Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
La SAS Hôtel Annapurna a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des compléments d'impôt sur les sociétés et de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises qui lui ont été assignés au titre des exercice clos en 2009, 2010 et 2011 et des majorations correspondantes.
Par un jugement nos 1603462 - 1603468 du 4 juin 2018, le tribunal administratif de Grenoble a prononcé, à l'article 1er, la décharge du complément d'impôt sur les sociétés assigné à la SAS Hôtel Annapurna au titre de l'exercice clos en 2009 à raison des dépenses engagées aux fins de mise en conformité de l'établissement et des majorations correspondantes, et a rejeté, à l'article 2, le surplus des conclusions de sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 30 juillet 2018 et le 15 mars 2019, la SAS Hôtel Annapurna, représentée par Me F..., demande à la cour :
1°) d'annuler l'article 2 du jugement nos 1603462 - 1603468 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté le surplus des conclusions de sa demande ;
2°) de prononcer la décharge des impositions restant en litige et des majorations correspondantes ;
3°) de condamner l'Etat aux dépens ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé en ce qui concerne sa réponse au moyen relatif à l'irrégularité de la procédure d'imposition ;
- elle n'a pas bénéficié effectivement du recours à l'interlocuteur départemental ;
- les travaux qu'elle a réalisés, qui n'ont pas contribué à l'accroissement de son actif immobilisé, ont pu donner lieu à déduction des dépenses correspondantes en tant que charges d'exploitation ;
- l'administration ne démontre pas que les insuffisances d'imposition en cause auraient le caractère de manquement délibéré.
Par un mémoire, enregistré le 22 février 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête et, par la voie de l'appel incident, à l'annulation de l'article 1er du jugement nos 1603462 et 1603468 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a prononcé la décharge du complément d'impôt sur les sociétés assigné à la SAS Hôtel Annapurna au titre de l'exercice clos en 2009 à raison des dépenses engagées aux fins de mise en conformité de l'établissement ainsi que des majorations correspondantes, et au rétablissement de la société au rôle de l'impôt sur les sociétés.
Il soutient que :
- les conclusions à fin de décharge de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises ne sont recevables qu'à hauteur du quantum du dégrèvement sollicité dans la réclamation préalable, soit 5 575 euros ;
- c'est à tort que le tribunal administratif de Grenoble a prononcé la décharge du complément d'impôt sur les sociétés assigné à la société requérante au titre de l'exercice clos en 2009 à raison des dépenses de mise en conformité de l'établissement, dès lors que ces dépenses ne constituent pas des charges déductibles du résultat mais ont contribué à l'accroissement de l'actif immobilisé de la société ;
- les moyens de la requête ne sont pour le surplus pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C..., présidente-assesseure,
- et les conclusions de Mme D..., rapporteure publique ;
Considérant ce qui suit :
1. La SAS Hôtel Annapurna, qui exploite un hôtel-restaurant de catégorie cinq étoiles à Courchevel (Savoie) pris en location auprès de la SCI Cristelli, a fait l'objet, en 2012, d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er décembre 2008 au 30 novembre 2011. A l'issue de ce contrôle, l'administration a remis en cause la déduction les dépenses de rénovation des chambres et de mise en conformité de l'établissement comptabilisées en charges déductibles qu'elle a regardées comme des dépenses à immobiliser à l'actif et a, en conséquence, rectifié, selon la procédure contradictoire, ses résultats imposables à l'impôt sur les sociétés des exercices clos en 2009, 2010 et 2011. Les impositions supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie en conséquence ont été assorties de majorations pour manquement délibéré. L'administration a également réclamé à la société un complément de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises au titre de l'année 2010. Le tribunal administratif de Grenoble a, par jugement du 4 juin 2018, prononcé la décharge du complément d'impôt sur les sociétés assigné à la SAS Hôtel Annapurna au titre de l'exercice clos en 2009 à raison des dépenses engagées aux fins de mise en conformité de l'établissement, ainsi que des majorations correspondantes, et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande. La SAS Hôtel Annapurna relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de sa demande. Par la voie de l'appel incident, le ministre de l'action et des comptes publics demande la réformation du même jugement en tant qu'il a partiellement fait droit à la demande de la SAS Hôtel Annapurna.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Il résulte de l'instruction que le tribunal administratif, qui n'était pas tenu de répondre à l'ensemble des arguments soulevés par la SAS Hôtel Annapurna, a répondu, de manière suffisamment développée, au moyen tiré de l'absence de recours effectif à l'interlocuteur départemental. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement doit être écarté.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 59 du livre des procédures fiscales : " Lorsque le désaccord persiste sur les rectifications notifiées, l'administration, si le contribuable le demande, soumet le litige à l'avis soit de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires prévue à l'article 1651 du code général des impôts (...) ". Il résulte de ces dispositions que l'administration ne peut estimer qu'un désaccord subsiste, ni soumettre celui-ci à l'avis de la commission départementale, tant que le contribuable n'a pas reçu d'elle une réponse motivée, rejetant les observations qu'il a formulées dans le délai de trente jours suivant la réception de la proposition de rectification.
4. Les rectifications en litige, notifiées à la SAS Hôtel Annapurna par une proposition de rectification du 3 décembre 2012, ont été contestées par la société requérante par des observations formulées le 30 janvier 2013. A la suite de la confirmation partielle de ces rectifications par l'administration dans la réponse aux observations du contribuable du 15 avril 2013, la SAS Hôtel Annapurna a, par une lettre du 7 mai 2013, sollicité la saisine du supérieur hiérarchique du vérificateur et celle de de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires puis, à la suite de l'entretien qui a eu lieu avec le supérieur hiérarchique du vérificateur le 17 septembre 2013, la société, par courrier du 6 novembre 2013, a confirmé son souhait de saisir la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires et a sollicité la saisine de l'interlocuteur départemental.
5. Il résulte de l'instruction que, dans ses observations formulées le 30 janvier 2013 à la suite de la notification de la proposition de rectification, la société a exposé les raisons pour lesquelles elle estimait que les travaux effectués au sein de l'établissement constituaient des charges déductibles des résultats imposables. En dépit de ces observations, l'administration a confirmé les redressements correspondants par la réponse aux observations du contribuable du 15 avril 2013, que la société requérante ne conteste pas avoir reçue. En présence de ce désaccord persistant, l'administration était fondée à soumettre le litige à la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, sans qu'il y ait lieu pour elle d'attendre que la société rencontre l'interlocuteur départemental, une telle entrevue ne constituant pas un préalable obligatoire à cette saisine. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 59 du livre des procédures fiscales doit, par suite, être écarté.
6. En second lieu, aux termes du 4ème alinéa de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales : " Avant l'engagement d'une des vérifications prévues aux articles L. 12 et L. 13, l'administration des impôts remet au contribuable la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ; les dispositions contenues dans la charte sont opposables à l'administration. ". Cette charte précise, en son paragraphe intitulé " en cas de désaccord avec le vérificateur ", dans sa rédaction applicable au litige : " Si le vérificateur a maintenu totalement ou partiellement les redressements envisagés, des éclaircissements supplémentaires peuvent vous être fournis si nécessaire par l'inspecteur départemental ou principal (...). Si après ces contacts des divergences importantes subsistent, vous pouvez faire appel à l'interlocuteur spécialement désigné par le directeur dont dépend le vérificateur ". La charte des droits et obligations du contribuable vérifié assure au contribuable qui en fait la demande la garantie substantielle de pouvoir obtenir, avant la clôture de la procédure de rectification, un débat avec le supérieur hiérarchique du vérificateur puis avec l'interlocuteur départemental dans les conditions qu'elle précise.
7. Il résulte de l'instruction que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, saisie dans les conditions rappelées aux points 4 et 5, a émis son avis le 23 février 2015 et qu'une rencontre du représentant de la SAS Hôtel Annapurna avec l'interlocuteur interrégional a eu lieu le 16 mars 2015. La société requérante soutient que ce dernier recours a été privé d'effectivité dès lors que la rencontre avec l'interlocuteur interrégional a eu lieu après que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires a émis son avis et que l'interlocuteur n'a pas examiné l'ensemble des observations qu'elle avait formulées devant la commission. Il résulte toutefois de l'instruction, et, notamment, de la lettre du 19 mai 2015 par laquelle l'interlocuteur a pris position par écrit sur la demande de la société, qu'ont été évoqués, au cours de cette rencontre, l'ensemble des points demeurant en litige entre la requérante et l'administration relatifs à la remise en cause de la déduction en tant que charges de travaux immobiliers et à l'application de majorations pour manquement délibéré. A cette occasion, l'interlocuteur a examiné l'argumentation développée devant lui par la société requérante sans s'estimer lié par l'avis émis par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires. L'interlocuteur a notamment exposé les raisons pour lesquelles il a estimé que ces travaux contribuaient à l'augmentation de l'actif net de la société et que la société, qui ne pouvait l'ignorer, devait être regardée comme ayant délibérément cherché à éluder l'impôt dû. Dans de telles conditions, la SAS Hôtel Annapurna n'est pas fondée à soutenir qu'elle a été privée du recours à l'interlocuteur prévu par la charte des droits et obligations du contribuable vérifié.
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne les dépenses de rénovation et d'agencement des suites et des chambres déduites des résultats des exercices clos en 2009, 2010 et 2011 :
8. Aux termes de l'article 38 du code général des impôts : " 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés. ". Aux termes de l'article 39 du même code : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (...) ".
9. Ne constituent des charges déductibles des résultats en vue de la détermination du bénéfice imposable ni les dépenses qui ont, en fait, pour résultat l'entrée d'un nouvel élément dans l'actif immobilisé d'une entreprise, ni les dépenses qui entraînent normalement une augmentation de la valeur pour laquelle un élément immobilisé figure à son bilan, ni les dépenses qui ont pour effet de prolonger d'une manière notable la durée probable d'utilisation d'un élément de l'actif immobilisé. La durée probable d'utilisation d'un tel élément s'apprécie à la date de son acquisition ou de sa création. En revanche, peuvent être compris dans les frais généraux et constituer des charges d'un exercice déterminé les dépenses qui n'ont d'autre objet que de maintenir les différents éléments de l'actif immobilisé de l'entreprise en un état tel que leur utilisation puisse être poursuivie conformément à leur objet jusqu'à la fin de la période correspondant à leur durée probable d'utilisation.
10. La SAS Hôtel Annapurna a comptabilisé, au titre des exercices clos en 2009, 2010 et 2011, des charges, d'un montant total de 1 892 150 euros, correspondant aux dépenses engagées en vue de la création, au sein de l'établissement qu'elle exploite, de suites junior, de la rénovation de chambres doubles, de la dépose d'une terrasse, de la pose d'un escalier extérieur et de la plantation d'arbres et de travaux sanitaires et de chauffage. L'administration a réintégré ces dépenses au résultat imposable au motif qu'elles devaient être immobilisées.
11. Il résulte de l'instruction que les travaux effectués par la SAS Hôtel Annapurna, qui ont permis, d'une part, de transformer six chambres doubles en quatre suites de catégorie supérieure dotées d'un salon et de rénover entièrement douze chambres doubles, et, d'autre part, d'apporter de nouveaux aménagements dans les espaces communs de l'établissement, ont nécessité la démolition de certains éléments, et ont porté sur le doublement des cloisons, le remplacement d'agencements tels que les faux plafonds, de la moquette et de l'ameublement, la pose d'habillages muraux en bois, le remplacement des éléments des sanitaires et ont exigé des travaux de menuiserie, de carrelage, de peinture, de plomberie ainsi que la mise aux normes techniques des installations électriques. Si la SAS Hôtel Annapurna soutient qu'ils n'ont eu pour objet que de maintenir l'établissement au niveau de standing d'un hôtel de catégorie cinq étoiles, les travaux de restructuration, réagencement et modernisation entrepris, qui ont eu pour objet d'adapter le produit à l'évolution du goût de la clientèle, et qui étaient rendus indispensables pour maintenir l'attractivité de l'établissement et lui permettre de faire face à la concurrence, ont eu pour résultat l'entrée d'un nouvel élément dans l'actif immobilisé de la société. Dans ces conditions, l'administration a pu à bon droit remettre en cause la déduction de ces dépenses au titre des exercices clos en 2009, 2010 et 2011.
En ce qui concerne les dépenses de mise aux normes d'accessibilité aux personnes à mobilité réduite déduites du résultat de l'exercice clos en 2009 :
12. La SAS Hôtel Annapurna a comptabilisé, au titre de l'exercice clos en 2009, des charges, d'un montant de 288 796 euros, correspondant aux dépenses engagées en vue de la rénovation et de la mise aux normes d'accessibilité aux personnes à mobilité réduite de l'espace bien-être et des salles de kinésithérapie et d'esthétique. L'administration a réintégré ces dépenses au motif qu'elles avaient en réalité contribué à l'augmentation de l'actif net de la société.
13. Il résulte de l'instruction que les travaux en cause, qui ont eu pour objet le réaménagement et la mise en conformité de l'espace bien-être et des salles de kinésithérapie et d'esthétique, par le remplacement des toilettes et des douches et la création d'un nouveau couloir, ont comporté des travaux de démolition, de remplacement des carrelages, des faïences, des parquets, des faux-plafonds, des cloisons, des menuiseries, des agencements et de la peinture. Par conséquent, ces travaux, qui ont permis de poursuivre l'exploitation de l'hôtel dans le respect des normes applicables en matière d'accessibilité des locaux aux personnes à mobilité réduite, et à défaut desquels l'établissement ne pouvait poursuivre l'accueil du public, ont contribué à la valorisation de l'immeuble et à la prolongation de la durée probable de son utilisation. Ainsi, ces travaux ont eu pour contrepartie un accroissement de la valeur des éléments de l'actif immobilisé. Il suit de là que c'est à tort que le tribunal administratif de Grenoble a estimé que ces dépenses, qui n'avaient pas pour objet l'augmentation d'avantages économiques, constituaient des charges déductibles du résultat imposable de l'exercice clos en 2009.
En ce qui concerne la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises :
14. Aux termes de l'article 1586 ter du code général des impôts : " I. - Les personnes physiques ou morales ainsi que les sociétés non dotées de la personnalité morale et les fiduciaires pour leur activité exercée en vertu d'un contrat de fiducie qui exercent une activité dans les conditions fixées aux articles 1447 et 1447 bis et dont le chiffre d'affaires est supérieur à 152 500 euros sont soumises à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises. / II. - 1. La cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises est égale à une fraction de la valeur ajoutée produite par l'entreprise, telle que définie à l'article 1586 sexies. ". Aux termes de l'article 1586 sexies du même code, dans sa version applicable au litige : " I.-Pour la généralité des entreprises, à l'exception des entreprises visées aux II à VI : (...) 4. La valeur ajoutée est égale à la différence entre : a) D'une part, le chiffre d'affaires tel qu'il est défini au 1 (...) b) Et, d'autre part, (...) les services extérieurs (...) ".
15. Les dispositions de l'article 1586 sexies du code général des impôts fixent la liste limitative des catégories d'éléments comptables qui doivent être pris en compte dans le calcul de la valeur ajoutée servant de base à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises. Il y a lieu, pour déterminer si une charge ou un produit se rattache à 1'une de ces catégories, de se reporter aux normes comptables dans leur rédaction en vigueur lors de l'année d'imposition concernée sous réserve que celles-ci ne soient pas incompatibles avec les règles applicables pour l'assiette de l'impôt.
16. Les dépenses engagées pour la rénovation et la mise en conformité de l'établissement exploité par la SAS Hotel Annapurna, qui ne constituent pas, ainsi qu'il a été dit précédemment, des frais d'entretien et de réparation mais des dépenses devant être immobilisées, ne peuvent en conséquence être regardées comme des charges déductibles au titre de services extérieurs au sens du b) du 4. du I. de l'article 1586 sexies du code général des impôts. Il n'est pas soutenu qu'elles figurent parmi les autres dépenses qui, en application de ces dispositions, doivent être déduites du chiffre d'affaires pour le calcul de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises. Par conséquent, c'est à bon droit que l'administration les a réintégrées dans la valeur ajoutée produite par la société requérante au titre de l'année 2010.
Sur les majorations pour manquement délibéré :
17. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré ".
18. Les compléments d'impôt sur les sociétés auxquels la SAS Hôtel Annapurna a été assujettie au titre des exercices clos en 2009, 2010 et 2011 à raison de la remise en cause de la déduction de dépenses devant être immobilisées ont été assortis de la majoration de 40 % prévue par les dispositions précitées de l'article 1729 du code général des impôts en cas de manquement délibéré.
19. Pour justifier l'application de cette majoration, l'administration fait état, d'une part, de la nature et du coût élevé des travaux entrepris par la SAS Hôtel Annapurna, du caractère systématique de leur comptabilisation en tant que charges au titre de chacun des exercices vérifiés ainsi que de l'importance des dépenses correspondantes au regard de l'ensemble des charges déduites, la part de ces dépenses étant comprise entre 80 et 89 % des charges totales au titre des exercices en litige. L'administration se réfère, d'autre part, à la faiblesse des dotations des comptes d'immobilisation, qui présentent des soldes débiteurs importants et stables en dépit des travaux effectués, et à la circonstance que la société n'a immobilisé que la piscine, le fumoir, un monte-charge, du mobilier pour le logement du personnel et la ventilation ainsi que l'extension du réseau wifi, à l'exclusion de la création et de la rénovation de chambres destinées à la clientèle et des travaux portant sur les espaces de détente. Contrairement à ce que soutient la société requérante, l'interprétation de la législation applicable ne présentait pas des difficultés telles qu'elle ait pu justifier les manquements importants et systématiques relevés par le service. En faisant état de l'importance et de la répétition des manquements constatés, lesquels procèdent d'un choix délibéré de la société, l'administration démontre la volonté de la SAS Hôtel Annapurna d'éluder l'impôt dû, sans que cette dernière puisse utilement se prévaloir de l'absence de préjudice pour le Trésor.
20. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par le ministre, que la SAS Hôtel Annapurna n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté le surplus de conclusions de sa demande et que le ministre de l'action et des comptes publics est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le même jugement, le tribunal administratif a prononcé la décharge du complément d'impôt sur les sociétés assigné à la SAS Hôtel Annapurna au titre de l'exercice clos en 2009 à raison des dépenses engagées aux fins de mise en conformité de l'établissement.
Sur les dépens de l'instance :
21. La SAS Hôtel Annapurna n'établit pas avoir engagé de dépens dans la présente instance. Par suite, sa demande tendant à ce que de tels dépens soient mis à la charge de l'Etat ne peut, en tout état de cause, qu'être rejetée.
Sur les frais liés à l'instance :
22. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à la SAS Hôtel Annapurna la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : L'article 1er du jugement nos 1603462 et 1603468 du tribunal administratif de Grenoble est annulé.
Article 2 : Les impositions et majorations dont le tribunal a, par le jugement attaqué, prononcé la décharge, sont remises à la charge de la SAS Hôtel Annapurna.
Article 3 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Grenoble par la SAS Hôtel Annapurna et ses conclusions présentées au titre des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Hôtel Annapurna et au ministre de l'action et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 7 janvier 2020, à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président de chambre,
Mme C..., présidente-assesseure,
Mme B..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 28 janvier 2020.
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N° 18LY02939
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