Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 21 novembre 2018 par lequel le maire de Sallaumines a refusé de le titulariser en qualité d'adjoint technique à temps complet et d'enjoindre sous astreinte à la commune de Sallaumines de procéder à sa réintégration, à sa titularisation et à la reconstitution de sa carrière dans un délai de quinze jours à compter du jugement à intervenir.
Par un jugement n° 1900612 du 21 avril 2021, le tribunal administratif de Lille a rejeté ses demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 23 juin 2021, M. A... B..., représenté par Me Gauthier Lacherie, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 21 novembre 2018 du maire de Sallaumines ;
3°) d'enjoindre à la commune de Sallaumines de procéder dans le délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard, à sa réintégration à compter du 21 novembre 2018, à sa titularisation et à la reconstitution de sa carrière ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Sallaumines la somme de 3 000 euros à lui payer au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- son poste ne correspondait pas au cadre d'emplois sur lequel il a été recruté comme stagiaire ;
- l'exactitude matérielle des faits n'est pas établie ;
- la décision ne pouvait se fonder sur son comportement et aurait dû prendre en compte son engagement depuis 2016 ;
- la décision est par suite entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- il n'a jamais été prévenu de ce qui lui était reproché.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 janvier 2022, la commune de Sallaumines, représentée par Me Pierre-Olivier Guilmain, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. B... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- la requête est irrecevable, faute que soient soulevés des moyens d'appel ;
- elle l'est également car le jugement attaqué n'était pas joint à la requête ;
- les tâches demandées à M. B... correspondaient à son grade ;
- la matérialité des faits est établie ;
- la commune n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation.
La clôture de l'instruction a été fixée au 9 mars 2022 à 12 heures par ordonnance du 9 février 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 89-229 du 17 avril 1989 ;
- le décret n° 92-1194 du 4 novembre 1992 ;
- le décret n° 2006-1691 du 22 décembre 2006 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Denis Perrin, premier conseiller,
- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public,
- et les observations de Me Lacherie pour M. B... et de Me Guilmain pour la commune de Sallaumines.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... a été recruté en qualité de stagiaire, dans le grade d'adjoint technique territorial de deuxième classe, par le maire de, pour exercer les fonctions de régisseur principal de la maison de l'art et de la communication de cette commune. Le maire a refusé de le titulariser par arrêté du 21 novembre 2018. M. B... relève appel du jugement du 21 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté et à ce qu'il soit enjoint sous astreinte à la commune de le réintégrer.
2. Aux termes de l'article 5 du décret du 4 novembre 1992 fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires stagiaires de la fonction publique territoriale : " Le fonctionnaire territorial stagiaire peut être licencié pour insuffisance professionnelle lorsqu'il est en stage depuis un temps au moins égal à la moitié de la durée normale du stage. Le licenciement est prononcé après avis de la commission administrative paritaire compétente pour le cadre d'emplois dans lequel l'intéressé a vocation à être titularisé ". Un agent public ayant, à la suite de son recrutement ou dans le cadre de la formation qui lui est dispensée, la qualité de stagiaire se trouve dans une situation probatoire et provisoire. Sous réserve d'un licenciement intervenant en cours de stage et motivé par ses insuffisances ou manquements professionnels, tout fonctionnaire stagiaire a le droit d'accomplir son stage dans des conditions lui permettant d'acquérir une expérience professionnelle et de faire la preuve de ses capacités pour les fonctions auxquelles il est destiné. Par ailleurs aux termes de l'article 3 du décret du 22 décembre 2006 portant statut particulier du cadre d'emplois des adjoints techniques territoriaux : " Les adjoints techniques territoriaux sont chargés de tâches techniques d'exécution. / Ils exercent leurs fonctions dans les domaines du bâtiment, des travaux publics, de la voirie et des réseaux divers, des espaces naturels et des espaces verts, de la mécanique et de l'électromécanique, de la restauration, de l'environnement et de l'hygiène, de la logistique et de la sécurité, de la communication et du spectacle, de l'artisanat d'art ".
3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que le refus de titularisation de M. B... a pour motifs, ainsi que cela ressort du rapport du 29 juin 2018 du directeur des affaires culturelles sur sa titularisation, son comportement peu soucieux du service public, ses absences et sa gestion de certains événements. Il ressort également de ce même rapport que M. B..., affecté comme régisseur principal de la maison de l'art et de la communication de la commune de Sallaumines, était chargé du pré montage lumière et son des spectacles ainsi que du montage et démontage des décors. Il devait également répondre aux problèmes techniques survenant durant les spectacles. La régie des spectacles des compagnies invitées était néanmoins assurée par ces compagnies. Il devait aussi, en lien avec les chargés de mission de la direction, préparer les événements liés aux activités de musique et de danse se déroulant tout au long de l'année. Si sa fiche de poste indique qu'il avait aussi pour tâche de gérer une équipe, ce qui serait une mission non prévue par son cadre d'emploi, d'une part, cette équipe se résumait à un régisseur et à lui-même, d'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier que ses compétences professionnelles auraient été évaluées par rapport à ses capacités managériales. Au contraire, il ressort de ces pièces que M. B... a été mis à même de faire la preuve de ces capacités à exercer des fonctions d'adjoint technique territorial telles que définies par les dispositions du décret du 22 décembre 2006 précitées. En particulier, s'il lui a été reproché à plusieurs reprises de ne pas prévenir son collègue lors de ses absences, afin de veiller à la présence d'un régisseur lors de spectacles ou de répétitions, un tel grief caractérise non pas une inaptitude managériale ou une difficulté dans l'organisation du service, contrairement à ce que soutient l'appelant, mais le comportement défaillant de l'intéressé. Le moyen tiré de ce que ses compétences professionnelles ont été appréciées par rapport à des fonctions qui ne ressortissaient pas au cadre d'emploi d'adjoint technique territorial doit donc être écarté.
4. En deuxième lieu, M. B... conteste l'exactitude matérielle des faits à l'origine de la décision refusant sa titularisation. Cette décision s'est fondée sur le rapport du directeur des affaires culturelles établi le 29 juin 2018. Ce rapport met en exergue des absences de M. B... lors de répétitions le 22 avril, le 9 juin et le 25 juin 2018 alors qu'il s'était engagé à être présent ou à prévenir l'autre régisseur pour que ce dernier soit présent. Il atteste également que le 30 avril 2018, M. B... l'avait assuré de la présence des deux régisseurs lors d'une projection mais qu'il était finalement seul et a oublié d'ouvrir les portes au public. Ce rapport est complété par une note du chargé de mission musique, daté du 27 juin 2018 qui confirme que M. B..., après s'être engagé sur la présence d'un régisseur le 25 juin, n'a prévenu son collègue qu'à 16 h 20 pour une répétition commençant à 17 heures. Ce chargé de mission se plaint également de la mauvaise volonté manifestée à d'autres occasions par M. B.... Les chargées de mission danse confirment également, dans une note certes non datée, les absences des 22 avril et 9 juin 2018. Elles témoignent également du manque de coopération de M. B... tant à leur égard que lors de l'intervention d'une compagnie extérieure. Si M. B... fait valoir que ces éléments sont rédigés par des personnels communaux, il ne vient pas remettre en cause la réalité des constats effectués. En ce qui concerne l'incident du 9 juin 2018, si M. B... a prévenu le 12 février 2018 qu'il avait besoin d'être en congé le week-end des 9 et 10 juin 2018, la commune établit que son absence n'était autorisée en récupération d'heures que pour le 8 juin 2018. Par ailleurs, ce qui est reproché à M. B... et non sérieusement contesté
par celui-ci, est de s'être engagé sur la présence d'un régisseur le 9 juin, alors qu'il savait ne pas être disponible à cette date et à nouveau de ne pas avoir prévenu son collègue de cet engagement. M. B... n'apporte donc pas d'éléments de nature à remettre en cause la matérialité des faits qui lui sont reprochés.
5. En troisième lieu, la décision de ne pas titulariser en fin de stage un fonctionnaire stagiaire est fondée sur l'appréciation portée par l'autorité compétente sur son aptitude à exercer les fonctions auxquelles il peut être appelé et, de manière générale, sur sa manière de servir. Elle peut donc prendre en compte le comportement de l'agent, et ce même si les faits en cause seraient de nature à caractériser des fautes disciplinaires. La commune pouvait donc prendre en compte le comportement de M. B..., et notamment ses absences pour refuser de le titulariser. Par ailleurs la commune ne pouvait se fonder que sur les faits commis pendant la période de stage et n'avait donc pas à prendre en compte, contrairement à ce que soutient l'appelant, son comportement satisfaisant lorsqu'il était employé contractuellement par la commune du 18 janvier 2016 au 31 août 2017.
6. En quatrième lieu, pour apprécier la légalité d'une décision de refus de titularisation, il incombe au juge de vérifier qu'elle ne repose pas sur des faits matériellement inexacts, qu'elle n'est entachée ni d'erreur de droit, ni d'erreur manifeste dans l'appréciation de l'insuffisance professionnelle de l'intéressé, qu'elle ne revêt pas le caractère d'une sanction disciplinaire et n'est entachée d'aucun détournement de pouvoir et que, si elle est fondée sur des motifs qui caractérisent une insuffisance professionnelle mais aussi des fautes disciplinaires, l'intéressé a été mis à même de faire valoir ses observations. En l'espèce, M. B... a été informé, au cours d'un entretien le 3 juillet 2018 avec le directeur général des services, de la décision de ne pas le titulariser. Il a ensuite été invité, par courrier du maire du 5 juillet 2018 à consulter son dossier, ce qu'il a fait dès le 12 juillet 2018. L'appelant a donc été prévenu, contrairement à ce qu'il soutient, avant la fin de son stage. Par ailleurs, aucune disposition n'imposait qu'il soit invité à corriger son comportement, avant même que ne soit proposé le refus de sa titularisation, comme le soutient l'intéressé. Ce moyen doit donc être écarté dans toutes ses branches.
7. En cinquième lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 4 que M. B... a été absent à plusieurs reprises alors qu'il s'était engagé à être présent pour assurer la régie de spectacles, n'a pas prévenu à plusieurs reprises l'autre régisseur de son absence alors qu'il s'était préalablement engagé sur la présence d'un régisseur et a pu faire preuve de mauvaise volonté à l'égard des autres intervenants municipaux au sein du lieu culturel. Compte tenu de ces éléments, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation ne peut qu'être écarté.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande, et ce sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les fins de non-recevoir opposées en défense par la commune. Sa requête doit donc être rejetée, y compris ses conclusions à fins d'injonction et celles sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... la somme de 600 euros à verser à la commune de Sallaumines au même titre.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : M. B... versera la somme de 600 euros à la commune de Sallaumines au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la commune de Sallaumines.
Délibéré après l'audience publique du 24 mars 2022 à laquelle siégeaient :
- Mme Ghislaine Borot, président de chambre,
- M. Marc Lavail-Dellaporta, président assesseur,
- M. Denis Perrin, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 avril 2022.
Le rapporteur,
Signé : D. Perrin
La présidente de chambre,
Signé : G. BorotLa greffière,
Signé : C. Huls-Carlier
La République mande et ordonne au préfet du Pas-de-Calais en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
La greffière,
C. Huls-Carlier
N°21DA01377 2