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08/04/2025 | FRANCE | N°24BX01674

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 5ème chambre, 08 avril 2025, 24BX01674


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Mayotte de " faire valoir ses droits au séjour au titre de son état de santé ".



Par une ordonnance n° 2303529 du 3 mai 2024, le magistrat désigné du tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée le 5 juillet 2024, Mme B..., représentée par Me Caliot, demande à la cour :



1°) d'annuler l'ordonnance du tribunal administratif de Mayotte du 3 mai 2024 ;



2°) d'annuler pour excès de pouvoir la dé...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Mayotte de " faire valoir ses droits au séjour au titre de son état de santé ".

Par une ordonnance n° 2303529 du 3 mai 2024, le magistrat désigné du tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 5 juillet 2024, Mme B..., représentée par Me Caliot, demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance du tribunal administratif de Mayotte du 3 mai 2024 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite du préfet de Mayotte ;

3°) d'enjoindre au préfet de Mayotte de lui délivrer un titre de séjour au titre de sa santé, dans un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ; à défaut de se prononcer à nouveau sur son droit au séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt, et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de 48 heures, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le rejet de sa requête pour irrecevabilité au motif qu'elle ne satisfaisait pas aux conditions de présentation prévues par l'article R. 414-5 du code de justice administrative, alors qu'elle n'est pas une professionnelle du droit et de la procédure administrative, lui est particulièrement préjudiciable dès lors que sa demande n'a pas été examinée au fond ;

- la décision du préfet de Mayotte est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

La requête a été communiquée au préfet de Mayotte qui n'a pas présenté d'observations.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 juin 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Carine Farault a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... B..., ressortissante comorienne née le 26 décembre 1992 à Ouani Anjouan (Comores), est entrée en France en le 29 mars 2015 selon ses déclarations. Elle a demandé au tribunal administratif de Mayotte de faire valoir ses droits au séjour au titre de sa santé. Mme B... relève appel de l'ordonnance du 3 mai 2024 par laquelle le tribunal administratif de Mayotte a, sur le fondement des dispositions du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, rejeté comme irrecevable sa demande.

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

2. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " (...) les présidents de formation de jugement des tribunaux (...) peuvent, par ordonnance : (...) 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser ou qu'elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens ". Aux termes de l'article R. 414-5 du même code, applicable aux requêtes transmises par voie électronique : " (...) / Le requérant transmet chaque pièce par un fichier distinct, à peine d'irrecevabilité de sa requête. Cette obligation est applicable à la transmission des pièces jointes aux mémoires complémentaires, sous peine pour le requérant de voir ces pièces écartées des débats après invitation à régulariser non suivie d'effet. / Chaque fichier transmis au moyen de l'application mentionnée à l'article R. 414-1 porte un intitulé commençant par le numéro d'ordre affecté à la pièce qu'il contient par l'inventaire détaillé. Lorsque le requérant recourt à la génération automatique de l'inventaire permise par l'application, l'intitulé du fichier décrit également le contenu de cette pièce de manière suffisamment explicite. Chaque pièce transmise au moyen du téléservice mentionné à l'article R. 414-2 porte un intitulé décrivant son contenu de manière suffisamment explicite. / Les obligations fixées au précédent alinéa sont prescrites au requérant sous peine de voir la pièce écartée des débats après invitation à régulariser non suivie d'effet (...). ".

3. La requête de Mme B... devant le tribunal administratif a été transmise au moyen de l'application mentionnée à l'article R. 414-1 du code de justice administrative sous la forme de plusieurs fichiers uniques comprenant chacun plusieurs pièces non répertoriées individuellement et sans que l'inventaire détaillé n'énumère toutes les pièces contenues dans chacun des fichiers. Dans ces conditions, la requête ne satisfaisait pas aux prescriptions de l'article R. 414-5 du code de justice administrative cité au point précédent.

4. Par un courrier du 3 novembre 2023, le greffe du tribunal administratif de Mayotte l'a invitée à régulariser sa requête en indiquant clairement les modalités de présentation des pièces découlant des dispositions de l'article R. 414-5 du code de justice administrative précisant qu'à défaut de régularisation, les pièces seraient écartées des débats.

5. Le magistrat délégué du tribunal administratif de Mayotte a rejeté comme irrecevable la demande présentée par Mme B... au motif que sa requête ne satisfaisait pas aux prescriptions de l'article R. 414-5 du code de justice administrative, alors que ces dispositions prévoit seulement que les pièces qui ne sont pas correctement présentées aux regard des prescriptions du code de justice administrative soient écartées des débats, ainsi qu'en faisait état la demande de régularisation à laquelle Mme B... n'a pas donné suite. Par suite, c'est à tort que le tribunal a rejeté comme irrecevable la demande dont il était saisi. Son ordonnance du 3 mai 2024 doit, dès lors, être annulée.

6. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif de Mayotte.

Sur les conclusions présentées par Mme B... devant le tribunal administratif de Mayotte :

7. Ainsi qu'il a été dit au point 5, Mme B... n'a pas procédé à la régularisation de la présentation des pièces qu'elle a produites au soutien de sa demande devant le tribunal administratif Mayotte. Ainsi, en application des dispositions de l'article R. 411-5 du code de justice administrative, l'intégralité de ces pièces doivent être écartées des débats.

8. Si Mme B... fait valoir qu'elle est prise en charge pour le traitement d'un cancer du sein qui a été diagnostiqué en août 2021, et qu'elle a besoin de soins spécifiques dont elle ne pourrait bénéficier dans son pays d'origine, ces seules allégations ne permettent pas d'établir qu'en rejetant sa demande, le préfet de Mayotte aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle. Par suite, et en tout état de cause, Mme B... n'est pas fondée à demander que " ses droits au séjour au titre de sa santé soient examinés ". Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 présentées devant la cour administrative d'appel doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : L'ordonnance du tribunal administratif de Mayotte du 3 mai 2024 est annulée.

Article 2 : La demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif de Mayotte et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B..., au ministre de l'intérieur et à Me Marie-Laure Caliot.

Copie en sera adressée au préfet de Mayotte et au ministre des outre-mer.

Délibéré après l'audience du 18 mars 2025 à laquelle siégeaient :

Mme Fabienne Zucarello, présidente,

M. Nicolas Normand, président-assesseur,

Mme Carine Farault, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 avril 2025.

La rapporteure,

Carine FaraultLa présidente,

Fabienne ZucarelloLa greffière,

Virginie Santana

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 24BX01674


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 24BX01674
Date de la décision : 08/04/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme ZUCCARELLO
Rapporteur ?: Mme Carine FARAULT
Rapporteur public ?: M. ELLIE
Avocat(s) : CALIOT

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-08;24bx01674 ?
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