Vu l'arrêt n° 04LY01417, en date du 24 avril 2007, par lequel la Cour administrative d'appel de Lyon, avant dire droit sur les conclusions de la requête de Mme X, qui tendait à ce que le centre hospitalier de Bourgoin-Jallieu soit condamné à lui verser une somme totale de 40 500 euros en réparation du préjudice subi à la suite d'une intervention chirurgicale réalisée dans cet établissement le 6 mai 1997, a décidé qu'il serait procédé à une expertise en vue de dire :
1) si, dès lors qu'un traitement antibiotique a été reçu par Mme X avant que les examens bactériologiques pratiqués constatent l'absence de germe, cette absence de germe peut permettre de conclure à l'absence d'une infection nosocomiale ;
2) si, en cas d'infection nosocomiale avérée, il est possible de conclure que la nécrose osseuse dont a été victime Mme X, à l'origine de la pseudoarthrose dont elle reste atteinte, serait en lien avec ladite infection ou avec la seule fracture initiale ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 juin 2009 :
- le rapport de M. Stillmunkes, premier conseiller,
- les observations de Me Delay, avocat de Mme Danièle X et de Me Levy, avocat du centre hospitalier de Bourgoin Jallieu ;
- les conclusions de Mme Marginean-Faure, rapporteur public ;
- les nouvelles observations de Me Delay, avocat de Mme Danièle X et de Me Levy, avocat du centre hospitalier de Bourgoin Jallieu ;
Sur le principe et l'étendue de la responsabilité :
Considérant, en premier lieu, que dans le cas où la faute commise lors de la prise en charge ou le traitement d'un patient dans un établissement public hospitalier a compromis ses chances d'obtenir une amélioration de son état de santé ou d'échapper à son aggravation, le préjudice résultant directement de la faute commise par l'établissement et qui doit être intégralement réparé n'est pas le dommage corporel constaté, mais la perte de chance d'éviter que ce dommage soit advenu ; que la réparation qui incombe à l'hôpital doit alors être évaluée à une fraction du dommage corporel déterminée en fonction de l'ampleur de la chance perdue ;
Considérant que, d'une part, il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert infectiologue désigné par la Cour, que Mme X a été victime d'une infection nosocomiale durant l'intervention chirurgicale dont elle a fait l'objet au centre hospitalier Pierre Oudot de Bourgoin-Jallieu ; que cette situation révèle une faute dans l'organisation et le fonctionnement du service ; que, d'autre part, si la gravité de la fracture que Mme X a subie faisait peser potentiellement sur elle le risque de souffrir de la pseudarthrose dont elle a finalement été atteinte, ce n'était toutefois que dans une proportion limitée, ses chances d'obtenir une consolidation normale ayant pu être évaluées par l'expert à au moins 70 % ; que la survenue d'une infection nosocomiale, qui rendait très probable une mauvaise consolidation, a en revanche compromis ses chances d'obtenir une amélioration de son état de santé ; que, dans ces conditions, Mme X est fondée à demander que le centre hospitalier de Bourgoin-Jallieu soit condamné à l'indemniser à hauteur de 70 % des préjudices en ayant résulté, au titre de la perte de ses chances d'obtenir une amélioration de son état de santé ;
Considérant, en second lieu, que dès lors que les préjudices en litige découlent de la mauvaise consolidation de la fracture avec déplacement subie par Mme X, qui a généré une pseudarthrose, et qu'il résulte de l'instruction qu'en l'absence d'intervention sur cette fracture aucune consolidation correcte n'aurait pu se produire, le défaut d'information préalable sur les risques encourus ne peut lui avoir fait perdre une chance d'échapper à ces préjudices en refusant l'intervention ; qu'elle ne peut dès lors utilement reprocher au centre hospitalier un tel défaut d'information ;
Sur le montant du préjudice :
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que Mme X, après une période d'incapacité temporaire totale d'environ un an et demi, conserve un taux d'incapacité permanente partielle de 20 % ; qu'elle est fortement handicapée dans les gestes de la vie quotidienne et souffre de douleurs permanentes, qui peuvent atteindre un seuil extrêmement élevé ; qu'elle a enfin subi un préjudice esthétique important ; qu'il sera fait une juste appréciation des troubles dans les conditions d'existence, des souffrances endurées, du préjudice esthétique et du préjudice d'agrément ainsi supportés en les évaluant à la somme totale de 40 500 euros ;
Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction que l'état de Mme X a justifié la réalisation ultérieure d'une autre intervention en 2006, à l'occasion de laquelle des frais médicaux sont demeurés à sa charge pour un montant total de 976,30 euros ; qu'elle est également fondée à en demander le remboursement ;
Considérant que, compte tenu des éléments qui viennent d'être indiqués, le préjudice correspondant à la perte de chance de Mme X d'obtenir une amélioration de son état de santé, doit être regardé comme s'élevant à la somme de 29 033,41 euros
Sur les intérêts et leur capitalisation :
Considérant, en premier lieu, qu'en application des dispositions de l'article 1153 du code civil, Mme X a droit aux intérêts au taux légal afférents à la somme susmentionnée de 29 033,41 euros, à compter du 8 janvier 2001, date de la demande adressée au centre hospitalier de Bourgoin-Jallieu ;
Considérant, en second lieu, que Mme X a demandé la capitalisation des intérêts pour la première fois dans sa requête enregistrée le 16 septembre 2004 ; qu'à cette date, les intérêts étaient dus pour au moins une année entière ; qu'en application des dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu dès lors de faire droit à cette demande, tant à cette date, qu'à chaque échéance annuelle à compter de celle-ci ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité des conclusions indemnitaires nouvelles de la requête, Mme X est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande, en tant qu'elle tendait à ce que le centre hospitalier de Bourgoin-Jallieu soit condamné à lui verser la somme de 29 033,41 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 8 janvier 2001, et avec capitalisation desdits intérêts au 16 septembre 2004 et à chaque échéance annuelle à compter de cette dernière date ;
Sur les dépens :
Considérant qu'en application des dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, il y a lieu de mettre les frais d'expertise, tant en première instance qu'en appel, à la charge du centre hospitalier de Bourgoin-Jallieu ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et compte tenu notamment des frais spécifiques d'assistance d'un médecin conseil dont Mme X justifie, de mettre à la charge du centre hospitalier de Bourgoin-Jallieu une somme de 3 500 euros au titre des frais exposés par Mme X et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le centre hospitalier de Bourgoin-Jallieu versera à Mme X la somme de 29 033,41 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 8 janvier 2001, et avec capitalisation desdits intérêts au 16 septembre 2004 et à chaque échéance annuelle à compter de cette dernière date.
Article 2 : Les frais d'expertise, tant en première instance qu'en appel, sont mis à la charge du centre hospitalier de Bourgoin-Jallieu.
Article 3 : Le jugement du Tribunal administratif de Grenoble en date du 7 juillet 2004 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le centre hospitalier de Bourgoin-Jallieu versera à Mme X la somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme X est rejeté.
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N° 04LY01417