Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens de condamner le centre hospitalier (CH) de Saint-Quentin à lui verser la somme totale de 232 416,22 euros, ou la somme de 48 789,06 euros en cas d'application du taux de perte de chance de 20 %, en réparation des préjudices subis lors de sa prise en charge dans cet établissement.
Par un jugement n° 2200008 du 25 janvier 2024, le tribunal administratif d'Amiens a partiellement fait droit à sa demande et a condamné le centre hospitalier de Saint-Quentin à lui verser une somme de 23 998,63 euros.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 21 mars 2024 et 13 février 2025, Mme B..., représentée par Me Mostaert, demande à la cour :
1°) de réformer le jugement attaqué ;
2°) de condamner le CH de Saint-Quentin à lui verser la somme totale de 255 641,82 euros avec intérêts au taux légal à compter du 3 janvier 2022 et capitalisation des intérêts, outre une somme de 2 680,89 euros ;
3°) de condamner le CH de Saint-Quentin au paiement de la somme de 3 600 euros en remboursement des frais d'expertise judiciaire ;
4°) de mettre à la charge du CH de Saint-Quentin une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la responsabilité du CH de Saint-Quentin est engagée du fait du retard de prise en charge de l'accident vasculaire cérébral (AVC) dont elle a été victime le 15 mars 2021, de la mauvaise organisation du service public hospitalier et du non-respect des garanties médicales ;
- son préjudice doit être intégralement indemnisé par le CH de Saint-Quentin, le taux de perte de chance de 20 % fixé par les experts étant sous-évalué ;
- le dommage est à l'origine de dépenses de santé qui sont restées à sa charge pour une somme totale de 383,29 € ;
- le dommage est à l'origine d'une perte de gains professionnels devant être indemnisée à la somme de 8 058,26 euros au lieu de la somme de 3 516,70 euros allouée par le tribunal ;
- le jugement attaqué sera confirmé en ce qu'il lui a alloué la somme de 212 euros au titre des frais hospitalier de location d'un téléviseur ;
- son besoin temporaire d'assistance temporaire par une tierce personne doit être évalué à la somme de 8 848 euros au lieu de la somme de 6 242,08 euros allouée par le tribunal ;
- elle a subi un déficit fonctionnel temporaire qui doit être évalué à la somme de 7 986 euros en lieu et place de la somme de 3 939 euros allouée par le tribunal ;
- elle a enduré des souffrances qui doivent être évaluée à la somme de 12 000 euros au lieu de la somme de 3 500 euros allouée par le tribunal ;
- elle a subi un préjudice esthétique temporaire qui doit être évalué à la somme de 20 000 euros au lieu de la somme de 12 000 euros allouée par le tribunal ;
- elle a subi un perte de gains professionnels postérieurs à la consolidation qu'il convient d'évaluer à la somme de 67 025,52 euros alors que le tribunal n'a alloué qu'une somme de 7 777,45 euros ;
- il y a lieu de réserver son préjudice de retraite ;
- son besoin permanent d'assistance par une tierce personne doit être évalué à la somme de 30 452,53 euros, alors que le tribunal n'a alloué qu'une somme totale de 21 148,85 euros ;
- elle a subi un préjudice d'agrément temporaire et permanent qui doivent être évalué à la somme totale de 2 000 euros au lieu de la somme de 955 euros allouée par le tribunal pour le seul préjudice esthétique permanent ;
- elle subit des pertes de revenus professionnels futurs qui doivent être évalué à la somme de 30 535,36 euros ainsi qu'à la somme de 3 053,50 euros au titre des congés payés afférents à la perte de salaire ;
- le jugement attaqué sera confirmé en ce qu'il lui a alloué la somme de 2 676,22 euros au titre des frais d'adaptation de son véhicule ;
- elle a subi un déficit fonctionnel permanent de 30 % qui doit être évalué à la somme de 60 000 euros au lieu de la somme de 48 022 euros allouée par les premiers juges ;
- son préjudice esthétique permanent doit être évalué à la somme de 8 000 euros au lieu de la somme de 2 500 euros fixée par le tribunal ;
- son préjudice d'agrément doit être indemnisé à la somme de 20 000 euros ;
- son préjudice sexuel doit être indemnisé à hauteur de 10 000 euros ;
- le jugement attaqué sera confirmé en ce qu'il lui a allouée les sommes de 280,69 euros au titre des frais de déplacement et 2 400 euros pour les frais d'assistance au cours des opérations d'expertise.
Par un mémoire, enregistré le 26 septembre 2024, le centre hospitalier de Saint-Quentin, représenté par Me Cariou, demande à la cour de rejeter la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par l'appelante ne sont pas fondés.
La requête et les pièces de la procédure ont été communiquées au recteur de l'académie d'Amiens qui n'a pas produit de mémoire.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C...,
- les conclusions de Mme Regnier, rapporteure publique ;
- et les observations de Me Mostaert, représentant Mme B... et de Me Flageul, substituant Me Cariou, représentant le CH de Saint-Quentin.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., professeur certifié hors classe née le 7 décembre 1960 et enseignant la matière " sciences et vie de la terre " au sein du collège Victor Hugo à Ham, a été prise de vertiges et de vomissements le 15 mars 2021 à l'issue de sa journée de travail. Le médecin qu'elle a consulté le même jour l'a adressée aux urgences du centre hospitalier (CH) de Saint-Quentin en raison de complications digestives et cardiaques. Après son admission au service des urgences, Mme B... a présenté un engourdissement d'une partie de son organisme. La réalisation d'une imagerie par résonance magnétique (IRM) dans la nuit a permis d'identifier un accident vasculaire cérébral (AVC) ayant entraîné une hémiplégie massive du côté gauche. L'intéressée a quitté le CH de Saint-Quentin le 30 mars 2021 et a bénéficié d'une rééducation jusqu'au 23 juillet 2021.
2. Mme B... a saisi, le 19 novembre 2021, le juge des référés du tribunal administratif d'Amiens qui, par une ordonnance du 17 janvier 2022, a désigné un collège d'experts. Le rapport des deux experts désignés a été remis le 16 juin 2022. Mme B... relève appel du jugement n° 2200008 du 25 janvier 2024 en tant que le tribunal administratif d'Amiens n'a pas fait droit en totalité à ses conclusions tendant à la condamnation du CH de Saint-Quentin à lui verser la somme totale de 232 416,22 euros en réparation des préjudices subis lors de sa prise en charge dans cet établissement.
Sur la responsabilité du centre hospitalier de Saint-Quentin :
3. Aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " I. - Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. ".
4. Il résulte de l'instruction, et il n'est pas contesté, que les personnels du CH de Saint-Quentin n'ont pas rapidement pris en compte les premiers signes évocateurs d'un AVC manifestés par Mme B... à partir de 21 heures le 15 mars 2021, une heure après son admission au sein du service des urgences, l'intéressée ayant alors ressenti un engourdissement progressif de l'hémicorps gauche et des difficultés d'élocution, son fils, qui l'accompagnait, ayant au surplus immédiatement fait part de ces constatations auprès du corps médical. La patiente a ainsi dû attendre le lendemain pour passer un scanner à 1h30 et n'a pu bénéficier d'une IRM qu'à 2h15, ce dernier examen ayant permis de détecter l'existence d'un AVC à l'origine d'une hémiplégie massive du côté gauche. Il en résulte que la prise en charge de l'état de santé de Mme B..., qui n'a pas pu bénéficier d'une prise en charge adaptée en temps utile, est tardive et que le CH de Saint-Quentin a ainsi commis une faute de nature à engager sa responsabilité.
Sur la perte de chance :
5. Dans le cas où la faute commise lors de la prise en charge ou le traitement d'un patient dans un établissement public hospitalier a compromis ses chances d'obtenir une amélioration de son état de santé ou d'échapper à son aggravation, le préjudice résultant directement de la faute commise par l'établissement et qui doit être intégralement réparé n'est pas le dommage corporel constaté, mais la perte de chance d'éviter que ce dommage soit advenu. La réparation qui incombe à l'hôpital doit alors être évaluée à une fraction du dommage corporel déterminée en fonction de l'ampleur de la chance perdue.
6. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise transmis le 16 juin 2022, que si le CH de Saint-Quentin avait pris en charge sans délai Mme B... et identifié rapidement, après réalisation d'une IRM, l'AVC en cours de manifestation, le corps médical aurait eu la possibilité de recourir à une thrombolyse intraveineuse afin de dissoudre le caillot sanguin obstruant l'artère cérébrale, cette opération devant, selon la littérature médicale et notamment les recommandations de la Haute Autorité de Santé établies en mai 2009 en ce qui concerne la prise en charge des accidents vasculaires cérébraux, être impérativement réalisée dans un délai maximum de quatre heures et demi suivant les premiers symptômes de l'accident. Toutefois et contrairement à ce que fait valoir Mme B... dans des termes généraux, le recours en temps utile à une thrombolyse n'aurait pas permis avec certitude d'éviter les séquelles de l'accident ischémique pour la patiente et l'absence de prise en charge adaptée de l'AVC de la requérante n'est, ainsi que les experts ont pu le relever, qu'à l'origine une perte de chance d'éviter les séquelles dont elle a été victime. En l'espèce, eu égard aux conclusions expertales et en l'absence de production par la requérante de tout élément médical circonstancié à l'appui de ses écritures, son taux de perte de chance d'éviter la dégradation de son état de santé doit être fixé à 20 %, ainsi que l'ont relevé les premiers juges.
Sur l'évaluation des préjudices :
En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux :
S'agissant des dépenses de santé restées à la charge de la victime :
7. Ainsi que l'ont relevé les premiers juges, Mme B... a subi un préjudice tenant aux frais médicaux restés à sa charge, soit une somme de 82,50 euros au titre des franchises, 20 euros au titre d'un déambulateur, 25,90 euros à raison d'une canne afin de l'aider à marcher et 212 euros pour la location d'un téléviseur dans sa chambre d'hôpital, soit un total de 340,4 euros, avant application du taux de perte de chance. En revanche, contrairement à ce que fait valoir l'intéressée, il ne résulte pas de l'instruction et notamment de la seule ordonnance sommaire qu'elle produit sur ce point, que son état de santé tenant à la faute commise par le CH de Saint-Quentin nécessite l'achat d'un sommier et d'un matelas pour une somme de 254,79 euros.
S'agissant des frais d'adaptation du véhicule :
8. Il y a lieu, par adoption des motifs exposés au point 18 du jugement attaqué, d'évaluer à la somme de 2 676,22 euros, avant application du taux de perte de chance, les travaux d'adaptation à mener sur le véhicule de Mme B... en raison des conséquences de la faute du CH de Saint-Quentin et consistant à le doter d'une boîte de vitesses automatique.
S'agissant du besoin d'assistance par une tierce personne :
9. Le principe de la réparation intégrale du préjudice impose que les frais liés à l'assistance à domicile de la victime par une tierce personne, alors même qu'elle serait assurée par un membre de sa famille, soient évalués à une somme qui ne saurait être inférieure au montant du salaire minimum augmenté des charges sociales, appliqué à une durée journalière, dans le respect des règles du droit du travail. Afin de tenir compte des congés payés et des jours fériés prévus par l'article L. 3133-1 du code du travail, il y a lieu de calculer l'indemnisation sur la base d'une année de 412 jours.
10. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que l'état de santé de Mme B... nécessitait une aide temporaire non spécialisée de deux heures par jour du 24 juillet 2021 au 23 septembre 2021, soit pendant 60 jours, ce qui représente 120 heures, d'une heure par jour pour la période du 24 septembre 2021 au 9 juin 2022, date de consolidation, soit 258 heures, et d'une heure par semaine pour les périodes suivantes, ce qui représente, du 10 juin 2022 à la date de lecture du présent arrêt 155 heures. En tenant compte d'un taux horaire de 15 euros, il y a lieu d'évaluer ce chef de préjudice, avant application du taux de perte de chance, à une somme de 9 034,35 euros (soit 533 heures x 15 euros x 1,13).
11. Ainsi qu'il vient d'être dit, l'état de santé de l'appelante nécessite l'assistance permanente d'une tierce personne à raison d'une heure par semaine, soit 52 heures par an. Aussi, pour la période postérieure à la date de mise à disposition du présent arrêt, il y a lieu d'évaluer ce chef de préjudice, avant application du taux de perte de chance, à une somme de 18 113,16 euros compte tenu du coefficient de 23,222 prévu par la table prospective du barème 2025 de la gazette du palais pour une femme âgée de 64 ans, à ce jour (soit 52 heures x 15 euros x 23,222).
S'agissant de la perte de gains professionnels :
12. Il résulte de l'instruction que Mme B... a été placée en congé de longue maladie du 15 mars 2021 au 14 mars 2022 puis à compter de cette dernière date en congé de longue durée tout en disposant d'un droit à bénéficier de son plein traitement jusqu'au 14 mars 2025 suivant les termes de l'attestation du recteur de l'académie d'Amiens établie le 16 février 2024. A compter du 15 mars 2025, l'intéressée ne bénéficie plus que d'un droit à demi-traitement pour une durée de trois ans. Il ne résulte par ailleurs pas de l'instruction qu'en raison de son état de santé, Mme B... sera en mesure de reprendre une quelconque activité professionnelle avant le 1er août 2026, date à laquelle elle entend partir à la retraite, l'intéressée n'atteignant au demeurant la limite d'âge impliquant la rupture de plein droit du lien de l'agent avec le service que le 7 décembre 2027. Il ne résulte pas non plus de l'instruction que le recteur de l'académie d'Amiens, qui n'a produit aucune observation tant en première instance qu'en appel, ait entendu radier des cadres la requérante en raison de son inaptitude physique ou de son invalidité avant le 1er août 2026. Mme B... doit par suite se voir indemniser de la perte de ses gains professionnels pour la période allant du 15 mars 2021 au 1er août 2026.
13. D'une part, pour la période du 15 mars 2025 au 1er août 2026, Mme B... est fondée à demander l'indemnisation du demi-traitement qu'elle n'est plus en mesure de percevoir, soit une somme de 28 378,40 euros avant application du taux de perte de chance, en prenant en compte une rémunération mensuelle moyenne à demi-traitement de 2 233,64 euros bruts, soit 1 719,90 euros nets, pendant une période de seize mois et demi (soit 1 719,90 euros x 16,5 mois).
14. D'autre part, il résulte de l'instruction que, préalablement à l'arrêt de son activité professionnelle en raison de la faute commise par le CH de Saint-Quentin, Mme B... bénéficiait de diverses indemnités qu'elle n'a plus été en mesure de percevoir à compter du 15 mars 2021. Ainsi, l'intéressée n'a plus perçu d'heures supplémentaires années, au cours de la période allant du 15 mars au 30 juin 2021 et de l'année scolaire 2021-2022, à hauteur de 0,5 heure hebdomadaire par mois, cette indemnité étant perçue sur les mois d'octobre à juin. Au titre de l'année scolaire 2022-2023, ses états de services font état de l'attribution de 1,5 heure supplémentaire année, également versée d'octobre à juin, Mme B... devant aussi être indemnisée de la perte de ces 1,5 heures concernant les années scolaires 2023-2024, 2024-2025 et 2025-2026. Au titre de la perte de ces heures supplémentaires année, le préjudice subi par la requérante doit être évaluée la somme nette et non contestée de 11 007,18 euros. La requérante n'a par ailleurs pu bénéficier des heures supplémentaires qu'elle n'a pas été en mesure de réaliser. Eu égard au montant perçu par l'intéressée à ce titre au cours des années 2019 et 2020 et dont elle se prévaut à l'appui de ses conclusions, son préjudice doit être évalué à la somme nette non contestée de 19 319,07 euros au titre des heures supplémentaires non réalisées. Pour ce qui est de l'indemnité REP spécifique, il résulte des bulletins de salaire de l'intéressée qu'elle a continué à bénéficier de cette indemnité mensuelle jusqu'au mois de décembre 2021. A compter du mois de janvier 2022, elle n'en a cependant plus bénéficié et a subi une perte de gains au titre de la période allant du mois de janvier 2022 au mois de juillet 2026 pour un montant net non contesté de 6 119,36 euros. L'appelante a encore été privée du bénéfice de l'indemnité de suivi et d'orientation des élèves à compter du 15 décembre 2022 et le préjudice subi à ce titre doit être évalué à la somme nette non contestée de 6 371,34 euros. En revanche, il n'est pas établi que la requérante aurait perçu avec certitude la prime Pacte à compter de son instauration. Par suite et afin de réparer l'absence de perception des indemnités précitées au cours de la période allant du 15 mars 2021 au 1er août 2026, Mme B... a droit à une somme de 42 816,95 euros, avant application du taux de perte de chance de 20 %.
S'agissant de la perte de droits à la retraite :
15. Il est donné acte à Mme B... qu'elle entend réserver ce poste.
En ce qui concerne les préjudices extrapatrimoniaux :
S'agissant du déficit fonctionnel:
16. D'une part, il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que Mme B... a droit à l'indemnisation d'un déficit fonctionnel temporaire à 100 % du 15 mars au 23 juillet 2021, à 50 % du 24 juillet 2021 au 23 septembre 2021 et à 40 % jusqu'à la date de consolidation de son état de santé le 9 juin 2022. Sur la base d'une indemnisation de 15 euros par jour, il sera fait une juste appréciation du déficit fonctionnel temporaire subi par la victime en l'évaluant à une somme de 3 948 euros (soit 1 950 euros (130 jours x 15 euros) + 450 euros (60 jours x 15 euros x 0,50) + 1 548 euros (258 jours x 15 euros x 0,40), avant application du taux de perte de chance de 20%.
17. D'autre part, il résulte de l'instruction que le taux de déficit fonctionnel permanent de Mme B... est de 30 %. Compte tenu de l'âge de la victime à la date de consolidation de son état de santé, soit 62 ans, et de ce taux, il y a lieu d'évaluer ce chef de préjudice à la somme de 48 022 euros, comme l'ont relevé les premiers juges, avant application du taux de perte de chance de 20%.
S'agissant des souffrances endurées :
18. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise précité, que les souffrances occasionnées à Mme B... par le retard fautif de la prise en charge de son AVC par le CH de Saint-Quentin ont été évaluées à 3 sur une échelle de 7. Compte tenu de cette évaluation et avant application du taux de perte de chance de 20%, il y a lieu de fixer à 3 500 euros ce chef de préjudice, ainsi que l'on relevé les premiers juges.
S'agissant du préjudice esthétique :
19. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise précité, que l'AVC traité avec retard par le CH de Saint-Quentin est à l'origine d'un préjudice esthétique temporaire évalué à 4 sur une échelle de 7 et un préjudice esthétique permanent évalué à 2,5 sur une échelle de 7. Ainsi que l'on relevé les premiers juges, il y a lieu d'évaluer ces chefs de préjudice à 7 000 euros et 2 500 euros, avant application du taux de perte de chance de 20%.
S'agissant du préjudice d'agrément :
20. Il ne résulte pas de l'instruction que Mme B... aurait subi un préjudice d'agrément du fait de la prise en charge fautive de son AVC. L'appelante n'est dès lors pas fondée à demander la condamnation du CH de Saint-Quentin à lui verser une somme de 20 000 euros à ce titre.
S'agissant du préjudice sexuel :
21. Il ne résulte pas de l'instruction que Mme B... subirait un préjudice sexuel du fait de la prise en charge fautive de son AVC. L'appelante n'est dès lors pas fondée à demander la condamnation du CH de Saint-Quentin à lui verser une somme de 10 000 euros à ce titre.
22. Par suite, le préjudice subi par Mme B... doit, compte tenu du taux de perte de chance de 20 %, être fixé à la somme de 33 264,90 euros (soit 0,2 x (340,4 euros +2 676,22 euros + 9 034,35 euros + 18 113,16 euros + 28 373,40 euros + 42 816,95 euros + 3 948 euros + 48 022 euros + 3 500 euros + 7 000 euros + 2 500 euros)), majorée des frais de déplacement occasionnés par les opérations de l'expertise ordonnée par le juge des référés du tribunal administratif d'Amiens, soit 270,27 euros. Quant aux frais d'avocat supportés par la requérante durant ces mêmes opérations, ils ne peuvent être remboursés que par la somme allouée, le cas échéant, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
23. Il résulte de ce qui précède que Mme B... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a limité son indemnisation à la somme de 23 998,63 euros en lieu et place de celle de 33 535,17 euros.
Sur les intérêts et leur capitalisation :
24. Mme B... est fondée à demander que la somme de 33 535,17 euros porte intérêts au taux légal à compter du 3 janvier 2022, date de sa demande introductive d'instance devant le tribunal administratif d'Amiens.
25. La capitalisation des intérêts a été demandée pour la première fois le 3 janvier 2022. Il y a lieu de faire droit à cette demande à compter du 3 janvier 2023, date à laquelle était due pour la première fois une année d'intérêts, ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date.
Sur les dépens :
26. Il y a lieu de confirmer la mise à la charge définitive du CH de Saint-Quentin des frais et honoraires de l'expertise de première instance, liquidés et taxés à la somme de 3 600 euros par une ordonnance n° 2103825 du 30 juin 2022 de la présidente du tribunal administratif d'Amiens.
Sur les frais liés au litige :
27. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du CH de Saint-Quentin une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, compte tenu notamment des frais de conseil engagés par l'appelante dans le cadre de l'expertise médicale pour une somme de 2 400 euros.
DÉCIDE :
Article 1er : La somme de 23 998,63 euros allouée à Mme B... par le jugement du tribunal administratif d'Amiens n° 2200008 du 25 janvier 2024 est portée à la somme de 33 535,17 euros.
Article 2 : La somme de 33 535,17 euros portera intérêts au taux légal à compter du 3 janvier 2022. Les intérêts échus à la date du 3 janvier 2023 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 3 : Le centre hospitalier de Saint-Quentin versera à Mme B... une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le jugement n° 2200008 du 25 janvier 2024 du tribunal administratif d'Amiens est réformé en ce qu'il de contraire au présent arrêt.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B..., au centre hospitalier de Saint-Quentin, à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Oise et à la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Copie en sera adressée au recteur de l'académie d'Amiens.
Délibéré après l'audience publique du 13 mai 2025 à laquelle siégeaient :
- M. Benoît Chevaldonnet, président de chambre,
- M. Laurent Delahaye, président-assesseur,
- M. Guillaume Vandenberghe, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 juin 2025.
Le rapporteur,
Signé : G. C...Le président de chambre,
Signé : B. Chevaldonnet
La greffière,
Signé : A. Vigor
La République mande et ordonne à la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Pour la greffière en chef,
par délégation,
La greffière
2
N°24DA00583