Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lille, sous les n° 2008969 et n° 2009011, d'une part, d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 28 septembre 2020 par laquelle le président de la communauté d'agglomération du Douaisis lui a infligé la sanction disciplinaire d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois jours ainsi que l'arrêté du 1er octobre 2020 portant application de cette sanction, d'autre part, d'enjoindre à la communauté d'agglomération du Douaisis de lui verser le traitement correspondant à ces trois jours d'exclusion, de rétablir ses droits au titre des congés payés, de l'ancienneté, de l'avancement et de la retraite et de retirer de son dossier la mention de cette sanction.
Par un jugement n° 2008969, 2009011 du 16 mars 2023, le tribunal administratif de Lille a rejeté l'intégralité de ses demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés le 16 mai 2023, le 20 juin 2023, les 2 et 3 août 2023, le 17 octobre 2023 et le 12 décembre 2023, M. A... B..., représenté par Me Despieghelaere, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler la sanction d'exclusion temporaire de fonctions de trois jours prononcée le 28 septembre 2020 par le président de la communauté d'agglomération du Douaisis et l'arrêté du 1er octobre 2020 pris pour son application par cette même autorité ;
3°) d'enjoindre à la communauté d'agglomération du Douaisis le reversement des traitements non-perçus du 19 au 21 octobre 2020, de rétablir ses droits au titre des congés payés, de l'avancement et de la retraite ainsi que de retirer de son dossier la mention de la sanction prononcée ;
4°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération du Douaisis le versement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et les entiers dépens.
Il soutient que :
- sa requête, qui n'est pas tardive, est recevable ;
- le jugement est irrégulier en ce que la minute n'a pas été signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier en méconnaissance de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;
- le jugement est également irrégulier en ce qu'il n'est pas suffisamment motivé faute d'avoir répondu au moyen opérant tiré de ce que la sanction infligée est disproportionnée ;
- la décision du 28 septembre 2020 est illégale en ce qu'elle ne mentionne pas les voies et délais de recours et ne comporte aucune motivation ;
- l'arrêté du 1er octobre 2020, qui ne fait qu'appliquer la décision du 28 septembre 2020 illégale, est par conséquent illégal ;
- cet arrêté est insuffisamment motivé ;
- la sanction a été prise au terme d'une procédure irrégulière, notamment en ce qui concerne le respect du contradictoire ;
- les stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues ;
- la sanction est entachée d'une erreur d'appréciation ;
- il a été sanctionné, pour les mêmes faits, d'un retrait de jours de réduction de temps de travail ;
- la sanction est disproportionnée.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 21 septembre 2023, le 10 novembre 2023 et le 19 janvier 2024, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la communauté d'agglomération du Douaisis, représentée par Me Guérin, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. B... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête, enregistrée au-delà du délai d'appel, est tardive et doit être déclarée irrecevable ;
- les moyens soulevés dans la requête ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 13 décembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 19 janvier 2024 à 12 heures.
Par lettre du 30 avril 2024, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions à fin d'annulation de la lettre du 28 septembre 2020 du président de la communauté d'agglomération du Douaisis, laquelle ne constitue pas une décision susceptible de recours pour excès de pouvoir dès lors qu'elle annonce une décision devant intervenir ultérieurement.
Par un mémoire enregistré le 2 mai 2024, M. B... a présenté ses observations sur le moyen relevé d'office.
Vu :
- l'ordonnance n° 474223 du 19 juin 2023 du président de la section du contentieux du Conseil d'Etat attribuant le jugement de la requête de M. B... à la cour administrative d'appel de Douai ;
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-56 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 89-677 du 18 septembre 1989 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Frédéric Malfoy, premier conseiller,
- les conclusions de M. Nil Carpentier-Daubresse, rapporteur public,
- et les observations de Me Despieghelaere, représentant M. B..., et de Me Liénart, représentant la communauté d'agglomération du Douaisis.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B... est technicien territorial de 1ère classe, affecté depuis 2007, au sein de la direction Voirie / Electrification du Pôle " Aménagement Réseau Environnement " (ARE) de la communauté d'agglomération du Douaisis. Par un courrier du 9 juin 2020, le président de cette collectivité territoriale l'a informé de la mise en œuvre d'une procédure disciplinaire à son encontre au motif d'un manque de respect envers le directeur du pôle ARE et de la directrice générale des services, révélé par des courriels adressés aux intéressés durant les mois de mars et avril 2020. Par une lettre du 28 septembre 2020, le président de cette collectivité a informé M. B... de sa décision de prendre à son encontre une sanction d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois jours, du 19 au 21 octobre 2020. Par un arrêté signé le 1er octobre 2020, le président a prononcé cette sanction, remise en mains propres à M. B... le 15 octobre suivant. Par une première requête enregistrée sous le n° 2008969 suivie d'une seconde requête enregistrée sous le n° 2009011, M. B... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la lettre du 28 septembre 2020 et l'arrêté du 1er octobre 2020 précités. M. B... relève appel du jugement du 16 mars 2023 par lequel le tribunal a rejeté ses demandes.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. D'une part, il ressort des pièces du dossier que la minute du jugement attaqué a été signée par la présidente de la formation de jugement, la conseillère rapporteure et la greffière. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que les dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ont été méconnues.
3. D'autre part, il ressort des écritures de première instance produites par M. B... qu'il n'a pas soulevé, ni ne peut être regardé comme ayant soulevé le moyen tiré de la disproportion de la sanction qui lui a été infligée. Par suite, il ne peut reprocher aux premiers juges d'avoir insuffisamment motivé leur jugement sur ce point.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la lettre du 28 septembre 2020 :
4. Par une lettre du 28 septembre 2020, le président de la communauté d'agglomération du Douaisis a informé M. B... qu'en application de l'article 19 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, il avait décidé de prendre à son encontre une sanction d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois jours du 19 au 21 octobre 2020. Une telle lettre doit être regardée comme une information préalable à l'infliction effective de cette sanction, dès lors que dans les quatre jours qui ont suivi, le président de cette collectivité a, le 1er octobre 2020, signé un arrêté formalisant cette sanction disciplinaire, notamment en indiquant les textes applicables, la procédure suivie, les motifs de droit et de fait la justifiant, sa date de prise d'effet et les conséquences de cette mesure d'éviction temporaire en ce qui concerne la rémunération de l'intéressé.
5. Dans ces circonstances particulières, la lettre du 28 septembre 2020 doit être regardée comme une mesure préparatoire à l'arrêté du 1er octobre 2020 et n'est dès lors pas une décision faisant grief susceptible de faire l'objet d'un recours en excès de pouvoir. Par suite, les conclusions à fin d'annulation présentées par M. B... contre cette lettre doivent être rejetées.
En ce qui concerne l'arrêté du 1er octobre 2020 prononçant l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois jours :
6. En premier lieu, à supposer que M. B... ait entendu invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de la lettre du 28 septembre 2020, un tel moyen est inopérant compte tenu de ce qui a été dit précédemment.
7. En deuxième lieu, aux termes de l'article 19 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, alors applicable : " Le pouvoir disciplinaire appartient à l'autorité investie du pouvoir de nomination. / (...) Le fonctionnaire à l'encontre duquel une procédure disciplinaire est engagée a droit à la communication de l'intégralité de son dossier individuel et de tous les documents annexes et à l'assistance de défenseurs de son choix. L'administration doit informer le fonctionnaire de son droit à communication du dossier. Aucune sanction disciplinaire autre que celles classées dans le premier groupe par les dispositions statutaires relatives aux fonctions publiques de l'Etat, territoriale et hospitalière ne peut être prononcée sans consultation préalable d'un organisme siégeant en conseil de discipline dans lequel le personnel est représenté. / L'avis de cet organisme de même que la décision prononçant une sanction disciplinaire doivent être motivés ". Aux termes du 2° de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) 2° Infligent une sanction ; (...) ". Enfin, aux termes de l'article L. 211-5 de ce code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".
8. Il résulte de ces dispositions que l'autorité qui prononce une sanction disciplinaire a l'obligation de préciser elle-même, dans sa décision, les griefs qu'elle entend retenir à l'encontre de l'agent intéressé, de sorte que celui-ci puisse, à la seule lecture de la décision qui lui est notifiée, connaître les motifs de la sanction qui le frappe.
9. Il ressort des termes de l'arrêté en litige que celui-ci énonce les textes dont il fait application et mentionne les manquements reprochés à M. B..., consistant à avoir, durant les mois d'avril et mai 2020, rédigé des courriels destinés au directeur du Pôle Are et à la directrice générale des services, d'une manière désinvolte et sur un ton ironique et désobligeant, considérés comme irrespectueux et caractérisant une attitude inacceptable constitutive d'un manquement aux devoirs et obligations des agents publics. L'ensemble de ces indications est suffisant pour lui permettre de comprendre la sanction qui lui est infligée, sans que l'appelant puisse reprocher à l'autorité territoriale de n'avoir pas mentionné les extraits pertinents des courriels dans sa décision. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté contesté doit être écarté.
10. En troisième lieu, aux termes de l'article 4 du décret du 18 septembre 1989 en vigueur relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires territoriaux, dans sa version applicable à la date de la décision contestée : " L'autorité investie du pouvoir disciplinaire informe par écrit l'intéressé de la procédure disciplinaire engagée contre lui, lui précise les faits qui lui sont reprochés et lui indique qu'il a le droit d'obtenir la communication intégrale de son dossier individuel au siège de l'autorité territoriale et la possibilité de se faire assister par un ou plusieurs conseils de son choix. / L'intéressé doit disposer d'un délai suffisant pour prendre connaissance de ce dossier et organiser sa défense. Les pièces du dossier et les documents annexés doivent être numérotés ". Une sanction ne peut être légalement prononcée à l'égard d'un agent public sans que l'intéressé ait été mis en mesure de présenter utilement sa défense. S'agissant des sanctions du premier groupe, dont fait partie, pour les fonctionnaires territoriaux, l'exclusion temporaire de fonctions en vertu des dispositions précitées de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984, cette garantie procédurale est assurée, en application des dispositions de l'article 19 de la loi du 13 juillet 1983, par l'information donnée par l'administration à l'intéressé qu'une procédure disciplinaire est engagée, et qu'il dispose du droit à la communication de son dossier individuel et de tous les documents annexes, ainsi qu'à l'assistance des défenseurs de son choix.
11. Il ressort des pièces du dossier que par une lettre datée du 9 juin 2020, le président de la communauté d'agglomération du Douaisis a informé M. B... qu'il envisageait d'engager une procédure disciplinaire à son encontre et, dans cette perspective, après lui avoir exposé le manquement reproché, lui a fait connaître son droit à la communication de l'intégralité de son dossier individuel, incluant le rapport disciplinaire, et à l'assistance d'un ou plusieurs défenseurs de son choix, et l'a informé de la possibilité de produire d'éventuelles observations sur les faits reprochés. Il est constant que M. B... a usé de la possibilité de consulter son dossier dès le 24 juin 2020, par l'intermédiaire de son conseil. Dès lors qu'il était informé de l'intention de l'administration de le sanctionner, il lui appartenait, s'il le souhaitait, de faire valoir ses observations, sans qu'il soit besoin, pour la communauté d'agglomération qui n'y était pas tenue, de l'y inviter formellement et de lui confirmer son intention de le sanctionner effectivement. Par suite, le moyen tiré ce que la procédure est irrégulière en raison de la méconnaissance des droits de la défense et du principe du contradictoire doit être écarté.
12. En quatrième lieu, le président de la communauté d'agglomération du Douaisis, compétent pour prendre la décision de sanction en litige, ne peut être regardé comme un tribunal au sens des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de telle sorte que la procédure au terme de laquelle cette autorité administrative a exercé son pouvoir disciplinaire n'entre pas dans le champ d'application de ces stipulations. En tout état de cause, cette décision de sanction a pu faire l'objet d'un recours devant la juridiction administrative, devant laquelle la procédure est en tous points conforme aux exigences de ce même article 6. Par suite, ainsi que l'a jugé le tribunal administratif, le moyen tiré de ce que la décision de sanction infligée à M. B... méconnait les stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté comme inopérant. Par ailleurs, alors qu'il n'est pas établi que le président de la communauté d'agglomération aurait montré une animosité particulière à l'égard de M. B..., la circonstance que cette autorité a, à la fois, engagé les poursuites disciplinaires et pris la décision contestée est sans incidence sur la légalité de cette décision.
13. En cinquième lieu, M. B... n'a pas contesté en appel, dans les conditions prévues par l'article R. 771-12 du code de justice administrative, l'ordonnance du 3 mai 2021 du tribunal administratif de Lille refusant de transmettre au Conseil d'Etat sa question prioritaire de constitutionnalité portant sur les dispositions de l'article 19 de la loi du 26 juillet 1983. Dans ces conditions, il ne peut utilement soutenir que ces dispositions, qui permettent à l'autorité compétente d'engager des poursuites disciplinaires sans consultation du conseil de discipline lorsqu'est envisagée une sanction du premier groupe, sont attentatoires à l'équité et aux principes généraux du contradictoire.
14. En sixième lieu, aux termes de l'article 29 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa rédaction alors en vigueur : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale ". Aux termes de l'article 89, alors en vigueur, de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : / Premier groupe : / l'avertissement ; / le blâme ; / l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de trois jours ; / (...) ".
15. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.
16. Pour infliger à M. B... la sanction de l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois jours, le président de la communauté d'agglomération du Douaisis s'est fondé sur la circonstance, mentionnée dans le rapport disciplinaire, qu'à plusieurs reprises durant les mois d'avril et mai 2020, l'intéressé a rédigé, " d'une manière désinvolte, s'accordant une liberté insolente ", des courriels ironiques et désobligeants destinés au directeur du Pôle ARE et à la directrice générale des services, dont l'autorité territoriale a également été destinataire en copie.
17. Il ressort des pièces du dossier, notamment du rapport disciplinaire et de ses annexes comportant vingt-et-un courriels s'échelonnant sur la période du 14 avril au 29 mai 2020, coïncidant avec la première période de confinement décidée par le gouvernement en raison de la situation d'urgence sanitaire, qu'afin de mettre en place le télétravail au sein des services de la communauté d'agglomération du Douaisis, il a été demandé à M. B... d'organiser à son domicile les modalités techniques de ses équipements informatiques, notamment par l'utilisation d'un câble permettant le raccordement à internet. Il ressort des nombreux échanges ayant eu lieu entre le directeur des systèmes d'information, le responsable du Pôle ARE et M. B..., que ce dernier s'est plaint, de manière récurrente, de difficultés d'ordre matériel, résultant en particulier d'une impossibilité alléguée d'effectuer les branchements nécessaires faute de disposer d'un câble Ethernet de longueur suffisante. Il ressort d'un courriel adressé le 29 avril 2020 au directeur des systèmes d'information que M. B... a usé d'un ton particulièrement ironique quant à cette situation à l'endroit de son directeur de pôle, également destinataire de ce courriel. Il ressort par ailleurs d'un autre courriel qu'il a adressé le 4 mai 2020 à la directrice générale des services, dont le président de la communauté d'agglomération était destinataire en copie, que c'est en usant d'un ton particulièrement ironique qu'il a ouvertement remis en cause la gestion matérielle de sa situation par l'ensemble de la chaîne hiérarchique en la qualifiant notamment " d'incurie ".
18. Si M. B..., qui ne conteste pas la matérialité de ces courriels annexés au rapport disciplinaire, invoque sa liberté d'expression, celle-ci n'autorise pas l'agent à adopter un comportement irrespectueux envers la hiérarchie, quand bien même il serait fondé à se plaindre de dysfonctionnements du service. Dans ces conditions, le grief tiré de ce que M. B... s'est adressé à son directeur de pôle et à la directrice générale des services d'une manière désinvolte, sur un ton ironique et désobligeant, révélé par les deux courriels précités dont l'un a été adressé en copie à l'autorité territoriale, est établi et constitue un manquement à son devoir d'obéissance, de nature à justifier une sanction.
19. Si l'appelant soutient qu'en ne tenant pas compte de sa situation médicale durant la période de confinement, la communauté d'agglomération a méconnu les obligations de sécurité s'imposant à l'administration, un tel reproche, au demeurant non établi par les pièces du dossier, ne saurait justifier les manquements commis dans ses relations avec sa hiérarchie. De la même manière, la supposée insuffisance d'information quant à l'organisation du travail et à la désignation de son chef hiérarchique durant la période de confinement ne peut l'exonérer de toute faute ou atténuer celle-ci. Enfin, il ne ressort aucunement des pièces du dossier que le président de la communauté d'agglomération aurait en réalité eu pour but de sanctionner un comportement consistant à avoir volontairement organisé l'impossibilité matérielle de télétravailler, faits qui avaient déjà donné lieu à une déduction unilatérale de deux jours de réduction du temps de travail. Il s'ensuit que la communauté d'agglomération du Douaisis n'a pas commis d'erreur d'appréciation en lui infligeant, pour avoir adressé des courriels désinvoltes et désobligeants à sa hiérarchie, une sanction du premier groupe d'exclusion temporaire de fonctions de trois jours.
20. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de la requête, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 16 mars 2023, le tribunal administratif de Lille a rejeté ses demandes à fin d'annulation et d'injonction.
Sur les frais liés au litige :
21. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la communauté d'agglomération du Douaisis, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par M. B... au titre des frais qu'il a exposés et non compris dans les dépens. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, et sur le fondement de ces mêmes dispositions, il y a lieu de mettre à la charge de M. B... une somme de 1 000 euros à verser à la communauté d'agglomération du Douaisis.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : M. B... versera à la communauté d'agglomération du Douaisis une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la communauté d'agglomération du Douaisis.
Délibéré après l'audience publique du 7 mai 2024 à laquelle siégeaient :
- M. Jean-Marc Guérin-Lebacq, président-assesseur, assurant la présidence de la formation du jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme Dominique Bureau, première conseillère,
- M. Frédéric Malfoy, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 mai 2024.
Le rapporteur,
Signé : F. Malfoy
Le président de la formation de jugement,
Signé : J-M. Guérin-Lebacq
Le greffier,
Signé : F. Cheppe
La République mande et ordonne au préfet du Nord en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Pour la greffière en chef, par délégation,
La greffière,
C. Huls-Carlier
N° 23DA01157 2