Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Le syndicat Confédération Française Démocratique du Travail (CFDT) Interco 33 a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision du 23 octobre 2020 par laquelle le vice-président en charge de l'administration générale et des ressources humaines de Bordeaux Métropole a rejeté sa réclamation préalable du 5 octobre 2020 relative au versement d'indemnités compensatrices de repas et de compensation financière forfaitaire pour les agents de Bordeaux Métropole en télétravail et de reconnaître le droit pour ces agents exerçant tout ou partie de leurs fonctions en télétravail de percevoir, d'une part, l'ensemble des indemnités compensatrices de repas correspondant aux jours où ils ont été en télétravail depuis le 11 juillet 2020, et d'autre part, la compensation financière forfaitaire de 60 euros pour participation aux frais divers liés au télétravail.
Par un jugement n° 2005870 du 5 mai 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés le 27 juin 2022, le 12 juillet 2023, le 8 mai 2024 et le 2 septembre 2024, le syndicat CFDT Interco 33, représenté par Me Baltazar, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 5 mai 2022 ;
2°) de reconnaître le droit des agents de Bordeaux Métropole exerçant tout ou partie de leurs fonctions en télétravail de percevoir, d'une part, l'ensemble des indemnités compensatrices de repas correspondant aux jours où ils ont été en télétravail depuis le 11 juillet 2020, et d'autre part, la compensation financière forfaitaire de 60 euros pour participation aux frais divers liés au télétravail ;
3°) de mettre à la charge de Bordeaux Métropole les entiers dépens de l'instance ainsi qu'une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- son action en reconnaissance de droits est recevable dès lors que le contentieux a été lié par une réclamation préalable présentée par le secrétaire général adjoint du syndicat dûment habilité ; au demeurant, le juge d'appel n'a pas à inviter le demandeur de première instance à régulariser sa situation ;
- son action en reconnaissance de droits est fondée dès lors que les délibérations du conseil de Bordeaux Métropole du 18 décembre 2015 et du 23 décembre 2016 prévoient que les télétravailleurs ont droit à une indemnité forfaitaire annuelle de 60 euros et à une indemnité compensatrice de repas de 3,30 euros par jour télétravaillé ;
- les textes en vigueur n'opèrent aucune distinction entre le télétravail et le travail à distance ;
- rien ne permet de distinguer la situation des agents de Bordeaux Métropole travaillant à distance à compter du 11 juillet 2020 de celle des agents placés en télétravail avant le 16 mars 2020 ;
- les notes établies par Bordeaux Métropole en mai et août 2020 ne précisent ni que la charte du télétravail est suspendue, ni que les agents en télétravail ne pourront donc plus bénéficier des indemnités compensatrices de repas ;
- contrairement à ce qu'a estimé le tribunal, les agents de Bordeaux Métropole en télétravail n'étaient nullement contraints de télétravailler mais ont donné leur accord en choisissant les jours télétravaillés via l'outil de gestion des temps mis à leur disposition ;
- la délibération n° 2015-824 du 18 décembre 2015 du conseil métropolitain relative au régime indemnitaire des agents à compter de janvier 2016 a vocation à s'appliquer aux agents travaillant à distance ; l'article 14 de la charte du télétravail annexée à la délibération du 23 décembre 2016 du conseil métropolitain prévoit le droit des agents en télétravail à une indemnité de repas ;
- la période concernée par la reconnaissance de droits prend fin le 30 juin 2022 compte tenu de la délibération du 25 mars 2022 fixant de nouvelles modalités d'indemnisation du télétravail.
Par des mémoires en défense enregistrés le 12 avril 2023, le 25 septembre 2023 et le 15 juin 2024, Bordeaux Métropole, représentée par le Cabinet Savigny, agissant par Me Dacquin, conclut, dans le dernier état de ses écritures, au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge du syndicat CFDT Interco 33 la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la demande de première instance était irrecevable en ce que la demande préalable n'a pu lier le contentieux parce qu'elle a été présentée par une section syndicale dépourvue de personnalité morale et non par le syndicat et qu'elle ne bénéficiait pas d'un mandat de représentation pour agir ainsi au nom du syndicat ; l'auteur de la demande préalable adressée à Bordeaux Métropole n'était pas habilité à représenter le syndicat ;
- l'absence d'invitation en première instance à régulariser ces causes d'irrecevabilité n'a pas pour effet de " purger l'irrecevabilité " mais impose au juge d'appel, qui la relève, le cas échéant d'office, d'inviter en cours de procédure d'appel le demandeur de première instance à régulariser sa situation, avant, le cas échéant, de rejeter la requête de première instance comme irrecevable ;
- sur le fond, aucun des moyens invoqués de la requête n'est fondé.
Par une ordonnance du 30 juin 2023, la clôture de l'instruction a été en dernier lieu fixée au 3 octobre 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général de la fonction publique ;
- le code du travail ;
- la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 ;
- la loi n° 2020-856 du 9 juillet 2020 ;
- le décret n° 2016-151 du 11 février 2016 ;
- le décret n° 2020-524 du 5 mai 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Caroline Gaillard,
- les conclusions de M. Anthony Duplan, rapporteur public,
- et les observations de Me Lagarde, représentant le syndicat CFDT Interco 33, et de Me Dacquin, représentant Bordeaux Métropole.
Une note en délibéré enregistrée le 28 octobre 2024 a été présentée pour Bordeaux Métropole.
Considérant ce qui suit :
1. Par un courrier du 5 octobre 2020, le syndicat CFDT Interco 33 a saisi le président de Bordeaux Métropole d'une demande tendant à ce que les agents de la Métropole bénéficient, d'une part, de l'ensemble des indemnités compensatrices de repas correspondant aux jours télétravaillés à compter du 11 juillet 2020, et d'autre part, de la compensation financière forfaitaire annuelle de 60 euros pour participation aux frais divers liés au télétravail. Par une décision du 23 octobre 2020, le vice-président en charge de l'administration générale et des ressources humaines de Bordeaux Métropole a rejeté sa demande. Le syndicat CFDT Interco 33 a alors demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler cette décision du 23 octobre 2020 et, sur le fondement des articles
L. 77-12-1 et suivants du code de justice administrative, de reconnaître aux agents de Bordeaux Métropole le droit de percevoir l'ensemble des indemnités compensatrices et la compensation financière sollicités. Il doit être regardé comme relevant appel de ce jugement en tant qu'il n'a pas reconnu un tel droit aux agents de Bordeaux Métropole, et réitère devant la cour son action en reconnaissance de droits pour la période du 11 juillet 2020 au
30 juin 2022.
Sur l'action en reconnaissance de droits :
En ce qui concerne le cadre juridique de l'action :
2. Aux termes de l'article L. 77-12-1 du code de justice administrative : " L'action en reconnaissance de droits permet à une association régulièrement déclarée ou à un syndicat professionnel régulièrement constitué de déposer une requête tendant à la reconnaissance de droits individuels résultant de l'application de la loi ou du règlement en faveur d'un groupe indéterminé de personnes ayant le même intérêt, à la condition que leur objet statutaire comporte la défense dudit intérêt. Elle peut tendre au bénéfice d'une somme d'argent légalement due ou à la décharge d'une somme d'argent illégalement réclamée. Elle ne peut tendre à la reconnaissance d'un préjudice (...) ".
En ce qui concerne la recevabilité de l'action :
3. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée ". Aux termes de l'article R. 77-12-1 du même code : " L'action en reconnaissance de droits est formée, instruite et jugée selon les règles prévues par le présent code sous réserve des dispositions du présent chapitre ". Aux termes de l'article R. 77-12-4 de ce code : " Pour l'application de l'article R. 421-1, la décision attaquée est la décision de rejet explicite ou implicite opposée par l'autorité compétente à la réclamation préalable formée par le demandeur à l'action ".
4. Il ressort des pièces du dossier que M. B... A..., auteur de la réclamation préalable adressée le 5 octobre 2020 au président de Bordeaux Métropole, l'a signée en qualité de secrétaire de la " section CFDT Interco Bordeaux Métropole ". Bordeaux Métropole soutient que, faute de liaison du contentieux par une personne ayant qualité pour représenter le syndicat CFDT Interco 33, la demande de première instance était irrecevable. Toutefois, d'une part, il est constant que M. A... exerce la fonction de secrétaire général adjoint du syndicat CFDT Interco 33 et qu'il dispose, en cette qualité, d'une délégation de signature du secrétaire général de ce syndicat du 21 juin 2018 lui permettant d'agir au nom dudit syndicat dont le logo et la mention sont d'ailleurs portés en tête du courrier du
5 octobre 2020. D'autre part, et en tout état de cause, la réclamation préalable formée le 5 octobre 2020 a été implicitement régularisée par le syndicat CFDT Interco 33 lorsqu'il a saisi, le 18 décembre 2020, le tribunal administratif de Bordeaux de son action en reconnaissance de droits. Par suite, la fin de non-recevoir tirée de l'absence de liaison régulière du contentieux doit être écartée.
En ce qui concerne l'existence de droits :
S'agissant du droit des agents de Bordeaux Métropole de bénéficier de l'indemnité forfaitaire de participation aux frais liés au télétravail :
5. D'une part, aux termes de l'article L. 1222-9 du code du travail : " I.- Sans préjudice de l'application, s'il y a lieu, des dispositions du présent code protégeant les travailleurs à domicile, le télétravail désigne toute forme d'organisation du travail dans laquelle un travail qui aurait également pu être exécuté dans les locaux de l'employeur est effectué par un salarié hors de ces locaux de façon volontaire en utilisant les technologies de l'information et de la communication. / Est qualifié de télétravailleur au sens de la présente section tout salarié de l'entreprise qui effectue, soit dès l'embauche, soit ultérieurement, du télétravail tel que défini au premier alinéa du présent I. / Le télétravail est mis en place dans le cadre d'un accord collectif ou, à défaut, dans le cadre d'une charte élaborée par l'employeur après avis du comité social et économique, s'il existe. ". Aux termes de l'article 133 de la loi du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique, désormais repris à l'article L. 430-1 du code général de la fonction publique : " Les fonctionnaires relevant de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires peuvent exercer leurs fonctions dans le cadre du télétravail tel qu'il est défini au premier alinéa de l'article L. 1222-9 du code du travail. L'exercice des fonctions en télétravail est accordé à la demande du fonctionnaire et après accord du chef de service. Il peut y être mis fin à tout moment, sous réserve d'un délai de prévenance. Les fonctionnaires télétravailleurs bénéficient des droits prévus par la législation et la réglementation applicables aux agents exerçant leurs fonctions dans les locaux de leur employeur public. / Le présent article est applicable aux agents publics non fonctionnaires et aux magistrats. / Un décret en Conseil d'Etat fixe, après concertation avec les organisations syndicales représentatives de la fonction publique, les conditions d'application du présent article, notamment en ce qui concerne les modalités d'organisation du télétravail et les conditions dans lesquelles la commission administrative paritaire compétente peut être saisie par le fonctionnaire intéressé en cas de refus opposé à sa demande de télétravail ainsi que les possibilités de recours ponctuel au télétravail ".
6. Aux termes de l'article 2 du décret du 11 février 2016 relatif aux conditions et modalités de mise en œuvre du télétravail dans la fonction publique et la magistrature, dans sa rédaction résultant du décret du 5 mai 2020 le modifiant : " Le télétravail désigne toute forme d'organisation du travail dans laquelle les fonctions qui auraient pu être exercées par un agent dans les locaux où il est affecté sont réalisées hors de ces locaux en utilisant les technologies de l'information et de la communication. / Le télétravail peut être organisé au domicile de l'agent, dans un autre lieu privé ou dans tout lieu à usage professionnel. / Un agent peut bénéficier au titre d'une même autorisation de ces différentes possibilités. ". Aux termes de l'article 5 de ce décret : " L'exercice des fonctions en télétravail est accordé sur demande écrite de l'agent. Celle-ci précise les modalités d'organisation souhaitées. Lorsque le télétravail est organisé au domicile de l'agent ou dans un autre lieu privé, une attestation de conformité des installations aux spécifications techniques, établie conformément aux dispositions prises en application du 9° du I de l'article 7, est jointe à la demande. ". Aux termes de l'article 6 du même décret : " Les agents exerçant leurs fonctions en télétravail bénéficient des mêmes droits et obligations que les agents exerçant sur leur lieu d'affectation. / L'employeur prend en charge les coûts découlant directement de l'exercice des fonctions en télétravail, notamment le coût des matériels, logiciels, abonnements, communications et outils ainsi que de la maintenance de ceux-ci. L'employeur n'est pas tenu de prendre en charge le coût de la location d'un espace destiné au télétravail ". Selon l'article 7 dudit décret : " I. - Un arrêté ministériel pour la fonction publique de l'Etat, une délibération de l'organe délibérant pour la fonction publique territoriale, une décision de l'autorité investie du pouvoir de nomination pour la fonction publique hospitalière, pris après avis du comité technique ou du comité consultatif national compétent, fixe : (...) 7° Les modalités de prise en charge, par l'employeur, des coûts découlant directement de l'exercice du télétravail, notamment ceux des matériels, logiciels, abonnements, communications et outils ainsi que de la maintenance de ceux-ci ".
7. D'autre part, aux termes de la délibération n° 2016-766 du conseil de Bordeaux Métropole du 16 décembre 2016 relative à la modification de l'encadrement du dispositif de télétravail à Bordeaux Métropole, reprise par la délibération n° 2018-146 du 23 mars 2018 " Télétravail - Modification de l'encadrement du dispositif à Bordeaux Métropole - Décision - Autorisation " elle-même modifiée par la délibération n° 2019-137 du 22 mars 2019 " Télétravail-Réajustement du nombre de jours ouverts au télétravail-Décision-Autorisation " s'agissant du volume de jours maximum autorisé en télétravail : " I. Définition du télétravail : Le télétravail repose sur l'exercice d'une activité professionnelle à distance de sa hiérarchie, rendu possible par l'usage des technologies de l'information et de la communication.(...) II - Cadre juridique du télétravail : L'article 133 de la loi du 12 mars 2012 autorise le télétravail dans la fonction publique sous certaines conditions : - double volontariat de l'agent et de son encadrant (...). E - Budget annuel prévisionnel : Un budget annuel doit être prévu tenant compte de : - la compensation financière de 60 euros/an pour les télétravailleurs à domicile (...) ".
8. Dans le cadre de l'organisation du télétravail instituée par Bordeaux Métropole, issue de la délibération du 16 décembre 2016 reprise par la délibération du 23 mars 2018 modifiée par la délibération du 22 mars 2019, citées au point précédent, en vigueur durant la période du 11 juillet 2020 au 30 juin 2022, une compensation financière de 60 euros par an est prévue pour les télétravailleurs à domicile.
9. Si le tribunal administratif de Bordeaux a admis que l'organisation du télétravail mise en place par Bordeaux Métropole durant la période en cause pouvait être assimilée au télétravail au sens de l'article 2 du décret du 11 février 2016 dès lors qu'elle permettait aux agents métropolitains d'exercer leurs fonctions hors de leurs locaux d'affectation en utilisant les technologies de l'information et de la communication, il a toutefois estimé que, faute de respect de la condition du " double volontariat des agents concernés et de leur employeur " résultant de l'article 5 du décret du 11 février 2016, la situation de télétravail des agents de Bordeaux Métropole, contraints de travailler depuis leur domicile plusieurs jours par semaine à compter du 11 juillet 2020, n'était pas caractérisée. Le tribunal en a déduit que lesdits agents n'avaient pas droit à la compensation financière de 60 euros prévue pour les télétravailleurs à domicile.
10. Il résulte des dispositions citées aux points 5 et 6 que le télétravail constitue une forme d'organisation du travail qui nécessite l'accord de l'agent et de l'employeur. Si Bordeaux Métropole soutient que la mise en place d'un " travail à distance " au sein de la métropole bordelaise durant le premier confinement, maintenu sur la période concernée par l'action en reconnaissance de droits, constitue un régime distinct de celui du télétravail en ce qu'il avait pour finalité d'assurer la sécurité sanitaire des personnes en limitant la propagation de la covid-19 et ne laissait pas les agents libres d'organiser les modalités de leur travail, il ne ressort pas des notes de service produites en appel par Bordeaux Métropole que cette dernière ait entendu contraindre ses agents à travailler à leur domicile plusieurs jours par semaine à compter du 11 juillet 2020 en raison des conditions sanitaires. Ainsi, la note du directeur général des services du 28 août 2020 portant sur les " principes d'organisation du travail entre le 31 août 2020 et le 1er janvier 2021 " prévoit que " l'organisation du travail de chaque agent pourra comprendre, à compter du 31 août 2020, 2 à 3 jours par semaine de travail à distance permettant d'alterner le présentiel et le travail à distance pour chacun et chacune ". Il ressort à cet égard des pièces du dossier que, dès le 2 juin 2020, les agents métropolitains éligibles ont télétravaillé en moyenne deux ou trois jours par semaine selon un planning de télétravail défini par un logiciel leur permettant de poser les jours de " travail à distance " de leur choix, la note de service précitée précisant seulement, comme d'ailleurs sur ce point la note de service précédente du 29 mai 2020 ayant pour objet les " principes d'organisation de reprise d'activité du 2 juin au 28 août 2020 ", que le travail par rotation devait être " privilégié ".
11. Dès lors que la compensation financière de 60 euros par an pour les télétravailleurs à domicile présente le caractère d'un forfait annuel et qu'il résulte de ce qui a été exposé au point précédent qu'au moins à compter du 31 août 2020, les agents de Bordeaux Métropole qui ont exercé tout ou partie de leurs fonctions à distance relevaient du régime légal et règlementaire du télétravail, ils étaient en droit de bénéficier de cette indemnité forfaitaire de participation aux frais liés au télétravail au titre des années 2020, 2021 et 2022, incluant la période litigieuse du 11 juillet 2020 au 30 juin 2022. Par suite, le syndicat CFDT Interco 33 est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la reconnaissance de ce droit.
S'agissant du droit des agents de Bordeaux Métropole de bénéficier de l'indemnité compensatrice de repas pour les jours télétravaillés :
12. Aux termes de la délibération n° 2015-824 du conseil de Bordeaux Métropole du 18 décembre 2015 relative au régime indemnitaire des agents métropolitains à compter de janvier 2016, les agents métropolitains, à l'exception de ceux ayant opté pour la conservation du régime indemnitaire et des avantages acquis de leur collectivité d'origine peuvent prétendre à " une indemnité compensatrice de repas d'un montant de 3,30 euros par repas (...) donnée aux agents qui ne bénéficient pas de possibilités de restauration sur place ou qui ne peuvent pas avoir accès à l'offre de restauration proposée par la métropole et dont le cycle de travail se termine au plus tôt à 14 heures. ". Selon l'article 14 de la charte sur le télétravail : " Le télétravailleur (...) peut prétendre au versement de l'indemnité de panier pour les jours télétravaillés. (...) " conformément à la délibération adoptée par le conseil de Bordeaux Métropole le 18 décembre 2015 relative au régime indemnitaire des agents métropolitains à compter de janvier 2016.
13. Pour refuser aux agents de Bordeaux Métropole le droit de bénéficier de l'indemnité compensatrice de repas d'un montant de 3,30 euros par repas, le tribunal administratif de Bordeaux a estimé que la délibération du 18 décembre 2015 publiée le
23 décembre suivant n'avait pas vocation à s'appliquer aux agents qui exercent leurs fonctions depuis leur domicile dès lors qu'ils bénéficient de la possibilité de se restaurer chez eux.
14. Or, en l'état des dispositions de l'article 6 du décret du 11 février 2016 modifié, citées au point 6, lorsqu'une administration décide d'attribuer une indemnité compensatrice de repas à ses agents dans les conditions prévues au point 12, les agents exerçant leurs fonctions en télétravail bénéficient du même droit à l'attribution de cette indemnité que s'ils exerçaient leurs fonctions sur leur lieu d'affectation.
15. Il résulte de ce qui précède que les agents de Bordeaux Métropole susceptibles de bénéficier, au regard des critères prévus par la délibération du 18 décembre 2015, de l'indemnité compensatrice de repas dans le cadre de leurs fonctions sur leur lieu d'affectation ont le droit de bénéficier de cette indemnité lorsqu'ils ont exercé leurs fonctions en télétravail.
16. Par suite, le syndicat CFDT Interco 33 est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à la reconnaissance du droit pour les agents de Bordeaux Métropole en télétravail susceptibles de de bénéficier, au regard des critères prévus par la délibération du 18 décembre 2015, de l'indemnité compensatrice de repas dans le cadre de leurs fonctions sur leur lieu d'affectation, de bénéficier de l'indemnité compensatrice de repas, d'un montant de 3,30 euros par repas, pour les jours télétravaillés durant la période du 11 juillet 2020 au 30 juin 2022.
Sur les frais liés à l'instance :
17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du syndicat CFDT Interco 33 qui n'est pas, en l'espèce, la partie perdante, les frais que Bordeaux Métropole a exposés au titre des frais liés à l'instance. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de Bordeaux Métropole une somme de 1 500 euros à verser au syndicat CFDT Interco 33 au titre de ces frais. En l'absence de dépens, les conclusions du syndicat CFDT Interco 33 tendant à leur versement ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux n° 2005870 du 5 mai 2022 est annulé.
Article 2 : Le droit de bénéficier de l'indemnité forfaitaire de participation aux frais liés au télétravail est reconnu aux agents de Bordeaux Métropole dans les conditions mentionnées au point 11 de la présente décision.
Article 3 : Le droit de bénéficier de l'indemnité compensatrice de repas pour les jours télétravaillés est reconnu aux agents de Bordeaux Métropole dans les conditions mentionnées aux points 15 et 16 de la présente décision.
Article 4 : Bordeaux Métropole versera une somme de 1 500 euros au syndicat CFDT Interco 33 sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions présentées par le syndicat CFDT Interco 33 et par Bordeaux Métropole est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié au syndicat CFDT Interco 33 et à Bordeaux Métropole.
Délibéré après l'audience du 17 octobre 2024 à laquelle siégeaient :
Mme Karine Butéri, présidente,
M. Stéphane Guéguein, président-assesseur,
Mme Caroline Gaillard, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 13 novembre 2024.
La rapporteure,
Caroline Gaillard
La présidente,
Karine Butéri
La greffière,
Laurence Mindine
La République mande et ordonne au préfet de la Gironde en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22BX01729