Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... E... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 16 août 2016 par laquelle l'inspecteur du travail de la troisième section de l'unité territoriale de la Seine-Maritime a autorisé son licenciement pour motif économique.
Par un jugement n° 1603349 du 13 décembre 2018, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 11 février 2019, le 4 octobre 2019, le 8 janvier 2021 et le 16 avril 2021, ainsi qu'un mémoire non communiqué enregistré le 6 mai 2021, Mme E..., représentée par Me A... D..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler la décision du 16 août 2016 de l'inspecteur du travail de l'unité territoriale de Seine-Maritime autorisant son licenciement ;
3°) de refuser d'autoriser son licenciement ;
4°) de mettre à la charge solidaire de Me C... en qualité de mandataire liquidateur de l'association Institut consulaire de formation, de la chambre de commerce et d'industrie Seine Mer Normandie et de l'Etat, la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail :
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Denis Perrin, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. L'association Institut consulaire de formation-Société industrielle d'Elbeuf formation gérait un centre de formation pour apprentis et proposait des activités de formation professionnelle à Elbeuf. Elle a cessé ses activités en avril 2016. Me F... C..., liquidateur amiable de l'association a demandé, dans ce contexte, l'autorisation de licencier Mme B... E... qui exerçait les fonctions de formatrice depuis le 1er septembre 2005 et était déléguée suppléante du personnel. L'inspecteur du travail territorialement compétent a autorisé ce licenciement économique par décision du 16 août 2016. Saisi par Mme E..., le tribunal administratif de Rouen a confirmé cette décision, par jugement du 13 décembre 2018. Mme E... relève appel de ce jugement. Parallèlement, par jugement du 2 mars 2017, le tribunal de grande instance de Rouen a ouvert une procédure de liquidation judiciaire de l'association Institut consulaire de formation- Société industrielle d'Elbeuf Formation et a désigné Me C... comme liquidateur judiciaire.
2. Mme E... soulève pour la première fois en appel le moyen tiré de ce que Me C... n'avait pas qualité pour agir au nom de l'association. Il appartient à l'administration, saisie d'une demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé, de vérifier que cette demande est présentée par l'employeur de ce salarié ou par une personne ayant qualité pour agir en son nom. Un tel moyen a donc trait à la procédure interne au sein de l'entreprise et non à la procédure devant l'inspecteur du travail. Il constitue ainsi, contrairement à ce que soutient le liquidateur, un moyen de légalité interne de la décision prise par l'inspecteur du travail. Or, en première instance, Mme E... n'avait soulevé que des moyens ayant trait à la légalité interne. Par suite, le moyen tiré du défaut de qualité pour agir de Me C..., qui se rattache à la même cause juridique que les moyens invoqués devant le tribunal administratif, est recevable.
3. L'article 18 des statuts de l'association Institut consulaire de formation, reconnue d'utilité publique par décret du 23 janvier 1864, prévoit que l'assemblée générale, dûment convoquée dans les conditions prévues par ces statuts ne peut prononcer la dissolution de l'association que si la moitié plus un des membres en exercice sont présents et à la majorité des deux tiers des membres présents. L'article 20 des mêmes statuts dispose que la délibération décidant de la dissolution doit être transmise au ministre de l'intérieur et au ministre de l'éducation nationale et n'est valable qu'après approbation du gouvernement.
4. En l'espèce, il ressort du procès-verbal de la délibération de l'assemblée générale du 18 avril 2016, produit à la suite d'une mesure d'instruction ordonnée par la cour, que l'assemblée générale a décidé à l'unanimité de la dissolution de l'association et a désigné Me C... comme liquidateur amiable. Ce procès-verbal atteste également que les conditions de convocation et de quorum avaient été respectées. Toutefois, aucun élément ne démontre que cette délibération ait été transmise au ministre de l'intérieur et au ministre de l'éducation nationale, ni a fortiori qu'elle ait été approuvée par le gouvernement, conformément aux statuts. Dans ces conditions, Mme E... est fondée à soutenir que la dissolution n'était pas valable et que par suite, Me C..., désigné pour la mettre en oeuvre, n'avait pas qualité pour agir au nom de l'association. L'inspecteur du travail ne pouvait ainsi autoriser le licenciement de Mme E.... Ce motif entraîne en conséquence l'illégalité de cette décision d'autorisation du 16 août 2016. Le jugement du tribunal de Rouen du 13 décembre 2018 doit donc être annulé, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens soulevés par Mme E....
5. Mme E... réitère la demande faite en première instance que la juridiction administrative refuse d'autoriser son licenciement. Il n'appartient pas à la juridiction administrative de se substituer dans ses pouvoirs de décision à l'administration, comme le fait valoir en défense le liquidateur de l'association. Par suite, ces conclusions ne peuvent qu'être rejetées comme irrecevables.
6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme E..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Me C..., en qualité de représentant de l'association Institut consulaire de formation demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les conclusions au même titre de Mme E... dirigées contre la chambre de commerce et d'industrie Seine Mer Normandie, doivent également être rejetées, cet établissement n'étant pas partie à la présente instance. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce de faire droit aux conclusions au même titre de Mme E... dirigées contre Me C... en tant que représentant de l'association Institut consulaire de formation- Société industrielle d'Elbeuf Formation. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme E... et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Rouen du 13 décembre 2018 est annulé.
Article 2 : La décision de l'inspecteur du travail du 16 août 2016 autorisant le licenciement de Mme E... est annulée.
Article 3 : L'Etat versera à Mme E..., la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Me A... D... pour Mme B... E..., à Me G... H... pour l'association Institut consulaire de France, représentée par son liquidateur, Me F... C... et à la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion.
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N°19DA00324
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