Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D...B...a demandé au tribunal administratif de Lyon de lui accorder la décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre de des années 2006, 2007 et 2009.
Par un jugement n° 1207610-1307513 du 7 avril 2015, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 28 mai 2015, M. B..., représenté par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 7 avril 2015 ;
2°) de lui accorder la décharge des impositions contestées ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier dès lors qu'il a statué sur la question de savoir s'il était de mauvaise foi alors que ce point ne figurait à aucun moment de la procédure ;
- il ne pouvait pas faire l'objet des rectifications en litige dès lors qu'en application de la doctrine référencée BOI-BIC-RICI-20-30-10-20-20120912, un contribuable qui se prévaut d'un certificat de déduction fiscale irrégulier n'encourt aucune rectification, sauf si sa mauvaise foi ou l'existence de manoeuvres frauduleuses est démontrée par l'administration ;
- l'administration a méconnu son devoir de loyauté ainsi que le principe de l'estoppel.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 novembre 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que le tribunal administratif n'a pas statué ultra petita et qu'aucun des moyens présentés par M. B... n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Savouré,
- les conclusions de Mme Bourion, rapporteur public.
1. Considérant qu'à la suite d'une vérification de comptabilité de l'association Synapsis portant sur les exercices clos en 2006 et 2007, dont M. B... est le directeur scientifique, ce dernier a fait l'objet d'un contrôle sur pièces à l'issue duquel il a été assujetti à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu portant sur les années 2006 et 2007, notifiées selon la procédure contradictoire, résultant de la remise en cause de la réduction d'impôt dont il avait bénéficié sur le fondement de l'article 200 du code général des impôts pour des dons consentis à cette association, sous forme d'abandons de salaires, pour des montants de 60 200 euros en 2006 et 78 450 euros en 2007 ; qu'à la suite d'un nouveau contrôle sur pièces intervenu en 2012, l'administration a également remis en cause, au titre de l'année 2009, la réduction d'impôt se rapportant à la fraction de ces sommes qui, ayant excédé le plafond des dons pouvant faire l'objet d'une réduction, avaient été reportée sur cette année ; qu'en revanche, aucune rectification n'a eu lieu sur l'année 2008, alors couverte par la prescription ; que M. B...relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande de décharge de ces impositions ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant que si M. B...soutient que le tribunal aurait majoré les impositions mises à sa charge ou statué au-delà des conclusions de l'administration, le jugement dont l'annulation est demandée s'est borné à rejeter les requêtes de M.B..., faisant ainsi droit aux conclusions de l'administration fiscale ; que le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué doit donc être écarté ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
3. Considérant que les obligations des contribuables résultent des textes législatifs et réglementaires, à l'application desquels l'administration ne peut renoncer ; que sous réserve des garanties prévues pour le contribuable par les articles L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales, la position ou le comportement de l'administration avant la procédure contentieuse, lors de l'instruction de la réclamation ou en cours d'instance devant le juge de l'impôt, quelles que soient leurs évolutions ou contradictions éventuelles, ne peuvent faire obstacle à l'application par le juge de l'impôt de la loi fiscale, dans le cadre des moyens soulevés par chacune des parties et de ceux qu'il est tenu de relever d'office ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...ne peut utilement se prévaloir de ce que pour justifier les rectifications en litige, l'administration aurait invoqué en cours de procédure des motifs qui ne figuraient pas dans la proposition de rectification ; que, dès lors, les moyens tirés de l'absence de loyauté de l'administration et de la méconnaissance du principe dit de " l'estoppel ", aux termes duquel une partie ne pourrait, après avoir adopté une position claire ou un comportement non ambigu sur sa future conduite à l'égard de l'autre partie, modifier ultérieurement cette position ou ce comportement d'une façon qui affecte les rapports de droit entre les parties, ne peuvent qu'être écartés ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :
5. Considérant qu'aux termes de l'article 200 du code général des impôts, applicable au litige : " 1. Ouvrent droit à une réduction d'impôt sur le revenu égale à 66 % de leur montant les sommes prises dans la limite de 20 % du revenu imposable qui correspondent à des dons et versements, y compris l'abandon exprès de revenus ou produits, effectués par les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B, au profit : (...) ; b) D'oeuvres ou d'organismes d'intérêt général ayant un caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial, culturel, ou concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique, notamment à travers les souscriptions ouvertes pour financer l'achat d'objets ou d'oeuvres d'art destinés à rejoindre les collections d'un musée de France accessibles au public, à la défense de l'environnement naturel ou à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques françaises (...) " ;
6. Considérant qu'il est constant qu'au cours des années 2006 et 2007, l'association Synapsis exerçait, en plus de son activité scientifique d'intérêt général, des activités de recherche à caractère lucratif ; que, comme l'a relevé l'administration, l'activité lucrative regroupait respectivement 92,40 % et 98,61 % des dépenses de l'association en 2006 et 2007, tandis que les dons représentaient respectivement 96,77 % et 95,75 % des recettes en 2006 et 2007 ; qu'elle établit ainsi que l'activité lucrative de l'association était prépondérante et que les dons ne pouvaient être regardés comme ouvrant droit à la réduction d'impôt prévue par l'article 200 précité du code général des impôts ; que contrairement à ce que soutient M.B..., la circonstance que l'article 1740 A du code général des impôts prévoit à l'encontre des associations une amende fiscale de 25 % des sommes indument mentionnées sur les attestations fiscales permettant aux contribuables d'obtenir une réduction d'impôt, ne fait pas obstacle à ce que l'administration remette en cause les réductions d'impôt indument perçues par lesdits contribuables sur le fondement de l'article 200 ;
En ce qui concerne l'application de la doctrine de l'administration :
7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 80 B du même livre dans sa version alors en vigueur : " La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable : 1° Lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal (...) " ;
8. Considérant que M. B...se prévaut du paragraphe 140 de la doctrine fiscale BOI-BIC-RICI-20-30-10-20-20120912, aux termes duquel : " Les organismes ne respectant pas les conditions mentionnées au BOI-BIC-RICI-20-30-10-10 II A et qui délivrent irrégulièrement des certificats, reçus ou attestations permettant à un contribuable d'obtenir une déduction du revenu ou du bénéfice imposables, ou une réduction d'impôt, sont passibles d'une amende fiscale égale à 25 % des sommes indûment mentionnées sur ces documents (article 1740 A du CGI). / Le contribuable qui se prévaut de ce document n'encourt pour sa part aucun redressement, sauf si sa mauvaise foi ou l'existence de manoeuvres frauduleuses, comme par exemple la collusion avec la personne ou l'organisme ayant délivré l'attestation, est démontrée par l'administration. " ; qu'il invoque également la réponse ministérielle faite à M.C..., député, publiée au journal officiel de l'assemblée nationale le 3 mai 2005, mentionnant que " Aux termes de l'article 1768 quater du code général des impôts, tout organisme qui délivre irrégulièrement des certificats, reçus, états ou attestations permettant à un contribuable d'obtenir le bénéfice d'une déduction du revenu ou du bénéfice imposable ou une réduction d'impôt est passible d'une amende fiscale égale à 25 % des sommes indûment mentionnées sur ces documents. Le contribuable qui se prévaut de ce document n'encourt pour sa part aucun redressement, sauf si sa mauvaise foi ou l'existence de manoeuvres frauduleuses, comme par exemple la collusion avec la personne ou l'organisme ayant délivré l'attestation, est démontrée par l'administration. Dans ce seul cas, la réduction d'impôt est remise en cause et le redressement assorti des pénalités prévues à l'article 1729 du code déjà cité. " ;
9. Considérant que M. B...était fondateur et président de l'association Synapsis lors de la création du secteur lucratif de ladite association en 2006 ; qu'il ne pouvait donc ignorer que ses dons allaient alimenter essentiellement cette activité ; que, dès lors, quand bien même son expert comptable lui a délivré une attestation suivant laquelle les dons effectués étaient éligibles à la réduction d'impôt, l'administration établit une collusion entre M. B...et l'organisme ayant délivré l'attestation, de sorte qu'il n'est pas fondé à invoquer la doctrine précitée ; que, par ailleurs, M. B... ne saurait utilement se prévaloir de la circonstance que l'administration n'ait pas cru devoir appliquer la pénalité prévue par l'article 1729 du code général des impôts ;
10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquences, ses conclusions à fin d'injonction et celles de son conseil tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B...et au ministre de l'économie et des finances.
Délibéré après l'audience du 10 novembre 2016 à laquelle siégeaient :
M. Clot, président de chambre,
M. Pourny, président-assesseur,
M. Savouré, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 1er décembre 2016.
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N° 15LY01783