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08/01/2025 | FRANCE | N°22DA02385

France | France, Cour administrative d'appel de DOUAI, 2ème chambre, 08 janvier 2025, 22DA02385


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société OGF a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler la délibération du 8 avril 2021 par laquelle le conseil communautaire de la communauté de communes " Falaises du Talou " a déclaré sans suite la procédure de passation de la délégation de service public relative à la construction, l'exploitation et au financement d'un crématorium sur la commune de Saint-Nicolas d'Aliermont et a autorisé son président à relancer une nouvelle procédure d'attribution.<

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Par un jugement n° 2101786 du 20 septembre 2022, le tribunal administratif de Rou...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société OGF a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler la délibération du 8 avril 2021 par laquelle le conseil communautaire de la communauté de communes " Falaises du Talou " a déclaré sans suite la procédure de passation de la délégation de service public relative à la construction, l'exploitation et au financement d'un crématorium sur la commune de Saint-Nicolas d'Aliermont et a autorisé son président à relancer une nouvelle procédure d'attribution.

Par un jugement n° 2101786 du 20 septembre 2022, le tribunal administratif de Rouen a annulé cette délibération.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 15 novembre 2022 et les 5 avril 2024 et 12 juin 2024, la communauté de communes " Falaises du Talou ", représentée par l'AARPI Sarre Rouxel avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande de la société OGF ;

3°) de mettre à la charge de la société OGF la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier dès lors qu'il repose sur une dénaturation des pièces du dossier et qu'il est entaché d'un défaut de motivation ;

- le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la déclaration sans suite est inopérant et infondé ;

- elle justifie de deux motifs d'intérêt général de nature à justifier une déclaration sans suite, l'un tiré des risques juridiques et indemnitaires résultant des irrégularités entachant la procédure de passation, et l'autre résultant de l'évolution de ses besoins ;

- si la cour devait considérer qu'aucun de ces deux motifs ne pouvait légalement justifier la décision de déclaration sans suite, elle sollicite une substitution de motifs tiré de ce que l'offre du groupement OGF-ELYSIO était irrégulière et qu'à tout le moins elle présentait un risque juridique.

Par des mémoire en défense, enregistrés les 7 mars 2024, 17 mai 2024 et 2 juillet 2024, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la société OGF, représentée par la SELARL Cabanes avocats, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête ;

2°) de mettre à la charge de la communauté de communes " Falaises du Talou " la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par la communauté de communes " Falaises du Talou " ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 18 juin 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 3 juillet 2024.

Un mémoire présenté pour la société OGF a été enregistré le 9 décembre 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la commande publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Delahaye, président-assesseur,

- les conclusions de Mme Regnier, rapporteure publique,

- et les observations de Me Sermot représentant la communauté de communes " Falaises du Talou " et celles de Me Girard représentant la société OGF.

Une note en délibéré présentée pour la communauté des communes " Falaises du Talou " a été enregistrée le 11 décembre 2024.

Considérant ce qui suit :

1. Par un avis publié le 1er mars 2020, la communauté de communes " Falaises du Talou " a lancé une procédure de consultation en vue la conclusion d'une délégation de service public ayant pour objet la construction, l'exploitation et le financement d'un crématorium situé sur la commune de Saint-Nicolas d'Aliermont. Après avoir désigné la société OGF comme attributaire, le conseil communautaire de la communauté de communes a décidé, par une délibération du 8 avril 2021, de ne pas donner suite à la procédure de passation de ce contrat pour un motif d'intérêt général et a autorisé son président à relancer une nouvelle procédure d'attribution. La communauté de communes " Falaises du Talou " relève appel du jugement du 17 février 2022 par lequel le tribunal administratif de Rouen a annulé cette délibération.

Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal :

2. Une personne publique qui a engagé une procédure de passation d'un contrat de concession ne saurait être tenue de conclure le contrat. Elle peut décider, sous le contrôle du juge, de renoncer à le conclure pour un motif d'intérêt général.

3. Il ressort des termes de la délibération en litige que, pour justifier de sa renonciation à conclure le contrat, la communauté de communes " Falaises du Talou " s'est notamment fondée sur un motif tenant à l'évolution de ses besoins depuis la publication de l'avis précité du 1er mars 2020 intervenue avant la crise sanitaire de la Covid-19 et résultant des nouvelles pratiques funéraires constatées lors de celle-ci et de leur nécessaire prise en compte dans le dimensionnement du crématorium et les modalités d'accueil du public et des professionnels. Il ressort des pièces du dossier, notamment de la comparaison du programme de consultation de la procédure initiale avec celui de la seconde procédure mise en œuvre et ayant conduit à la construction et à la mise en service du crématorium, que la communauté de communes a augmenté le nombre attendu de places de stationnement en portant celui-ci de quarante à soixante-quinze dont cinq réservées aux personnes à mobilité réduite. Elle a également revu le dimensionnement du futur crématorium en portant la surface utile intérieure du bâtiment à 650 m2 maximum en vue notamment de bénéficier de propositions architecturales intégrant une surface plus importante des espaces dédiés à l'accueil du public par rapport au règlement initial qui n'imposait le respect de cette même surface qu'au titre de l'emprise au sol du bâtiment. De même, le nouveau document de la consultation imposait aux candidats d'intégrer, dans la conception architecturale du bâtiment, un espace spécifique, non prévu initialement, d'entreposage d'un cercueil, sécurisé et avec contrôle d'accès, afin de permettre aux services de pompes funèbres de disposer d'un accès permanent au crématorium, 24 heures sur 24, en vue d'y déposer un cercueil, avec également un dispositif automatique spécifique d'ouverture et de fermeture du portail. Compte tenu de la portée de ces nouvelles attentes de la communauté de communes et de sa volonté de bénéficier à ce titre de nouvelles propositions concurrentes, et eu égard au large pouvoir d'appréciation dont dispose l'administration en la matière, l'appelante n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en estimant que cette évolution des besoins caractérisait un motif d'intérêt général lui permettant de renoncer à conclure le contrat. Si la société OGF conteste également le bien-fondé du second motif d'intérêt général initialement invoqué par la communauté de communes tiré des risques juridiques et indemnitaires en cas de recours d'un concurrent évincé, il résulte de l'instruction que la communauté de communes aurait pris la même décision si elle s'était fondée exclusivement sur le motif d'intérêt général tiré de l'évolution de ses besoins. Dans ces conditions, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a annulé la délibération en litige en estimant qu'aucun motif d'intérêt général n'était caractérisé en l'espèce.

4. Toutefois, il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen soulevé par la société OGF devant le tribunal administratif et la cour.

Sur l'autre moyen :

5. Aux termes dispositions de l'article R. 3125-4 du code de la commande publique : " lorsque l'autorité décide de ne pas attribuer le contrat de concession ou de recommencer la procédure, elle informe, dans les plus brefs délais, les candidats ou soumissionnaires des motifs de sa décision. ".

6. En l'espèce, la société OGF ne peut pas utilement se prévaloir du fait que la délibération en litige du 8 avril 2021 serait insuffisamment motivée au regard des dispositions précitées de l'article R. 3125-4 du code de la commande publique dès lors que cette délibération par laquelle la communauté de communes a décidé de renoncer à conclure le contrat n'a pas pour objet d'informer la société OGF des motifs de cette décision. Ce moyen doit dès lors être écarté comme inopérant.

7. Il résulte de ce tout qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la régularité du jugement, que la communauté de communes " Falaises du Talou " est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a annulé la délibération du 8 avril 2021 et que la demande présentée par la société OGF devant le tribunal administratif de Rouen doit être rejetée.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la communauté des communes " Falaises du Talou " qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par la société OGF au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de celle-ci la somme demandée par la communauté des communes au même titre.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Rouen du 17 février 2022 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par la société OGF devant le tribunal administratif de Rouen est rejetée.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent jugement sera notifié à la société OGF et à la communauté de communes " Falaises du Talou ".

Délibéré après l'audience du 10 décembre 2024 à laquelle siégeaient :

- M. Benoit Chevaldonnet, président de chambre,

- M. Laurent Delahaye, président-assesseur,

- M. Guillaume Vandenberghe, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 janvier 2025.

Le président-rapporteur,

Signé : L. Delahaye Le président de chambre,

Signé : B. Chevaldonnet

La greffière,

Signé : A-S. Villette

La République mande et ordonne au préfet de la Seine-Maritime en ce qui le concerne en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Pour la greffière en chef,

par délégation,

La greffière

2

N°22DA02385


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22DA02385
Date de la décision : 08/01/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Chevaldonnet
Rapporteur ?: M. Laurent Delahaye
Rapporteur public ?: Mme Regnier
Avocat(s) : AARPI SARRE ROUXEL AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 19/01/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-01-08;22da02385 ?
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