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23/06/2022 | FRANCE | N°21BX02307

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 23 juin 2022, 21BX02307


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la délibération du 19 décembre 2019 par laquelle la communauté d'agglomération du Grand Périgueux a approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal du Grand Périgueux en tant qu'elle porte sur les emplacements réservés AM n°9, AM n°88 et AM n°89 institués sur le territoire de la commune de Chancelade.

Par un jugement n°2000798 du 31 mars 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande.

Procé

dure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 30 mai 2021 et un mémoire enregistré l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la délibération du 19 décembre 2019 par laquelle la communauté d'agglomération du Grand Périgueux a approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal du Grand Périgueux en tant qu'elle porte sur les emplacements réservés AM n°9, AM n°88 et AM n°89 institués sur le territoire de la commune de Chancelade.

Par un jugement n°2000798 du 31 mars 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 30 mai 2021 et un mémoire enregistré le 1er mars 2022, M. et Mme A..., représentés par Me Paul, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 31 mars 2021 ;

2°) d'annuler la délibération du 19 décembre 2019 en tant qu'elle porte sur les emplacements réservés AM n°9, AM n°88 et AM n°89 institués sur le territoire de la commune de Chancelade;

3°) d'enjoindre à la communauté d'agglomération du Grand Périgueux de supprimer ces emplacements réservés, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) d'enjoindre à la communauté d'agglomération du Grand Périgueux de communiquer le compte-rendu du conseil municipal de Chancelade du 18 avril 2011, ainsi que l'ensemble des annexes à cette délibération relatives aux travaux envisagés sur les chemins ruraux de Keruel et de Puyferrat, y compris le document d'arpentage réalisé par Aquitaine Géométrie ;

5°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération du Grand Périgueux une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761- 1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement attaqué ne comporte pas les signatures nécessaires ;

- la procédure est irrégulière au regard de l'article R. 123-19 du code de l'environnement en l'absence d'analyse et de réponse à toutes leurs observations par le commissaire enquêteur, ce qui a porté atteinte à l'information du public ;

- l'absence de communication de certaines informations lors de l'enquête publique a nui à l'information du public ;

- le maintien des emplacements réservés AM n°9, n°88 et n°89 n'est pas suffisamment motivé, détaillé et justifié dans les documents du plan local d'urbanisme intercommunal ;

- le maintien des emplacements réservés est entaché d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que l'élargissement des chemins de Keruel et de Puyferrat a été intégralement réalisé en 2005 et 2013 et que le besoin n'est pas justifié pour l'emplacement AM n°9.

Par un mémoire en défense enregistré le 19 janvier 2022, la communauté d'agglomération du Grand Périgueux, représentée par Me Clerc, conclut, à titre principal, au rejet de la requête et demande qu'une somme de 3 500 euros soit mise à la charge de M. et Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à titre subsidiaire, à ce qu'il soit sursis à statuer en application de l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme.

Elle soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés et qu'une éventuelle irrégularité est susceptible d'être régularisée.

La clôture à effet immédiat a été prononcée par une ordonnance du 29 mars 2022 à 14h39.

Un mémoire a été enregistré pour M. et Mme A... le 29 mars 2022 à 17h14.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B... C...,

- les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public,

- et les observations de Me Le Franc, représentant M. et Mme A... et D..., représentant la communauté d'agglomération du Grand Périgueux.

Une note en délibéré présentée par Me Paul, pour M. et Mme A..., a été enregistrée le 12 mai 2022.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme A... relèvent appel du jugement du 31 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la délibération du 19 décembre 2019 par laquelle la communauté d'agglomération du Grand Périgueux a approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi), en tant qu'elle concerne les emplacements réservés AM n°9, AM n°88 et AM n°89 institués sur le territoire de la commune de Chancelade.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ". Il ressort de l'examen de la minute du jugement attaqué qu'elle a été signée par le président de la formation de jugement, la rapporteure et le greffier. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement sur ce point doit être écarté.

Sur la légalité de la délibération du 19 décembre 2019 :

3. Aux termes de l'article L. 123-15 du code de l'environnement : " Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête rend son rapport et ses conclusions motivées dans un délai de trente jours à compter de la fin de l'enquête. Si ce délai ne peut être respecté, un délai supplémentaire peut être accordé à la demande du commissaire enquêteur ou de la commission d'enquête par l'autorité compétente pour organiser l'enquête, après avis du responsable du projet./ Le rapport doit faire état des observations et propositions qui ont été produites pendant la durée de l'enquête ainsi que des réponses éventuelles du maître d'ouvrage (...) ". Aux termes de l'article R. 123-19 de ce code : " Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête établit un rapport qui relate le déroulement de l'enquête et examine les observations recueillies. /Le rapport comporte le rappel de l'objet du projet, plan ou programme, la liste de l'ensemble des pièces figurant dans le dossier d'enquête, une synthèse des observations du public, une analyse des propositions produites durant l'enquête et, le cas échéant, les observations du responsable du projet, plan ou programme en réponse aux observations du public./Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête consigne, dans une présentation séparée, ses conclusions motivées, en précisant si elles sont favorables, favorables sous réserves ou défavorables au projet (...) ". Il résulte des dispositions combinées des articles L. 123-15 et R. 123-19 du code de l'environnement que, si elles n'imposent pas au commissaire-enquêteur ou à la commission d'enquête de répondre à chacune des observations présentées lors de l'enquête publique, elles l'obligent à indiquer, au moins sommairement, en donnant son avis personnel, les raisons qui déterminent le sens de cet avis.

4. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que la commission a énuméré et résumé dans son rapport les observations recueillies au cours de l'enquête publique, en faisant état notamment des demandes individuelles concernant les emplacements réservés, réparties par commune. Si les requérants se prévalent d'extraits peu explicites des fiches de synthèses de leurs observations établies par la commission d'enquête, il ressort du rapport de cette commission qu'elle a analysé les observations qu'ils avaient présentées et qu'elle a soumis à la collectivité leurs questionnements concernant les emplacements réservés. En faisant état, dans la partie de son rapport consacrée à l'analyse des observations, de l'absence de précisions et de justifications suffisantes ainsi que de la nécessité de fournir les précisions demandées au plus tard lors de l'approbation du PLUi, la commission doit être regardée comme ayant fait sienne les critiques des requérants concernant le manque de justifications et de précisions quant aux caractéristiques des aménagements envisagés sur ces emplacements réservés qui ne justifiaient toutefois pas un avis défavorable au regard de la possibilité d'y remédier avant l'approbation du PLUi. Par suite, le rapport de la commission d'enquête n'a pas méconnu les exigences des articles L. 123-15 et R. 123-19 du code de l'environnement.

5. Si les requérants soutiennent que l'absence de communication de certaines informations lors de l'enquête publique aurait nui à l'information du public, en se bornant à renvoyer au point 3.2 de leurs écritures qui concernent la critique du bien-fondé des emplacements réservés, les requérants n'ont pas permis à la cour d'identifier ces informations et, par suite, d'apprécier le bien-fondé de ce moyen.

6. Aux termes de l'article de L. 151-41 du code de l'urbanisme : " Le règlement peut délimiter des terrains sur lesquels sont institués : 1° Des emplacements réservés aux voies et ouvrages publics dont il précise la localisation et les caractéristiques ; 2° Des emplacements réservés aux installations d'intérêt général à créer ou à modifier ;(...) ". Aux termes de l'article R. 151-34 de ce code : " Dans les zones U, AU, A et N les documents graphiques du règlement font apparaître, s'il y a lieu : (...) 4° Les emplacements réservés aux équipements et installations d'intérêt général en précisant leur destination et les collectivités, services et organismes publics bénéficiaires ". L'article R. 151-48 du même code ajoute que : " Dans les zones U, AU, A et N, le ou les documents graphiques du règlement font, en outre, apparaître, s'il y a lieu : (...) 2° Les emplacements réservés aux voies publiques délimités en application du 1° de l'article L. 151-41, en précisant leur destination et les collectivités, services et organismes publics bénéficiaires (...) ".

7. L'appréciation à laquelle se livrent les auteurs d'un plan local d'urbanisme lorsqu'ils décident de créer des emplacements réservés ne peut être discutée devant le juge de l'excès de pouvoir que si elle repose sur des faits matériellement inexacts, si elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ou si elle procède d'un détournement de pouvoir. En outre, l'intention d'une commune de réaliser un aménagement sur une parcelle suffit à justifier légalement son classement en tant qu'emplacement réservé sans qu'il soit besoin pour la commune de faire état d'un projet précisément défini. Enfin, il n'appartient pas au juge administratif d'apprécier l'opportunité du choix de la localisation d'un emplacement réservé par rapport à d'autres localisations possibles.

8. En l'espèce, le rapport de présentation du PLUi énonce les principes et les objectifs qui ont conduit à la mise en place des emplacements réservés et comporte une annexe qui liste les emplacements réservés et précise, pour chacun, son bénéficiaire, sa destination, sa localisation et sa surface, conformément aux dispositions des articles R. 151-34 et R. 151-48 cités ci-dessus. Ainsi, alors que ni l'article L. 151-41 du code de l'urbanisme, ni aucune autre disposition de ce code n'impose que les documents d'urbanisme justifient précisément pour chaque emplacement réservé les motifs qui ont conduit à le retenir ni les caractéristiques détaillées des ouvrages envisagés, le moyen tiré de l'insuffisante motivation dans le PLUi du maintien de l'inscription des emplacements réservés AM n°9, AM n°88 et AM n°89 doit être écarté. Enfin, en l'absence d'impact environnemental il n'était pas nécessaire de procéder à l'analyse de ces emplacements dans le résumé non-technique du rapport de présentation.

9. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du rapport de présentation, que l'emplacement réservé AM n°9 correspond à la création d'un bassin de rétention des eaux pluviales au niveau du pont de la Beauronne, que l'emplacement n°88 porte sur une longueur approximative de 265 mètres linéaires en vue de l'aménagement d'un chemin de desserte au niveau du chemin de Keruel et enfin que l'emplacement n°89 concerne une longueur de 361 mètres linéaires pour l'aménagement d'un chemin de desserte au niveau du chemin de Puyferrat Sud. S'agissant du bassin de rétention, il ressort des pièces du dossier que tous les terrains inclus dans les zones constructibles à proximité de cet emplacement ne sont pas encore bâtis, dès lors l'augmentation des ruissellements pluviaux en raison de l'imperméabilisation des terrains naturels résultant de la mise en œuvre du PLUi du Grand Périgueux était de nature à justifier la nécessité de créer de nouveaux bassins de rétention et, par suite, le maintien de cet emplacement réservé AM n°9 quand bien même ce PLUi comportait une diminution des zones constructibles par rapport au plan antérieur. S'agissant des travaux d'élargissement des chemins ruraux, il ressort des pièces du dossier que la procédure d'élargissement du chemin de Keruel n'était pas achevée à la date d'approbation du PLUi dès lors qu'une parcelle constitutive de l'emprise n'avait pas encore été acquise par la commune et qu'un nouvel élargissement était nécessaire sur le chemin de Puyferrat pour assurer la sécurité de la circulation en raison de l'augmentation constatée du trafic depuis les travaux réalisés en 2005 et 2013. Les constats d'huissiers que produisent les requérants, s'ils confirment que des travaux avaient déjà été réalisés, ne permettent pas de remettre en cause la nécessité de nouveaux travaux et de la finalisation de la procédure d'élargissement à la date d'approbation du PLUi en litige. Il en est de même de l'accord passé avec la commune en 2011, concernant le maintien d'arbres et d'une clôture, et de l'état parcellaire établi en 2010 pour l'élargissement du chemin de Keruel, qui se borne à faire état de l'identité des propriétaires et des surfaces à acquérir et ne permet pas de considérer que la parcelle AS375 aurait été acquise à cette date. Enfin, contrairement à ce que soutiennent les requérants, les précisions apportées par la collectivité dans ses écritures ne sont pas contradictoires avec les mentions figurant dans le rapport de présentation du PLUi et ils ne peuvent utilement se prévaloir des réponses apportées par la commune de Chancelade lors d'enquêtes publiques menées pour les travaux d'élargissement en 2009 et 2010 qui correspondaient à une situation de fait différente. Dès lors, la définition des emplacements réservés n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

10. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de faire droit à la mesure d'instruction sollicitée, que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la délibération du conseil de la communauté d'agglomération du Grand Périgueux du 19 décembre 2019 approuvant le PLUi du Grand Périgueux. Par suite, leurs conclusions tendant à l'annulation de ce jugement doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, leurs conclusions aux fins d'injonction.

Sur les frais liés à l'instance :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la communauté d'agglomération du Grand Périgueux, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que les requérants demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. et Mme A... la somme de 1 500 euros à verser à la communauté d'agglomération du Grand Périgueux au titre des mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.

Article 2 : M. et Mme A... verseront à la communauté d'agglomération du Grand Périgueux une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... et à la communauté d'agglomération du Grand Périgueux.

Délibéré après l'audience du 25 mai 2022, à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, présidente,

Mme Fabienne Zucarello, présidente-assesseure,

Mme Christelle Brouard-Lucas, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 juin 2022.

La rapporteure,

Christelle C...La présidente,

Marianne Hardy

La greffière,

Marion Azam Marche

La République mande et ordonne au préfet de la Dordogne en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 21BX02307 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21BX02307
Date de la décision : 23/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: Mme Christelle BROUARD-LUCAS
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : CABINET PAUL-AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-06-23;21bx02307 ?
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