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07/11/2023 | FRANCE | N°21BX02892

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre, 07 novembre 2023, 21BX02892


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme K... I... épouse A... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 27 juin 2019 par laquelle le conseil départemental des Pyrénées-Atlantiques a refusé de reconnaître imputable au service sa pathologie cervicale et, par voie de conséquence, de prendre en charge à ce titre les arrêts de travail et soins.

Par un jugement n°1901664, 1901665 du 18 mai 2021, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa requête.

Procédure devant la Cour :


Par une requête et un mémoire, enregistrés les 7 juillet 2021 et 20 décembre 2022, Mme K... ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme K... I... épouse A... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 27 juin 2019 par laquelle le conseil départemental des Pyrénées-Atlantiques a refusé de reconnaître imputable au service sa pathologie cervicale et, par voie de conséquence, de prendre en charge à ce titre les arrêts de travail et soins.

Par un jugement n°1901664, 1901665 du 18 mai 2021, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 7 juillet 2021 et 20 décembre 2022, Mme K... I... épouse A..., représentée par la SELARL Ballade Larrouy, agissant par Me Loupien-Suares, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 18 mai 2021 en tant que le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande dirigée contre la décision du 27 juin 2019 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 27 juin 2019 ;

3°) de mettre à la charge solidaire du département des Pyrénées-Atlantiques et du centre de gestion de la fonction publique territoriale des Pyrénées-Atlantiques, le versement d'une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens.

Elle soutient que :

- le courrier du 27 juin 2019 constitue une décision lui faisant grief si bien que c'est à tort que le tribunal a estimé que sa demande n'était pas recevable ;

- aucun des représentants du personnel n'a siégé lors de la séance de la commission de réforme, laquelle était donc irrégulièrement composée ;

- la cervicalgie identifiée le 14 octobre 2016 est imputable au service.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 25 octobre 2021 et 29 décembre 2022, le centre de gestion de la fonction publique territoriale des Pyrénées-Atlantiques, représenté par Me Gallardo, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme I... épouse A... une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 17 juin 2019 sont nouvelles et ainsi, irrecevables en appel ;

- les conclusions dirigées dans le mémoire enregistré le 20 décembre 2022 contre le jugement n°1901664, 1901665 sont tardives et également irrecevables ;

- le courrier du 16 mai 2019, qui, d'une part, a un caractère informatif, d'autre part, est une mesure préparatoire en tant qu'il rejette le recours formé contre l'avis de la commission de réforme, n'est pas susceptible de recours ;

- le moyen tiré de l'irrégularité de la composition de la commission de réforme est insuffisamment précis, et inopérant car sans incidence sur le courrier du 16 mai 2019, et en outre non fondé puisqu'un représentant du personnel était systématiquement présent aux réunions de la commission ;

- le moyen tiré de l'erreur d'appréciation de l'imputabilité au service de la cervicalgie de la requérante n'est pas fondé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 novembre 2022, le département des Pyrénées-Atlantiques, représenté par la SELARL A.B.L. Associés, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de Mme I... épouse A... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 17 juin 2019 sont nouvelles et ainsi, irrecevables en appel ;

- le jugement n°1901664, 1901665 est devenu définitif ;

- le courrier du 16 mai 2019 ne fait pas grief et est insusceptible de recours ;

- le moyen tiré de l'irrégularité de la composition de la commission de réforme est insuffisamment précis, inopérant car sans incidence sur le courrier du 16 mai 2019, et en outre non fondé puisqu'un représentant du personnel était systématiquement présent aux réunions de la commission ;

- le moyen tiré de l'erreur d'appréciation de l'imputabilité au service de la cervicalgie de la requérante n'est pas fondé.

Par ordonnance du 14 novembre 2022, la clôture d'instruction a été fixée au

19 décembre 2022.

Vu :

- le jugement attaqué ;

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 ;

- l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 octobre 2023 :

- le rapport de M. G...,

- et les conclusions de M. Duplan, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme K... I... épouse A..., adjointe technique territoriale au grade d'adjoint principal de première classe, employée par le département des Pyrénées-Atlantiques et affectée dans les services de la cité scolaire de Saint-Jean-de Luz, a été placée, du 17 mars 2009 au 1er septembre 2010, en arrêt de travail en raison d'une pathologie du membre supérieur droit reconnue imputable au service. Elle a repris son service en mi-temps thérapeutique le 2 septembre 2010, puis à temps plein à compter du 29 mars 2013. Mme I... épouse A... a été à nouveau placée en arrêt maladie à compter du 14 octobre 2016. Une expertise médicale, conduite le 28 novembre 2016, a alors conclu à l'existence de deux affections distinctes, l'une du membre supérieur droit, l'autre du rachis cervical. Estimant, comme la commission de réforme, consultée les 16 février 2017 et 12 juillet 2018, que seule la première des deux pathologies, rechute de l'affection déclarée le 17 mars 2009, était imputable au service, le département des Pyrénées-Atlantiques a décidé, le 20 juillet 2018, de prendre en charge les arrêts de travail du 1er octobre 2017 au 9 septembre 2018 au titre de l'affection imputable au service, et a informé Mme I... épouse A... que les éventuels arrêts de travail postérieurs seraient qualifiés en congés de maladie ordinaire. Par courrier du 13 août 2018, Mme I... épouse A... a demandé au centre de gestion de la fonction publique territoriale des Pyrénées-Atlantiques, qui assure le secrétariat de la commission de réforme, de ressaisir cette instance. Le 16 mai 2019, le président du centre de gestion lui a opposé un refus s'agissant de la première pathologie, et l'a informée que l'imputabilité au service de la seconde pathologie serait examinée lors d'une séance de la commission du 23 mai 2019. Suivant ce nouvel avis, le président du conseil départemental, par décision du 27 juin 2019, a refusé de reconnaître imputable au service l'affection aux cervicales dont souffre Mme I... épouse A.... Celle-ci a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler le courrier du 16 mai 2019, ainsi que la décision du 27 juin 2019. Par un jugement n°1901647 en date du 18 mai 2021, le tribunal a rejeté la requête dirigée contre le courrier du 16 mai 2019 au motif que, ne revêtant qu'un caractère informatif, il n'était pas susceptible de recours. Par un jugement n°1901664, 1901665, du même jour, le tribunal a rejeté les conclusions dirigées contre la décision du 27 juin 2019. Par la présente requête, Mme I... épouse A... relève appel du " jugement du 4 mai 2021 " et demande à la Cour d'annuler la décision du 27 juin 2019.

2. Si Mme I... épouse A... a produit, au soutien de sa requête introductive d'instance d'appel, le seul jugement n°1901647, et critique le motif d'irrecevabilité retenu dans cette décision, elle vise en première page " le jugement (...) ayant refusé l'annulation de la décision du 27 juin 2019 prise par le département des Pyrénées-Atlantiques " et l'ensemble de son argumentation, y compris celle touchant à la recevabilité, concerne cette décision. Par suite, Mme I... épouse A... doit être regardée comme demandant à la Cour d'annuler le jugement n°1901664, 1901665.

Sur la légalité de la décision du 27 juin 2019 :

3. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) / 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales ".

4. Aux termes de l'article 3 de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière : " Le président de la commission de réforme est désigné par le préfet qui peut choisir soit un fonctionnaire placé sous son autorité, soit une personnalité qualifiée qu'il désigne en raison de ses compétences, soit un membre élu d'une assemblée délibérante dont le personnel relève de la compétence de la commission de réforme. (...) / Cette commission comprend : / 1. Deux praticiens de médecine générale, auxquels est adjoint, s'il y a lieu, pour l'examen des cas relevant de sa ompétence, un médecin spécialiste qui participe aux débats mais ne prend pas part aux votes ; / 2. Deux représentants de l'administration ; 3. Deux représentants du personnel. / Chaque titulaire a deux suppléants désignés dans les conditions prévues aux articles 5 et 6 ci-dessous ". Et aux termes de l'article 17 de cet arrêté : " La commission ne peut délibérer valablement que si au moins quatre de ses membres ayant voix délibérative assistent à la séance. / Deux praticiens, titulaires ou suppléants, doivent obligatoirement être présents. (...) ". Si Mme I... épouse A... soutient que la commission de réforme n'a pu régulièrement délibérer en l'absence des deux représentants du personnel, il ressort des pièces du dossier, notamment du procès-verbal de la commission de réforme du 23 mai 2019, que l'avis sur la base duquel a été prise la décision du 27 juin 2019 a été rendu par une commission composée de M. H... B..., représentant du personnel titulaire, et Mme E... C..., représentante du personnel suppléante. Dès lors, le moyen tiré du vice de procédure doit être écarté comme manquant en fait.

5. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service.

6. Il ressort des pièces du dossier, notamment des rapports d'expertise du docteur F..., en date des 28 novembre 2016, 3 octobre 2017 et 22 mai 2018, que Mme I... épouse A..., née le 18 novembre 1962, souffre depuis l'année 2008 d'une enthésopathie du sus-épineux couplée à une bursite sous-acromio-deltoïdienne à l'épaule droite, d'une géode sous-chondrale au niveau du coude droit, et d'une tendinite de De Quervain au niveau du poignet droit. Ces trois pathologies ont été reconnues imputables à l'activité professionnelle de l'agent, qui exerce ses fonctions à la lingerie du collège. Il ressort également de ces expertises que, depuis la même époque,

Mme I... épouse A... est sujette à des cervicalgies entraînant des irradiations dans le membre supérieur droit, objectivées par une radiographie cervicale réalisée en 2009 et une IRM du 14 janvier 2011 révélant de l'arthrose et une hernie discale C5-C6. Les douleurs sont réapparues et se sont intensifiées en 2016 du rachis cervical jusqu'à l'occiput, associées désormais à une dorsalgie droite. Si la requérante soutient que cette cervicalgie est en lien direct avec le service, et notamment les tâches nouvelles de nettoyage de l'atelier de couture de son établissement qui lui ont été imposées en 2016, ni les rapports du docteur F..., qui ne se prononcent pas sur l'origine de cette pathologie, ni le certificat du docteur D... du 1er mars 2018, invoqués par Mme I... épouse A..., n'affirment l'existence d'un tel lien. Au contraire, le rapport d'expertise du docteur J... du 5 février 2019, dont la commission de réforme a fait sienne les conclusions pour donner un avis défavorable à la demande de reconnaissance d'imputabilité, énonce qu'on ne peut établir de lien de causalité entre la cervicalgie chronique secondaire à une discarthrose C5-C6 associée à une irradiation névralgique dans le membre supérieur droit dont est atteinte l'intéressée et son activité professionnelle, même si la pathologie est gênante lors du travail de Mme I... épouse A.... Il s'ensuit que le département des Pyrénées-Atlantiques n'a pas commis d'erreur d'appréciation en refusant de reconnaître l'imputabilité au service de cette pathologie, et de prendre en charge les arrêts de travail et les soins en lien avec celle-ci au titre du 2ème alinéa du 2° de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984.

7. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les fins de non-recevoir opposées en défense, que Mme I... épouse A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Sur les frais de l'instance :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du département des Pyrénées-Atlantiques et du centre de gestion de la fonction publique territoriale des Pyrénées-Atlantiques, qui ne sont pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par Mme I... épouse A..., au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme I... épouse A... la somme demandée par le département des Pyrénées-Atlantiques et le centre de gestion de la fonction publique territoriale des

Pyrénées-Atlantiques, au même titre.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme I... épouse A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le centre de gestion de la fonction publique territoriale des Pyrénées-Atlantiques et le département des Pyrénées-Atlantiques sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme K... I... épouse A..., au département des Pyrénées-Atlantiques et au centre de gestion de la fonction publique territoriale des Pyrénées-Atlantiques.

Délibéré après l'audience du 9 octobre 2023, à laquelle siégeaient :

Mme Ghislaine Markarian, présidente,

M. Frédéric Faïck, président assesseur,

M. Julien Dufour, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 novembre 2023.

Le rapporteur,

Julien G...La présidente,

Ghislaine Markarian

La greffière,

Catherine Jussy

La République mande et ordonne au préfet des Pyrénées-Atlantiques en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21BX02892


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX02892
Date de la décision : 07/11/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MARKARIAN
Rapporteur ?: M. Julien DUFOUR
Rapporteur public ?: M. DUPLAN
Avocat(s) : ABL ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-11-07;21bx02892 ?
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