Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société par actions simplifiée (SAS) Financière SASA a demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2013, 2014 et 2015, d'autre part, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par une ordonnance n° 1906879 du 15 mars 2021, le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Lille a donné acte du désistement d'office de la demande de la société Financière SASA.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 29 mars 2021, 6 juillet 2021 et 8 juillet 2021, la société Financière SASA, représentée par Me Deschamps, demande à la cour :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 1906879 du 15 mars 2021 du président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Lille ;
2°) de renvoyer l'affaire au tribunal administratif de Lille afin qu'il soit statué sur sa demande.
Elle soutient que :
- le premier juge n'a pas fait, dans les circonstances de l'affaire, une juste application des dispositions de l'article R. 612-5-1 du code de justice administrative ;
- aucun élément ne permettait au premier juge de s'interroger sur l'intérêt que sa demande conservait pour elle ; en effet, sa demande en décharge des impositions en litige présentait des chances significatives d'être accueillie par le juge de l'impôt, dès lors, notamment, que la commission départementale des impôts directs et du chiffre d'affaires du Nord a émis, le 3 juillet 2018, un avis défavorable aux rectifications envisagées par le service ; les rappels d'impôt en litige portent sur un montant significatif ; aucun dégrèvement ne lui a été accordé en première instance ; c'est pour des raisons contingentes, relatives à l'organisation du cabinet de son avocat durant la pandémie de Covid-19, qu'aucune réponse n'a été donnée, dans le délai d'un mois, au courrier du greffe l'invitant à confirmer les conclusions de sa demande.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 8 juin 2021 et 22 juillet 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- le premier juge était en droit de s'interroger sur l'intérêt que conservait la demande pour la société Financière SASA dès lors que celle-ci n'avait pas produit de mémoire en réplique à la suite de la communication, le 11 février 2020, du mémoire en défense produit par l'administration ; le contexte lié à la pandémie de Covid-19 ne saurait justifier l'absence de réponse de la contribuable au courrier du greffe l'invitant à confirmer le maintien des conclusions de sa demande ;
- les garanties procédurales ont été respectées par le premier juge, qui a donné acte du désistement d'office de la demande de la société Financière SASA, faute pour celle-ci d'avoir confirmé le maintien de sa demande dans le délai d'un mois à compter de l'invitation du greffe en date du 5 février 2021.
Par une ordonnance du 8 juillet 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 9 août 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Heu, président de chambre,
- les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public,
- et les observations de Me Debels, représentant la SAS Financière SASA.
Considérant ce qui suit :
1. La société par actions simplifiée (SAS) Financière SASA, qui, exerçant l'activité de société holding, a opté pour l'intégration fiscale prévue à l'article 223 A du code général des impôts, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015. Les rectifications résultant de ce contrôle ont été notifiées à la SAS Financière SASA par une proposition de rectification en date du 1er juin 2017. A la suite des observations présentées par cette société le 26 juillet 2017, le service a maintenu les rectifications par une lettre du 24 août 2017. La commission départementale des impôts directs et du chiffre d'affaires du Nord a émis, le 3 juillet 2018, un avis défavorable aux rectifications envisagées par le service. Les impositions ont été mise en recouvrement le 15 novembre 2018, à hauteur de 79 080 euros en droits et 11 029 euros en pénalités, au titre des cotisations supplémentaires d'impôt se rapportant à la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015. Après rejet de sa réclamation par une décision du 12 juin 2019, la SAS Financière SASA a demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2013, 2014 et 2015, d'autre part, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle relève appel de l'ordonnance du 15 mars 2021 par laquelle le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Lille a donné acte du désistement d'office de l'ensemble des conclusions de sa demande.
2. Aux termes de l'article R. 612-5-1 du code de justice administrative : " Lorsque l'état du dossier permet de s'interroger sur l'intérêt que la requête conserve pour son auteur, le président de la formation de jugement ou le président de la chambre chargée de l'instruction, peut inviter le requérant à confirmer expressément le maintien de ses conclusions. La demande qui lui est adressée mentionne que, à défaut de réception de cette confirmation à l'expiration du délai fixé, qui ne peut être inférieur à un mois, il sera réputé s'être désisté de l'ensemble de ses conclusions. ".
3. A l'occasion de la contestation en appel de l'ordonnance prenant acte du désistement d'un requérant en l'absence de réponse à l'expiration du délai qui lui a été fixé, il incombe au juge d'appel, saisi de moyens en ce sens, de vérifier que l'intéressé a reçu la demande mentionnée par les dispositions de l'article R. 612-5-1 du code de justice administrative, que cette demande fixait un délai d'au moins un mois au requérant pour répondre et l'informait des conséquences d'un défaut de réponse dans ce délai et que le requérant s'est abstenu de répondre en temps utile et d'apprécier si le premier juge, dans les circonstances de l'affaire, a fait une juste application des dispositions de l'article R. 612-5-1.
4. Il ressort des pièces du dossier de première instance que la demande introduite devant le tribunal administratif de Lille le 9 août 2019 par la société Financière SASA a été communiquée, le 13 août 2019, à la direction régionale des finances publiques des Hauts-de-France, qui a produit, le 10 février 2020, un mémoire en défense. Par ce mémoire, le directeur régional des finances publiques a conclu au rejet comme non fondées des conclusions de la société Financière SASA tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2013, 2014 et 2015. A la suite de la communication, le 11 février 2020, de ce mémoire, la société Financière SASA n'a pas produit de mémoire en réplique. Dans ce contexte, le tribunal administratif de Lille a, le 5 février 2021, adressé au conseil de la société Financière SASA une demande de maintien de ses conclusions, dans le délai d'un mois, sur le fondement des dispositions de l'article R. 612-5-1 du code de justice administrative. Le conseil de la société Financière SASA n'a cependant apporté, dans le délai d'un mois qui lui avait été imparti, aucune réponse à la demande de maintien des conclusions de sa demande.
5. La demande produite par la société Financière SASA devant le tribunal administratif de Lille comporte l'exposé de moyens contestant le bien-fondé des impositions supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et des pénalités en litige. Cette demande ne présentait aucun caractère sommaire et aucun dégrèvement n'a été accordé à la société Financière SASA en première instance. S'il est vrai qu'un délai de l'ordre de douze mois, durant lequel la société n'a pas produit d'observations, sépare la date de communication à la société Financière SASA du mémoire en défense présenté par l'administration fiscale et la date de la demande du tribunal invitant le conseil de cette société à confirmer le maintien des conclusions de sa demande, cette circonstance, à elle seule, ne permettait pas au premier juge de s'interroger, à la date du 5 février 2021, sur l'intérêt que conservait, pour la société Financière SASA, sa demande tendant à la décharge d'impositions et pénalités, dont elle contestait le bien-fondé, et qui sont d'ailleurs d'un montant non négligeable. Dans ces conditions, le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Lille, en estimant que la société Financière SASA devait être réputée s'être désistée des conclusions de sa demande, n'a pas fait une juste application des dispositions précitées de l'article R. 612-5-1 du code de justice administrative.
6. Il résulte de ce qui précède que la société Financière SASA est fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Lille a donné acte du désistement d'office de l'ensemble des conclusions de sa demande. Il y a lieu, comme le demande d'ailleurs la société Financière SASA, de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Lille afin qu'il soit statué sur la demande de cette société.
DECIDE :
Article 1er : L'ordonnance n° 1906879 du 15 mars 2021 par laquelle le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Lille a donné acte du désistement d'office des conclusions de la demande de la société Financière SASA est annulée.
Article 2 : La demande de la société Financière SASA est renvoyée devant le tribunal administratif de Lille.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée Financière SASA et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.
Délibéré après l'audience publique du 3 mars 2022 à laquelle siégeaient :
- M. Christian Heu, président de chambre,
- M. Mathieu Sauveplane, président-assesseur,
- M. Jean-François Papin, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 mars 2022.
Le premier vice-président,
président de chambre, rapporteur,
Signé : C. HEUL'assesseur le plus ancien,
Signé : M. A...
La greffière,
Signé : N. ROMERO
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
La greffière,
Nathalie Roméro
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