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08/04/2021 | FRANCE | N°20DA01444

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 08 avril 2021, 20DA01444


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 22 août 2019 par lequel le préfet du Pas-de-Calais a rejeté sa demande de certificat de résidence, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour, dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement sous astreinte de 150 euros par jour de retard, à défaut, d'enjoindre au préfet de l

ui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de procéder au réexamen de sa...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 22 août 2019 par lequel le préfet du Pas-de-Calais a rejeté sa demande de certificat de résidence, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour, dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement sous astreinte de 150 euros par jour de retard, à défaut, d'enjoindre au préfet de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de procéder au réexamen de sa situation, dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement sous astreinte de 150 euros par jour de retard, et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 700 euros à lui verser en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2001001 du 10 août 2020, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 11 septembre 2020 et 30 novembre 2020, M. A..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 22 août 2019 par lequel le préfet du Pas-de-Calais a rejeté sa demande de certificat de résidence et l'a obligé à quitter le territoire français ;

3°) d'enjoindre au préfet du Pas-de-Calais de lui délivrer un titre de séjour, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, d'enjoindre au préfet de procéder au réexamen de sa situation, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à lui verser en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Nil Carpentier-Daubresse, premier conseiller ;

- et les observations de Me C... pour M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant algérien, né le 1er juin 1980, est entré en France le 18 mai 2018 muni de son passeport revêtu d'un visa de court séjour délivré par les autorités consulaires françaises à Alger, valable du 16 octobre 2017 au 15 octobre 2019. Il a sollicité, le 21 mars 2019, la délivrance d'une carte de séjour en faisant valoir son état de santé. Par un arrêté du 22 août 2019, le préfet du Pas-de-Calais a rejeté sa demande de titre de séjour et a obligé l'intéressé à quitter le territoire français. M. A... relève appel du jugement du 10 août 2020 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la décision portant refus de délivrance d'un certificat de résidence :

2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) ". Aux termes de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant: a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; d) la durée prévisible du traitement. Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays [...] ".

3. Il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance ou le renouvellement d'un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui se prévaut des stipulations précitées de l'article 6 de l'accord franco algérien du 27 décembre 1968, de vérifier que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays d'origine. Lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine. Si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine.

4. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.

5. Il ressort des pièces du dossier que, pour refuser la délivrance d'un certificat de résidence à M. A... sur le fondement du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, le préfet du Pas-de-Calais a estimé, en s'appuyant sur l'avis établi par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration en date du 30 juillet 2019, que, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il pourrait, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, y bénéficier effectivement d'un traitement approprié et que son état de santé lui permettait de voyager sans risque vers son pays d'origine.

6. Ayant décidé de lever le secret relatif aux informations médicales qui le concernent, M. A... produit des attestations médicales notamment celle en date du 29 avril 2019 émanant du docteur Ajzenberg, chef de service du laboratoire d'hématologie de l'hôpital Bichat, mentionnant que l'intéressé présente une afibrinogénémie congénitale associée à une mutation T895C du gène FGB à l'état homozygote qui est une pathologie très rare caractérisée par des hémorragies dues à une absence complète de fibrinogène circulant ainsi qu'à des thromboses et qu'il a fait l'objet de lourds antécédents médico-chirurgicaux liés à ces deux anomalies de la coagulation. Toutefois, ces éléments ne mentionnent pas que M. A... suivrait, à la date de la décision attaquée, un traitement dont il ne pourrait effectivement bénéficier en Algérie. S'il produit des pièces indiquant qu'il a fait l'objet d'une hospitalisation en mai 2020 et qu'il est traité par des injections de Clottafact deux fois par semaine, lequel médicament n'est pas disponible en Algérie et ne saurait être remplacé par une perfusion de plasma frais congelé, ces éléments sont postérieurs à la décision contestée. Or le juge de l'excès de pouvoir apprécie la légalité d'un acte administratif à la date de son édiction. Dans ces conditions, si l'intéressé peut, s'il s'y croit fondé, solliciter la délivrance d'un certificat de résidence en faisant état de ces nouvelles circonstances de fait, celles-ci demeurent sans incidence sur la légalité de la décision contestée. Enfin, les éléments produits ne permettent pas davantage d'établir qu'à la date de la décision en litige son état de santé l'empêcherait de voyager sans risque vers l'Algérie. Par suite, le moyen tiré de ce que le refus de certificat de résidence méconnaît les stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien en l'absence de traitement approprié dont il pourrait effectivement bénéficier en cas de retour dans son pays d'origine et d'impossibilité d'y voyager sans risque doit être écarté.

7. Il résulte ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision de refus de délivrance d'un certificat de résidence est entachée d'illégalité.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

8. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 7 que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'un certificat de résidence, qui fonde l'obligation de quitter le territoire français, ne peut qu'être écarté.

9. En second lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ".

10. Il résulte de ce qui a été dit au point 6 que M. A... n'établit pas qu'il ne pourrait, à la date de la décision en litige, bénéficier effectivement d'un traitement approprié en Algérie ni que son état de santé ne lui permettrait pas de voyager sans risque vers ce pays. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 22 août 2019. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction assorties d'une astreinte ainsi que la demande présentée par son conseil sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 7611 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Me C... pour M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet du Pas-de-Calais.

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N°20DA01444

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20DA01444
Date de la décision : 08/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: M. Nil Carpentier-Daubresse
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : MANNESSIER

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-04-08;20da01444 ?
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