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27/03/2025 | FRANCE | N°24BX02492

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 4ème chambre, 27 mars 2025, 24BX02492


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 19 avril 2024 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.



Par un jugement n° 2403380 du 19 septembre 2024, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée le 18 octobre 2024, M. B..., représenté par Me Hugon, demande à la cour :



1...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 19 avril 2024 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2403380 du 19 septembre 2024, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 18 octobre 2024, M. B..., représenté par Me Hugon, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 19 septembre 2024 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Gironde du 19 avril 2024 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de la Gironde de réexaminer sa situation et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travailler, sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros toutes taxes comprises sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

- l'arrêté contesté est entaché d'un vice de procédure tenant à l'absence de saisine préalable de la commission du titre de séjour ;

- il est entaché d'une erreur d'appréciation au regard du 1° de l'article 6 de l'accord franco-algérien ;

- il est entaché d'une erreur d'appréciation au regard du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien et méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale en raison de l'illégalité dont est entaché le refus de titre de séjour ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

- elle est illégale en raison de l'illégalité dont est entachée l'obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 février 2025, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête. Il s'en remet à son mémoire de première instance pour soutenir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 15 janvier 2025, la clôture de l'instruction a été fixée au 24 février 2025 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Lucie Cazcarra,

- et les observations de Me Tovia Vila, représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant algérien né le 19 novembre 1975 à El Affround (Algérie), est entré en France le 9 avril 2013 muni d'un visa court séjour valable jusqu'au 30 avril 2013. Après avoir obtenu un titre de séjour en qualité de conjoint de français valable du 7 mars 2017 au 6 mars 2018, M. B... a sollicité le renouvellement de ce titre. Par un arrêté du 8 août 2018, le préfet de la Gironde n'a pas fait droit à sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être renvoyé. Cet arrêté a été confirmé par un jugement n° 1804566 du tribunal administratif de Bordeaux du 7 février 2019 et par un arrêt n° 19BX00850 de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 1er octobre 2019. Le 22 avril 2022, M. B... a déposé une demande de titre de séjour " vie privée et familiale ". Par arrêté du 19 avril 2024, le préfet de la Gironde a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être renvoyé. Par la présente requête, M. B... relève appel du jugement du 19 septembre 2024 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / 1) au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant ". Aux termes du 2ème alinéa de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14 ". En vertu du 4° de l'article L. 432-13 du même code, la commission du titre de séjour instituée dans chaque département, dont la composition est fixée par l'article L. 432-14, doit être saisie pour avis par l'autorité administrative dans le cas prévu à l'article L. 435-1.

3. Si l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 régit d'une manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, ainsi que les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés, il n'a toutefois pas entendu écarter, sauf stipulations incompatibles expresses, l'application des dispositions de procédure qui s'appliquent à tous les étrangers en ce qui concerne la délivrance, le renouvellement ou le refus de titres de séjour. Au nombre de ces dispositions, figurent notamment celles qui résultent de l'article L. 435-1 précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui prévoient que le préfet doit consulter la commission du titre de séjour lorsqu'il envisage de refuser un titre de séjour à un étranger qui justifie d'une durée de résidence de dix ans sur le territoire français dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que ce refus porterait au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus. Le préfet n'est toutefois tenu de saisir la commission que du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement cette condition, et non de celui de tous les étrangers qui s'en prévalent.

4. D'une part, M. B... justifie de sa présence sur le territoire français au cours de la période allant de mai 2016 à la date de l'arrêté en litige. Toutefois, l'intéressé ne verse, au titre de la période allant d'avril 2013 à mai 2015, qu'une attestation d'hébergement du 9 juin 2013, une facture d'eau du 24 mai 2013 qui n'est au demeurant pas à son nom, une copie de sa carte d'admission à l'aide médicale de l'Etat valable du 11 septembre 2013 au 10 septembre 2014, et des ordonnances médicales des 1er décembre 2014, 7 mai 2015 et 7 juin 2015. Dans ces conditions, le requérant ne démontre pas, ainsi qu'il lui incombe, qu'il résidait de manière continue en France depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté contesté. M. B... ne satisfaisant pas à la condition posée par le 1° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, le refus opposé par le préfet de la Gironde à sa demande de titre de séjour n'avait pas à être précédé de la consultation de la commission du titre de séjour.

5. D'autre part, dès lors que M. B... ne justifie pas, par les pièces qu'il produit, d'une durée de résidence de dix ans sur le territoire français à la date de l'arrêté litigieux, le préfet pouvait prendre la décision attaquée sans l'entacher d'une erreur d'appréciation.

6. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...) ". Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ".

7. M. B... se prévaut de onze années de présence en France et de l'obtention d'un contrat de travail à durée indéterminée dans le secteur du bâtiment depuis le mois de novembre 2021. Toutefois, l'intéressé, célibataire et sans charge de famille, ne justifie pas de liens personnels intenses et stables en France. Il n'établit pas davantage être dépourvu de toute attache, privée ou familiale, en Algérie, où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de trente-huit ans et où résident ses parents et l'ensemble de sa fratrie. En outre, si M. B... justifie d'une activité professionnelle en qualité de " peintre-façade-carreleur ", qu'il exerce dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée à temps complet conclu le 2 novembre 2021, il est constant qu'il a eu recours à un titre de séjour falsifié. M. B... a par ailleurs fait l'objet en 2018 d'une mesure d'éloignement qu'il n'a pas exécutée et a passé de nombreuses années sur le territoire français en situation irrégulière. Eu égard à l'ensemble de ces éléments, le préfet de la Gironde n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée. Le requérant n'est, par suite, pas fondé à soutenir que la décision attaquée a méconnu les stipulations du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien ni celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour ces mêmes motifs, le moyen tiré d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences du refus d'un certificat de résidence sur la situation du requérant doit être écarté.

Sur l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours :

8. Ainsi qu'il a été dit ci-dessus, le requérant n'établit pas l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour. Dès lors, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision doit être écarté.

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

9. Le requérant n'établit pas l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français. Par suite, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision doit être écarté.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de l'arrêté attaqué. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles à fin d'injonction sous astreinte ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 27 février 2025 à laquelle siégeaient :

Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente,

Mme Bénédicte Martin, présidente-assesseure,

Mme Lucie Cazcarra, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 mars 2025.

La rapporteure,

Lucie CazcarraLa présidente,

Frédérique Munoz-Pauziès La greffière,

Laurence Mindine

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 24BX02492


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 24BX02492
Date de la décision : 27/03/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MUNOZ-PAUZIES
Rapporteur ?: Mme Lucie CAZCARRA
Rapporteur public ?: Mme REYNAUD
Avocat(s) : HUGON

Origine de la décision
Date de l'import : 06/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-03-27;24bx02492 ?
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