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28/08/2024 | FRANCE | N°23DA02088

France | France, Cour administrative d'appel de DOUAI, 2ème chambre, 28 août 2024, 23DA02088


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. C... A... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 17 mai 2023 par lequel la préfète de l'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il doit être éloigné.



Par un jugement n° 2302138 du 5 octobre 2023, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.



Procédure devant l

a cour :



Par une requête et un mémoire, enregistrés les 6 novembre 2023 et 27 novembre 2023, M. A..., représ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 17 mai 2023 par lequel la préfète de l'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il doit être éloigné.

Par un jugement n° 2302138 du 5 octobre 2023, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 6 novembre 2023 et 27 novembre 2023, M. A..., représenté par Me Christelle Monconduit, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 17 mai 2023 de la préfète de l'Oise en tant qu'elle lui refuse la délivrance d'un titre de séjour et l'oblige à quitter le territoire français, et subsidiairement en tant qu'elle l'oblige à quitter le territoire français ;

3°) d'enjoindre à la préfète de l'Oise ou à tout préfet territorialement compétent, dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou, subsidiairement, de procéder à un réexamen de sa situation et, en tout état de cause, de lui remettre, dans l'attente et dans un délai de sept jours, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé et procède d'un défaut d'examen dès lors que la préfète de l'Oise n'a pas pris en compte l'ensemble des justificatifs qu'il a produits, qu'elle a retenu une motivation générale et superficielle, qu'elle n'a pas pris en compte l'ancienneté dans son emploi, qu'elle a à tort considéré que l'emploi de chauffeur de poids lourds n'exige pas un savoir-faire rare sur le marché du travail ou stratégique pour son entreprise et qu'elle a également omis de tenir compte du fait qu'il est associé dans l'entreprise qui l'emploie ainsi que de sa durée de séjour en France ;

- il est entaché d'erreur de droit dès lors que la préfète de l'Oise a retenu que la possession antérieure du titre de séjour portant la mention " travailleur saisonnier " s'opposait par principe à son admission au séjour en qualité de salarié ;

- il est entaché d'erreurs de fait qui ont exercé une influence sur le sens des décisions prises dès lors que la préfète a à tort considéré qu'aucun document autre qu'une promesse d'embauche et un contrat de travail n'avait été fourni et qu'il ne disposait pas d'un savoir-faire pour occuper un emploi dans le domaine en question où sont constatées des difficultés de recrutement ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il justifie d'une bonne insertion privée et d'une durée significative de présence sur le territoire français ainsi que d'une insertion professionnelle ancienne, stable et pérenne.

La requête et l'ensemble des pièces de la procédure ont été communiqués à la préfète de l'Oise qui n'a pas produit de mémoire, malgré une mise en demeure adressée le 5 mars 2024.

Par une ordonnance en date du 7 mai 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 24 mai 2024 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Guillaume Toutias, premier conseiller,

- et les observations de Me Stephany Sun-Troya, représentant M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. C... A..., né le 5 mai 1987, de nationalité marocaine, est entré en France le 12 août 2017 sous couvert d'un visa long séjour portant la mention " travailleur saisonnier " valable du 27 juillet 2017 au 25 octobre 2017. Après un premier refus opposé par un arrêté du 25 juillet 2018 du préfet de l'Essonne, annulé par un jugement n° 1806155 du 22 novembre 2018 du tribunal administratif de Versailles, il a été mis en possession d'une carte de séjour pluriannuelle portant la mention " travailleur saisonnier ", valable du 9 janvier 2019 au 8 janvier 2022. Le 28 février 2023, il a sollicité son admission exceptionnelle au séjour pour des motifs tenant à ses activités professionnelles en France. Par un arrêté du 17 mai 2023, la préfète de l'Oise a refusé de faire droit à sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il doit être éloigné. M. A... relève appel du jugement du 5 octobre 2023 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, l'arrêté attaqué énonce les considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de chacune des décisions prises à l'encontre de M. A... et il ne ressort pas des pièces du dossier que la préfète de l'Oise n'aurait pas procédé à l'examen sérieux de sa situation personnelle. En particulier, si la préfète de l'Oise a retenu que la présentation d'une promesse d'embauche et d'un contrat de travail ne suffit pas par elle-même à caractériser un motif exceptionnel justifiant une admission au séjour, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle aurait omis de tenir compte des autres éléments du dossier de demande d'autorisation de travail fourni par M. A... à l'appui de sa demande. La motivation de l'arrêté attaqué rend compte de ce qu'il a été procédé à un examen précis et personnalisé du projet professionnel dont il s'est prévalu au soutien de sa demande. La circonstance que la préfète n'aurait pas correctement apprécié la situation ne suffit pas par elle-même à caractériser une insuffisance de motivation ou un défaut d'examen sérieux. Enfin, contrairement à ce que soutient également M. A..., la préfète ne peut être regardée comme ayant omis de prendre en compte l'ancienneté de son séjour sur le territoire alors que l'arrêté attaqué rappelle la date de son entrée en France et les conditions de son séjour. Dès lors, les moyens tirés de ce que l'arrêté attaqué serait insuffisamment motivé et de ce qu'il serait entaché d'erreur de droit pour procéder d'un défaut d'examen particulier doivent être écartés.

3. En deuxième lieu, contrairement à ce que soutient M. A..., il ne ressort ni des motifs de l'arrêté attaqué, ni des pièces du dossier que la préfète de l'Oise aurait opposé l'irrecevabilité de sa demande ou refusé de l'examiner au seul motif que la carte de séjour pluriannuelle portant la mention " travailleur saisonnier " dont il était précédemment détenteur l'empêcherait de solliciter tout autre titre de séjour. Si la préfète de l'Oise a relevé cette circonstance, il ressort toutefois explicitement des motifs de l'arrêté attaqué que la préfète, dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire, a cependant apprécié, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de M. A..., tant sur le plan familial que sur le plan professionnel, l'opportunité d'une mesure de régularisation de sa situation. A cet égard, la préfète, dans le cadre de cette appréciation, pouvait régulièrement tenir compte de ce que M. A... n'a pas respecté les conditions du droit au séjour et au travail ouvert par la carte de séjour pluriannuelle portant la mention " travailleur saisonnier " dont il a été précédemment titulaire et de ce que c'est illégalement qu'il s'est maintenu et a travaillé sans interruption sur le territoire français depuis 2017. Le moyen d'erreur de droit soulevé par M. A... doit, dès lors, être écarté.

4. En troisième lieu, en relevant que la présentation d'une promesse d'embauche et d'un contrat de travail ne suffit pas par elle-même à caractériser un motif exceptionnel justifiant une admission au séjour, la préfète de l'Oise n'a, contrairement à ce que soutient M. A..., pas entendu lui opposer qu'il n'aurait pas fourni l'entier dossier de demande d'autorisation de travail. En outre, si M. A... se prévaut des difficultés de recrutement aux fonctions de chauffeurs de poids lourds, de ce qu'il détient toutes les compétences pour occuper de telles fonctions et de ce qu'il est de ce fait un atout pour la société qui l'emploie depuis 2018, il n'en demeure pas moins qu'il n'est pas établi que cette société aurait effectué en vain des recherches actives pour pourvoir son poste par un candidat déjà régulièrement admis sur le marché du travail. Dans ces conditions, c'est sans erreur de fait que la préfète de l'Oise a pu retenir, dans l'arrêté attaqué, que M. A... " ne justifie pas que cet emploi de chauffeur livreur nécessite un savoir-faire rare sur le marché du travail, stratégique pour son entreprise, qu'il maîtriserait à la différence d'autres demandeurs d'emplois ". Le moyen d'erreur de fait soulevé par M. A... doit, dès lors, être écarté dans toutes ses branches.

5. En quatrième lieu, il ressort des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté attaqué, M. A... justifie d'un peu moins de six années de présence en France et de cinq années d'ancienneté dans l'emploi de chauffeur de poids lourds qu'il occupe au sein de la société fondée par son frère et à laquelle il s'est associé à hauteur de 49 %. Toutefois, pour ce faire, M. A... a contourné l'objet et les droits attachés à la carte de séjour pluriannuelle portant la mention " travailleur saisonnier " au bénéfice de laquelle il a été initialement autorisé à entrer et séjourner en France. Ce titre de séjour est en effet délivré à la condition que l'étranger s'engage à maintenir sa résidence habituelle hors de France et il n'autorise pas plus de six mois de séjour et de travail par an. Par ailleurs, si M. A... compte deux frères en situation régulière sur le territoire français, il conserve en revanche de solides attaches familiales au Maroc où vivent son épouse, ses parents et trois autres frères et sœurs. Ainsi qu'il a été dit au point précédent, il ne ressort pas des pièces du dossier, alors en particulier qu'il n'est pas justifié des recherches que la société aurait en vain effectué sur le marché du travail, qu'il soit le seul à même d'occuper le poste de chauffeur de poids lourds qu'il a occupé en séjournant illégalement sur le territoire. Il n'établit pas davantage qu'il ne pourrait pas se réinsérer socialement et professionnellement au Maroc, pays dans lequel il a vécu jusqu'à l'âge de trente ans. Dans ces conditions, c'est sans erreur manifeste d'appréciation que la préfète de l'Oise a pu considérer que l'admission au séjour de M. A... ne se justifiait ni par des considérations humanitaires, ni par des motifs exceptionnels et qu'elle a pu rejeter sa demande. Le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation commise par la préfète dans l'usage de son pouvoir discrétionnaire de régularisation doit, dès lors, être écarté.

6. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 mai 2023 de la préfète de l'Oise. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie sera adressée à la préfète de l'Oise.

Délibéré après l'audience publique du 9 juillet 2024 à laquelle siégeaient :

- M. Marc Baronnet, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- M. Guillaume Vandenberghe, premier conseiller,

- M. Guillaume Toutias, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 août 2024.

Le rapporteur,

Signé : G. ToutiasLe président de la formation

de jugement,

Signé : M. B...

La greffière,

Signé : A.S. Villette

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Pour la greffière en chef,

par délégation,

l'agent de greffe

2

N°23DA02088


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23DA02088
Date de la décision : 28/08/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Baronnet
Rapporteur ?: M. Guillaume Toutias
Rapporteur public ?: Mme Regnier
Avocat(s) : SELARL CHRISTELLE MONCONDUIT

Origine de la décision
Date de l'import : 01/09/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-08-28;23da02088 ?
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