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03/10/2019 | FRANCE | N°19LY00214

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 03 octobre 2019, 19LY00214


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 10 novembre 2018 par lequel le préfet de l'Yonne a pris à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.

Par un jugement n° 1802942 du 17 décembre 2018, le président du tribunal administratif de Dijon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 16 janvier 2019 et le 30 avril 2019, M. B..., représenté par M

e Boutaourout, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du président du tribunal ad...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 10 novembre 2018 par lequel le préfet de l'Yonne a pris à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.

Par un jugement n° 1802942 du 17 décembre 2018, le président du tribunal administratif de Dijon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 16 janvier 2019 et le 30 avril 2019, M. B..., représenté par Me Boutaourout, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du président du tribunal administratif de Dijon du 17 décembre 2018 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du préfet de l'Yonne du 10 novembre 2018 ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté n'est pas suffisamment motivé ;

- il est entaché d'une erreur de droit au regard du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il est entaché d'une erreur d'appréciation ;

- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 5 août 2019, le préfet de l'Yonne, représenté par la société Claisse et associés, avocats, conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Le rapport de M. Seillet, président assesseur, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant ukrainien, serait entré irrégulièrement en France en 2014. Le 16 mars 2016, il a présenté une demande d'asile, rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA) par une décision du 2 novembre 2016, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) par une décision du 19 septembre 2017. Le 29 novembre 2017, le préfet de l'Essonne a prononcé à son encontre, d'une part, une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et, d'autre part, une assignation à résidence. Le 10 novembre 2018, M. B... a été interpellé par la gendarmerie de Sens à raison d'un excès de vitesse. Le préfet de l'Yonne, par un arrêté du même jour, a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans. M. B... relève appel du jugement du 17 décembre 2018 par lequel le président du tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Lorsque l'étranger ne faisant pas l'objet d'une interdiction de retour s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire au-delà du délai de départ volontaire, l'autorité administrative prononce une interdiction de retour pour une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ".

3. Il ressort des termes mêmes de ces dispositions que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux. La décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs. Si cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi, aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère.

4. Il incombe ainsi à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger. Elle doit par ailleurs faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet. Elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifie sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace. En revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément.

5. En premier lieu, l'arrêté en litige indique que M. B... réside en France depuis 2014, que sa demande d'asile a été rejetée, qu'il a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français le 29 novembre 2017 et qu'il n'a pas de famille en France. Ainsi, il ressort des termes mêmes de cet arrêté que le préfet de l'Yonne a pris en compte la durée de sa présence sur le territoire français, la nature et l'ancienneté de ses liens avec la France et la précédente mesure d'éloignement dont il a fait l'objet. Ne retenant pas l'existence d'une menace à l'ordre public, il n'était pas tenu de mentionner ce critère. Par suite, les moyens tirés de l'insuffisance de motivation de l'arrêté et de l'erreur de droit qu'aurait commise le préfet de l'Yonne doivent être écartés.

6. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. "

7. Si M. B... déclare résider en France depuis 2014, la date de son entrée sur le territoire n'est pas établie et la durée de son séjour est uniquement liée à l'examen de sa demande d'asile, laquelle a été rejetée, et à son maintien sur le territoire français en situation irrégulière, malgré une mesure d'éloignement. La circonstance qu'il aurait une fille en Pologne, au demeurant majeure et avec laquelle il ne démontre pas entretenir des liens réguliers, ne permet pas de considérer que la mesure d'interdiction de retour d'une durée de deux ans prise à son encontre porterait, au regard des buts poursuivis, une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale protégé par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou serait entachée d'une erreur d'appréciation.

8. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le président du tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. Ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Yonne.

Délibéré après l'audience du 12 septembre 2019 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Seillet, président assesseur,

Mme Burnichon, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 3 octobre 2019.

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N° 19LY00214


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY00214
Date de la décision : 03/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Philippe SEILLET
Rapporteur public ?: M. CHASSAGNE
Avocat(s) : BOUTAOUROUT

Origine de la décision
Date de l'import : 15/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2019-10-03;19ly00214 ?
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