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25/11/2021 | FRANCE | N°20DA01927

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 25 novembre 2021, 20DA01927


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 19 septembre 2017 par lequel le maire de la commune de Mentque-Nortbécourt a fixé le montant mensuel de son indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise (I.F.S.E.) à la somme de 261,74 euros à compter du 1er octobre 2017 et d'enjoindre à la commune de Mentque-Nortbécourt de lui attribuer, avec effet au 1er octobre 2017, le montant qu'il percevait précédemment mensuellement soit la somme de 511,74 euros .

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n jugement n° 1710230 du 6 octobre 2020, le tribunal administratif de Lille a rej...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 19 septembre 2017 par lequel le maire de la commune de Mentque-Nortbécourt a fixé le montant mensuel de son indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise (I.F.S.E.) à la somme de 261,74 euros à compter du 1er octobre 2017 et d'enjoindre à la commune de Mentque-Nortbécourt de lui attribuer, avec effet au 1er octobre 2017, le montant qu'il percevait précédemment mensuellement soit la somme de 511,74 euros .

Par un jugement n° 1710230 du 6 octobre 2020, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 4 décembre 2020, 6 janvier et 9 juillet 2021, M. A..., représenté par Me Christine Laffargue, demande à la cour :

1°) d'annuler cet arrêté ;

2°) d'enjoindre à la commune de Mentque-Nortbécourt de lui attribuer, avec effet au 1er octobre 2017 le montant qu'il percevait précédemment mensuellement, soit la somme de 511,74 euros ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Mentque-Nortbécourt la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 91-875 du 6 septembre 1991 ;

- le décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 ;

- l'arrêté du 28 avril 2015 du ministre de la décentralisation et de la fonction publique ;

- l'arrêté du 16 juin 2017 du ministre de l'intérieur ;

- l'arrêté du 27 août 2017 du ministre de la décentralisation et de la fonction publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre,

- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public,

- et les observations de Me Pauline Anger-Bourez substituant Me Laurent Fillieux pour la commune de Mentque-Nortbécourt.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 17 janvier 2017, le conseil municipal de la commune de Mentque-Nortbécourt a mis en place le régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel (R.I.F.S.E.E.P.) comprenant, d'une part, l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise (I.F.S.E.) et, d'autre part, le complément indemnitaire annuel (C.I.A.). Par un arrêté du 19 septembre 2017, le maire de Mentque-Nortbécourt a fixé le montant mensuel de l'I.F.S.E. de M. A..., adjoint technique territorial, à la somme de 261,74 euros à compter du 1er octobre 2017. M. A..., qui affirme qu'il percevait des indemnités mensuelles de 511,74 euros résultant de la combinaison de l'indemnité d'exercice des missions des préfectures (I.E.M.P.) et de l'indemnité d'administration et technicité (I.A.T.), relève appel du jugement du 6 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. M. A... soutient que le jugement du tribunal administratif de Lille a été rendu en violation du principe du contradictoire et que les premiers juges auraient rejeté sa requête en omettant de répondre à l'ensemble des moyens opérants soulevés. Toutefois, ces moyens, qui ne sont pas assortis de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé ou la portée, doivent être écartés.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. En premier lieu, l'arrêté contesté vise l'ensemble les dispositions relatives à l'attribution individuelle de l'I.F.S.E. et relève que les fonctions exercées et l'expérience professionnelle acquise justifient le classement de M. A... dans le groupe de fonctions 2 de la catégorie C. Ainsi, cette décision comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cet arrêté doit, en tout état de cause, être écarté.

4. En deuxième lieu , M. A... soutient que la réduction du montant de son régime indemnitaire constitue une sanction déguisée. Toutefois, la décision par laquelle l'autorité qui en est chargée détermine, dans les conditions fixées par la réglementation, le montant des indemnités d'un agent public au regard de sa contribution au bon fonctionnement du service, n'est en aucun cas une mesure disciplinaire. En tout état de cause, une mesure revêt le caractère d'une sanction disciplinaire déguisée lorsque, tout à la fois, il en résulte une dégradation de la situation professionnelle de l'agent concerné et que la nature des faits qui ont justifié la mesure et l'intention poursuivie par l'administration révèlent une volonté de sanctionner cet agent. En l'espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier que le montant d'I.F.S.E. attribué à l'appelant diffère de celui attribué à des agents à un poste et une expérience professionnelle comparables, ni davantage que le passage d'une notation de 18 ou 19/20 de 2007 à 2013 à 14/20 en 2014 traduirait la volonté de le sanctionner alors qu'outre une appréciation " Très bien " en 2014, de l'aveu même de l'appelant dans ses écritures de première instance, les comptes rendus d'entretiens professionnels pour les années 2015 et 2016 révèlent une prise en compte de ses progrès ainsi que des encouragements, avec des avis favorables aux formations et pistes d'évolution. Par suite, le moyen tiré de l'existence d'une sanction déguisée et de la méconnaissance des garanties procédurales afférentes doit être écarté.

5. En troisième lieu, M. A... excipe de l'illégalité de la délibération du conseil municipal de la commune de Mentque-Nortbécourt du 17 janvier 2017 mettant en place le R.I.F.S.E.E.P. D'une part, c'est l'arrêté du 16 juin 2017, modifiant l'arrêté du 28 avril 2015 pris pour l'application aux corps d'adjoints techniques des administrations de l'Etat des dispositions du décret du 20 mai 2014 portant création d'un nouveau régime indemnitaire, qui y a inclus le corps des adjoints techniques des administrations de l'Etat et a fixé pour ce corps, par groupe de fonctions, des plafonds d'indemnités. Conformément aux dispositions de l'article 1er du décret du 6 septembre 1991 pris pour l'application du premier alinéa de l'article 88 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa version en vigueur à la date de la délibération : " Le régime indemnitaire fixé par les assemblées délibérantes des collectivités territoriales (...) pour les différentes catégories de fonctionnaires territoriaux ne doit pas être plus favorable que celui dont bénéficient les fonctionnaires de l'Etat exerçant des fonctions équivalentes. (...) ". La délibération du conseil municipal de la commune de Mentque-Nortbécourt du 17 janvier 2017 mettant en place le R.I.F.S.E.E.P. précise, pour les adjoints techniques territoriaux, être " en attente de parution de l'arrêté ministériel - non éligible ". Par suite, le moyen tiré de ce que cette délibération aurait étendu le nouveau régime aux adjoints techniques territoriaux avant son entrée en vigueur pour les agents techniques de l'Etat, en méconnaissance du principe de parité fixé par l'article 1er du décret du 6 septembre 1991, doit être écarté.

6. D'autre part, comme l'indique son intitulé même, le décret du 20 mai 2014 portant création du R.I.F.S.E.E.P. n'est pas directement applicable aux fonctionnaires territoriaux et l'appelant ne saurait utilement soutenir que la délibération du 17 janvier 2017 serait contraire à l'article 6 de ce décret qui prévoit une garantie de maintien du montant indemnitaire perçu dans l'ancien régime jusqu'au prochain changement de fonctions. Par ailleurs, il revient à l'assemblée délibérante de chaque collectivité territoriale de fixer elle-même la nature, les conditions d'attribution et le taux moyen des indemnités bénéficiant aux fonctionnaires de la collectivité, sans que le régime ainsi institué puisse être plus favorable que celui dont bénéficient les fonctionnaires de l'Etat d'un grade et d'un corps équivalents au grade et au cadre d'emplois de ces fonctionnaires territoriaux et sans que la collectivité soit tenue de faire bénéficier ses fonctionnaires de régimes indemnitaires identiques à ceux des fonctionnaires de l'Etat. Il lui est notamment loisible de subordonner le bénéfice d'un régime indemnitaire à des conditions plus restrictives que celles qui sont applicables aux fonctionnaires de l'Etat. Le respect du principe d'égalité entre les agents publics ne s'oppose pas à l'institution de différences dans le régime indemnitaire dont ils bénéficient, fondées sur des différences dans les conditions d'exercice de leurs fonctions ou sur les nécessités du bon fonctionnement du service auquel ils appartiennent. Ainsi, si l'article 1er du décret du 6 septembre 1991, cité au point 5, pose le principe d'une parité entre les fonctions publiques, c'est uniquement en tant qu'est fixé un plafond indemnitaire maximal. Cet article n'impose pas aux collectivités locales de prévoir un régime indemnitaire prévoyant des garanties minimales similaires à celles prévalant pour la fonction publique d'Etat. Par suite le moyen tiré de ce que la délibération aurait méconnu une garantie de maintien des montants perçus antérieurement doit également être écarté.

7. En quatrième lieu, pour les motifs exposés au point 6, M. A... ne peut pas plus utilement soutenir que l'arrêté du 19 septembre 2017 du maire de Mentque-Nortbécourt fixant le montant mensuel de son I.F.S.E. serait contraire au décret du 20 mai 2014 et à une prétendue garantie d'un montant indemnitaire perçu antérieurement. Dans le cadre d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre une décision qui ne le prévoit pas, l'appelant ne peut pas non plus utilement se prévaloir de ce que le maire lui aurait assuré maintenir les montants qu'il percevait antérieurement.

8. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 242-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Par dérogation à l'article L. 242-1, l'administration peut, sans condition de délai : / 1° Abroger une décision créatrice de droits dont le maintien est subordonné à une condition qui n'est plus remplie (...). ". La délibération du conseil municipal de la commune de Mentque-Nortbécourt du 17 janvier 2017 dispose, en son article 16, que : " L'I.F.S.E. et le C.I.A. sont exclusifs, par principe, de tout autre régime indemnitaire de même nature. / Le RIFSEEP ne pourra se cumuler avec : (...) / - L'Indemnité d'Administration et de Technicité (IAT), / - L'Indemnité d'Exercice de Missions des Préfectures (IEMP) (...). ". L'article 5 du décret du 20 mai 2014 précise que : " L'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise et le complément indemnitaire annuel sont exclusifs de toutes autres primes et indemnités liées aux fonctions et à la manière de servir, à l'exception de celles énumérées par arrêté du ministre chargé de la fonction publique et du ministre chargé du budget. ".

9. En vertu du principe de parité entre les fonctions publiques pour la fixation d'un plafond indemnitaire, mentionné au point 6, le conseil municipal de Mentque-Nortbécourt était tenu d'interdire le cumul d'indemnités entre l'ancien et le nouveau régime, alors que ni l'I.A.T, ni l'I.E.M.P ne figurent parmi les exceptions visées par l'article 5 précité. M. A... n'est donc pas fondé à soutenir que l'arrêté du 19 septembre 2017 aurait illégalement procédé à l'abrogation des arrêtés des 10 janvier 2010 et 14 février 2014 fixant antérieurement son régime indemnitaire.

10. Enfin, alors que dans l'arrêté du 19 septembre 2017 le maire de Mentque-Nortbécourt a tenu compte des fonctions exercées par l'appelant ainsi que de son expérience professionnelle pour le classer dans le groupe de fonctions 2 de la catégorie C pour lui attribuer son montant mensuel d'I.F.S.E, il ne ressort pas des pièces du dossier que cet arrêté serait entaché d'un détournement de pouvoir.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 19 septembre 2017. Par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par la commune, sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

12. Il n'y a, par ailleurs, pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la commune de Mentque-Nortbécourt à l'encontre de M. A... sur le fondement des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Mentque-Nortbécourt sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la commune de Mentque-Nortbécourt.

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N°20DA01927


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