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02/04/2020 | FRANCE | N°19LY02607

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 02 avril 2020, 19LY02607


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

L'association Biozat environnement, M. et Mme F... E..., Mme I... L..., M. et Mme A... B..., M. et Mme K... C... ont demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du préfet de l'Allier du 22 août 2014 autorisant la société Ferme éolienne de Biozat à exploiter des installations de production d'électricité comprenant six aérogénérateurs sur le territoire de la commune de Biozat.

Par un jugement n° 1500388 du 14 juin 2016, le tribunal administratif a annulé cet arrêté

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Par un arrêt n° 16LY02858 du 10 juillet 2018, la cour administrative d'appel de Lyo...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

L'association Biozat environnement, M. et Mme F... E..., Mme I... L..., M. et Mme A... B..., M. et Mme K... C... ont demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du préfet de l'Allier du 22 août 2014 autorisant la société Ferme éolienne de Biozat à exploiter des installations de production d'électricité comprenant six aérogénérateurs sur le territoire de la commune de Biozat.

Par un jugement n° 1500388 du 14 juin 2016, le tribunal administratif a annulé cet arrêté.

Par un arrêt n° 16LY02858 du 10 juillet 2018, la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel formé par le ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer contre ce jugement.

Par une décision n° 424076 du 28 juin 2019, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire à la cour, au greffe de laquelle elle a été enregistrée sous le n° 19LY02607.

Procédure devant la cour

Par un recours et un mémoire enregistrés le 10 août 2016 et le 15 mai 2018, le ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer demande à la cour d'annuler ce jugement du 14 juin 2016 et de rejeter la demande de l'association Biozat environnement.

Il soutient que :

- le préfet disposait de suffisamment d'éléments pour apprécier les capacités techniques et financières dont disposait le pétitionnaire ;

- les conditions d'exploitation d'un parc éolien sont très spécifiques et justifient un niveau d'exigence moindre concernant les capacités techniques et financières ;

- l'appartenance du pétitionnaire à une société mère de grande envergure et les comptes prévisionnels fournis permettaient de porter une appréciation favorable sur les capacités financières de la société pétitionnaire ;

- aux termes de l'article L. 553-3 du code de l'environnement la société mère est responsable en cas de défaillance de sa filiale, du démantèlement et de la remise en état du site de l'installation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 novembre 2016, l'association Biozat environnement, M. et Mme F... E..., Mme I... L..., M. et Mme A... B..., M. et Mme K... C..., représentés par la SCP Tuffal-Nerson Douarre et associés, concluent au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros à verser à chacun d'eux soit mise à la charge de l'Etat au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'arrêté litigieux est illégal dès lors que le dossier de demande d'autorisation d'exploiter était incomplet, le préfet n'ayant pas été en état d'apprécier les capacités techniques et financières du demandeur ;

- le demandeur ne présente pas de garanties techniques et financières suffisantes ;

- l'étude d'impact ne répond pas aux exigences du I de l'article R. 512-8 dudit code en ce qui concerne les émergences sonores et les illustrations utilisées ;

- l'arrêté ne détermine pas les conditions de remise en état en cas d'arrêt définitif des éoliennes en méconnaissance des dispositions de l'article R. 512-30 du code de l'environnement ;

- l'arrêté méconnaît l'article L. 511-1 du code de l'environnement, ne fixant pas l'ensemble des prescriptions nécessaires pour prévenir les dangers concernant la commodité, la salubrité, la santé et la sécurité des voisins de l'installation ainsi que la conservation des paysages, sites et monument, et ne prévoyant aucune disposition s'agissant d'éventuels dysfonctionnements ou arrêts momentanés ;

- le potentiel éolien de la zone retenue pour l'implantation du parc n'est pas établi.

Par un mémoire enregistré le 8 août 2019, M. et Mme F... E..., représentés par Me D..., concluent au rejet de la requête et à ce que l'Etat leur verse la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils font valoir les mêmes moyens que ceux qu'ils avaient soulevés, avec les autres intimés, dans le mémoire enregistré le 21 novembre 2016.

La clôture de l'instruction a été fixée au 20 décembre 2020, par une ordonnance du même jour.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'environnement ;

- l'arrêté du 26 août 2011 relatif aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Thierry Besse, président-assesseur,

- et les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 22 août 2014, le préfet de l'Allier a accordé à la société Ferme éolienne de Biozat l'autorisation d'exploiter un parc éolien de six aérogénérateurs, sur le territoire de la commune de Biozat. Par jugement du 14 juin 2016, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé cet arrêté. Le ministre chargé de l'environnement relève appel de ce jugement.

Sur le moyen d'annulation retenu par les premiers juges :

2. Il appartient au juge du plein contentieux des installations classées pour la protection de l'environnement d'apprécier le respect des règles relatives à la forme et la procédure régissant la demande d'autorisation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date de délivrance de l'autorisation et celui des règles de fond régissant le projet en cause au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date à laquelle il se prononce, sous réserve du respect des règles d'urbanisme qui s'apprécie au regard des circonstances de fait et de droit applicables à la date de l'autorisation.

3. L'article L. 181-27 du code de l'environnement, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 26 janvier 2017, applicable à compter du 1er janvier 2017, dispose que : " L'autorisation prend en compte les capacités techniques et financières que le pétitionnaire entend mettre en oeuvre, à même de lui permettre de conduire son projet dans le respect des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 et d'être en mesure de satisfaire aux obligations de l'article L. 512-6-1 lors de la cessation d'activité ". Ces dispositions modifient les règles de fond relatives aux capacités techniques et financières de l'exploitant d'une installation classée pour la protection de l'environnement antérieurement définies à l'article L. 512-1 du code de l'environnement. Il résulte de ces dispositions, que lorsque le juge se prononce sur la légalité de l'autorisation avant la mise en service de l'installation, il lui appartient de vérifier la pertinence des modalités selon lesquelles le pétitionnaire prévoit de disposer de capacités financières et techniques suffisantes pour assumer l'ensemble des exigences susceptibles de découler du fonctionnement, de la cessation éventuelle de l'exploitation et de la remise en état du site au regard des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement ainsi que des garanties de toute nature qu'il peut être appelé à constituer à cette fin en application des articles L. 516-1 et L. 516-2 du même code.

4. Il résulte de l'instruction que la société Ferme éolienne de Biozat, laquelle a été créée pour l'exploitation du parc éolien de Biozat, est une filiale à 100% du groupe Axpo, son capital social étant détenu à 70% par la société Volkswind GrmH. Cette dernière société, dont le chiffre d'affaires atteignait 60 millions d'euros en 2011 et dont le résultat opérationnel représentait 30% de ce chiffre d'affaires, est spécialisée dans l'exploitation de parcs éoliens. Elle bénéficie d'une notation A auprès des établissements bancaires, ce qui établit une capacité d'emprunt très favorable. La société ferme éolienne de Biozat a produit un compte d'exploitation prévisionnel, dont les résultats ne sont pas utilement contestés, permettant de justifier la capacité du projet à dégager d'importants flux de trésorerie et à faire face tant aux emprunts bancaires envisagés qu'aux exigences susceptibles de découler du fonctionnement des éoliennes. Par ailleurs, la société Volkswind Grmh se prévaut d'une lettre d'intention en date du 27 juillet 2016, qui peut être prise en compte quand bien même elle est postérieure à l'autorisation, selon laquelle elle s'engage à mettre à disposition de la société Ferme éolienne de Biozat SAS, sa filiale, ses capacités techniques et financières, afin de lui permettre de conduire son projet dans le respect des intérêts visés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement et d'être en mesure de satisfaire à ses obligations lors de sa cessation d'activité. Au demeurant, et ainsi que le fait valoir le ministre, les dispositions de l'article L. 553-3 du code de l'environnement, reprises à l'article L. 515-46 de ce code, obligent la société mère, en cas de défaillance de l'exploitant, à prendre en charge le démantèlement de l'installation et la remise en état du site. Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, qui n'ont pas été contestés par les intimés depuis la reprise d'instance, et eu égard aux conditions de fonctionnement de parcs éoliens, la société la Ferme éolienne de Biozat, quand bien même elle n'explicite pas précisément les conditions dans lesquelles elle entend financer sur ses fonds propres 20% de l'investissement initial, justifie de la pertinence des modalités selon lesquelles elle prévoit de disposer de capacités financières et techniques suffisantes pour assumer l'ensemble des exigences susceptibles de découler du fonctionnement, de la cessation éventuelle de l'exploitation et de la remise en état du site.

5. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé, pour annuler l'arrêté du préfet de l'Allier du 22 août 2014, sur l'insuffisance des garanties techniques et financières offertes par le pétitionnaire.

6. Toutefois, il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par l'association Biozat environnement et autres requérants tant devant le tribunal administratif que devant la Cour.

Sur les autres moyens dirigés contre l'arrêté du 22 août 2014 :

En ce qui concerne la composition du dossier de demande d'autorisation :

7. En premier lieu, aux termes de l'article L. 512-1 du code de l'environnement dans sa rédaction en vigueur à la date de l'autorisation : " La délivrance de l'autorisation, pour ces installations (...) prend en compte les capacités techniques et financières dont dispose le demandeur, à même de lui permettre de conduire son projet dans le respect des intérêts visés à l'article L. 511-1 et d'être en mesure de satisfaire aux obligations de l'article L. 512-6-1 lors de la cessation d'activité ". Les dispositions de l'article R. 512-3 du code de l'environnement applicables à la date de délivrance de l'autorisation attaquée exigeaient que le dossier de demande comporte, en vertu du 5° de ce dernier article, " les capacités techniques et financières de l'exploitant ". Les éléments du dossier de demande devaient par ailleurs figurer dans le dossier soumis à enquête publique en vertu des articles L. 512-1 et R. 123-6.

8. Ainsi qu'il a été dit au point 4, le dossier de demande d'autorisation comportait, dans sa partie relative aux capacités techniques et financières du candidat, une présentation du groupe Volkswind, dont il était indiqué qu'il possédait l'ensemble des parts sociales de la SAS Ferme éolienne de Biozat, et de ses capacités financières, un plan de financement des investissements, un compte de résultat prévisionnel faisant apparaître le résultat net escompté de l'exploitation du pétitionnaire. Les indications ainsi fournies par le pétitionnaire étaient de nature à apporter des informations sur les conditions dans lesquelles le pétitionnaire entendait mener à bien son projet et satisfaire aux obligations qui lui sont imparties par le code de l'environnement. Si le dossier ne comportait aucun engagement ferme de la société Volkswind sur l'aide qu'elle entendait apporter à sa filiale, ni aucun élément précis sur d'éventuels prêts bancaires, une telle insuffisance, au regard des règles alors applicables du code de l'environnement, n'a pu être de nature à fausser l'appréciation du service instructeur ni, s'agissant de l'enquête publique, à nuire à l'information de l'ensemble des personnes intéressées ou à exercer une influence sur les résultats de l'enquête. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance du dossier de demande d'autorisation sur ce point doit être écarté.

9. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 512-4 alors applicable du code de l'environnement : " La demande d'autorisation est complétée dans les conditions suivantes : 1° Lorsque l'implantation d'une installation nécessite l'obtention d'un permis de construire, la demande d'autorisation doit être accompagnée ou complétée dans les dix jours suivant sa présentation par la justification du dépôt de la demande de permis de construire. L'octroi du permis de construire ne vaut pas autorisation au sens des dispositions du présent titre ; ". Il ressort des pièces du dossier que le pétitionnaire a adressé au service instructeur les récépissés de dépôt des demandes de permis de construire le 3 janvier 2012, soit dans le délai de dix jours suivant la demande d'autorisation. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit être écarté.

10. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 512-5 alors applicable du code de l'environnement : " Lorsque la demande d'autorisation porte sur une installation mentionnée à l'article R. 516-1, elle précise, en outre, les modalités des garanties financières exigées à l'article L. 516-1, notamment leur nature, leur montant et les délais de leur constitution. ".

11. Il résulte de l'instruction que les modalités de garantie financière sont précisées au point 1.4.3 de la demande d'autorisation, laquelle contient, en outre, une fiche méthode pour justifier le calcul du montant de la garantie. Ces pièces permettaient ainsi de justifier la nature et le montant de la garantie. La demande indiquait également que ces garanties seraient constituées au plus tard avant la mise en service de l'installation. Dans ces conditions, eu égard à l'objet de l'obligation prescrite à l'article R. 512-5 du code de l'environnement et au stade de la procédure auquel elle s'applique, les mentions figurant dans le dossier de demande étaient suffisantes.

En ce qui concerne l'étude d'impact :

12. Aux termes de l'article R. 512-6 du code de l'environnement : " I.- A chaque exemplaire de la demande d'autorisation doivent être jointes les pièces suivantes : (...) 4° L'étude d'impact prévue à l'article L. 122-1 dont le contenu est défini à l'article R. 122-5 et complété par l'article R. 512-8 (...) ". Selon l'article R. 122-5 du code de l'environnement dans sa version alors en vigueur : " I.- Le contenu de l'étude d'impact est proportionné à la sensibilité environnementale de la zone susceptible d'être affectée par le projet, à l'importance et la nature des travaux, ouvrages et aménagements projetés et à leurs incidences prévisibles sur l'environnement ou la santé humaine. / II.- L'étude d'impact présente : / 1° Une description du projet comportant des informations relatives à sa conception et à ses dimensions, y compris, en particulier, une description des caractéristiques physiques de l'ensemble du projet et des exigences techniques en matière d'utilisation du sol lors des phases de construction et de fonctionnement et, le cas échéant, une description des principales caractéristiques des procédés de stockage, de production et de fabrication, notamment mis en oeuvre pendant l'exploitation, telles que la nature et la quantité des matériaux utilisés (...) ; / 2° Une analyse de l'état initial de la zone et des milieux susceptibles d'être affectés par le projet, portant notamment sur la population, la faune et la flore, les habitats naturels, les sites et paysages, les biens matériels, les continuités écologiques telles que définies par l'article L. 371-1, les équilibres biologiques, les facteurs climatiques, le patrimoine culturel et archéologique, le sol, l'eau, l'air, le bruit, les espaces naturels, agricoles, forestiers, maritimes ou de loisirs, ainsi que les interrelations entre ces éléments ; 3° Une analyse des effets négatifs et positifs, directs et indirects, temporaires (y compris pendant la phase des travaux) et permanents, à court, moyen et long terme, du projet sur l'environnement, en particulier sur les éléments énumérés au 2° et sur la consommation énergétique, la commodité du voisinage (bruits, vibrations, odeurs, émissions lumineuses), l'hygiène, la santé, la sécurité, la salubrité publique, ainsi que l'addition et l'interaction de ces effets entre eux ; 4° Une analyse des effets cumulés du projet avec d'autres projets connus (...) ; / 5° Une esquisse des principales solutions de substitution examinées par le pétitionnaire ou le maître d'ouvrage et les raisons pour lesquelles, eu égard aux effets sur l'environnement ou la santé humaine, le projet présenté a été retenu ; (...) / 7° Les mesures prévues par le pétitionnaire ou le maître de l'ouvrage pour : / - éviter les effets négatifs notables du projet sur l'environnement ou la santé humaine et réduire les effets n'ayant pu être évités ; / - compenser, lorsque cela est possible, les effets négatifs notables du projet sur l'environnement ou la santé humaine qui n'ont pu être ni évités ni suffisamment réduits. S'il n'est pas possible de compenser ces effets, le pétitionnaire ou le maître d'ouvrage justifie cette impossibilité. / La description de ces mesures doit être accompagnée de l'estimation des dépenses correspondantes (...) ". Aux termes de l'article R. 512-8 du même code : " I.- Le contenu de l'étude d'impact mentionnée à l'article R. 512-6 doit être en relation avec l'importance de l'installation projetée et avec ses incidences prévisibles sur l'environnement, au regard des intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1. / II. - Le contenu de l'étude d'impact est défini à l'article R. 122-5. Il est complété par les éléments suivants : / 1° L'analyse mentionnée au 3° du II de l'article R. 122-5 précise notamment, en tant que de besoin, l'origine, la nature et la gravité des pollutions de l'air, de l'eau et des sols, les effets sur le climat le volume et le caractère polluant des déchets, le niveau acoustique des appareils qui seront employés ainsi que les vibrations qu'ils peuvent provoquer, le mode et les conditions d'approvisionnement en eau et d'utilisation de l'eau ; / 2° Les mesures réductrices et compensatoires mentionnées au 7° du II de l'article R. 122-5 font l'objet d'une description des performances attendues, notamment en ce qui concerne la protection des eaux souterraines, l'épuration et l'évacuation des eaux résiduelles et des émanations gazeuses ainsi que leur surveillance, l'élimination des déchets et résidus de l'exploitation, les conditions d'apport à l'installation des matières destinées à y être traitées, du transport des produits fabriqués et de l'utilisation rationnelle de l'énergie ; (...) ".

13. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.

14. Il ressort des pièces du dossier que l'étude d'impact comprend une étude acoustique ayant estimé, à partir de mesures effectuées sur les neuf habitations les plus proches et sous différentes conditions de vent, l'émergence sonore nocturne et diurne devant résulter de l'installation des éoliennes. Si les intimés contestent les normes acoustiques prises en compte par l'étude, qui sont pourtant celles issues de l'arrêté du 26 août 2011 susvisé, il ne ressort en tout état de cause pas des pièces du dossier que les résultats obtenus seraient erronés ou auraient pu fausser l'information de la population ou l'appréciation de l'administration. Enfin, et contrairement à ce qui est soutenu, le résumé de l'étude acoustique figurant dans l'étude d'impact, qui évoque un risque probable d'émergence acoustique en période nocturne et préconise un plan de bridage des aérogénérateurs sous certaines conditions de vent, n' a pas déformé les résultats de l'étude.

15. Si les intimés soutenaient devant le tribunal que l'étude était insuffisante s'agissant des effets du parc éolien sur les insectes et les chauve-souris, ils n'ont pas assorti leur moyen de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé.

16. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier que l'étude d'impact et l'étude paysagère comprennent de nombreuses photographies permettant d'apprécier l'insertion du projet dans son environnement. Si les intimés soutiennent que les photomontages ne donneraient pas une représentation exacte de l'effet visuel du parc éolien, il ne ressort pas des pièces du dossier que les inexactitudes alléguées aient pu nuire à l'information du public ou affecter l'appréciation de l'administration. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de l'étude d'impact doit être écarté.

En ce qui concerne la remise en état du site :

17. Aux termes de l'article R. 512-30 du code de l'environnement : " Dans le cas d'une installation implantée sur un site nouveau, l'arrêté d'autorisation détermine également l'état dans lequel doit être remis le site lors de l'arrêt définitif de l'installation. ".

18. Les dispositions des articles R. 553-5 à R. 553-8 du code de l'environnement, reprises désormais aux articles R. 515-105 à R. 515-108, relatifs à la remise en état du site par l'exploitant d'une installation d'éoliennes déclarée, autorisée ou enregistrée prévoient les obligations de remise en état du site s'imposant aux exploitants de telles installations. Dans ces conditions, l'arrêté n'avait pas à déterminer de manière spécifique les obligations devant s'imposer à l'exploitant.

En ce qui concerne la méconnaissance de l'article L. 511-1 du code de l'environnement :

19. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'environnement : " Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique. ". Aux termes de l'article L. 512-12 du code de l'environnement applicable depuis le 1er mars 2017 : " Si les intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 ne sont pas garantis par l'exécution des prescriptions générales contre les inconvénients inhérents à l'exploitation d'une installation soumise à déclaration, le préfet, éventuellement à la demande des tiers intéressés et après avis de la commission départementale consultative compétente, peut imposer par arrêté toutes prescriptions spéciales nécessaires. ". Aux termes de l'article R. 181-54 du code de l'environnement : " les prescriptions (...) tiennent compte notamment, d'une part, de l'efficacité des meilleures techniques disponibles et de leur économie, et, d'autre part, de la qualité, de la vocation et de l'utilisation des milieux environnants ainsi que de la gestion équilibrée de la ressource en eau. ".

20. L'article 8 de l'arrêté du 22 août 2014 en litige prévoit un plan de bridage des aérogénérateurs permettant de respecter les valeurs maximales d'émergence sonore alors fixées par l'arrêté ministériel du 26 août 2011 susvisé. Contrairement à ce que soutiennent les intimés, il ne résulte pas de l'instruction que cette prescription ne s'appliquerait pas dès la mise en service du site, quand bien même il est envisagé de réévaluer le plan de bridage projeté en fonction des mesures sonores constatées. Par suite, lesdites prescriptions de l'arrêté sont suffisantes.

21. Il ne résulte par ailleurs pas de l'instruction que les dangers résultant du fonctionnement des six aérogénérateurs, qui sont distants de 400 mètres de la route départementale et de 600 mètres des habitations les plus proches auraient nécessité des prescriptions en vue d'assurer la sécurité des voisins de l'installation.

22. S'il résulte de l'instruction que les installations seraient visibles depuis le château de Font Noble, classé ainsi que son parc au titre des monuments historiques, cette visibilité est restreinte compte tenu de la végétation du parc, qui atténue fortement l'impact visuel du projet. Il en est de même, s'agissant de l'église de Biozat, séparée du projet par des habitations et de la végétation qui l'occultent largement. Par ailleurs, les intimés font valoir que le belvédère de la chapelle Sainte-Radegonde de Cognat-Lyonne, laquelle est également classée au titre des monuments historiques, offre une large vue sur le parc éolien projeté, distant d'environ 2,5 kilomètres. Toutefois, le projet, qui n'occulte pas la vue sur la chaîne des Puys, n'apparaît pas de nature, compte tenu de l'absence d'intérêt paysager particulier du bassin de Gannat dans lequel le parc doit s'implanter, à porter une atteinte significativement défavorable à ce monument ou au site environnant.

23. Si les intimés soutiennent que le potentiel éolien de la zone retenue pour l'implantation du parc n'est pas établi, ils n'assortissent en tout état de cause pas cette allégation de la moindre argumentation pertinente.

24. Enfin, le moyen tiré de ce que l'arrêté ne fixe pas de dispositions en cas d'éventuels dysfonctionnements ou d'arrêts momentanés n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé.

25. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'environnement est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé l'arrêté du préfet de l'Allier du 22 août 2014 autorisant la société Ferme éolienne de Biozat à exploiter des installations de production d'électricité.

Sur les frais d'instance :

26. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas partie perdante, verse aux intimés la somme qu'ils demandent au titre des frais non compris dans les dépens qu'ils ont exposés.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 14 juin 2016 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand est annulé.

Article 2 : La demande présentée par l'association Biozat environnement et autres devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand et les conclusions d'appel présentées par l'ensemble des intimés sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de la transition écologique et solidaire, à l'association Biozat environnement, pour les intimés, et à M. et Mme F... E....

Délibéré après l'audience du 18 février 2020 à laquelle siégeaient :

Mme J... M..., présidente de chambre,

M. Thierry Besse, président-assesseur,

Mme H... G..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 2 avril 2020.

2

N° 19LY02607

md


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19LY02607
Date de la décision : 02/04/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

29-035 Energie.


Composition du Tribunal
Président : Mme MARGINEAN-FAURE
Rapporteur ?: M. Thierry BESSE
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : SCP TUFFAL- NERSON DOUARRE et Associés

Origine de la décision
Date de l'import : 21/04/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-04-02;19ly02607 ?
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