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14/10/2003 | FRANCE | N°02DA00563

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2eme chambre, 14 octobre 2003, 02DA00563


Vu la requête, enregistrée le 5 juillet 2002 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée pour Mme Mauricette X, demeurant ... et M. Christian Y, demeurant ... par Me Bessard du Parc, avocat ; les appelants demandent à la Cour :

1') d'annuler le jugement du 29 avril 2002 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté, d'une part, leur demande dirigée contre la décision implicite du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ayant rejeté leur demande d'indemnité et, d'autre part, leurs conclusions tendant à la condamnation de l'Etat à l

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Vu la requête, enregistrée le 5 juillet 2002 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée pour Mme Mauricette X, demeurant ... et M. Christian Y, demeurant ... par Me Bessard du Parc, avocat ; les appelants demandent à la Cour :

1') d'annuler le jugement du 29 avril 2002 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté, d'une part, leur demande dirigée contre la décision implicite du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ayant rejeté leur demande d'indemnité et, d'autre part, leurs conclusions tendant à la condamnation de l'Etat à leur verser diverses sommes, majorées des intérêts de droit, en réparation de la diminution de la valeur de leur pension de retraite à la suite de la dévaluation du franc CFA ;

2') de condamner l'Etat à leur verser diverses sommes en réparation du préjudice actuel et futur qu'ils ont subi ;

3°) de condamner l'Etat à leur verser chacun la somme de 8 000 francs au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Code D Classement CNIJ : 54-01-01-02

Les appelants font valoir qu'étant affiliés à un régime de retraite d'Etat africain partie à la convention de coopération monétaire entre les Etats membres de la Banque des Etats de l'Afrique centrale et la République française signée le 23 novembre 1972, ils sont fondés à engager la responsabilité sans faute de l'Etat français pour obtenir réparation du préjudice subi par la diminution de la valeur de leur pension de retraite du fait de la dévaluation du franc de la communauté financière africaine (franc CFA) ; que le tribunal administratif de Rouen a commis une erreur de droit en retenant la généralité des stipulations contenues dans la convention de coopération monétaire alors qu'ils invoquaient à l'appui de leur demande la convention internationale dénommée décision du comité monétaire mixte du 11 janvier 1994 qui a modifié à compter du 12 janvier 1994 la parité du franc CFA avec le franc français ; que la décision de dévaluation a été incorporée dans l'ordre juridique français par le décret du 24 mars 1994 et non par le décret du 27 juillet 1997 ; que, nonobstant les différentes catégories de personnes touchées par la dévaluation du franc CFA, seule la catégorie, dont les intéressés font partie, composée de retraités résidant désormais en France et dont la pension est libellée en franc CFA, subit un véritable préjudice spécial et anormal ; qu'en particulier, il n'existe aucune raison justifiant la différence de régime de retraite existant entre les agents publics et les agents privés ; or le Conseil d'Etat a jugé que les pensions de retraite constituent des rémunérations différées destinées à assurer à leurs bénéficiaires des conditions matérielles de vie en rapport avec la dignité de la situation professionnelle passée ; que les différentes déclarations faites par le gouvernement français et les diverses mesures de compensation ou d'indemnisation mises en oeuvre au profit des fonctionnaires et des coopérants français démontrent que l'Etat n'a pas entendu exclure dans l'application de la convention internationale susvisée toute indemnisation sur le terrain de la rupture de l'égalité devant les charges publiques ; qu'une indemnisation de leur préjudice n'est pas incompatible avec l'objet de la dévaluation qui vise essentiellement à redynamiser l'économie des pays africains intéressés ; que les différents motifs d'intérêt général invoqués par l'Etat pour justifier la dévaluation du franc CFA ne sont pas de nature à écarter sa responsabilité ; que la jurisprudence relevée par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie n'est pas pertinente en l'espèce ; que le fait de diviser par deux les pensions de retraite constitue un grave préjudice pour les retraités ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 24 février 2003, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, qui demande à la Cour de rejeter la requête de Mme X et de M. Y ; il fait valoir qu'il appartient à la Cour de vérifier l'existence d'un lien de causalité direct entre le comportement de la France et le préjudice allégué par les appelants ; que la dévaluation du franc CFA est une co-décision franco africaine qui n'est en tout état de cause pas susceptible d'engager la seule responsabilité du gouvernement français ; que le préjudice des appelants trouve son origine à la fois dans la décision de l'Etat africain, dont relève la caisse de sécurité sociale qui leur sert la retraite, d'introduire dans son droit national la décision de dévaluation et dans l'absence de mesure de compensation prise par ce même Etat ; que la participation des autorités françaises à la décision de dévaluation du franc CFA ne saurait à elle seule les tenir pour directement responsables de la perte du pouvoir d'achat de la pension des appelants ; qu'au surplus, les conditions requises pour retenir la responsabilité sans faute de

l'Etat ne sont pas réunies ; que l'objectif d'intérêt général que poursuit la décision de dévaluation c'est-à-dire reprise de l'investissement et de la croissance des pays de la zone franc, s'oppose à toute indemnisation nonobstant le fait que la dévaluation ne concerne pas la monnaie nationale ; que le tribunal administratif a considéré, à juste titre, que les dommages subis par les appelants du fait de la dévaluation du franc CFA sont analogues à ceux qui ont été subis par d'autres catégories de personnes et que le caractère spécial du dommage n'est pas établi ; que le préjudice anormalement grave allégué par les requérants ne saurait résulter du seul fait que la valeur de la monnaie a été divisée par deux ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le décret n° 77-877 du 27 juillet 1977 et la convention annexée ;

Vu le décret n° 94-253 du 24 mars 1994 et la décision annexée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 septembre 2003 où siégeaient M. Gipoulon, président de chambre, M. Nowak, premier conseiller et Mme Eliot, conseiller :

- le rapport de Mme Eliot, conseiller,

- et les conclusions de M.Paganel, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par une décision du 11 janvier 1994, le comité mixte chargé de mettre en oeuvre la convention de coopération monétaire entre les Etats- membres de la Banque des Etats de l'Afrique centrale et la République française signée à Brazzaville le 23 novembre 1972 a fixé la parité entre le franc de la coopération financière en Afrique centrale (franc CFA) et le franc français à 1 franc CFA pour 0,01 franc français à compter du 12 janvier 1994, alors que cette parité, telle qu'arrêtée par l'article XII de ladite convention, était jusqu'alors de 1 franc CFA pour 0,02 francs français ; que les appelants, titulaires d'une retraite libellée en franc CFA, mais versée en francs français après conversion, et résidant désormais en France, demandent la condamnation de l'Etat à les indemniser du préjudice actuel et futur résultant pour eux de la dévaluation du franc CFA ainsi décidée ;

Considérant que la responsabilité de l'Etat est susceptible d'être engagée, sur le fondement de l'égalité des citoyens devant les charges publiques, pour assurer la réparation de préjudices nés de conventions conclues par la France avec d'autres Etats, et incorporées régulièrement dans l'ordre juridique interne, à la condition, d'une part, que ni la convention elle-même ni la loi qui en a éventuellement autorisé la ratification ne puissent être interprétées comme ayant entendu exclure toute indemnisation et, d'autre part, que le préjudice dont il est demandé réparation soit d'une gravité suffisante et présente un caractère spécial ;

Considérant qu'eu égard à la généralité des effets de la décision de dévaluer le franc CFA et au nombre des personnes, dont les titulaires d'une retraite libellée en francs CFA, affectées par les conséquences de cette décision, le préjudice invoqué par les appelants ne présente pas un caractère spécial ; qu'il n'incombe donc pas à l'Etat d'en assurer, en tout état de cause, la réparation ; que, dans ces conditions, le tribunal administratif de Rouen n'a pas commis d'erreur de droit en estimant que les stipulations de la convention de coopération monétaire entre les Etats membres de la Banque des Etats de l'Afrique centrale et la République française, parmi lesquelles figure la nouvelle parité susnommée entre le franc CFA et le franc français, ne sont pas de nature à engager la responsabilité de l'Etat ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X et M. Y ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative susvisé : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou, à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer aux appelants la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme Mauricette X et de M. Christian Y est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme Mauricette X, à M. Christian Y et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie .

Délibéré à l'issue de l'audience publique du 30 septembre 2003 dans la même composition que celle visée ci-dessus.

Prononcé en audience publique le 14 octobre 2003.

Le rapporteur

Signé : A. Eliot

Le président de chambre

Signé : J.F. Gipoulon

Le greffier

Signé : G. Vandenberghe

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

Le greffier

G. Vandenberghe

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N°02DA00563

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N°02DA00563


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2eme chambre
Numéro d'arrêt : 02DA00563
Date de la décision : 14/10/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Gipoulon
Rapporteur ?: Mme Eliot
Rapporteur public ?: M. Paganel
Avocat(s) : BESSARD DU PARC

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2003-10-14;02da00563 ?
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