Par un jugement n° 1901258 du 27 février 2020, le tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 22 mai 2020, Mme F... représentée par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 27 février 2020 du tribunal administratif de la Guyane ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Guyane du 13 juin 2019 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Guyane de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale ", dans le délai d'un mois à compter de la date de notification de l'arrêt intervenir sous astreinte de 200 euros par jour de retard, et dans l'attente de lui remettre une autorisation provisoire de séjour avec droit au travail sous 8 jours, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ou à défaut de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois et, dans l'attente d'une nouvelle décision préfectorale, lui remettre une autorisation provisoire de séjour sous 8 jours, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
En ce qui concerne l'arrêté dans son ensemble :
- il est insuffisamment motivé et le préfet de la Guyane n'a pas procédé à un examen personnel de sa situation ;
En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :
- elle est entachée d'une erreur de fait et d'un défaut d'examen particulier dès lors que des membres de sa famille résident en France ;
- elle méconnaît les dispositions des articles L. 313-11 7° et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que ses résultats scolaires sont très satisfaisants et qu'elle est hébergée par sa soeur titulaire d'un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français ;
- elle méconnaît les dispositions de L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences qu'elle emporte sur sa situation personnelle ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 25 novembre 2020, le préfet de la Guyane conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;
- le décret 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. D... E... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme F..., ressortissante haïtienne née le 18 septembre 2000, est entrée en France, selon ses déclarations, en août 2016. Elle a sollicité un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour et du droit d'asile. Par un arrêté du 13 juin 2019, le préfet de la Guyane a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement. Mme F... relève appel du jugement du 27 février 2020 par lequel le tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
S'agissant de l'arrêté dans son ensemble :
2. Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ". Aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. (...) ".
3. En premier lieu, pour écarter le moyen tiré du défaut de motivation de l'arrêté contesté, le tribunal a relevé " D'une part, il ressort de la lecture de l'arrêté attaqué que, notamment, celui-ci vise les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la convention internationale des droits de l'enfant, le code des relations entre le public et l'administration, les articles L. 313-11 7°, L. 511-1, L. 514-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et précise que Mme F... déclare être entrée irrégulièrement sur le territoire français le 27 septembre 2016, ne remplit pas les conditions d'ancienneté de séjour requises sur le territoire, son parcours scolaire n'est pas suffisant, est célibataire et sans enfant. Dans ces conditions, la décision portant refus de titre de séjour comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. D'autre part, la motivation de la décision obligeant un étranger à quitter le territoire français, qui se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement, n'implique pas d'autre mention particulière que le rappel des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui permettent d'assortir un refus de titre de séjour d'une obligation de quitter le territoire français et sont visées dans l'arrêté litigieux. ". Il y a lieu d'écarter ce moyen repris en appel par adoption des motifs pertinemment retenus par les premiers juges.
4. En second lieu, il ressort des pièces du dossier et notamment de la motivation de l'arrêté en litige mentionnée au point 3 du présent arrêt, qu'alors même que le préfet ne mentionne pas dans sa décision la présence en Guyane de la soeur et du beau-frère de la requérante, cette autorité administrative n'en a pas moins procédé à un examen particulier de la situation de Mme F... au regard de son droit au séjour avant de prendre l'arrêté contesté. Par suite, le moyen invoqué par Mme F... tiré de l'absence d'examen de sa situation personnelle doit être écarté.
S'agissant du refus de titre de séjour :
5. En premier lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " et aux termes des dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".
6. Il ressort des pièces du dossier que Mme F... est célibataire, sans enfant, a passé l'essentiel de son existence dans son pays d'origine, ne résidait en France que depuis 3 ans à la date de l'arrêté attaqué et n'établit pas être dépourvue de toute attache familiale en cas de retour dans son pays d'origine. Ni la circonstance qu'elle ait été prise en charge depuis son arrivée en France par sa soeur titulaire d'un titre de séjour en qualité de parent d'un enfant français et qu'elle entretienne des liens d'affection avec ses deux neveux résidant en France, ni le fait qu'elle justifie d'une progression scolaire satisfaisante en BEP Métier de la relation aux clients et aux usagers en juillet 2019 dont témoignent ses notes et les attestations délivrées par ses enseignants et maîtres de stage, ne sont de nature à démontrer, eu égard à ses conditions d'entrée et de séjour en France, que l'arrêté attaqué porte une atteinte disproportionnée à son droit à mener une vie privée et familiale au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
7. En deuxième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6 du présent arrêt, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
8. En troisième lieu, il résulte de ce qui précède que si le préfet de la Guyane a commis une erreur de fait en indiquant dans l'arrêté contesté qu'aucun membre de la famille de Mme F... ne réside en France alors que sa soeur, titulaire d'une carte de séjour temporaire, et deux neveux, de nationalité française, résident sur le territoire français, celui-ci aurait toutefois pris, compte tenu des conditions de séjour de l'intéressée en France telles qu'exposées aux points 3 et 6 du présent arrêt, la même décision s'il ne s'était pas fondé, à tort, sur cet élément factuel.
S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
9. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que Mme F... n'est pas fondée à soutenir que la mesure d'éloignement serait illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour.
10. En second lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés aux point 6 du présent arrêt, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés doit être écarté.
11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme F... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fins d'injonction et d'astreinte et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme F... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme G... F... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Guyane
Délibéré après l'audience du 21 janvier 2021 à laquelle siégeaient :
Mme C... B..., présidente,
M. Dominique Ferrari, président-assesseur,
M. D... E..., premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 février 2021.
La présidente
Evelyne B...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
2
N° 20BX01732