Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision du 6 mars 2019 par laquelle le préfet du Nord lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, d'enjoindre au même préfet de lui délivrer une carte de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation, sous la même astreinte, et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1903933 du 29 novembre 2021, le tribunal administratif de Lille a annulé la décision du 6 mars 2019 par laquelle le préfet a refusé à M. A... la délivrance d'un certificat de résidence, a enjoint au préfet du Nord de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement et a condamné l'Etat à lui verser la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 30 décembre 2021, le préfet du Nord demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Lille.
Il soutient que les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation qui ont été retenus par les premiers juges pour prononcer l'annulation de la décision préfectorale du 6 mars 2019 ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense du 21 mars 2022, M. A..., représenté par Me Mannessier, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés dans la requête n'est fondé et que la décision en litige est également entachée d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen particulier de sa situation.
Par une décision du 22 mars 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 22 avril 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu, au cours de l'audience publique, le rapport de M. Nil Carpentier-Daubresse, premier conseiller.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A..., ressortissant algérien né le 9 mai 2000 à Biskra (Algérie), déclare être entré régulièrement en France le 20 juillet 2010. Devenu majeur, il a sollicité la délivrance d'une carte de résidence sur le fondement des articles 7 bis et 6-5° de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Par une décision du 6 mars 2019, le préfet du Nord lui a refusé la délivrance d'un certificat de résidence. Le préfet du Nord relève appel du jugement du 29 novembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Lille a, sur demande de M. A..., annulé cette décision du 6 mars 2019 et a enjoint au préfet du Nord de délivrer à l'intéressé un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ".
Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal administratif de Lille :
2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...) ".
3. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., dont la mère est décédée alors qu'il était âgé de trois ans, est entré en France le 20 juillet 2010, soit à l'âge de dix ans, pour y rejoindre son père alors en situation régulière sur le territoire français et qu'il y réside de manière continue depuis cette date. Si le préfet du Nord fait valoir que l'intéressé a fait l'objet de nombreux signalements et condamnations pour des faits de détention et cession de stupéfiants à compter du mois de mai 2017, cette circonstance est insuffisante pour remettre en cause l'appréciation retenue par les premiers juges qui ont estimé, au regard des circonstances particulières de l'espèce et notamment de la durée de présence de l'intéressé sur le territoire français depuis l'âge de dix ans, que la décision contestée méconnaissait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et qu'elle était entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé.
4. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Nord n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a annulé sa décision du 6 mars 2019 par laquelle il a refusé à M. A... la délivrance d'un certificat de résidence et qu'il lui a enjoint de lui délivrer, dans un délai d'un mois, un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ". Par suite, sa requête doit être rejetée.
Sur les frais liés au litige :
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. A... de la somme de 1 000 euros au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du préfet du Nord est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera la somme de 1 000 euros à M. A... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. B... A....
Copie en sera transmise, pour information, au préfet du Nord.
Délibéré après l'audience publique du 25 mai 2022 à laquelle siégeaient :
- Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre,
- M. Marc Lavail-Dellaporta, président-assesseur,
- M. Nil Carpentier-Daubresse, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 juin 2022.
Le rapporteur,
Signé : N. Carpentier-Daubresse
La présidente de chambre,
Signé : G. Borot
La greffière,
Signé : C. Huls-Carlier
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
La greffière,
C. Huls-Carlier
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N° 21DA02977
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