Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E... B... a demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008, 2009 et 2010, ainsi que des pénalités correspondantes.
Par un jugement n° 1400339 du 23 mai 2017, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 31 juillet 2017 et 19 juillet 2018, M. B..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008, 2009 et 2010, ainsi que des pénalités correspondantes.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D... A..., première conseillère,
- et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... a fait l'objet au cours de l'année 2011 d'un contrôle sur pièces au titre de l'année 2008 qui faisait suite à la vérification de comptabilité de la SARL Patrimoine Familial Immobilier (PFI), dont il est gérant associé. L'administration fiscale a porté à sa connaissance, par une proposition de rectification du 28 septembre 2011, des rectifications résultant de la réintégration dans son revenu imposable de l'année vérifiée, dans la catégorie des revenus mobiliers, des sommes portées par la SARL PFI au crédit de son compte courant d'associé ouvert dans ses écritures et considérées comme des revenus des capitaux mobiliers, au sens des dispositions du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts. Par un avis du 28 août 2011, l'administration fiscale a par ailleurs informé M. B... de l'engagement d'un examen de sa situation fiscale personnelle, à l'issue de laquelle elle lui a adressé, le 16 juillet 2012, une proposition de rectification prévoyant la réintégration dans son revenu imposable des années 2009 et 2010 de sommes portées au crédit de son compte courant d'associé dans les écritures de la SARL PFI, dans la même catégorie et sur le même fondement. M. B... fait appel du jugement du 23 mai 2017 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008 à 2010, ainsi que des pénalités correspondantes.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : " L'administration des impôts contrôle les déclarations ainsi que les actes utilisés pour l'établissement des impôts, droits, taxes et redevances. / (...) A cette fin, elle peut demander aux contribuables tous renseignements, justifications ou éclaircissements relatifs aux déclarations souscrites ou aux actes déposés. (...) ". Aux termes de l'article L. 12 du même livre : " Dans les conditions prévues au présent livre, l'administration des impôts peut procéder à l'examen contradictoire de la situation fiscale des personnes physiques au regard de l'impôt sur le revenu, qu'elles aient ou non leur domicile fiscal en France, lorsqu'elles y ont des obligations au titre de cet impôt. / A l'occasion de cet examen, l'administration peut contrôler la cohérence entre, d'une part les revenus déclarés et, d'autre part, la situation patrimoniale, la situation de trésorerie et les éléments du train de vie des membres du foyer fiscal. (...) ".
3. Les rehaussements du revenu imposable de M. B... au titre de l'année 2008 ont été portés à sa connaissance par une première proposition de rectification en date du 28 septembre 2011. Il ne résulte pas de l'instruction, compte tenu en particulier des mentions figurant dans cette première proposition de rectification, et il n'est d'ailleurs pas allégué, que ces rehaussements auraient procédé du contrôle de la cohérence entre les revenus déclarés par l'intéressé et sa situation patrimoniale, sa situation de trésorerie ou les éléments de son train de vie que suppose l'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle du contribuable prévue à l'article L. 12 du livre des procédures fiscales et non, comme le précise l'administration fiscale, d'un simple contrôle sur pièces opéré, sur le fondement des dispositions de l'article L. 10 de ce livre, à la suite de la vérification de la comptabilité de la SARL PFI. Si, par ailleurs, l'administration fiscale a adressé à M. B... un avis, en date du 26 août 2011, l'informant de l'engagement d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle en ce qui concerne " les revenus perçus en 2008, 2009 et 2010 ", il est constant que les opérations de contrôle correspondantes ont effectivement commencé le 30 septembre 2011, soit postérieurement à l'envoi de la première proposition de rectification, et il résulte des termes mêmes de la seconde proposition de rectification adressée à M. B..., en date du 16 juillet 2012, que les rehaussements résultant de cet examen contradictoire ne portaient que sur ses revenus imposables au titre des années 2009 et 2010. Il s'ensuit que le moyen tiré de ce que la proposition de rectification du 28 septembre 2011 a été adressée à M. B... sans que celui-ci ait bénéficié de la procédure contradictoire applicable en cas d'examen d'une situation fiscale personnelle est inopérant.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. / Sur demande du contribuable reçue par l'administration avant l'expiration du délai mentionné à l'article L. 11, ce délai est prorogé de trente jours (...) ". Aux termes de l'article L. 11 du même livre : " A moins qu'un délai ne soit prévu par le présent livre, le délai accordé aux contribuables pour répondre aux demandes de renseignements, de justifications ou d'éclaircissements et, d'une manière générale, à toute notification émanant d'un agent de l'administration des impôts est fixé à trente jours à compter de la réception de cette notification ". Enfin, aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition, prorogé, le cas échéant, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de cet article ".
5. Il résulte de ces dispositions que l'administration est tenue d'inviter le contribuable à présenter ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition de rectification. Sur demande du contribuable reçue par l'administration fiscale avant son expiration, ce délai est prolongé pour une nouvelle période de trente jours.
6. Il résulte de l'instruction que la proposition de rectification en date du 28 septembre 2011, relative à l'année 2008, a été remise en main propre à M. B... le 24 octobre suivant. Cette proposition de rectification mentionnait sur son premier feuillet que le délai de trente jours imparti au contribuable pour faire connaître ses éventuelles observations courait à compter de la date de sa réception et rappelait la possibilité pour celui-ci d'en demander, dans le même délai, la prolongation. Au demeurant, après avoir présenté une demande en ce sens par un courrier reçu le 21 novembre 2011 par l'administration fiscale, qui y a fait droit le même jour, le contribuable n'a présenté ses observations que le 19 décembre suivant. Par suite, M. B... ne peut sérieusement soutenir qu'en raison de l'écart entre la date de la proposition de rectification du 28 septembre 2011 et la notification de ce document, il n'aurait pas été mis à même, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 57-1 du livre des procédures fiscales, de bénéficier du délai de trente jours pour présenter ses observations.
7. En troisième lieu, ainsi qu'il ressort du point 3, M. B... ne saurait utilement invoquer une méconnaissance des dispositions de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales, relatives à l'obligation pour l'administration de mentionner dans ses échanges avec le contribuable les données financières des rectifications, dès lors qu'aux termes mêmes de cet article, elles ne s'appliquent qu'en cas de vérification de comptabilité ou d'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle du contribuable.
Sur le bien-fondé des impositions en litige :
8. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : (...) 2° toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices (...) ".
9. En application de ces dispositions, les sommes inscrites au crédit d'un compte courant d'associé d'une société soumise à l'impôt sur les sociétés sont, sauf preuve contraire, à la disposition de cet associé, alors même que l'inscription résulterait d'une erreur comptable involontaire, et ont donc, même dans une telle hypothèse, le caractère de revenus distribués, imposables entre les mains de cet associé dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers en vertu du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts. Pour que l'associé échappe à cette imposition, il lui incombe de démontrer, le cas échéant, qu'il n'a pas pu avoir la disposition de ces sommes ou que ces sommes ne correspondent pas à la mise à disposition d'un revenu.
10. En premier lieu, M. B... soutient que les sommes portées au crédit de son compte courant d'associé au cours des exercices clos par la SARL PFI le 31 décembre des années 2008, 2009 et 2010 et réintégrées dans son revenu imposable par l'administration fiscale à hauteur de 113 940 euros au titre de l'année 2008, de 83 022,70 euros au titre de l'année 2009 et de 39 768,74 euros au titre de l'année 2010, correspondaient soit à des versements effectués au profit de créanciers de la société en vertu de dettes qu'il n'avait pas prises en charge, en particulier au paiement de fournisseurs de la SARL PFI ou au remboursement d'acomptes versés à cette dernière pour des prestations non réalisées, soit au versement à la SARL PFI de sommes dues par ses locataires ou à l'occasions d'opérations de ventes immobilières. Toutefois, si M. B... fait valoir que ces écritures procédaient d'erreurs comptables, les opérations considérées n'ayant entraîné pour lui aucun enrichissement, une telle circonstance ne faisait, par elle-même, pas obstacle à ce que l'administration les réintègre dans ses revenus imposables des années 2009 et 2010 sur le fondement des dispositions du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts. De même, M. B... ne saurait utilement faire valoir que l'inscription erronée d'une somme de 5 000 euros portée au crédit de son compte courant d'associé le 4 décembre 2008, imposée en tant que revenu distribué au titre de cette année, avait donné lieu à une correction au cours de l'exercice suivant.
11. En second lieu, pour soutenir qu'il n'a pas eu la disposition des sommes litigieuses, M. B... fait valoir que la situation financière de la SARL PFI ne permettait pas leur prélèvement, dès lors qu'elle se caractérisait, à la fin de chaque exercice, d'une part, par un solde du compte de disponibilités d'un faible montant, soit 4 728 euros, 1 020 euros et 2 460 euros au 31 décembre respectivement des années 2008, 2009 et 2010, et, d'autre part, par des échéances d'emprunts bancaires importants. Toutefois, pour apprécier la situation de trésorerie de la société en fin d'exercice, il n'y a lieu de tenir compte que des dettes financières à court terme, telles que des découverts bancaires ou d'autres comptes courants d'associé créditeurs remboursables à tout moment, dont l'existence n'est en l'espèce pas alléguée. Par ailleurs, alors que l'administration fait état de prélèvements en compte courant d'associé auxquels M. B... a procédé au cours de chaque exercice, ce dernier se borne sur ce point à invoquer le faible impact de ces prélèvements sur le solde créditeur de son compte courant d'associé à la clôture des exercices clos par la SARL PFI en 2009 et 2010 et l'augmentation de ce solde sur ces deux exercices. Dans ces conditions, et alors même que la disponibilité des sommes considérées ne pouvait être appréciée en tenant compte des stocks et des encours de trésorerie de la société, M. B... ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe, de ce qu'il n'aurait pas eu la disposition effective des sommes réputées distribuées avant 31 décembre de chacune des trois années d'imposition en litige. L'administration était, par suite, fondée à les réintégrer dans son revenu imposable de ces trois années.
12. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... B... et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.
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No17DA01544