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25/08/2020 | FRANCE | N°20LY00055

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 25 août 2020, 20LY00055


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 3 septembre 2019, par lequel le préfet de l'Isère l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a désigné le pays à destination duquel il serait reconduit d'office et lui a interdit le retour sur le territoire français durant un an.

Par un jugement n° 1905848 du 14 octobre 2019, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistr

e le 7 janvier 2020, M. A..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugem...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 3 septembre 2019, par lequel le préfet de l'Isère l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a désigné le pays à destination duquel il serait reconduit d'office et lui a interdit le retour sur le territoire français durant un an.

Par un jugement n° 1905848 du 14 octobre 2019, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 7 janvier 2020, M. A..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 14 octobre 2019 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté susmentionné ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de supprimer son signalement dans le système d'information Schengen, de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, à défaut de réexaminer sa demande dans le même délai et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 200 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté est insuffisamment motivé ;

- le préfet a méconnu son droit d'être entendu résultant de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le préfet a méconnu le principe de non refoulement résultant de l'article 33 de la convention de Genève et consacré par l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la France l'a fait réadmettre en Espagne alors qu'un délai de six mois s'était écoulé depuis l'accord de réadmission ;

- lorsque l'examen de la demande d'asile relève d'un pays étranger, le demandeur ne peut pas être éloigné en application de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile mais doit faire l'objet d'une mesure de réadmission en application de l'article L. 742-3 du même code ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- les décisions refusant de lui accorder un délai de départ volontaire et prononçant à son encontre une interdiction de retour sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense enregistré le 23 mars 2020, le préfet de l'Isère conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 décembre 2019.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Bertrand Savouré, premier conseiller ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant de la République de Guinée, né le 26 juin 1997, a déposé une demande d'asile le 19 octobre 2018, à la suite de laquelle les autorités espagnoles ont accepté sa prise en charge en application de l'article 13.1 du règlement UE n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013. Par arrêté du 25 février 2019, le préfet de l'Isère a décidé de le remettre aux autorités espagnoles. Cet arrêté a été exécuté sous contrainte lors d'un vol groupé le 23 avril 2019. Ayant été interpellé en France, à Grenoble, le 2 septembre 2019 pour des faits de vol avec violence en réunion, il a fait l'objet le lendemain d'un arrêté portant obligation de quitter le territoire français sans délai et l'interdisant de retourner sur le territoire français pendant une durée d'un an. M. A... interjette appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. Aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (...) "

3. Aux termes de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve du second alinéa de l'article L. 742-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen (...) ".

4. Lorsqu'en application des stipulations des conventions internationales conclues avec les Etats membres de l'Union européenne, l'examen de la demande d'asile d'un étranger ne relève pas de la compétence des autorités françaises mais de celles de l'un de ces Etats, la situation du demandeur d'asile n'entre pas dans le champ d'application des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, quand bien-même l'intéressé est revenu en France à la suite de sa décision de transfert, le préfet n'était pas en droit de prendre à son encontre une décision d'obligation de quitter le territoire français sur le fondement du 1° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

6. Eu égard au motif qui fonde l'annulation prononcée par le présent arrêt, il y a seulement lieu d'enjoindre au préfet de l'Isère de délivrer à M. A... une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours et de réexaminer la situation de M. A... dans un délai de deux mois, sans qu'il y ait lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

7. Aux termes de l'article R. 5113 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Les modalités de suppression du signalement d'un étranger effectué au titre d'une décision d'interdiction de retour prise en application du III de l'article L. 5111 sont celles qui s'appliquent, en vertu de l'article 7 du décret n° 2010569 du 28 mai 2010, aux cas d'extinction du motif d'inscription au fichier des personnes recherchées ". Aux termes de l'article 7 du décret du 28 mai 2010 : " Les données à caractère personnel enregistrées dans le fichier sont effacées sans délai en cas d'aboutissement de la recherche ou d'extinction du motif de l'inscription (...) ".

8. Le présent arrêt annule l'interdiction de retour prise à l'encontre de M. A... et il résulte des dispositions précitées qu'une telle annulation implique nécessairement l'effacement sans délai du signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen résultant de cette décision. Il y a lieu, dès lors, d'enjoindre au préfet de l'Isère de mettre en oeuvre la procédure d'effacement de ce signalement aux fins de non admission dans le système d'information Schengen dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 000 euros au conseil de M. A... en application des dispositions de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, sous réserve qu'il renonce à la part contributive de l'Etat.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 14 octobre 2019 et l'arrêté du préfet de l'Isère du 3 septembre 2019 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Isère de délivrer à M. A... une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt et de procéder au réexamen de la situation de M. A... au regard de son droit au séjour sur le territoire français dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de l'Isère de mettre en oeuvre la procédure d'effacement du signalement de M. A... aux fins de non admission dans le système d'information Schengen dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera une somme de 1 000 euros à Me C..., conseil de M. A..., sous réserve que celui-ci renonce à la part contributive de l'Etat.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M A... est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... et au ministre de l'intérieur. Copie du présent arrêt en sera adressée au préfet de l'Isère et au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Grenoble.

Délibéré après l'audience du 9 juillet 2020 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme B..., présidente-assesseure,

M. Savouré, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 25 août 2020.

2

N° 20LY00055


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY00055
Date de la décision : 25/08/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: M. Bertrand SAVOURE
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : HUARD

Origine de la décision
Date de l'import : 05/09/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-08-25;20ly00055 ?
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