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16/02/2022 | FRANCE | N°21BX03213

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 16 février 2022, 21BX03213


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B... E... a demandé au tribunal administratif de Saint-Martin d'annuler la décision du 7 octobre 2020, par laquelle le préfet délégué auprès du représentant de l'Etat dans les collectivités de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin a rejeté son recours gracieux formé à l'encontre de sa décision du 8 juin 2020 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et confirmé ce refus.

Par un jugement n° 2000113 du 17 juin 2021, le tribunal administratif de Saint-Martin a rejeté cette demand

e.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 26 juillet 2021, Mme B.....

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B... E... a demandé au tribunal administratif de Saint-Martin d'annuler la décision du 7 octobre 2020, par laquelle le préfet délégué auprès du représentant de l'Etat dans les collectivités de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin a rejeté son recours gracieux formé à l'encontre de sa décision du 8 juin 2020 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et confirmé ce refus.

Par un jugement n° 2000113 du 17 juin 2021, le tribunal administratif de Saint-Martin a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 26 juillet 2021, Mme B... E..., représentée par Me Guillaume-Matime, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Saint-Martin du 17 juin 2021 ;

2°) d'annuler la décision du 8 juin 2020 par laquelle le préfet délégué auprès du représentant de l'Etat dans les collectivités de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, ensemble la décision du 7 octobre 2020 rejetant son recours gracieux ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et à défaut de procéder, dans les mêmes conditions de délai, au réexamen de sa situation avec la délivrance pendant le temps de ce réexamen d'une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 2 000 euros pour la procédure de première instance et la somme de 3 000 euros pour la présente instance.

Elle soutient que :

- la décision de refus de titre de séjour méconnait les dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Dominique Ferrari, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... E..., ressortissante dominicaine, née le 20 août 1982, est entrée en France selon ses déclarations en janvier 2015. Elle a donné naissance le 1er avril 2016 à une fille prénommée D... et a obtenu un premier titre de séjour sur le fondement des dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en qualité de parent d'enfant français, valable du 11 janvier 2019 au 10 janvier 2020. Mme B... E... a demandé le 7 octobre 2019 le renouvellement de son titre de séjour. Par décision du 8 juin 2020, le préfet délégué auprès du représentant de l'Etat dans les collectivités de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin a rejeté sa demande de renouvellement de titre de séjour et confirmé ce refus, par décision du 7 octobre 2020, suite au recours gracieux effectué par l'intéressée. Mme B... E... relève appel du jugement du 17 juin 2021 par lequel le tribunal de Saint-Martin a rejeté sa demande d'annulation de ces décisions.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée ; / Lorsque la filiation est établie à l'égard d'un parent, en application de l'article 316 du code civil, le demandeur, s'il n'est pas l'auteur de la reconnaissance de paternité ou de maternité, justifie que ce dernier contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, dans les conditions prévues à l'article 371-2 du même code, ou produit une décision de justice relative à la contribution à l'éducation et à l'entretien de l'enfant. Lorsque le lien de filiation est établi mais que la preuve de la contribution n'est pas rapportée ou qu'aucune décision de justice n'est intervenue, le droit au séjour du demandeur s'apprécie au regard du respect de sa vie privée et familiale et au regard de l'intérêt supérieur de l'enfant ; (...) ". Aux termes de l'article 371-2 du code civil : " Chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant ".

3. Il ressort des termes de la décision attaquée, que pour refuser le renouvellement du titre de séjour sollicité par Mme B... E..., le préfet s'est fondé sur le motif tiré de l'absence de justificatif probant attestant de la participation à l'entretien et à l'éducation de l'enfant par le père.

4. Il ressort cependant des pièces du dossier que Mme B... E... a donné naissance le 1er avril 2016, en Guadeloupe, à une fille prénommée D... qui, le 6 avril 2016, a été reconnue par M. F... A..., né en France le 9 septembre 1983, dont la nationalité française n'est pas contestée. Il ressort également des pièces du dossier que Mme B... E... et M. A... vivent en concubinage à la même adresse depuis 2015, dans une maison mise à leur disposition gratuitement par le père de M. A.... Ainsi, M. A... vivant avec la requérante et sa fille depuis la naissance de cette dernière, il doit être présumé contribuer à son entretien et à son éducation, au sens des dispositions susmentionnées de l'article 371-2 du code civil. A cet égard, la requérante a versé au dossier plusieurs attestations sur l'honneur, notamment du directeur de l'école où est scolarisée la jeune D..., attestant que M. A... et Mme B... E..., répondent à ses sollicitations et à celles des enseignants, ainsi que des reçus de recouvrement de frais de restauration scolaire de l'enfant au nom de M. F... A... pour la période de septembre 2019 à juin 2021 et plusieurs photos attestant la réalité d'une vie de famille. Dans ces conditions Mme B... E... est fondée à soutenir que le préfet a méconnu les dispositions précitées du 6° de l'article L. 313-11 en rejetant sa demande de titre de séjour au motif qu'elle ne justifiait pas de la contribution effective du père à l'entretien et à l'éducation de leur enfant.

5. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que Mme B... E... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Saint-Martin a rejeté sa demande d'annulation des décisions en litige.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Le présent arrêt implique nécessairement, en application de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, que le préfet délégué auprès du représentant de l'Etat dans les collectivités de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin délivre à Mme B... E... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ". Il y a lieu de lui enjoindre d'y procéder dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, au titre des frais de la présente instance, une somme de 1 200 euros à verser à Mme B... E.... En revanche, en ce qui concerne l'instance engagée devant le Tribunal administratif de Saint-Martin, aucune conclusion tendant au versement de frais de procès n'a été présentée. Dès lors, il n'y a pas lieu pour la cour de mettre à la charge de l'Etat la somme que demande Mme B... E... au titre des frais de première instance.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Saint-Martin du 17 juin 2021 est annulé.

Article 2 : Les décisions du préfet délégué auprès du représentant de l'Etat dans les collectivités de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin en date du 8 juin 2020 et du 7 octobre 2020 sont annulées.

Article 3 : Il est enjoint au préfet délégué auprès du représentant de l'Etat dans les collectivités de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin de délivrer à Mme B... E... un titre de séjour mention vie privée et familiale, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à Mme B... E... une somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... E... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Guadeloupe et au préfet délégué auprès du représentant de l'Etat dans les collectivités de Saint-Barthélemy et de Saint-Martin.

Délibéré après l'audience du 17 décembre 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

M. Dominique Ferrari, président-assesseur,

M. Nicolas Normand, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 février 2022.

Le rapporteur,

Dominique Ferrari

La présidente,

Evelyne Balzamo

Le greffier,

André Gauchon

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 21BX03213


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX03213
Date de la décision : 16/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: M. Dominique FERRARI
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : GUILLAUME-MATIME

Origine de la décision
Date de l'import : 22/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-02-16;21bx03213 ?
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