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29/08/2024 | FRANCE | N°24DA00014

France | France, Cour administrative d'appel de DOUAI, 3ème chambre, 29 août 2024, 24DA00014


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 19 juin 2023 par lequel la préfète de l'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour au titre de l'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.



Par un jugement no 2302236 du 24 août 2023, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.
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Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée le 4 janvier 2024, M. B..., rep...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 19 juin 2023 par lequel la préfète de l'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour au titre de l'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement no 2302236 du 24 août 2023, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 janvier 2024, M. B..., représenté par Me Detrez-Cambrai, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 19 juin 2023 ;

3°) d'enjoindre à la préfète de l'Oise de l'admettre au séjour dans le délai d'un mois à compter de la décision à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, à charge pour son conseil de renoncer à la part contributive de l'Etat.

Il soutient que :

- l'arrêté en litige méconnaît les dispositions de l'article L. 542-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnaît les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de renvoi sont illégales en raison de l'illégalité du refus d'admission au séjour.

La requête a été communiquée à la préfète de l'Oise, qui n'a pas produit de mémoire en défense.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 novembre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Guérin-Lebacq, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant iranien né en 1983, a déposé une demande d'asile auprès des autorités françaises le 5 août 2022. L'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a rejeté sa demande par une décision du 30 novembre 2022, confirmée le 1er juin 2023 par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA). Tirant les conséquences du rejet de la demande d'asile présentée par M. B..., la préfète de l'Oise a pris à son encontre un arrêté du 19 juin 2023 l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination de son pays d'origine. M. B... relève appel du jugement du 24 août 2023 par lequel la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, le requérant soulève à nouveau en appel le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 542-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En l'absence d'élément nouveau de nature à remettre en cause l'appréciation portée sur ce point par la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif d'Amiens, il y a lieu, par adoption des motifs énoncés aux points 2 et 3 du jugement attaqué, d'écarter ce moyen.

3. En deuxième lieu, l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". En outre, aux termes du dernier alinéa de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ".

4. Le moyen tiré de ce que le requérant se trouverait exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être regardé comme dirigé contre la décision fixant le pays de destination. Le requérant soutient qu'il a fui l'Iran en mai 2022 au motif qu'il y est recherché pour avoir imprimé des livres et des tracts contre le régime politique, et qu'un retour dans son pays d'origine l'exposerait à des persécutions de la part des autorités iraniennes en raison de ses opinions politiques. Toutefois, par une décision n° 23008902 du 1er juin 2023, la CNDA a rejeté son recours tendant à l'annulation de la décision de l'OFPRA du 30 novembre 2022 rejetant sa demande d'asile au motif que ses déclarations, imprécises et peu spontanées, ne permettaient pas d'établir les raisons de son départ d'Iran et le motif de ses craintes en cas de retour. En produisant comme seules pièces des documents administratifs établis, pour le plus récent, au cours de l'année 2016 et une attestation datée du 13 mars 2023, émanant de deux personnes se présentant comme ses salariés, M. B... n'établit pas qu'il exerçait l'activité d'imprimeur à la date de son départ, en mai 2022. Si le requérant produit trois convocations judiciaires adressées en mai 2023 à son père, à son épouse et à lui-même, ainsi que le témoignage de son épouse, accompagné de photographies, qui indique notamment qu'elle a été interrogée par des agents du service de renseignement le 20 mai 2023 et a été victime d'une agression sexuelle et de sévices corporels, ces éléments ne suffisent pas à démontrer la véracité de ses allégations quant aux poursuites dont il ferait l'objet en raison de l'impression de documents contre les autorités politiques iraniennes, qui ont été jugées peu crédibles par la CNDA. Au demeurant, les convocations judiciaires et le témoignage précité, produits à l'appui d'une demande de réexamen au titre de l'asile, ont été considérés comme dépourvus de force probante par l'OFPRA qui a rejeté cette demande de réexamen par une décision du 23 février 2024. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

5. L'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

6. Il ressort des pièces du dossier que le requérant, entré en France très récemment, ne justifie pas d'attaches familiales ou privées sur le territoire français, ni d'une insertion particulière. A supposer même que le requérant ait entendu soutenir qu'en l'éloignant du territoire français vers l'Iran, la décision contestée fait obstacle, compte tenu des persécutions dont il ferait l'objet de la part des autorités politiques, au maintien d'une vie privée et familiale normale, une telle allégation n'est pas établie au regard de ce qui a été énoncé au point 5. Par suite, la préfète de l'Oise n'a pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte hors de proportion avec les motifs de la décision contestée. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit donc être écarté.

7. Compte tenu des motifs énoncés au point précédent, les moyens soulevés, par voie d'exception, à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français et de la décision fixant le pays de destination ne peuvent qu'être écartés.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté de la préfète de l'Oise du 19 juin 2023. Il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Detrez-Cambrai.

Copie sera adressée à la préfète de l'Oise.

Délibéré après l'audience publique du 2 juillet 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Jean-Marc Guérin-Lebacq, président-assesseur, assurant la présidence de la formation du jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme Dominique Bureau, première conseillère,

- M. Frédéric Malfoy, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 29 août 2024.

L'assesseure la plus ancienne,

Signé : D. BureauLe président de la formation de jugement,

Signé : J.-M. Guérin-LebacqLa greffière,

Signé : C. Huls-Carlier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Pour la greffière en chef,

Par délégation,

La greffière

C. Huls-Carlier

N° 24DA00014 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 24DA00014
Date de la décision : 29/08/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Guerin-Lebacq
Rapporteur ?: M. Jean-Marc Guerin-Lebacq
Rapporteur public ?: M. Carpentier-Daubresse
Avocat(s) : DETREZ-CAMBRAI

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-08-29;24da00014 ?
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