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21/02/2019 | FRANCE | N°16DA01653

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 21 février 2019, 16DA01653


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL NORMAFI et Me A...C..., agissant en qualité de commissaire à l'exécution du plan de redressement de la SARL NORMAFI, ont demandé au tribunal administratif de Rouen de condamner le département de la Seine-Maritime à verser à la société NORMAFI la somme de 32 350,20 euros toutes taxes comprises au titre du solde d'un marché conclu le 14 avril 2008, assortie des intérêts moratoires à compter du 15 août 2014 et de leur capitalisation, ainsi qu'une somme de 10 000 euros en réparation du préjudi

ce résultant de l'absence de fonds de roulement à laquelle la société NORMAFI ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL NORMAFI et Me A...C..., agissant en qualité de commissaire à l'exécution du plan de redressement de la SARL NORMAFI, ont demandé au tribunal administratif de Rouen de condamner le département de la Seine-Maritime à verser à la société NORMAFI la somme de 32 350,20 euros toutes taxes comprises au titre du solde d'un marché conclu le 14 avril 2008, assortie des intérêts moratoires à compter du 15 août 2014 et de leur capitalisation, ainsi qu'une somme de 10 000 euros en réparation du préjudice résultant de l'absence de fonds de roulement à laquelle la société NORMAFI a dû faire face.

Par un jugement n° 1403056 du 19 juillet 2016, le tribunal administratif de Rouen a condamné le département de la Seine-Maritime à verser à la SARL NORMAFI une somme de 997,08 euros, assortie des intérêts moratoires tels que définis aux points n° 12 et n° 15 du jugement, les intérêts échus à la date du 15 août 2015, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date, étant capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes des intérêts, et a rejeté le surplus de la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 16 septembre 2016, et des mémoires, enregistrés les 12 octobre 2018 et 30 octobre 2018, la SARL NORMAFI et Me A...C..., agissant en qualité de commissaire à l'exécution du plan de redressement de la SARL NORMAFI, représentés par Me E...D..., demandent à la cour :

1°) de réformer ce jugement ;

2°) à titre principal, de condamner le département de la Seine-Maritime à verser à la société NORMAFI le solde du marché, soit la somme de 32 350,20 euros toutes taxes comprises, assortie des intérêts moratoires à compter du 15 juillet 2014, avec capitalisation annuelle de ces intérêts ;

3°) à titre subsidiaire, de condamner le département de la Seine-Maritime à lui verser la somme de 14 557,70 euros toutes taxes comprises, assortie des intérêts moratoires à compter du 31 janvier 2012, avec capitalisation annuelle de ces intérêts ;

4°) de condamner le département de la Seine-Maritime à lui verser une indemnité de 10 000 euros pour absence de fonds de roulement, assortie des intérêts moratoires avec capitalisation annuelle de ces intérêts ;

5°) de condamner le département de la Seine-Maritime à lui verser une indemnité de 190 euros, ou à titre subsidiaire, de 133 euros, au titre du préjudice résultant du retard de transmission de la mainlevée de caution de retenue de garantie ;

6°) de mettre à la charge du département de la Seine-Maritime la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code général des impôts ;

- le code des marchés publics ;

- le décret n° 76-87 du 21 janvier 1976 approuvant le cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ;

- le décret n° 2002-232 du 21 février 2002 relatif à la mise en oeuvre du délai maximum de paiement dans les marchés publics ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Hervé Cassara, premier conseiller,

- les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public,

- et les observations de M. F...B..., gérant de la SARL NORMAFI.

Une note en délibéré, présentée pour la SARL NORMAFI, a été enregistrée le 8 février 2019.

Considérant ce qui suit :

1. Il résulte de l'instruction que le mémoire et les productions présentés pour la SARL NORMAFI et MeC..., enregistrés le 12 octobre 2018, sont relatifs à la procédure enregistrée sous le numéro 16DA01420. Par suite, ces documents doivent être rayés du registre du greffe de la cour dans le cadre de la présente procédure et joints à la requête enregistrée sous le numéro 16DA01420.

2. Le département de la Seine-Maritime a confié à la société NORMAFI, par un acte d'engagement du 14 avril 2008, l'exécution des travaux de peinture dans le cadre de l'opération de reconstruction du collège Charles Gounod à Canteleu. Après avoir exécuté une partie des travaux, la société NORMAFI a cédé son fonds de commerce à la société SIPDEG Peinture Ravalement (SIPDEG), par acte du 20 décembre 2011. La société SIPDEG a exécuté le reste des travaux à compter du 1er janvier 2012 et a conclu le 14 juin 2012 avec le département de la Seine-Maritime un avenant portant transfert du marché en cause à son profit. La SARL NORMAFI et Me C..., mandataire judiciaire et commissaire à l'exécution du plan de redressement de la société NORMAFI, relèvent appel du jugement du 19 juillet 2016, en tant que le tribunal administratif de Rouen a seulement partiellement fait droit à leur demande tendant à la condamnation du maître de l'ouvrage à verser à la société NORMAFI le solde du marché ainsi que la somme de 10 000 euros en réparation de l'absence de fonds de roulement à laquelle elle a dû faire face, ainsi qu'une indemnité de 190 euros, ou à titre subsidiaire, de 133 euros, au titre du préjudice subi résultant du retard de transmission de la mainlevée de caution de retenue de garantie. Le département de la Seine-Maritime présente des conclusions d'appel incident tendant à la réformation du jugement en tant qu'il l'a condamné à verser à la société NORMAFI la somme de 997,08 euros en réparation du manque à gagner, assortie des intérêts moratoires capitalisés, ainsi que la somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Sur les conclusions aux fins d'indemnisation de l'appel principal :

En ce qui concerne les conclusions tendant au paiement du solde du marché :

S'agissant de la faute et du lien de causalité :

3. Il résulte de l'instruction que, par un arrêt du 19 juin 2014, la cour d'appel de Rouen a jugé que la cession du fonds de commerce de la société NORMAFI à la société SIPDEG par l'acte de cession du 20 décembre 2011 n'emporte pas, de plein droit, la transmission de l'ensemble des contrats conclus, que seuls les contrats énumérés dans la liste constituant l'annexe n° 1 à cet acte de cession doivent être regardés comme lui ayant été cédés et que les contrats et marchés en cours non mentionnés dans cette liste ne lui ont pas été cédés. Il est, en outre, constant que le contrat en litige, en cours d'exécution à la date de la cession, n'était pas mentionné dans cette liste. Dès lors, ce contrat ne peut être regardé comme ayant été cédé à la société SIPDEG et, par suite, la SARL NORMAFI en est demeurée le titulaire, contractuellement liée au département de la Seine-Maritime, malgré son exécution partielle par la société SIPDEG à compter du 1er janvier 2012, ce qui n'est au demeurant pas contesté par le département de la Seine-Maritime dans le cadre de la présente procédure d'appel.

4. Dans ces conditions, en concluant un avenant au contrat passé avec la SARL NORMAFI en vue de transférer le bénéfice de celui-ci à la société SIPDEG, et en ne s'opposant pas à l'intervention de cette société alors qu'il n'avait pas l'assurance de la cession du marché et sans avoir mis en demeure la SARL NORMAFI, titulaire du contrat, d'exécuter les prestations qui lui incombaient, le département de la Seine-Maritime a commis une faute de nature à engager sa responsabilité contractuelle. Cette faute présente un lien direct et certain avec les préjudices subis par la SARL NORMAFI.

S'agissant du préjudice au principal :

5. Il résulte de l'instruction que la SARL NORMAFI n'a plus réalisé aucune prestation en exécution du contrat en cause à compter du 1er janvier 2012, les travaux restants ayant été exécutés par la société SIPDEG. Par suite, elle ne peut obtenir le paiement de l'intégralité du solde du marché en application de l'article 13 du cahier des clauses administratives générales comme elle le réclame, mais a seulement droit à l'indemnisation de l'un de ses éléments constitutifs, à savoir le manque à gagner, qui doit être calculé sur la base de la marge nette qu'elle escomptait de la réalisation des travaux restants.

6. Il résulte de l'instruction que le montant du solde du marché s'établit à la somme de 24 927,05 euros hors taxes. Pour contester la fixation, par le jugement attaqué, de la valeur de la marge bénéficiaire nette à 10 % de ce montant, les appelants se bornent à soutenir qu'il faudrait retrancher uniquement les frais de main d'oeuvre non engagés, qu'ils évaluent à 45 % du montant du solde du marché sans toutefois l'établir, à faire à nouveau valoir que la société SIPDEG aurait profité de son stock qu'ils évaluent à 20 % du même montant, sans toutefois non plus l'établir, et enfin à soutenir que la marge bénéficiaire doit en tout état de cause être fixée à 25 %, sans apporter aucune justification utile à l'appui de cette allégation. Dès lors, il ne résulte pas de l'instruction qu'en fixant la valeur de la marge bénéficiaire nette attendue à 10 % du montant hors taxe du solde du marché, le tribunal administratif de Rouen ait fait une inexacte appréciation de cette marge et il y a lieu, par suite, de retenir le même calcul. Il suit de là que la SARL NORMAFI et Me C... sont seulement fondés à demander la condamnation du département de la Seine-Maritime à verser à la SARL NORMAFI la somme de 2 492,71 euros au titre de la marge bénéficiaire nette qu'elle escomptait de l'exécution du solde du marché en litige.

7. Il résulte toutefois de l'instruction que ni le personnel de la société NORMAFI, ni son gérant ne se sont présentés sur le chantier une fois la cession du fonds de commerce effectuée et qu'en outre, la société NORMAFI n'a pas alerté le maître de l'ouvrage qu'elle restait le titulaire du marché en cause postérieurement au 1er janvier 2012. Si la société NORMAFI fait à nouveau valoir qu'elle a été empêchée de continuer le suivi du chantier dès lors que la société SIPDEG s'est illégalement emparée des dossiers concernant des marchés qui n'avaient pas été cédés avec le fonds de commerce, cette circonstance ne faisait pas obstacle à ce qu'elle alerte le maître de l'ouvrage, par tout moyen, des difficultés qui l'opposaient à la société SIPDEG et notamment de l'absence de cession du marché en cause à la société SIPDEG. Ainsi, la société NORMAFI a commis elle-même une faute de nature à exonérer partiellement le département de la Seine-Maritime de sa responsabilité. Il résulte de l'instruction qu'il sera fait une juste appréciation de cette exonération en la fixant à 50 %. Par suite, le département de la Seine-Maritime doit être condamné à verser à la société NORMAFI la somme de 1 246,35 euros.

S'agissant de la révision des prix :

8. La clause de révision des prix a pour objet de prendre en compte les modifications des conditions économiques entre le prix du marché à la date de remise de l'offre de l'entreprise et le prix du marché à la date d'exécution effective des prestations. L'indemnité allouée par le présent arrêt étant évaluée, non à la date de remise de l'offre, mais à la date à laquelle la SARL NORMAFI aurait effectivement dû exécuter les travaux restants, ladite indemnité n'est pas susceptible de se voir appliquer une formule de révision du prix. Par suite, il n'y a pas lieu d'appliquer la révision des prix à la marge bénéficiaire comprise dans le solde de son marché dont la SARL NORMAFI est seulement fondée à demander réparation ainsi qu'il a été dit aux points 5 et 6.

S'agissant des intérêts moratoires et de leur capitalisation :

9. En vertu des dispositions de l'article 98 du code des marchés publics dans sa rédaction applicable au présent marché, le dépassement du délai de paiement ouvre de plein droit et sans autre formalité, pour le titulaire du marché ou le sous-traitant, le bénéfice d'intérêts moratoires, à compter du jour suivant l'expiration du délai. En vertu des dispositions de l'article 5 du décret du 21 février 2002 relatif à la mise en oeuvre du délai maximum de paiement dans les marchés publics dans sa rédaction alors applicable, le défaut de paiement dans les délais prévus par l'article 98 du code des marchés publics fait courir de plein droit, et sans autre formalité, des intérêts moratoires au bénéfice du titulaire ou du sous-traitant payé directement.

10. Aux termes de l'article 13.42 du cahier des clauses administratives générales (CCAG) applicable aux marchés de travaux : " Le décompte général, signé par la personne responsable du marché, doit être notifié à l'entrepreneur par ordre de service avant la plus tardive des deux dates ci après : / quarante-cinq jours après la date de remise du projet de décompte final / - trente jours après la publication de l'index de référence permettant la révision du solde ". Aux termes de l'article 11.7 du CCAG, l'entrepreneur a droit à des intérêts moratoires, dans les conditions réglementaires, en cas de retard dans les mandatements dans le solde du marché qui intervient, selon l'article 13.431 du CCAG, dans le délai courant à compter de la notification du décompte général, ce délai ne pouvant être supérieur à soixante jours si la durée contractuelle d'exécution du marché est, comme en l'espèce, supérieure à six mois. Aux termes de l'article 178 du code des marchés publics dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce : " I. L'administration contractante est tenue de procéder au mandatement des acomptes et du solde dans un délai qui ne peut dépasser quarante-cinq jours (...) ; / II. Le défaut de mandatement dans le délai prévu au I. ci-dessus fait courir de plein droit et sans autre formalité, au bénéfice du titulaire et du sous-traitant, des intérêts moratoires, à partir du jour suivant l'expiration dudit délai jusqu'au 15ème jour inclus suivant la date de mandatement du principal ". Ainsi, le défaut de mandatement du solde d'un marché dans les délais prévus par ces dispositions fait courir de plein droit et sans autre formalité, au bénéfice du titulaire ou du sous-traitant, des intérêts moratoires. La circonstance que le solde du marché ne puisse être établi par les parties elles-mêmes est sans incidence sur le point de départ de ces intérêts qui doit être fixé à la date à laquelle ce solde aurait dû être établi. Il n'en va autrement, sans préjudice des stipulations du marché, que lorsque le retard dans l'établissement du solde est imputable au titulaire du marché, le point de départ de ces intérêts étant alors fixé à la date à laquelle le juge est saisi en vue du règlement du litige.

11. En vertu des stipulations de l'article 3-7 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) du marché en litige, le délai global de paiement est le délai de quarante-cinq jours prévu par l'article 98 du code des marchés publics. En vertu des stipulations de l'article 3-8 du CCAP, le défaut de paiement dans les délais prévus par le code des marchés publics fait courir de plein droit et sans autres formalités des intérêts moratoires au bénéfice du titulaire, le taux des intérêts étant, conformément au décret du 21 février 2002 visé ci-dessus, celui de l'intérêt légal en vigueur à la date à laquelle les intérêts moratoires ont commencé a courir, augmenté de deux points.

12. La réception par le maître d'oeuvre, le 16 avril 2014, du projet de décompte final soumis par la société NORMAFI a fait courir un délai de quarante-cinq jours d'établissement du décompte général expirant le 31 mai 2014. Le département de la Seine-Maritime était donc tenu de notifier son décompte général au plus tard à cette dernière date et disposait alors, à compter de cette même date, d'un délai de quarante-cinq jours, soit le 15 juillet 2014 au plus tard, pour mandater le solde du marché. Il ne résulte pas de l'instruction que le retard dans l'établissement du solde du marché soit imputable à la SARL NORMAFI. Il résulte de ce qui précède que les intérêts moratoires au taux fixé au point 11 sont dus à compter du jour suivant cette date, le 16 juillet 2014, sur la somme de 1 246,35 euros mentionnée au point 7.

13. Aux termes de l'article 1343-2 du code civil, les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produisent intérêt si le contrat l'a prévu ou si une décision de justice le précise. Pour l'application de ces dispositions, la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond, même si, à cette date, les intérêts sont dus depuis moins d'une année. En ce cas, cette demande ne prend toutefois effet qu'à la date à laquelle, pour la première fois, les intérêts sont dus pour une année entière. La capitalisation des intérêts a été demandée par la société NORMAFI dans sa requête enregistrée devant le tribunal administratif de Rouen le 11 septembre 2014. Il y a lieu de faire droit à cette demande à compter du 16 juillet 2015, date à laquelle était due pour la première fois une année d'intérêts sur la somme de 1 246,35 euros mentionnée au point 7, ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date.

S'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée :

14. Le versement qu'une partie à un contrat opère au profit de son cocontractant, qui ne résulte pas des modalités dont les parties étaient convenues pour assurer l'équilibre économique du contrat, ne constitue pas la contrepartie directe et la rémunération d'une prestation de services individualisable mais a pour objet de réparer le préjudice subi par le bénéficiaire du versement du fait de la faute de l'autre cocontractant. Il n'est dès lors pas au nombre des opérations que le I de l'article 256 du code général des impôts soumet à la taxe sur la valeur ajoutée. De même, l'indemnité versée par le débiteur à son créancier du fait du retard apporté au paiement de la somme due au titre de l'exécution d'un marché n'est pas la contrepartie d'une prestation de service entrant dans le champ de la taxe sur la valeur ajoutée mais constitue la réparation d'un préjudice qui est dissociable de la prestation fournie par l'entreprise bénéficiaire du versement. Par suite, ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal administratif de Rouen, il n'y a lieu ni de retenir le montant toutes taxes comprises du solde du marché pour l'assiette du calcul de la marge nette, ni d'ajouter la taxe sur la valeur ajoutée à la marge bénéficiaire dont la SARL NORMAFI est seulement fondée à demander réparation ainsi qu'il a été dit aux points 5 et 6, ni d'ajouter cette même taxe aux intérêts moratoires et à leur capitalisation calculés comme indiqués aux points 12 et 13.

En ce qui concerne les conclusions tendant à la réparation du préjudice financier résultant de l'absence de fonds de roulement :

15. La société NORMAFI soutient à nouveau en cause d'appel que l'absence de paiement, par le département de la Seine-Maritime, du solde du marché pendant plusieurs années, a eu pour effet de la priver de fonds de roulement, et d'entraîner, par voie de conséquence, sa mise en redressement judiciaire, prononcée par jugement du tribunal de commerce de Rouen du 18 décembre 2012. Toutefois, le maître de l'ouvrage n'avait pas à payer le solde du marché en cause avant la date de cessation de paiement fixée au 31 juillet 2012 par le jugement du 18 décembre 2012 mentionné ci-dessus. Il résulte en effet de l'instruction que la réception des travaux n'a été prononcée que le 5 juillet 2012 de sorte que ce n'est qu'à partir de cette date que la société NORMAFI aurait pu adresser son projet de décompte au maître d'oeuvre, à la suite de quoi le maître d'ouvrage disposait d'un délai de quarante-cinq jours pour notifier son décompte général, le département disposant encore, ensuite, d'un délai de quarante-cinq jours, aux termes de l'article 3-7 du CCAP, pour procéder au règlement du solde. Ainsi, la date limite de mandatement du solde du marché étant nécessairement postérieure à celle de la cessation des paiements, le lien de causalité entre la cessation des paiements de la société NORMAFI et le paiement avec retard du solde du marché passé avec le département de la Seine-Maritime n'est pas établi. Dès lors, les conclusions des appelants tendant à la condamnation du département de la Seine-Maritime à leur verser une somme de 10 000 euros augmentée des intérêts moratoires et de leur capitalisation, en réparation du préjudice financier résultant de l'absence de fonds de roulement, doivent être rejetées, ainsi que, par voie de conséquence, les conclusions tendant à ce que cette somme soit assortie d'intérêts moratoires capitalisés.

En ce qui concerne les conclusions tendant à la réparation du préjudice financier résultant du retard de transmission de la mainlevée de caution de retenue de garantie :

16. En vertu des dispositions de l'article 101 du code des marchés publics, dans leur rédaction applicables à la date de conclusion du marché, le marché peut prévoir, à la charge du titulaire, une retenue de garantie, dont le montant ne peut être supérieur à 5 % du montant initial augmenté, le cas échéant, du montant des avenants et qui a pour seul objet de couvrir les réserves à la réception des travaux, fournitures ou services ainsi que celles formulées, le cas échéant, pendant le délai de garantie. En vertu des dispositions de l'article 102 du même code, la retenue de garantie peut être remplacée au gré du titulaire par une garantie à première demande ou, si le pouvoir adjudicateur ne s'y oppose pas, par une caution personnelle et solidaire dont l'objet est identique à celui de la retenue de garantie qu'elle remplace. Les dispositions de l'article 103 du même code, applicables à la date de conclusion du marché, prévoient que les établissements ayant accordé leur caution ou leur garantie à première demande sont libérés un mois au plus tard après l'expiration du délai de garantie. Ce même article précise, toutefois, que si des réserves ont été notifiées au titulaire du marché ou aux établissements ayant accordé leur caution ou leur garantie à première demande pendant le délai de garantie et si elles n'ont pas été levées avant l'expiration de ce délai, les établissements sont libérés de leurs engagements un mois au plus tard après la date de leur levée. En vertu des stipulations de l'article 44.1. du cahier des clauses administratives générales (CCAG) applicable aux marchés de travaux, le délai de garantie est, sauf stipulation différente du marché, d'un an à compter de la date d'effet de la réception, et l'article 4.16. du CCAG stipule que le cautionnement est restitué ou la caution qui le remplace libérée, dans les conditions réglementaires, par la personne responsable du marché. Il résulte de l'instruction, notamment de l'article 5-1 du cahier des clauses administratives particulières, que les pièces du marché en litige ne prévoient pas un délai de garantie différent du délai mentionné à l'article 44.1. du CCAG.

17. La société NORMAFI soutient à nouveau que le retard du département de la Seine-Maritime à prononcer la mainlevée de la caution bancaire qu'elle avait souscrite a généré des frais bancaires supplémentaires, d'un montant total de 190 euros et a minima de 133 euros. Il résulte de l'instruction que la réception des travaux a été prononcée le 5 juillet 2012, avec effet au 6 février 2012, et que la mainlevée de la caution souscrite par la société SIPDEG a été réalisée le 12 février 2013, après l'expiration du délai de garantie, alors que la mainlevée de la caution souscrite par la société NORMAFI a quant à elle été prononcée seulement le 14 octobre 2014. Dans ces conditions, le département de la Seine-Maritime a commis une faute de nature à engager sa responsabilité en ne libérant pas la caution dans le délai d'un mois suivant l'expiration du délai de garantie comme le prévoit l'article 103 du code des marchés publics, soit au plus tard le 6 mars 2013.

18. Toutefois, pour établir la réalité de son préjudice, la société NORMAFI se borne à produire à nouveau en cause d'appel un relevé de sa banque du 2 octobre 2012, lequel démontre que la banque avait connaissance dès cette date de la date d'expiration du délai de garantie au 6 mars 2013. Or en l'absence de production de tout document bancaire postérieur à octobre 2012, la société NORMAFI ne démontre pas que la banque aurait continué à percevoir, après le 6 mars 2013, des frais bancaires pour une caution qu'elle savait éteinte et n'établit donc pas la réalité de son préjudice. Par suite, les conclusions doivent être rejetées.

19. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL NORMAFI et Me C...sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a condamné le département de la Seine-Maritime à leur verser la somme de 997,08 euros alors qu'il y a lieu de porter cette somme à 1 246,35 euros, et a retenu la date du 15 août 2014, en lieu et place du 16 juillet 2014, à laquelle les intérêts moratoires étaient dus, et celle du 15 août 2015, en lieu et place de celle du 16 juillet 2015, à laquelle était due pour la première fois une année d'intérêts sur la somme de 1 246,35 euros mentionnée au point 7, mais ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté le surplus de leur demande.

Sur les conclusions d'appel incident :

20. Si le département de la Seine-Maritime conclut à titre incident à la réformation du jugement attaqué en tant qu'il l'a condamné à verser à la société NORMAFI la somme de 997,08 euros au titre de son manque à gagner, assortie des intérêts moratoires capitalisés, ainsi que la somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, aux motifs que la société NORMAFI n'a pas établi de lien de causalité direct et certain entre sa faute et le préjudice dont se prévaut cette société, et, en tout état de cause, que les fautes de la société NORMAFI sont de nature à l'exonérer totalement, et non seulement partiellement, de sa responsabilité, il résulte de ce qui a été dit ci-dessus, notamment aux points 4 et 7, que ces conclusions doivent être rejetées.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

21. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SARL NORMAFI et de MeC..., qui ne sont pas dans la présente instance les parties perdantes, la somme demandée par le département de la Seine-Maritime, au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du département de la Seine-Maritime la somme demandée par la SARL NORMAFI et Me C...au titre des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : Le mémoire et les productions présentés pour la SARL NORMAFI et MeC..., enregistrés le 12 octobre 2018 sont rayés du registre du greffe de la cour dans le cadre de la présente procédure pour être joints à la requête n° 16DA01420.

Article 2 : La somme que le département de la Seine-Maritime a été condamné à verser à la SARL NORMAFI par l'article 2 du jugement du 19 juillet 2016 du tribunal administratif de Rouen est portée à 1 246,35 euros, assortie des intérêts moratoires au taux légal augmenté de deux points, dus à compter du 16 juillet 2014. Ces intérêts porteront capitalisation à compter du 16 juillet 2015, et à chaque échéance annuelle à compter de cette date.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Rouen du 19 juillet 2016 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la SARL NORMAFI et de Me C...est rejeté.

Article 5 : Les conclusions du département de la Seine-Maritime à titre d'appel incident et au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL NORMAFI, à Me A...C..., agissant en qualité de commissaire à l'exécution du plan de redressement de la SARL NORMAFI, et au département de la Seine-Maritime.

N°16DA01653 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3e chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16DA01653
Date de la décision : 21/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-05-01 Marchés et contrats administratifs. Exécution financière du contrat. Rémunération du co-contractant.


Composition du Tribunal
Président : Mme Petit
Rapporteur ?: M. Hervé Cassara
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : BARRABE

Origine de la décision
Date de l'import : 19/03/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-02-21;16da01653 ?
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