Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour.
Par un jugement n° 2302664 du 7 février 2024, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des pièces complémentaires enregistrées les 22, 27 février, 23 avril et 2 juillet 2024, M. B..., représenté par Me Cesso, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 7 février 2024 ;
2°) d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation dans un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision de refus de séjour en litige méconnait son droit au respect de sa vie privée et familiale, tel que garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L.423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnait l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle ;
- elle méconnait les stipulations du 1° de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Par un mémoire en défense, enregistré le 11 juillet 2024, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'il confirme l'ensemble des éléments de fait et de droit qui ont conduit le tribunal administratif à rendre le jugement en litige.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Béatrice Molina-Andréo aété entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C... B..., ressortissant marocain né le 15 août 1984, est entré en France le 29 septembre 2019 muni d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour. Par un courrier reçu en préfecture le 14 novembre 2022, il a sollicité son admission au séjour sur le fondement des dispositions des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le silence gardé par le préfet de la Gironde a fait naitre, le 14 mars 2023, une décision implicite de rejet. Par la présente requête, M. B... relève appel du jugement du 7 février 2024 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.
2. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. /2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ".
3. M. B... soutient qu'il est entré régulièrement en France le 29 septembre 2019, qu'il s'est marié le 24 juillet 2021 à Bègles (Gironde) avec une compatriote titulaire d'une carte de résident et que de leur union sont nés une première enfant le 22 août 2022 puis, postérieurement à la décision en litige, un second enfant, le 13 juin 2024. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que l'ancienneté du séjour en France de M. B..., qui n'a pas sollicité de titre de séjour avant la demande précitée du 14 novembre 2022, est essentiellement due à son maintien irrégulier sur le territoire français à l'expiration de son visa de court séjour. Alors que l'épouse du requérant a obtenu le 24 août 2022 le bénéfice du regroupement familial au profit de ce dernier, il ne ressort pas des pièces du dossier que le requérant ne pourrait pas s'éloigner temporairement dans son pays d'origine le temps pour lui de se voir délivrer le visa de long séjour requis par les dispositions de l'article R. 434-34 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En outre, en se bornant à produire une promesse d'embauche postérieure à la date de la décision attaquée à laquelle s'apprécie sa légalité, l'intéressé ne justifie d'aucune insertion professionnelle sur le territoire français. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier, et en particulier des quelques attestations produites, qu'il entretiendrait avec ses trois sœurs séjournant en France des liens d'une particulière intensité, pas davantage qu'il y aurait noué des liens sociaux stables. Dans ces conditions, et alors que M. B... n'est pas isolé dans son pays d'origine où résident toujours ses parents et quatre de ses frères et sœurs et où il a vécu jusqu'à l'âge de 35 ans, la décision attaquée portant refus de séjour n'a pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Dès lors, elle n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, cette décision n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation sur la situation personnelle de M. B....
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. (...) ".
5. Compte tenu de la situation de M. B... telle qu'elle a été exposée ci-dessus, celui-ci ne peut être regardé comme faisant état de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels justifiant la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation au regard de ces dispositions doit être écarté.
6. En troisième lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces dispositions que dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
7. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations citées au point précédent est inopérant à l'encontre d'une décision portant refus de séjour qui, par elle-même, n'implique pas le retour du requérant, ni celui de son épouse ou de leurs enfants, au A.... Dès lors, ce moyen ne peut qu'être écarté.
8. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.
Délibéré après l'audience du 10 octobre 2024 à laquelle siégeaient :
M. Luc Derepas, président,
Mme Evelyne Balzamo, présidente de chambre,
Mme Béatrice Molina-Andréo, présidente-assesseure.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 octobre 2024.
La rapporteure,
Béatrice Molina-Andréo
Le président,
Luc Derepas
La greffière,
Sylvie Hayet
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
2
N° 24BX00437