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09/04/2025 | FRANCE | N°24DA00438

France | France, Cour administrative d'appel de DOUAI, 2ème chambre, 09 avril 2025, 24DA00438


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la délibération n° 2021-028 en date du 22 octobre 2021 par laquelle le conseil municipal de la commune de Selens a décidé de ne pas le maintenir dans ses fonctions de premier adjoint au maire.



Par un jugement n° 2103843 du 28 décembre 2023, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande et a mis à sa charge une somme de 500 euros à verser à la commune de Selens au titre des di

spositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



Procédure devant la...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la délibération n° 2021-028 en date du 22 octobre 2021 par laquelle le conseil municipal de la commune de Selens a décidé de ne pas le maintenir dans ses fonctions de premier adjoint au maire.

Par un jugement n° 2103843 du 28 décembre 2023, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande et a mis à sa charge une somme de 500 euros à verser à la commune de Selens au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 29 février 2024, M. A..., représenté par Me Gravier, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la délibération n° 2021-028 en date du 22 octobre 2021 du conseil municipal de la commune de Selens ;

3°) d'enjoindre à la commune de Selens de le réintégrer dans ses fonctions de premier adjoint au maire dans un délai de sept jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, lors de la première séance utile du conseil municipal suivant cette même date ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Selens une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la délibération attaquée méconnaît les dispositions de l'article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales dès lors que la question de son maintien en qualité de premier adjoint au maire avait déjà été soumise au conseil municipal lors de sa séance du 30 septembre 2021 et qu'aucun des motifs avancés par la commune ne justifiait de la lui soumettre à nouveau ;

- elle a été prise pour des motif étrangers à la bonne marche de l'administration municipale et est entachée d'un détournement de pouvoir dès lors que le maire de Selens a exercé des pressions sur les membres du conseil municipal afin de procéder à un nouveau vote portant sur son maintien en qualité de premier adjoint, alors même que le précédent vote avait été régulièrement acquis et après une information satisfaisante des conseillers municipaux.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 juin 2024, la commune de Selens, représentée par Me Detrez-Cambrai, conclut au rejet de la requête d'appel de M. A... et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à sa charge au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Toutias, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Regnier, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 9 septembre 2021, le maire de la commune de Selens a retiré à son premier adjoint, M. B... A..., la délégation de fonctions et de signature qu'il lui avait consentie pour les affaires financières. Par la délibération n° 2021-026 du 30 septembre 2021, le conseil municipal de Selens s'est prononcé pour le maintien de M. A... dans ses fonctions. Par les délibérations nos 2021-027 et 2021-028 du 22 octobre 2021, le conseil municipal a décidé, d'une part, de procéder au retrait de la délibération du 30 septembre 2021 et, d'autre part, de ne pas maintenir l'intéressé dans ses fonctions de premier adjoint. M. A... relève appel du jugement du 28 décembre 2023 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande d'annulation qu'il a regardée comme étant dirigée uniquement contre la délibération n° 2021-028 du 22 octobre 2021, ce qui n'est pas contesté par l'appelant dont les conclusions sont formulées dans le même sens qu'en première instance.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales : " Le maire est seul chargé de l'administration, mais il peut, sous sa surveillance et sa responsabilité, déléguer par arrêté une partie de ses fonctions à un ou plusieurs de ses adjoints et à des membres du conseil municipal. / (...) / Lorsque le maire a retiré les délégations qu'il avait données à un adjoint, le conseil municipal doit se prononcer sur le maintien de celui-ci dans ses fonctions ". Il résulte de ces dispositions qu'il est loisible au maire d'une commune, sous réserve que sa décision ne soit pas inspirée par un motif étranger à la bonne marche de l'administration communale, de mettre un terme, à tout moment, aux délégations de fonctions qu'il avait données à l'un de ses adjoints. Dans ce cas, il est tenu de convoquer sans délai le conseil municipal afin que celui-ci se prononce sur le maintien dans ses fonctions de l'adjoint auquel il a retiré ses délégations. Cette décision et cette délibération constituent des décisions à caractère réglementaire qui ont pour objet la répartition des compétences entre les différentes autorités municipales. Elles sont soumises à un contrôle restreint du juge de l'excès de pouvoir.

3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que, par un arrêté du 9 septembre 2021, le maire de Selens a retiré à M. A..., premier adjoint, la délégation pour les affaires financières qu'il lui avait accordée le 23 mai 2020. Par la délibération n° 2021-026 du 30 septembre 2021, le conseil municipal de Selens s'est prononcé pour le maintien de M. A... dans ses fonctions. Cette délibération a été retirée par la délibération n° 2021-027 du 22 octobre 2021. Du fait de ce retrait, qui n'est contesté par M. A... ni par la voie d'action ni par celle de l'exception, le conseil municipal était tenu, en application des dispositions précitées du dernier alinéa de l'article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales et contrairement à ce que soutient M. A..., de se prononcer à nouveau sur le maintien de celui-ci dans ses fonctions. Pour le reste, il ressort des pièces du dossier, notamment des attestations circonstanciées produites par une majorité des élus municipaux dans le cadre de la présente instance, que des difficultés relationnelles étaient survenues entre, d'une part, M. A... et, d'autre part, le maire, les autres élus et les personnels municipaux, difficultés qui étaient de nature à nuire à la conduite de l'action municipale et au bon fonctionnement des services. Il s'ensuit que c'est sans méconnaître les dispositions de l'article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales ni commettre d'erreur manifeste d'appréciation que le conseil municipal a pu, le 22 octobre 2021, démettre M. A... de ses fonctions de premier adjoint. Le moyen qu'il soulève en ce sens doit, dès lors, être écarté.

4. En second lieu, il résulte de ce qui a été dit précédemment que la décision attaquée, fondée sur la détérioration des relations de M. A... avec le maire, les autres conseillers municipaux et les personnels de la commune ainsi que sur son incidence pour la conduite des affaires de la municipalité, ne peut être regardée comme ayant été prise dans un but autre que l'intérêt du service ou étranger à la bonne marche de l'administration communale. Par ailleurs, alors qu'une majorité d'élus municipaux ont produit dans le cadre de la présente instance des attestations, dont les énonciations sont à la fois précises, personnalisées et circonstanciées, pour justifier le sens de leurs votes, les pressions que le maire de la commune aurait, selon M. A..., exercé sur eux pour obtenir un second vote en faveur du retrait de ses fonctions de premier adjoint ne peuvent être tenues pour établies. En particulier, la circonstance que la commune ait mis à leur disposition un modèle d'attestation pour formaliser leur demande n'est pas de nature à remettre en cause la sincérité et le caractère personnel de leurs démarches. Il en va de même des attestations produites à l'instance par M. A..., dont aucune n'émane d'élus au conseil municipal. Il s'ensuit que ni le détournement de pouvoir, ni le détournement de procédure qu'il allègue n'est établi. Le moyen qu'il soulève en ce sens doit, dès lors, être écarté.

5. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de la délibération n° 2021-028 en date du 22 octobre 2021 par laquelle le conseil municipal de la commune de Selens a décidé de le démettre de ses fonctions de premier adjoint au maire ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction.

Sur les frais liés au litige :

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Selens, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions que la commune de Selens présente au même titre.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Selens présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la commune de Selens.

Délibéré après l'audience publique du 25 mars 2025 à laquelle siégeaient :

- M. Benoît Chevaldonnet, président de chambre,

- M. Laurent Delahaye, président-assesseur,

- M. Guillaume Toutias, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 avril 2025.

Le rapporteur,

Signé : G. ToutiasLe président de chambre,

Signé : B. Chevaldonnet

La greffière,

Signé : A-S. Villette

La République mande et ordonne à la préfète de l'Aisne, en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Pour la greffière en chef,

par délégation,

La greffière

2

N°24DA00438


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 24DA00438
Date de la décision : 09/04/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Chevaldonnet
Rapporteur ?: M. Guillaume Toutias
Rapporteur public ?: Mme Regnier
Avocat(s) : SCP GRAVIER

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-09;24da00438 ?
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