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21/12/2021 | FRANCE | N°19BX04928

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre, 21 décembre 2021, 19BX04928


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Cocktail Développement a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 22 mars 2018 par lequel le maire de la commune de Niort a refusé de lui délivrer l'autorisation d'implanter un dispositif publicitaire lumineux sur un emplacement situé au 51 C rue de Comporté, ainsi que la décision du 12 juin 2018 portant rejet de son recours gracieux.

Par un jugement n° 1801887 du 17 octobre 2019, le tribunal administratif de Poitiers a fait droit à sa demande et a enjoint

la commune de Niort de délivrer l'autorisation sollicitée dans le délai d'un moi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Cocktail Développement a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 22 mars 2018 par lequel le maire de la commune de Niort a refusé de lui délivrer l'autorisation d'implanter un dispositif publicitaire lumineux sur un emplacement situé au 51 C rue de Comporté, ainsi que la décision du 12 juin 2018 portant rejet de son recours gracieux.

Par un jugement n° 1801887 du 17 octobre 2019, le tribunal administratif de Poitiers a fait droit à sa demande et a enjoint à la commune de Niort de délivrer l'autorisation sollicitée dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 18 décembre 2019 et un mémoire, enregistré le 2 février 2021, la commune de Niort, représentée par Me Rouveyran, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 17 octobre 2019 ;

2°) de mettre à la charge de la société Cocktail Développement la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé en ce que le tribunal s'est contenté à plusieurs reprises de procéder par voie d'affirmations générales ; cette motivation ne permet pas de comprendre en quoi l'implantation du dispositif lumineux ne porterait pas atteinte à la sécurité des automobiles ;

- elle a apporté des éléments précis de nature à caractériser la dangerosité du dispositif lumineux et qui justifient la décision du maire ; en particulier, l'éloignement du panneau du carrefour aura pour conséquence de porter l'attention des usagers au loin sur la gauche, alors qu'elle doit être maintenue sur le carrefour et les différentes voies ; les observations de la préfète en première instance confirment l'analyse de la commune quant à la situation du carrefour et à la dangerosité de l'implantation du panneau à l'endroit projeté.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 octobre 2020, la société Cocktail Développement, société par actions simplifiée, et M. B... A..., représentés par Me Tertrais, concluent au rejet de la requête, à l'admission de l'intervention de M. A..., et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la commune de Niort au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- aucun des moyens de la requête n'est fondé ;

- M. A... justifie d'un intérêt à intervenir en sa qualité de prospecteur foncier pour la société Cocktail Développement via la société Pixiti, autre société du groupe Cocktail Invest dès lors qu'il est directement intéressé à l'aboutissement du projet, dont dépend une partie de sa rémunération.

Par une ordonnance du 23 décembre 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 3 février 2021 à 12 : 00 heures.

Un mémoire enregistré le 26 novembre 2021, postérieurement à la clôture de l'instruction, a été présenté pour la commune de Niort.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de la route ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Birsen Sarac-Deleigne,

- et les conclusions de M. Stéphane Gueguein, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société Cocktail Développement a déposé en mairie le 19 mars 2018 une demande d'autorisation d'implantation d'un dispositif publicitaire lumineux numérique scellé au sol, sur la parcelle cadastrée section BD n° 0085, située au 51 C rue de Comporté à Niort. Par arrêté du 22 mars 2018, le maire de la commune de Niort a refusé de faire droit à cette demande. La commune de Niort relève appel du jugement du 17 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Poitiers, à la demande de la société Cocktail Développement, a annulé cet arrêté ainsi que la décision du maire du 12 juin 2018 rejetant le recours gracieux formé à son encontre.

Sur l'intervention :

2. L'intervention de M. A... au soutien des conclusions de la société Cocktail Développement, qui n'a pas été présentée par mémoire distinct en méconnaissance de l'article R. 632-1 du code de justice administrative, ne peut être admise.

Sur la régularité du jugement :

3. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Contrairement à ce que soutient la commune de Niort, le tribunal qui a précisément énoncé au point 4 du jugement les motifs qui étaient de nature à justifier l'absence d'atteinte à la sécurité routière, a suffisamment motivé son jugement. La commune requérante n'est dès lors pas fondée à soutenir que celui-ci serait entaché d'irrégularité.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

4. Aux termes de l'article R. 581-15 du code de l'environnement : " L'autorisation d'installer un dispositif de publicité lumineuse (...) est accordée, compte tenu notamment du cadre de vie environnant et de la nécessité de limiter les nuisances visuelles pour l'homme (...) aux dispositifs dont les caractéristiques respectent les prescriptions des articles R. 581-34 à R. 581-41 et les interdictions faites aux publicités et enseignes par l'article R. 418-4 du code de la route (...) ". L'article R. 418-4 du code de la route dispose que : " Sont interdites la publicité et les enseignes, enseignes publicitaires et pré-enseignes qui sont de nature, soit à réduire la visibilité ou l'efficacité des signaux réglementaires, soit à éblouir les usagers des voies publiques, soit à solliciter leur attention dans des conditions dangereuses pour la sécurité routière ".

5. Il ressort des termes de l'arrêté du 22 mars 2018 que le maire de la commune de Niort a rejeté la demande d'autorisation de la société Cocktail Développement au motif que le dispositif publicitaire lumineux en litige devait s'insérer à l'intersection de quatre axes de circulation, dans un environnement particulièrement dense composé de panneaux de signalisation routière lumineux ainsi que de feux tricolores, et qu'il serait de ce fait de nature à perturber la vision que les automobilistes auraient de ces feux tricolores. En outre, le maire a indiqué dans sa décision du 12 juin 2018 rejetant le recours gracieux que " l'ajout d'un panneau numérique dans un tel site routier intense serait de nature à réduire l'efficacité des panneaux réglementaires en détournant l'attention des conducteurs " et que " l'emplacement rendrait le panneau visible depuis chaque intersection et aurait pour conséquence de rendre les automobilistes moins vigilants au trafic routier ".

6. Toutefois, il ressort des pièces du dossier et notamment du courrier du 12 février 2019 de la direction de l'espace public de la ville de Niort, produit par la commune, que le dispositif publicitaire en cause, d'une dimension de 8 m2, qui a vocation à remplacer un panneau traditionnel comportant des affiches en papier, sera, du fait d'un délaissé important entre le boulevard et la parcelle d'implantation, localisé en retrait du carrefour, et par suite des feux tricolores. Par ailleurs, il ressort du dossier de demande d'autorisation précisant les caractéristiques techniques du dispositif que pour éviter de diminuer l'efficacité des signaux réglementaires et d'éblouir les usagers de la route, la luminosité du panneau sera limitée à 4 000 candelas par m2 avec une extinction sur la plage horaire de 1 heure à 6 heures et que l'installation sera équipée d'un système permettant de régler tant la puissance lumineuse que la vitesse de défilement des images, laquelle sera limitée à une image toutes les dix secondes.

7. S'il ressort du courriel de la direction des routes du département que près de 27 300 véhicules par jour empruntent le carrefour dans les deux sens, il ne ressort pas des pièces du dossier que le dispositif litigieux, bien que visible depuis les voies de circulation routière, soit, compte tenu de sa taille, de son emplacement et de ses caractéristiques techniques susvisées, de nature à réduire la visibilité ou l'efficacité des signaux réglementaires. En outre, ainsi que l'a relevé le tribunal, la très forte densité des panneaux de signalisation alléguée par la commune de Niort n'est pas établie par les photographies qu'elle produit. Par ailleurs, contrairement à ce que soutient la commune, ni les considérations d'ordre général reprises dans l'annexe à l'instruction du gouvernement du 25 mars 2014 relative à la réglementation nationale des publicités, des enseignes et des pré enseignes, ni celles contenues dans le rapport du conseil supérieur wallon de la sécurité routière, ne suffisent pour permettre d'estimer que le panneau en litige serait de nature à solliciter l'attention des automobilistes dans des conditions dangereuses pour la sécurité routière alors que la publicité lumineuse numérique n'est pas par principe interdite par la législation ou la réglementation nationale ou par la réglementation locale applicable sur le territoire de la commune. Cette dangerosité ne ressort pas davantage des observations présentées en première instance par la préfète, qui se borne à retenir une baisse seulement probable de la vigilance attendue des automobilistes alors que la société Cocktail Développement soutient, sans être contredite, que des dispositifs lumineux similaires ont été implantés à proximité de carrefours dont la configuration est semblable à celle en l'espèce, sans que des incidents de circulation n'aient été relevés. Dans ces conditions, et alors que la commune admet elle-même dans sa réponse au recours gracieux que la configuration des lieux ne présente actuellement aucune difficulté particulière pour les usagers, la société Cocktail Développement est fondée à soutenir que c'est à tort que la commune a, pour ce motif, refusé de faire droit à sa demande d'autorisation d'implantation d'un dispositif de publicité lumineuse sur la parcelle cadastrale BD n° 0085, située au 51 C rue de Comporté.

8. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Niort n'est pas fondée à soutenir c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a annulé l'arrêté du 22 mars 2018 ainsi que la décision du 12 juin 2018 portant rejet du recours gracieux formé à son encontre.

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Cocktail Développement, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la commune de Niort demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la commune de Niort une somme de 1 500 euros à verser à la société Cocktail Développement au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : L'intervention de M. A... n'est pas admise.

Article 2 : La requête de la commune de Niort est rejetée.

Article 3 : La commune de Niort versera une somme de 1 500 euros à la société Cocktail Développement au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Niort, à la société Cocktail Développement et à M. B... A....

Délibéré après l'audience du 30 novembre 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, présidente,

Mme Laury Michel, première conseillère,

Mme Birsen Sarac-Deleigne, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 décembre 2021.

La rapporteure,

Birsen Sarac-DeleigneLa présidente,

Elisabeth Jayat

La greffière,

Virginie Santana

La République mande et ordonne au préfet des Deux-Sèvres en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 19BX04928


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19BX04928
Date de la décision : 21/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

49-05-12 Police. - Polices spéciales. - Police de l`affichage et de la publicité (voir : Affichage et publicité).


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Birsen SARAC-DELEIGNE
Rapporteur public ?: M. GUEGUEIN
Avocat(s) : SELARL ATLANTIC - JURIS

Origine de la décision
Date de l'import : 04/01/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-12-21;19bx04928 ?
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