Vu la procédure suivante :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 15 avril 2022, 14 septembre 2023 et 31 octobre 2023, M. A... C... et Mme D... B..., épouse C..., représentés par Me Martin, demandent à la cour :
1°) d'annuler l'arrêté n° 2021/135 du 15 décembre 2021 par lequel la préfète de la Haute-Vienne a autorisé la SARL SEPE Landes des Verrines à exploiter cinq éoliennes et un poste de livraison sur le territoire des communes de Châteauponsac et Saint-Sornin-Leulac ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- ils justifient d'un intérêt à agir à l'encontre de l'arrêté contesté ;
- l'étude d'impact présente des insuffisances s'agissant de l'étude avifaunistique et chiroptérologique, de l'étude acoustique, de l'étude des milieux naturels impactés et au regard des mesures d'évitement, de réduction et de compensation proposées en considération d'une sous-évaluation des impacts sur l'environnement ;
- l'autorisation contestée est irrégulière en ce qu'elle n'a pas été précédée d'une étude d'évaluation des incidences Natura 2000 ;
- l'autorisation contestée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 211-1 du code de l'environnement dès lors que le projet autorisé, qui n'a au demeurant pas pris en compte la modification législative intervenue sur la définition des zones humides, présente un risque d'atteinte à la préservation de ces zones ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de la loi sur l'eau ;
- elle est incompatible avec l'article 8B du schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) Loire-Bretagne ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme du point de vue des nuisances sonores ;
- elle méconnaît l'article L. 411-2 du code de l'environnement, incompatible avec les articles 12 et 16 de la directive 92/43/CEE du 21 mai 1992, dès lors qu'aucune dérogation à l'interdiction de porter atteinte aux espèces protégées n'a été sollicitée ;
- elle méconnaît les articles L. 181-3 et L. 511-1 du code de l'environnement dès lors que le projet autorisé porte une atteinte excessive aux chiroptères, à la santé et à la salubrité publiques ainsi qu'à la commodité du voisinage ;
- elle est entachée d'une erreur de droit au regard de l'article L. 211-1 du code de l'environnement.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 27 septembre 2022, 9 octobre 2023 et 20 novembre 2023, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la société à responsabilité limitée (SARL) SEPE Landes des Verrines, représentée par Me Brault, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de M. et Mme C... le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- les requérants ne justifient pas d'un intérêt à agir contre l'arrêté préfectoral contesté ;
- aucun des moyens invoqués par les requérants n'est fondé.
Par un mémoire en défense, enregistré le 31 octobre 2023, le préfet de la Haute-Vienne conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- les requérants ne justifient pas d'un intérêt à agir contre l'arrêté préfectoral contesté ;
- aucun des moyens invoqués par les requérants n'est fondé.
Par une ordonnance du 2 novembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 24 novembre 2023 à 12h00.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la directive 92/43/CEE du Conseil, du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages ;
- le code de l'environnement ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Lucie Cazcarra,
- les conclusions de Mme Pauline Reynaud, rapporteure publique,
- les observations de Me Martin, représentant M. et Mme C...,
- et les observations de Me Williot représentant la SARL SEPE Landes des Verrines.
Considérant ce qui suit :
1. La société à responsabilité limitée (SARL) SEPE Landes des Verrines a présenté, le 6 novembre 2018, une demande en vue d'obtenir l'autorisation d'installer et d'exploiter un parc éolien composé de cinq éoliennes et d'un poste de livraison, sur le territoire des communes de Châteauponsac et de Saint-Sornin-Leulac (Haute-Vienne). Par un arrêté du 15 décembre 2021, la préfète de la Haute-Vienne a délivré à la SARL SEPE Landes des Verrines l'autorisation environnementale sollicitée. M. et Mme C... demandent l'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne le caractère complet de l'étude d'impact :
2. Aux termes du I de l'article R. 122-5 du code de l'environnement dans sa version applicable au litige, qui définit le contenu de l'étude d'impact, celui-ci " doit être proportionné à la sensibilité environnementale de la zone susceptible d'être affectée par le projet, à l'importance et la nature des travaux, installations, ouvrages, ou autres interventions dans le milieu naturel ou le paysage projetés et à leurs incidences prévisibles sur l'environnement ou la santé humaine ". Les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.
3. Le site d'implantation du parc éolien projeté sur les communes de Saint-Sornin-Leulac et Châteauponsac, dans le département de la Haute-Vienne à proximité de la limite départementale avec la Creuse, se situe à proximité du site Natura 2000 Vallée de la Gartempe et de l'église de Saint-Sornin-Leulac, ainsi que d'un autre site Natura 2000 mines de Chabannes et aux souterrains des Monts d'Ambazac, toutefois plus éloigné. Il résulte également du rapport de l'inspection des installations classées et de l'avis de la mission régionale d'autorité environnementale (MRAe) que l'analyse de l'état initial de l'environnement fait ressortir plusieurs enjeux environnementaux au niveau du site d'implantation portant notamment sur les habitats naturels, la faune et la flore et plus particulièrement sur les chiroptères, au regard de la présence de lisières boisées à proximité immédiate des éoliennes. Au regard de la sensibilité environnementale de la zone susceptible d'être affectée par le projet, M. et Mme C... invoquent plusieurs insuffisances de l'étude d'impact du projet.
S'agissant du choix du site :
4. Les requérants invoquent le caractère insuffisant des justifications contenues dans l'étude d'impact sur le choix du site. Il ressort toutefois des pages 237 et suivantes de l'étude d'impact du projet que la société pétitionnaire a clairement exposé les motifs ayant présidé à la localisation du site, tels que le schéma régional éolien ou la présence d'habitations ou de servitudes techniques et environnementales impliquant d'en éloigner le projet. Dès lors, en se bornant à soutenir que la justification du choix de l'emplacement " est particulièrement légère ", les requérants ne justifient pas d'une insuffisance de l'étude d'impact sur ce point.
S'agissant de l'étude avifaunistique et chiroptérologique :
5. Les requérants contestent l'analyse du fonctionnement écologique du site d'implantation telle qu'elle ressort de l'étude d'impact, conformément à ce que prévoit le 3° de l'article R. 122-5 du code de l'environnement. Il ressort toutefois de l'étude d'impact que la société pétitionnaire a clairement présenté l'aire d'étude, au regard notamment du contexte hydrographique, des zones de protection, ou encore des habitats naturels et a identifié les impacts de la construction des éoliennes sur l'avifaune et sur les chiroptères. S'agissant plus particulièrement de l'expertise chiroptérologique, les requérants font valoir qu'elle ne précise pas le fondement scientifique des faibles distances séparant les éoliennes des lisières ou des haies. S'il résulte de l'expertise chiroptérologique que les mâts des éoliennes CP-01, CP-02, CP-03, CP-04, CP-05 doivent respectivement être implantés à 50 m, 52 m, 73 m, 40 m et 18 m des lisières les plus proches, l'expertise précise que les implantations proposées, bien que situées à moins de 200 m des lisières, se situent dans des zones à enjeux faibles à modérés pour les chiroptères. Les requérants soutiennent également que les impacts du projet sur les chiroptères ont été sous-estimés dès lors qu'ils reposent principalement sur un suivi de l'activité en hauteur dont les données sont interprétées par un logiciel d'identification des signaux acoustiques rendant peu fiables les résultats. Toutefois, aucun élément ne permet d'estimer que le suivi aurait modifié le recensement des espèces présentes et, par suite, l'appréhension de l'impact du projet sur les chiroptères. Dans le même sens, en se bornant à indiquer que " les enregistrements automatiques ne permettent pas d'avoir une connaissance précise des chiroptères présents sur le site d'implantation ", les requérants ne justifient pas du caractère imprécis et incomplet de l'étude d'impact. Enfin, et plus largement, la référence des requérants à des publications portant sur le comportement des chiroptères face aux éoliennes ne permet pas de caractériser des insuffisances affectant l'étude d'impact du projet contesté.
6. Les requérants font par ailleurs état de trois insuffisances affectant l'étude d'impact. La première porte sur l'absence d'information sur le fonctionnement de la Vallée de la Gartempe et de l'église de Saint-Sornin-Leulac, notamment au regard des axes principaux de déplacement des chiroptères, et sur l'existence d'une contradiction entre l'étude d'impact et l'étude chiroptérologique qui font état d'un risque de mortalité direct moyen pour le Grand murin tout en relevant l'existence d'une importante colonie à proximité immédiate de la zone d'implantation. Il résulte toutefois de l'instruction qu'en réponse à l'avis de la MRAe, la société pétitionnaire a ajouté une analyse du fonctionnement des sites de la Vallée de la Gartempe et de l'église de Saint-Sornin-Leulac au point 2.6.4, pages 328 et 329 de l'étude d'impact. Aux termes de cette analyse, il est notamment relevé l'absence de corridor principal susceptible de guider et de concentrer les chiroptères sur une route de vol particulière de l'église à la vallée de la Gartempe (axe nord-sud). Quant à la contradiction invoquée par les requérants, elle n'est pas davantage établie. S'il résulte de l'instruction qu'il existe une importante colonie à proximité immédiate de la zone d'implantation, il ressort de l'étude chiroptérologique que la sensibilité potentielle du Grand murin à la mortalité directe sur les parcs éoliens est très faible. Eu égard au niveau d'enjeu et de sensibilité du Grand murin, le niveau de risque de mortalité directe de cette espèce a été évalué à " moyen ", tant en page 329 de l'étude d'impact que dans le tableau 15 de l'étude chiroptérologique. Une deuxième insuffisance de l'étude d'impact relevée par les requérants tient à l'absence d'évaluation des incidences du projet sur le site Natura 2000 que constituent les mines de Chabannes et les souterrains des Monts d'Ambazac situé à 15 km. Toutefois, là encore, il ressort du point 2.6.4 de l'étude d'impact que la société pétitionnaire a justifié de l'absence d'incidence significative sur l'équilibre des populations cibles des zones spéciales de conservation (ZSC) situées dans un rayon de 20 km autour du projet qui comprend les mines de Chabannes et les souterrains des Monts d'Ambazac, situés à 17 km du projet. La dernière insuffisance invoquée tient à l'absence d'analyse de l'impact du parc éolien sur la colonie de Pipistrelle. Néanmoins, contrairement à ce que soutiennent les requérants, l'impact du projet sur les Pipistrelles a bien été analysé, tant au stade de l'état initial du site qu'à celui de la mise en œuvre du projet.
S'agissant de l'étude acoustique :
7. Les requérants soutiennent que l'autorité décisionnaire n'a pas pu apprécier en toute connaissance de cause l'impact acoustique du projet contesté compte tenu de l'absence de point de mesure couvrant l'ensemble des hameaux situés à proximité du parc éolien projeté et du fait de l'extrapolation des données opérées pour certains points de mesures.
8. D'une part, il résulte de l'instruction que l'étude acoustique réalisée le 7 novembre 2019 a pris en compte huit points de mesures situés au niveau de huit habitations encerclant le projet, en présence de vents de secteurs sud-ouest et nord-est. Il n'est nullement établi que les points de mesures seraient insuffisants et non représentatifs de la situation d'ensemble dès lors que les points de relevés ont bien été répartis de manière à prendre en compte les habitations situées tout autour du projet.
9. D'autre part, si les requérants contestent l'extrapolation opérée par la société pétitionnaire pour les points de mesures 17, 18 et 19 à partir des mesures réalisées aux points 4 et 5, il résulte de l'étude d'impact que ces points de mesures présentent les mêmes caractéristiques en raison de leur proximité de la zone d'implantation, de la topographie, de leur proximité avec un axe routier de même classe sonore et du fait qu'ils sont soumis aux mêmes directions des vents par rapport au projet. Quant à l'extrapolation opérée pour le point de mesure 10 à partir des résultats relevés par le point 11, elle ne peut davantage être contestée dès lors qu'il ressort de l'étude acoustique que la situation du point 11 est équivalente à celle du point 10, eu égard notamment à la distance séparant ces points de mesures de la route et de la végétation environnante. En outre, et en tout état de cause, il ne résulte pas de l'instruction que, compte tenu de la durée des mesures et de l'implantation des points de mesures, les résultats obtenus auraient pu nuire à l'information de la population ou exercer une influence sur l'appréciation de l'administration. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'incomplétude et de l'inexactitude du volet acoustique de l'étude d'impact doit être écarté.
S'agissant de l'analyse des effets du projet sur les zones humides :
10. Sur ce volet, les requérants font valoir que l'étude d'impact est insuffisante dès lors que l'appréciation des zones humides a été conduite selon les règles applicables à la date de la demande, soit avant la réforme de 2019.
11. D'une part, dans sa version en vigueur jusqu'au 27 juillet 2019, l'article L. 211-1 du code de l'environnement prévoyait : " 1° (...) on entend par zone humide les terrains, exploités ou non, habituellement inondés ou gorgés d'eau douce, salée ou saumâtre de façon permanente ou temporaire ; la végétation, quand elle existe, y est dominée par des plantes hygrophiles pendant au moins une partie de l'année ". Depuis l'entrée en vigueur de la loi du 24 juillet 2019 portant création de l'office français de la biodiversité, modifiant les missions des fédérations de chasseurs et renforçant la police de l'environnement, ce même article prévoit : " 1° (...) on entend par zone humide, les terrains exploités ou non, habituellement inondés ou gorgés d'eau douce, salée ou saumâtre de façon permanente ou temporaire, ou dont la végétation, quand elle existe, y est dominée par des plantes hygrophiles pendant au moins une partie de l'année ". La loi du 24 juillet 2019 a donc modifié la définition de la notion de " zone humide " pour prévoir que les deux critères qu'elle comporte sont alternatifs et pas cumulatifs.
12. D'autre part, il appartient au juge des installations classées pour la protection de l'environnement d'apprécier le respect des règles relatives à la forme et la procédure régissant la demande d'autorisation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date de délivrance de l'autorisation, et d'appliquer les règles de fond applicables au projet en cause en vigueur à la date à laquelle il se prononce.
13. Dans le cas présent, il est constant que la société pétitionnaire a déterminé les zones humides présentes sur la zone d'implantation du projet en application de l'article L. 211-1 du code de l'environnement, dans sa version antérieure à la loi du 24 juillet 2019. En réponse à l'avis de la MRAe, elle a clairement indiqué en ce sens que les " zones humides n'ont pas été caractérisées en application des nouvelles dispositions de l'article L. 211-1 du code de l'environnement, modifié par la loi du 24 juillet 2019 renforçant la police de l'environnement. Les études sur les zones humides ont été faites selon les lois applicables à la date de la demande (2018) ". Toutefois, en se bornant à reprocher à la société pétitionnaire de ne pas avoir pris en compte la nouvelle définition de la notion de " zone humide " sans démontrer ni même soutenir que certaines zones, clairement identifiées, auraient dû figurer dans les zones humides, selon la nouvelle acception, les requérants n'établissent pas le caractère insuffisant de l'étude d'impact sur ce point. En outre, et contrairement à ce que soutiennent les requérants, la surface des zones humides concernée par le projet, qui est évaluée à 130 m² par la société porteuse du projet et qui est cartographiée en page 99 de l'étude d'impact, n'apparait pas sous-estimée par rapport aux données fournies sur le site du réseau partenarial des données sur les zones humides effectives auquel renvoient les requérants et librement accessible sur internet. Ainsi, il ne résulte pas de l'instruction que cette insuffisance de l'étude d'impact a pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population, ou a été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.
S'agissant des mesures d'évitement, de réduction et de compensation :
14. Tout d'abord, et contrairement à ce que soutiennent les requérants, le projet retenu par la société pétitionnaire, correspondant à la variante D3, a été guidé par la volonté d'implanter les éoliennes dans des secteurs présentant des enjeux faibles à modérés pour les chiroptères. Ainsi, les infrastructures projetées, quoiqu'à faible distance des lisières les plus proches, sont plus éloignées des boisements les plus favorables aux chiroptères tels que les chênaies. Par ailleurs, les mesures de suppression, de réduction et d'accompagnement, telles qu'elles ressortent du tableau récapitulatif figurant en page 466 de l'étude d'impact, permettent de parvenir à un niveau d'impact résiduel " négligeable " pour l'avifaune et " négligeable à faible " pour les chiroptères.
15. Ensuite, les requérants n'établissent pas que la surface des zones humides, évaluée à 130 m² sur le site d'implantation, aurait été volontairement sous-estimée par la société pétitionnaire en ne se conformant pas aux nouvelles dispositions de l'article L. 211-1 du code de l'environnement. Dans ces conditions, les requérants ne peuvent valablement remettre en cause la compensation prévue pour la destruction des zones humides qui, ainsi que l'ont relevé l'inspection des installations classées et la MRAe, dans leurs rapports respectifs, consiste en la restauration et la gestion de 390 m² de zones humides.
16. Enfin, si les requérants font état de la présence d'une colonie de parturition de Pipistrelle au lieudit Le Puychaumet qu'aurait omis de prendre en compte la société pétitionnaire dans le cadre des mesures d'évitement, de réduction et de compensation, ils n'en justifient pas. Dans ces conditions, les mesures d'évitement, de réduction et de compensation proposées par la société pétitionnaire ne peuvent être considérées comme étant fondées sur des informations erronées ou incomplètes.
17. Il résulte par conséquent de tout ce qui précède que le moyen tiré de l'insuffisance de l'étude d'impact doit être écarté en toutes ses branches.
En ce qui concerne l'absence d'évaluation des incidences Natura 2000 :
18. Aux termes du I de l'article L. 414-4 du code de l'environnement : " Lorsqu'ils sont susceptibles d'affecter de manière significative un site Natura 2000, individuellement ou en raison de leurs effets cumulés, doivent faire l'objet d'une évaluation de leurs incidences au regard des objectifs de conservation du site, dénommée ci-après "Evaluation des incidences Natura 2000" : / (...) 2° Les programmes ou projets d'activités, de travaux, d'aménagements, d'ouvrages ou d'installations ; / (...) ".
19. L'aire d'étude immédiate du projet ne comporte aucun site Natura 2000 en son sein. Néanmoins, plusieurs sites Natura 2000 se situent dans ses environs, notamment une zone spéciale de conservation (ZSC) composée de la vallée de la Gartempe et d'un site à chiroptères de l'église de Saint-Sornin-Leulac, située à 450 mètres au nord de l'aire d'étude immédiate, ainsi que la ZSC composée des Mines de Chabannes et des souterrains des Monts d'Ambazac, située à 17 km de l'aire immédiate du projet.
20. D'une part, et conformément à ce que prévoient les dispositions précitées, la société exposante a évalué les incidences du projet sur les sites Natura 2000 ainsi que cela ressort des pages 323 et suivantes de l'étude d'impact.
21. D'autre part, la société pétitionnaire a complété l'étude d'impact au regard des observations faites par la MRAe. Une analyse des principaux axes de déplacement des chiroptères pouvant être interceptés par le projet a ainsi conduit la société à considérer que le projet n'aura pas d'influence significative sur les populations de chiroptères des sites Natura 2000, parmi lesquels figure le site des Mines de Chabannes situé au sud de la vallée de la Gartempe. Si les requérants font valoir que l'étude menée par la société porteuse du projet sur les déplacements de Grand murin, destinée à localiser leurs territoires de chasse, n'est pas représentative dans la mesure où elle a été réalisée seulement à partir de quatre individus, cette affirmation ne suffit pas à mettre en doute l'exactitude des observations apportées par la société. Quant à la circonstance que l'étude d'impact ne prend pas en compte " les relations existantes entre le site des mines de Chabannes et celui de la vallée de la Gartempe ", elle n'est pas établie faute pour les requérants de démontrer des " relations " alléguées.
22. Il résulte par conséquent de ce qui précède que le moyen tiré de l'absence d'évaluation des incidences Natura 2000, ou même de son insuffisance, n'est pas fondé.
En ce qui concerne la soumission du projet à la loi sur l'eau :
23. Aux termes de l'article L. 214-3 du code de l'environnement : " I. - Sont soumis à autorisation de l'autorité administrative les installations, ouvrages, travaux et activités susceptibles de présenter des dangers pour la santé et la sécurité publique, de nuire au libre écoulement des eaux, de réduire la ressource en eau, d'accroître notablement le risque d'inondation, de porter gravement atteinte à la qualité ou à la diversité du milieu aquatique (...) Cette autorisation est l'autorisation environnementale (...) II. - Sont soumis à déclaration les installations, ouvrages, travaux et activités qui, n'étant pas susceptibles de présenter de tels dangers, doivent néanmoins respecter les prescriptions édictées en application des articles L. 211-2 et L. 211-3 (...) ". Selon la rubrique 3.3.1.0 de la nomenclature des installations classées pour la protection de l'environnement annexée à l'article R. 214-1 du code de l'environnement, sont soumises à autorisation les opérations d'assèchement, d'imperméabilisation, de remblais de zones humides sur une superficie supérieure ou égale à un hectare. En-deçà de ce seuil et pour une superficie supérieure à 0,1 hectare, ces opérations relèvent du régime de la déclaration.
24. Dans le cas présent, les requérants ne démontrent pas que le projet en litige est susceptible de nuire au libre écoulement des eaux, de réduire la ressource en eau et de porter gravement atteinte à la qualité ou à la diversité du milieu aquatique au sens des dispositions précitées. Par suite, les requérants ne peuvent utilement se prévaloir de l'erreur d'appréciation qu'aurait commise le préfet en application de la loi sur l'eau pas plus que de l'incompatibilité du projet avec l'article 8B du schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux du bassin Loire-Bretagne.
25. En outre, et en tout état de cause, il résulte de ce qui a été indiqué précédemment qu'aucun élément de l'instruction ne permet de remettre en cause les éléments de l'étude d'impact selon lesquels le projet de parc éolien n'entraîne pas la destruction de plus de 1 000 m² de zones humides. Par suite, le projet en litige pouvait, sans illégalité, être autorisé sans qu'il soit nécessaire de solliciter une déclaration ou une autorisation au titre de la loi sur l'eau.
En ce qui concerne les atteintes aux intérêts visés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement :
26. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'environnement : " Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation économe des sols naturels, agricoles ou forestiers, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique. (...) ". Aux termes de l'article L. 512-1 de ce même code : " Sont soumises à autorisation les installations qui présentent de graves dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés à l'article L. 511-1. / L'autorisation, dénommée autorisation environnementale, est délivrée dans les conditions prévues au chapitre unique du titre VIII du livre Ier ". Par ailleurs, aux termes de l'article L. 181-3 du code de l'environnement : " I.-L'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent la prévention des dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1 du code de l'environnement (...). II.-L'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent également : (...) 4° Le respect des conditions, fixées au 4° du I de l'article L. 411-2, de délivrance de la dérogation aux interdictions édictées pour la conservation de sites d'intérêt géologique, d'habitats naturels, des espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées et de leurs habitats, lorsque l'autorisation environnementale tient lieu de cette dérogation ; / 5° Le respect des objectifs de conservation du site Natura 2000, lorsque l'autorisation environnementale tient lieu d'absence d'opposition mentionnée au VI de l'article L. 414-4 ; / (...) ".
27. Dans l'exercice de ses pouvoirs de police administrative en matière d'installations classées pour la protection de l'environnement, il appartient à l'autorité administrative d'assortir l'autorisation environnementale délivrée en application de l'article L. 512-1 du code de l'environnement des prescriptions de nature à assurer la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du même code, en tenant compte des conditions d'installation et d'exploitation précisées par le pétitionnaire dans le dossier de demande, celles-ci comprenant notamment les engagements qu'il prend afin d'éviter, réduire et compenser les dangers ou inconvénients de son exploitation pour ces intérêts. Ce n'est que dans le cas où il estime, au vu d'une appréciation concrète de l'ensemble des caractéristiques de la situation qui lui est soumise et du projet pour lequel l'autorisation d'exploitation est sollicitée, que même l'édiction de telles prescriptions ne permet pas d'assurer la conformité de l'exploitation aux dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'environnement, qu'il ne peut légalement délivrer cette autorisation.
S'agissant de l'atteinte aux chiroptères :
28. Ainsi que cela a déjà été indiqué précédemment, le projet constitué d'un poste de livraison et de cinq éoliennes d'une hauteur de 150 mètres en bout de pale doit s'implanter dans un secteur boisé se composant essentiellement de chênaies et de hêtraies ainsi que de prairies entrecoupées par un maillage bocager comprenant un réseau de haies. Il comprend également des zones humides de très faible étendue. Par ailleurs, un site Natura 2000 constitué de la vallée de la Gartempe, situé à environ 500 m au sud de l'aire d'étude rapprochée et à 3 km de l'aire d'étude immédiate, abrite plusieurs espèces de chiroptères. L'aire d'étude rapprochée du projet comprend en outre l'église de Saint-Sornin-Leulac qui abrite une des plus importantes populations reproductrices de Grand murin du Limousin. Enfin, trois autres sites Natura 2000 se trouvent respectivement à 15 km, 17 km et 19 km du lieu d'implantation, parmi lesquels figurent les mines de Chabannes et les souterrains des Monts d'Ambazac qui constituent également des lieux d'hibernation de chiroptères. Dans ce contexte, les inventaires de terrains ont mis en évidence une forte attractivité du site avec un peuplement chiroptérologique très diversifié. Dix-neuf espèces ont été recensées, dont dix présentent un intérêt patrimonial et trois qui apparaissent particulièrement sensibles aux éoliennes, à savoir la Pipistrelle de Nathusius, la Noctule commune et la Noctule de Leisler. L'étude chiroptérologique qualifie d'ailleurs l'impact porté aux chiroptères en phase d'exploitation du projet de modéré à fort selon les éoliennes.
29. Toutefois, et bien que les éoliennes soient toutes implantées à une distance inférieure à 200 mètres des lisières les plus proches, l'implantation retenue est la plus favorable aux enjeux écologiques puisqu'elle évite les territoires de chasse les plus attrayants pour les chiroptères. La société pétitionnaire s'est par ailleurs engagée, dans l'étude chiroptérologique, à éviter la destruction d'habitats de chasse ou de gîtes en phase chantier en recourant à un écologue et en choisissant la période de travaux la moins impactante pour les chiroptères. En phase d'exploitation, elle s'est engagée à réduire la mortalité par bridage des éoliennes et à réduire les phénomènes d'attraction. Elle a également prévu des mesures d'accompagnement au travers du suivi de la mortalité des chiroptères, du suivi des gîtes destiné à adapter au besoin les mesures de réduction mises en place ou encore du suivi acoustique en altitude. Il résulte des éléments non sérieusement contestés de l'étude d'impact, qu'après la mise en œuvre des mesures d'évitement, de réduction et d'accompagnement proposées, les effets sur les chiroptères seront " négligeables à faibles ". De plus, l'arrêté contesté comporte des mesures spécifiques afin d'assurer la protection des chiroptères. Il est ainsi imposé à l'exploitant d'arrêter toute la nuit du 15 mars au 15 novembre les éoliennes lorsque certaines conditions climatiques sont réunies et l'exploitant doit tenir à la disposition de l'inspection des installations classées les enregistrements justifiant de l'arrêt des éoliennes. Des exigences spécifiques sont également prescrites dans la méthodologie du suivi environnemental prévu par l'exploitant, telles que l'équipement des éoliennes CP01 et CP04 d'un dispositif d'écoute, et le rapport du suivi environnemental devra être transmis à l'inspection des installations classées. Des mesures spécifiques sont enfin liées à la phase travaux. Il est notamment prévu qu'une visite préalable d'un chiroptérologue ait lieu avant l'abattage des arbres creux afin d'éviter la mortalité des chiroptères y gîtant. Au surplus, il ne résulte pas de l'instruction et n'est d'ailleurs pas soutenu par les requérants que les mesures contenues dans l'arrêté fixant les prescriptions applicables à l'autorisation d'exploiter seraient insuffisantes.
30. Dans ces conditions, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'implantation des mâts des éoliennes à une distance inférieure à 200 mètres des lisières les plus proches justifiait à elle seule un refus d'autorisation pour assurer la préservation des chiroptères. Cette limite des 200 mètres, préconisée par Eurobats, est au demeurant dépourvue de toute valeur réglementaire. Par conséquent, le moyen tiré de l'erreur d'appréciation qu'aurait commise le préfet en prenant l'arrêté en litige, au regard de l'atteinte portée aux chiroptères, doit être écarté.
S'agissant de l'atteinte à la santé et à la salubrité publiques :
31.D'une part, conformément aux préconisations de la MRAe, la société pétitionnaire a complété l'étude d'impact sur l'analyse de l'ambiance sonore des hameaux situés à proximité du projet. Elle a ainsi relevé qu'avec l'application d'un plan de bridage, les seuils réglementaires admissibles seront bien respectés pour l'ensemble des habitations situées autour du projet éolien, de jour comme de nuit et pour toutes conditions (vitesse et direction) de vent considérées. En outre, la société porteuse du projet s'est engagée devant la commission d'enquête publique, à procéder à un suivi acoustique lors de la mise en service du parc éolien afin de confirmer le respect de la réglementation.
32. D'autre part, afin de tenir compte de la réserve émise par la commission d'enquête et conformément à l'avis de l'inspection des installations classées, l'arrêté attaqué prévoit dans un article 10 que, " au cours des douze premiers mois de fonctionnement du parc éolien, l'exploitant réalise une campagne de mesures acoustiques en période hivernale. Compte tenu du nombre de hameaux, le contrôle comprendra un nombre de points de contrôle suffisant pour être représentatif des zones à émergence réglementée (...). Les résultats sont transmis à l'inspection des installations classées. Ces contrôles sont réalisés indépendamment des contrôles que l'inspection des installations classées pourra demander ultérieurement ".
33. Dans ces conditions, et en l'absence de toute démonstration circonstanciée de la part des requérants, le moyen tiré de ce que le parc éolien autorisé porterait atteinte à la santé et à la salubrité publiques doit être écarté.
S'agissant de l'atteinte à la commodité du voisinage et au choix du site :
34. La circonstance que les intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement incluent la protection des paysages ne fait pas obstacle à ce que l'impact visuel d'un projet, en particulier le phénomène de saturation visuelle qu'il est susceptible de produire, puisse être pris en compte pour apprécier ses inconvénients pour la commodité du voisinage au sens de cet article. Il appartient au juge de plein contentieux, pour apprécier les inconvénients pour la commodité du voisinage liés à l'effet de saturation visuelle causé par un projet de parc éolien, de tenir compte, lorsqu'une telle argumentation est soulevée devant lui, de l'effet d'encerclement résultant du projet en évaluant, au regard de l'ensemble des parcs installés ou autorisés et de la configuration particulière des lieux, notamment en termes de reliefs et d'écrans visuels, l'incidence du projet sur les angles d'occupation et de respiration, ce dernier s'entendant du plus grand angle continu sans éolienne depuis les points de vue pertinents.
35. Les requérants font valoir que, pour le lieudit Puychaumet, l'impact visuel est estimé " modéré à fort " au terme de l'étude paysagère du projet. Il résulte toutefois de cette même étude que l'implantation du projet laisse un espace de respiration à l'est et que les éoliennes, dont la plus proche est située à 1,241 km du lieudit, sont partiellement masquées par la végétation éparse. Par ailleurs, la seule circonstance que les éoliennes sont perceptibles depuis ce hameau n'est pas de nature à caractériser à elle seule une atteinte à la commodité du voisinage. Le projet en litige ne peut donc être regardé comme contribuant à créer un effet de saturation visuelle et d'encerclement constitutif d'une telle atteinte.
36. Quant à la circonstance que l'autorité décisionnaire n'aurait pas pu apprécier en toute connaissance de cause l'impact acoustique du projet contesté, elle n'est pas davantage établie. Ainsi que cela a déjà été indiqué précédemment, la réserve émise sur le bruit par la commission d'enquête a donné lieu à des prescriptions particulières portées dans l'arrêté attaqué.
37. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que l'arrêté litigieux méconnaît les dispositions combinées des articles L. 181-3 et L. 511-1 du code de l'environnement en raison de l'atteinte portée à la commodité du voisinage doit être écarté.
S'agissant de l'atteinte aux zones humides :
38. En se bornant à soutenir que l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation, faute pour l'exploitant d'avoir respecté les nouvelles dispositions applicables de l'article L. 211-1 du code de l'environnement, les appelants n'apportent pas les précisions suffisantes permettant d'apprécier l'atteinte que porterait l'arrêté en litige aux zones humides mentionnées à l'article L. 211-1 et, par suite, aux intérêts protégés par les articles L. 181-3 et L. 511-1 du code de l'environnement. En outre, et en tout état de cause, il résulte de l'étude d'impact que la société pétitionnaire a prévu de compenser la destruction de 93 m² de zones humides ainsi que la dégradation temporaire de 37 m² de zones humides par la restauration des fonctionnalités écologiques des zones humides sur des parcelles d'une superficie de 390 m².
S'agissant de l'atteinte aux sites Natura 2000 :
39. Les requérants soutiennent qu'en l'absence d'évaluation des incidences Natura 2000, le préfet n'a pas pu évaluer correctement l'impact du projet sur le Grand murin, entachant par là même son arrêté d'une erreur de droit, d'une erreur de fait et d'une erreur d'appréciation.
40. Toutefois, pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 20 et 21 du présent arrêt, les moyens invoqués, qui manquent en fait, doivent être écartés.
En ce qui concerne la méconnaissance de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme :
41. Aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ".
42. Il résulte de l'instruction et de ce qui est dit aux points 7 à 9 du présent arrêt que l'étude acoustique a permis à l'autorité administrative d'apprécier la conformité du projet au regard de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme. A cet égard, le niveau sonore émis par les éoliennes du parc litigieux ne comporte pas de risque sanitaire notable et il n'est ni démontré, ni même soutenu, que les prescriptions prévues par le préfet dans l'arrêté attaqué sur le niveau sonore des éoliennes seraient insuffisantes. Il suit de là que le préfet n'a pas commis, du point de vue des nuisances sonores, d'erreur manifeste d'appréciation au regard de ces dispositions en autorisant le projet litigieux.
En ce qui concerne l'absence de demande de dérogation à l'interdiction de destruction des espèces protégées :
43. D'une part, en se bornant à soutenir que la condition tenant à subordonner la demande de dérogation à l'interdiction d'espèces protégées à l'existence d'un risque résiduel suffisamment caractérisé est contraire aux articles 12 et 16 de la directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages, en se prévalant d'un arrêt C-473/19 du 4 mars 2021 de la Cour de justice de l'Union européenne, les requérants n'apportent pas les précisions suffisantes permettant d'apprécier le bien-fondé de ce moyen.
44. D'autre part, les requérants soutiennent que, compte tenu de l'impact significatif porté par le projet à l'avifaune et aux chiroptères, une dérogation pour la destruction d'espèces protégées aurait dû être délivrée. Les requérants font plus particulièrement état, pour l'avifaune, d'une atteinte portée à la Cigogne noire, à la Bondrée apivore, au Milan noir, au Milan royal, au Busard Saint-Martin, au Pic noir, au Pic mar et à la Pie-grièche écorcheur, puis, pour lesNchiroptères, à la noctule de Leisler, à la Pipistrelle de Nathusius, à la noctule commune, à la Pipistrelle commune, à la Sérotine commune, à la Pipistrelle de Kuhl, au Grand murin et à la Barbastelle d'Europe.
45. Il résulte de l'étude chiroptérologique que l'impact pour l'ensemble des espèces évoquées par les requérants et clairement identifiées par le pétitionnaire sur le site du projet a été qualifié de " faible " lors de la phase chantier et de " fort à modéré " lors de la phase d'exploitation compte tenu d'un risque de mortalité directe par collision ou barotraumatisme avant la prise en compte des mesures d'évitement et de réduction. Ces dernières mesures consistent en l'implantation des éoliennes en milieu ouvert (prairie ou culture) ; en " phase chantier ", elles consistent en la réalisation d'un diagnostic préalable des arbres à cavités par un écologue, d'un abattage des arbres identifiés en présence d'un écologue et dans le choix d'une période de travaux la moins impactante pour les chiroptères ; en phase d'exploitation, dans le bridage des éoliennes et dans des mesures visant à réduire les phénomènes d'attraction telles que l'utilisation d'un éclairage seulement quand il est nécessaire ou obligatoire pour des raisons de sécurité. En tenant compte de ces mesures, l'impact résiduel a été qualifié de " faible " sur les chiroptères, y compris en phase d'exploitation. Si les requérants relèvent que la perte d'attractivité des territoires de chasse en phase d'exploitation n'a pas été évaluée par la société pétitionnaire, ainsi que cela ressort des tableaux 21 et 23 figurant dans l'étude chiroptérologique, il ressort de cette même étude que la société a estimé que la perte d'attractivité était sans doute non négligeable au vu du contexte local particulièrement attractif pour les chiroptères et a majoré les mesures compensatoires par précaution, notamment par un suivi de mortalité destiné à ajuster les mesures de réduction. Au surplus, et conformément aux préconisations de l'inspection des installations classées, des prescriptions particulières destinées à assurer la protection des chiroptères ont été prises par le préfet.
46. S'agissant de l'avifaune, il résulte de l'étude d'impact que l'impact du projet pour l'ensemble des espèces à enjeux, évoquées par les requérants, est estimé de faible à très faible avant la prise en compte des mesures d'évitement et de réduction. Ces dernières mesures consistent en la suppression d'une partie de la zone d'emprise potentielle afin d'éviter un couloir de migration, en un évitement des boisements de la zone, en la réduction au maximum d'un défrichement des zones boisées, des longueurs de haies à supprimer ou à élaguer, en la réduction au maximum des surfaces de zones humides impactées et en prévoyant la réalisation des travaux hors période de reproduction. En tenant compte de ces mesures, l'impact résiduel a été qualifié de négligeable sur l'avifaune ainsi que cela ressort du tableau de synthèse figurant en page 466 de l'étude d'impact. Au surplus, le préfet a adopté des prescriptions particulières pour assurer la protection de l'avifaune qui ne sont nullement contestées par les requérants.
47. Dans ces conditions, il ne résulte pas de l'instruction qu'un risque d'atteinte soit suffisamment caractérisé à l'égard de l'avifaune et des chiroptères pour justifier l'obligation de dépôt d'une demande de dérogation. Les requérants ne sont, dès lors, pas fondés à soutenir que l'arrêté attaqué serait entaché d'illégalité en tant qu'il ne comporte pas de demande de dérogation à l'interdiction de destruction des espèces protégées.
48. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée en défense, que M. et Mme C... ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêté du 15 décembre 2021 par lequel la préfète de la Haute-Vienne a accordé une autorisation environnementale à la société SEPE Landes des Verrines pour un parc éolien situé sur les communes de Châteauponsac et Saint-Sornin-Leulac.
Sur les frais liés au litige :
49. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, au titre des frais exposés par M. et Mme C... et non compris dans les dépens.
50. En outre, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. et Mme C... la somme demandée par la société SEPE Landes des Verrines sur le fondement de ces mêmes dispositions.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme C... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la société SEPE Landes des Verrines sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... et D... C..., à la société SEPE Landes des Verrines et au préfet de la Haute-Vienne.
Délibéré après l'audience du 19 décembre 2024 à laquelle siégeaient :
Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente,
Mme Bénédicte Martin, présidente-assesseure,
Mme Lucie Cazcarra, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 janvier 2025.
La rapporteure,
Lucie CazcarraLa présidente,
Frédérique Munoz-Pauziès La greffière,
Laurence Mindine
La République mande et ordonne au préfet de la Haute-Vienne en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 22BX01100