Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Ortec Industrie a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision du 6 décembre 2013 par laquelle l'inspecteur du travail de la section 3 de l'unité territoriale Nord-Lille a refusé d'autoriser le licenciement pour faute de M. D...C...et d'annuler le refus implicite du ministre chargé du travail rejetant son recours hiérarchique.
Par un jugement n° 1405145 du 15 juin 2016, le tribunal administratif de Lille a annulé la décision du 6 décembre 2013 refusant l'autorisation de licenciement de M. C...et la décision implicite du ministre chargé du travail rejetant le recours hiérarchique.de la société Ortec industrie.
Procédure devant la cour :
I) Par une requête enregistrée le 1er août 2016 sous le n° 16DA01417, la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1405145 du 15 juin 2016 du tribunal administratif de Lille ;
2°) de rejeter la demande de la société Ortec Industrie.
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II) Par une requête enregistrée le 17 août 2016 sous le n° 16DA01493, M. D...C..., représenté par Me A...F..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1405145 du 15 juin 2016 du tribunal administratif de Lille ;
2°) d'annuler la décision du 25 juillet 2014 du ministre chargé du travail ;
3°) de mettre à la charge de la société Ortec Industrie la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller,
- les conclusions de M. Jean-Philippe Arruébo-Mannier, rapporteur public,
- et les observations de Me E...B...représentant la SAS Ortec Industrie ;
Considérant ce qui suit :
1. Les requêtes susvisées n° 16DA01417 et n° 16DA01493 sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
2. M. D...C...est, depuis 3 juillet 2006, salarié sous contrat à durée indéterminée, employé par la société par actions simplifiée (SAS) Ortec Industrie, spécialisée dans la collecte des déchets dangereux. Il travaille dans son agence de Grande-Synthe (Nord) comme de chauffeur poids-lourd-monteur. Il détenait, jusqu'en 2013 le mandat de membre du comité d'établissement suppléant 1er collège et aussi, depuis le 23 mai 2014, celui de délégué du personnel titulaire. Le ministre du travail, sous le n° 16DA01417, et M.C..., sous le n° 16DA01493, relèvent appel du jugement n° 1405145 du 15 juin 2016 par lequel le tribunal administratif de Lille a annulé la décision du 6 décembre 2013 de l'inspecteur du travail de la section 3 de l'unité territoriale Nord-Lille refusant l'autorisation de licenciement pour faute de M. C...et la décision implicite du ministre chargé du travail, intervenue le 7 juin 2014, par laquelle il a rejeté le recours hiérarchique de la société Ortec industrie et a autorisé le licenciement pour faute de M.C....
Sur les conclusions d'appel du ministre :
3. Si le refus d'autoriser le licenciement d'un salarié protégé se borne, vis-à-vis de l'employeur, à rejeter la demande qu'il a adressée à l'administration et n'est, par suite, pas créateur de droits à son égard, il revêt en revanche le caractère d'une décision créatrice de droits au profit du salarié intéressé, y compris, dans certains cas, après l'expiration de sa période de protection. Ainsi, le litige par lequel l'employeur demande au juge administratif l'annulation de ce refus pour excès de pouvoir ne saurait être privé d'objet en raison de ce que ce refus aurait cessé, en cours d'instance, de faire obstacle au licenciement, soit parce que l'administration l'aurait abrogé pour l'avenir en accordant l'autorisation sollicitée, soit en raison de la fin de la période de protection du salarié. Un tel litige n'est en effet susceptible de perdre son objet que si, en cours d'instance, le refus d'autorisation a été rétroactivement retiré par l'autorité compétente et que ce retrait a acquis un caractère définitif.
4. Il ressort des pièces du dossier que le ministre chargé du travail, a, retiré le 25 juillet 2014 la décision de l'inspecteur du travail du 6 décembre 2013 refusant d'autoriser le licenciement pour faute de M. C...et sa décision implicite intervenue le 7 juin 2014, par laquelle il a rejeté le recours hiérarchique de la société Ortec Industrie et a autorisé le licenciement pour faute de M.C.... Celui-ci avait été mis à même de présenter ses observations lors de la procédure ayant abouti à la décision du 25 juillet 2014. Toutefois, cette décision du ministre chargé du travail, retirant celle de l'inspecteur du travail, et sa décision implicite, rejetant le recours hiérarchique de la société Ortec Industrie et accordant à cette société l'autorisation de licencier M.C..., n'étaient pas devenues définitives à cette date, du fait du recours introduit par M. C...le 26 septembre 2014 devant le tribunal administratif de Paris, requête ensuite enregistrée le 20 octobre 2014 par le tribunal administratif de Lille. Par suite, la ministre du travail n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a écarté son exception de non-lieu, tirée de la disparition de la décision du 6 décembre 2013 de l'inspecteur du travail et de celle rejetant le recours hiérarchique de la société Ortec Industrie. Les conclusions d'appel de la ministre du travail doivent, dès lors, être rejetées.
Sur les conclusions d'appel de M.C... :
5. M. C...relève appel du jugement du 15 juin 2016 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 25 juillet 2014 par laquelle le ministre chargé du travail a retiré sa décision implicite de rejet née du silence gardé sur le recours hiérarchique formé par la société Ortec Industrie contre la décision du 6 décembre 2013 de l'inspecteur du travail de la section 3 de l'unité territoriale Nord-Lille refusant l'autorisation de le licencier pour faute, a annulé la décision précitée et a accordé l'autorisation de le licencier.
6. Afin d'établir la réalité du harcèlement moral dont il affirme avoir été victime de la part de son employeur, M. C...ne peut utilement se prévaloir des termes de la décision du 6 décembre 2013 de l'inspecteur du travail refusant de délivrer l'autorisation de le licencier, dès lors que celle-ci a été retirée par la décision du ministre du travail du 25 juillet 2014 dans le cadre de l'exercice de son pouvoir hiérarchique. De même, le requérant, qui n'a produit aucune observation sur le fond du dossier dans le cadre de la procédure contradictoire relative au retrait de la décision implicite de rejet du recours hiérarchique de la société Ortec Industrie, ne peut soutenir que la demande d'autorisation de licenciement serait liée à l'exercice de son mandat en se prévalant seulement de la procédure qu'il a entamée devant le conseil de prud'hommes de Dunkerque au titre d'une allégation de harcèlement moral.
7. Il ressort des pièces du dossier, tout d'abord, que le 1er juillet 2013, M. C...a laissé en stationnement pendant plusieurs jours, derrière la base vie de la raffinerie des Flandres à Dunkerque exploitée par la société Total, un camion dont la citerne contenant, ainsi qu'il le reconnait, trois mètres cubes de carburant. Il n'a pas procédé à sa vidange, en contravention avec les règles impératives de sécurité en vigueur sur ce site pétrolier sur lequel un très grave accident s'était, au demeurant, produit le 29 janvier 2009 lors d'une opération de pompage, entrainant la mort d'un salarié de la société Ortec Industrie et de graves brûlures pour cinq autres. Le requérant n'ignorait pas ces règles de sécurité et a pourtant quitté son travail sans informer la société Total ou ses collègues encore présents. Il n'a, de surcroît, produit aucun bon de dépotage, document à présenter avant tout nouveau pompage de carburant, conformément aux mesures de prévention en vigueur sur le site. La société Total a d'ailleurs sanctionné M. C...en lui interdisant pendant trois jours l'accès à cette raffinerie. Ainsi, en raison de ces circonstances et particulièrement du risque très important d'explosivité d'une citerne contenant seulement quelques mètres cubes d'essence, la faute reprochée à M. C...était d'une gravité de nature à justifier son licenciement.
8. Il ressort, d'autre part, des pièces du dossier que M.C..., lors d'un audit de sécurité effectué le 11 juillet 2013, n'avait pas installé la balise de sécurité obligatoire avant de commencer l'opération de pompage, en contravention avec les règles de sécurité. M. C...ne peut sérieusement soutenir que l'installation de la balise incombait à son chef d'équipe alors qu'en tant que chauffeur du camion, il était responsable de l'opération de pompage.
9. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir de la société Ortec Industrie ou les autres fautes reprochées à M.C..., qui au demeurant avait fait l'objet de plusieurs rappels à l'ordre et sanctions depuis 2010, notamment pour des manquements aux règles de sécurité, c'est sans erreur d'appréciation que le ministre chargé du travail a pu estimer que ces deux fautes commises sur un site classé " Seveso seuil haut " étaient d'une gravité de nature à fonder l'autorisation de licenciement de M.C....
10. Il résulte de tout ce qui précède que, d'une part, la ministre du travail n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement du 15 juin 2015, le tribunal administratif de Lille a annulé la décision du 6 décembre 2013 par laquelle l'inspecteur du travail a refusé d'autoriser le licenciement de M. C...ainsi que sa décision implicite rejetant le recours hiérarchique de la SAS Ortec Industrie. Il ya lieu de mettre à la charge de la ministre du travail, partie perdante, le versement à la société Ortec Industrie d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. D'autre part, M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Lille a annulé la décision du 6 décembre 2013 de l'inspecteur du travail et a autorisé son licenciement. Par voie de conséquence, les conclusions de M. C...tendant à la mise à la charge de la SAS Ortec Industrie d'une somme application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. C..., la somme que la société Ortec Industrie lui demande sur le fondement de ces dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la ministre du travail est rejetée.
Article 2 : La requête de M. C...est rejetée.
Article 3 : La ministre du travail versera à la société Ortec Industrie la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions de la société Ortec Industrie tendant à la mise à la charge de M. C...d'une somme sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la ministre du travail, à M. D...C...et à la SAS Ortec Industrie.
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N°16DA01417-16DA01493
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