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08/11/2022 | FRANCE | N°22BX00921

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre, 08 novembre 2022, 22BX00921


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 9 décembre 2021 par lequel le préfet des Pyrénées-Atlantiques lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2103384 du 17 février 2022, la présidente du tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 mars 2022, Mme A..., représentée par Me Mandi

le, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 17 février 2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 9 décembre 2021 par lequel le préfet des Pyrénées-Atlantiques lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2103384 du 17 février 2022, la présidente du tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 mars 2022, Mme A..., représentée par Me Mandile, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 17 février 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 9 décembre 2021 du préfet des Pyrénées-Atlantiques ;

3°) d'enjoindre au préfet des Pyrénées-Atlantiques de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le préfet ne pouvait prendre l'arrêté en litige alors que ses parents et son frère ont demandé le réexamen de leur propre demande d'asile devant la CNDA, lequel était pendant ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen réel et sérieux de sa situation eu égard à sa bonne intégration scolaire ;

- l'arrêté en litige est entaché d'erreur manifeste d'appréciation et méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- son intégration exemplaire lui ouvre droit à demeurer en France pour poursuivre ses études et à une admission exceptionnelle au séjour.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 juillet 2022, le préfet des Pyrénées-Atlantiques conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Mme A... a obtenu l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 juillet 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme D... E... a été entendu au cours de l'audience publique.

Une note en délibéré présentée pour Mme A... a été enregistrée le 14 octobre 2022.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... A..., ressortissante albanaise, née le 15 juillet 2003 à Shkoder (Albanie), est entrée en France, selon ses déclarations le 26 juin 2019, accompagnée de ses parents et de ses frères. Le 4 juillet 2019, sa mère, Mme C... A..., a déposé pour son compte une demande d'asile, qui a été rejetée le 3 septembre 2020 par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) statuant en procédure accélérée. Par un arrêté du 9 décembre 2021, le préfet des Pyrénées-Atlantiques lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Mme A... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté du 9 décembre 2021.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : (...) : 4° La reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou il ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 542-1 et L. 542-2, (...) ". Par ailleurs l'article L. 542-2 du même code dispose que : " Par dérogation à l'article L. 542-1, le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin : 1° Dès que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a pris les décisions suivantes : (...) d) une décision de rejet dans les cas prévus à l'article L. 531-24 et au 5° de l'article L. 531-27 ; (...) ". Aux termes de l'article L. 531-24 du même code : " L'Office français de protection des réfugiés et apatrides statue en procédure accélérée dans les cas suivants : 1° Le demandeur provient d'un pays considéré comme un pays d'origine sûr au sens de l'article L. 531-25 ; (...) ". Enfin, l'Albanie est considérée comme un pays d'origine sûr au sens de l'article 37 et de l'annexe de la directive 2013/21/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013.

3. Il ressort du relevé Telemofpra, produit en défense par le préfet des Pyrénées-Atlantiques et dont les mentions font foi jusqu'à preuve du contraire, que la demande d'asile présentée au nom de la requérante, alors mineure, par sa mère Mme C... A..., a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides statuant en procédure accélérée, par une décision du 3 septembre 2020. Cette décision ayant été notifiée à la requérante le 22 septembre 2020, l'intéressée ne bénéficiait plus à cette date, nonobstant le recours formé devant la Cour nationale du droit d'asile, du droit de se maintenir sur le territoire français. Si Mme A... fait valoir que ses parents et son frère Omar, dont la demande d'asile a été rejetée par la cour nationale du droit d'asile, ont présenté une demande de réexamen devant cette instance de leur propre demande d'asile, laquelle n'avait pas encore été examinée à la date de l'arrêté en litige, cette circonstance alors que l'intéressée était devenu majeure avant l'édiction de l'arrêté en litige, est sans incidence sur la légalité de cet arrêté. Par suite, le préfet des Pyrénées-Atlantiques a pu légalement estimer que, à la date de l'arrêté attaqué, Mme A... ne disposait plus d'aucun droit à se maintenir sur le territoire au titre de l'asile et qu'elle se trouvait, en conséquence, dans le cas où, en application des dispositions précitées du 4° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour de étrangers et du droit d'asile, il pouvait légalement édicter à son encontre la mesure d'éloignement en litige.

4. En deuxième lieu, il ne ressort ni des pièces du dossier ni des termes de la décision en litige que le préfet des Pyrénées-Atlantiques n'aurait pas procédé à un examen réel et sérieux de la situation de la requérante avant de l'obliger à quitter le territoire français en indiquant qu'au regard de l'ensemble de sa situation, " elle ne justifie pas de son intégration durable dans la société française " et ce, quand bien même la requérante a de bons résultats scolaires.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. "

6. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... est entrée en France en juin 2019, alors qu'elle était mineure, accompagnée de ses parents et de ses frères. L'intéressée, qui n'a été autorisée à résider sur le territoire français qu'en raison de l'instruction et de l'examen de sa demande d'asile, n'a pas vocation à s'y maintenir, alors que ses parents et son frère Omar ont également fait l'objet de mesures d'éloignement. Mme A..., qui est majeure et poursuit sa scolarité en classe de première, fait valoir que, depuis son arrivée, elle a fait montre d'une bonne intégration scolaire, ainsi qu'en attestent ses professeurs. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que ses parents et son frère sont également en situation irrégulière, qu'elle n'était présente sur le territoire que depuis deux ans et demi à la date de la décision en litige et que, étant célibataire et sans charge de famille, rien ne fait obstacle à la poursuite de sa scolarité en Albanie. Dès lors, nonobstant ses bons résultats scolaires, la mesure d'éloignement en litige ne peut être regardée comme ayant des conséquences disproportionnées sur sa situation personnelle et familiale. Dans ces conditions, la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de Mme A... au respect de sa vie privée et familiale et ne méconnaît ainsi pas l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, elle n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation sur sa situation personnelle.

7. Enfin, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point précédent, le préfet des Pyrénées-Atlantiques n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en refusant l'admission exceptionnelle au séjour de Mme A... au regard de sa situation personnelle.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la présidente du tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande. Sa requête doit, par suite, être rejetée y compris, par voie de conséquence, ses conclusions présentées à fin d'injonction, d'astreinte et de versement d'une somme en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera délivrée au préfet des Pyrénées-Atlantiques.

Délibéré après l'audience du 12 octobre 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Florence Demurger, présidente,

Mme Karine Butéri, présidente-assesseure,

Mme Caroline Gaillard, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 8 novembre 2022.

La rapporteure,

Caroline E...

La présidente,

Florence DemurgerLa greffière,

Catherine Jussy

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22BX00921


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 22BX00921
Date de la décision : 08/11/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme DEMURGER
Rapporteur ?: Mme Caroline GAILLARD
Rapporteur public ?: Mme MADELAIGUE
Avocat(s) : MANDILE

Origine de la décision
Date de l'import : 13/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-11-08;22bx00921 ?
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