Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. I... H..., M. A... H..., Mme F... G..., M. J... G..., Mme C... D... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la délibération du 9 mars 2017 par laquelle le conseil municipal de la commune de Collonges-sous-Salève a adopté son plan local d'urbanisme.
Par un jugement n° 1722183 du 24 septembre 2019, le tribunal administratif de Lyon, à qui a été transmise cette demande en vertu de l'ordonnance n° 430232 du 6 avril 2019 du président de la section du contentieux du Conseil d'Etat, a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés le 18 novembre 2019 et le 19 mai 2020, M. H... et autres, représentés par la Selarl EBC Avocats, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 24 septembre 2019 ainsi que la délibération du 9 mars 2017 ;
2°) de mettre à la charge de la commune de Collonges-sous-Salève la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le jugement est irrégulier en ce qu'il ne mentionne pas expressément dans ses visas les dispositions précises sur lesquelles la formation de jugement s'est fondée pour statuer et alors que les motifs du jugement ne reproduisent pas l'ensemble des dispositions dont les premiers juges ont fait application, en violation de l'article R. 741-2 du code de justice administrative ;
- le jugement a été pris au terme d'une instruction irrégulière et est entaché d'une omission à statuer sur deux moyens ; la clôture immédiate de l'instruction datée du 11 octobre 2018 n'a été mise à disposition des parties sous Télérecours qu'à compter du 15 octobre suivant et leur mémoire contenant deux moyens nouveaux et parvenu au tribunal le 16 octobre 2018 n'a pas été communiqué ; les premiers juges ont omis de répondre à ces deux moyens ;
- les conseillers municipaux de la commune n'ont pas reçu une information suffisante avant d'adopter le PLU en méconnaissance des articles L. 2121-11 et L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales ; c'est à tort que les premiers juges, après avoir relevé le caractère lacunaire de la note de synthèse, ont considéré que les conseillers municipaux ont pu disposer d'autres éléments ;
- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le moyen tiré de l'exception de l'illégalité de la délibération prescrivant l'adoption du PLU, faute de définir précisément les objectifs poursuivis, était inopérant ;
- le conseil municipal n'a pas valablement tiré le bilan de la concertation, la synthèse adressée aux élus en annexe de la délibération du 19 mai 2016 se contentant de lister les différentes modalités de la concertation sans mentionner les observations du public ; enfin deux des modalités de concertation prévues n'ont pas été respectées en méconnaissance de l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme ;
- le rapport de présentation méconnaît les articles R. 151-4 et L. 153-27 du code de l'urbanisme ; les indicateurs choisis par la commune et nécessaires à l'analyse prévue par ces dispositions sont insuffisamment définis ;
- le classement des parcelles détenues en division par les requérants en zone naturelle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation, est incompatible avec les orientations du schéma de cohérence territoriale (SCOT) de la communauté de communes du genevois, est incohérent avec les orientations du projet d'aménagement et de développement durable (PADD) et ne correspond pas à la définition des zones naturelles ;
- la création de deux emplacements réservés distincts, implantés pour l'emplacement réservé n°18 sur leur parcelle n° 111 et pour l'emplacement réservé n° 10, sur celles cadastrées section AC n° 524, 525, 85, 523, 84 et 87 est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
Par deux mémoires en défense enregistrés le 27 avril et le 26 juin 2020, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la commune de Collonges-sous-Salève, représentée par la Selarl CDMF Avocats Affaires publiques, conclut à titre principal au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à ce que la cour mette en oeuvre l'article L. 600-9 du code de l'urbanisme et à ce qu'une somme de 5000 euros soit mise à la charge des requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.
La clôture de l'instruction a été fixée au 8 juillet 2020 par une ordonnance du 11 juin précédent en application des dispositions de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme F... E..., première conseillère,
- les conclusions de Jean-Simon Laval, rapporteur public
- les observations de Me K... pour M. H... et autres ainsi que celles de Me B... pour la commune de Collonges-sous-Salève ;
Considérant ce qui suit :
1. M. H... et autres relèvent appel du jugement du 24 septembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la délibération du 9 mars 2017 par laquelle le conseil municipal de Collonges-sous-Salève a adopté le plan local d'urbanisme (PLU) de la commune.
Sur la régularité du jugement :
2. Aux termes de l'article de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : " La décision (...) contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont il est fait application. ".
3. En premier lieu, si les visas du jugement attaqué font mention sans davantage de précision du code de l'urbanisme, les motifs de ce jugement reproduisent le texte des dispositions pertinentes de ce même code dont le tribunal administratif de Lyon a fait application. Le jugement satisfait ainsi aux dispositions précitées au point 2.
4. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que M. H... et autres ont fait parvenir au greffe du tribunal un mémoire le 16 octobre 2018 à 16h53, soit postérieurement à la clôture d'instruction immédiate prise par le magistrat instructeur sur le fondement de l'article R.611-11-1 du code de justice administrative intervenue, par sa mise à disposition dans l'application Télérecours, le 15 octobre 2018 à 12h04. La circonstance que le conseil des requérants n'ait accusé lecture de cette clôture d'instruction que dans les deux jours suivants est sans conséquence sur la date d'effet de cette clôture. Dès lors, les premiers juges ont pu, sans entacher leur jugement d'irrégularité, se borner à viser sans l'analyser ce mémoire des requérants.
5. Enfin, le tribunal n'a pas entaché d'irrégularité son jugement en ne rouvrant pas l'instruction et en s'abstenant de statuer sur le nouveau moyen tiré de l'insuffisance du rapport de présentation qui était présenté dans ce mémoire mentionné au point 4.
6. Il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le jugement contesté est irrégulier.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne l'information des conseillers municipaux lors de l'adoption du PLU :
7. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales, relatif au fonctionnement du conseil municipal : " dans les communes de 3 500 habitants et plus, une note explicative de synthèse sur les affaires soumises à délibération doit être adressée avec la convocation aux membres du conseil municipal ". Il résulte de ces dispositions que, dans les communes de 3 500 habitants et plus, la convocation aux réunions du conseil municipal doit être accompagnée d'une note explicative de synthèse portant sur chacun des points de l'ordre du jour. Cette obligation, qui doit être adaptée à la nature et à l'importance des affaires, doit permettre aux conseillers municipaux de connaître le contexte et de comprendre les motifs de fait et de droit ainsi que les implications des mesures envisagées. Elle n'impose pas de joindre à la convocation adressée aux intéressés une justification détaillée du bien-fondé des propositions qui leur sont soumises.
8. Il ressort des pièces du dossier que la réunion du conseil municipal du 9 mars 2017 a été précédée d'une convocation adressée à chacun des membres le 2 mars précédent. Cette convocation était accompagnée d'une note qui, si elle se bornait à rappeler les différentes étapes chronologiques de la procédure, renvoyait à une annexe en pièce jointe intitulée " Synthèse des modifications du projet de PLU " qui retraçait pour chacun des documents composant le PLU les ajouts et modifications intervenus à la suite de l'enquête publique et des avis des personnes publiques associées. Si ce document ne permettait pas à lui seul de comprendre l'origine précise de chaque modification, il ressort des pièces du dossier que l'entier dossier de PLU était, depuis le 2 mars 2017, date desdites convocations, consultable sur le site intranet de la commune, avec notamment le rapport du commissaire enquêteur, lequel comportait ces informations. Dans ces conditions, les requérants ne sont pas fondés à se plaindre de ce que le tribunal a écarté le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées au point 7.
En ce qui concerne l'exception d'illégalité de la délibération qui a prescrit l'élaboration du PLU :
9. L'illégalité de la délibération du 29 novembre 2012 telle que modifiée par la délibération du 19 septembre 2013 par laquelle le conseil municipal de Collonges-sous-Salève a prescrit l'élaboration du PLU et définit les objectifs poursuivis, ne peut, eu égard à l'objet et à la portée d'une telle délibération, être utilement soulevée par voie d'exception à l'encontre de la délibération qui approuve le PLU, quels que soient les moyens invoqués à l'appui de cette exception d'illégalité. Le constat de cette inopérance ne méconnaît en tout état de cause pas les stipulations des articles 7 et 8 de la convention d'Aarhus du 25 juin 1998 relatives à la participation du public lors de l'élaboration des documents réglementaires tels que les PLU.
En ce qui concerne la procédure de concertation :
10. L'article L. 300-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable en l'espèce, dispose que : " I - Le conseil municipal ou l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale délibère sur les objectifs poursuivis et sur les modalités d'une concertation associant, pendant toute la durée de l'élaboration du projet, les habitants, les associations locales et les autres personnes concernées dont les représentants de la profession agricole, avant : / a) Toute élaboration ou révision du schéma de cohérence territoriale ou du plan local d'urbanisme / (...) IV- Les documents d'urbanisme et les opérations mentionnées aux I et II ne sont pas illégaux du seul fait des vices susceptibles d'entacher la concertation, dès lors que les modalités définies par la décision ou la délibération prévue au II ont été respectées. (...) ".
11. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que les modalités de concertation telles que définies par la délibération du 29 novembre 2012, modifiée par celle du 19 septembre 2013, et en ce qu'elles prévoyaient la mise à disposition du public à la mairie d'un registre de concertation durant toute la procédure de concertation et des documents suivant l'avancement du projet, ont été respectées.
12. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que, par une délibération du 19 mai 2016, le conseil municipal de Collonges-sous-Salève a tiré le bilan de la concertation au cours de cette séance et en a accepté le résultat avant d'arrêter, par délibération du même jour, le projet de PLU. Ainsi, et alors qu'à ce stade de la procédure, aucune disposition n'obligeait le conseil municipal à procéder à une analyse de chaque observation du public, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le bilan de la concertation, dont l'exposé est joint en annexe à la délibération, n'aurait pas été valablement effectué.
En ce qui concerne le rapport de présentation :
13. Aux termes de l'article R. 123-2 du code de l'urbanisme codifié à l'article R. 151-4 du même code dans sa version en vigueur à compter du 1er janvier 2016 : " 5° Le rapport de présentation : Précise les indicateurs qui devront être élaborés pour l'évaluation des résultats de l'application du plan prévue à l'article L. 123-12-1. ". Aux termes de l'article L. 153-27 du code de l'urbanisme dans sa version applicable à compter du 1er janvier 2016, anciennement codifié à l'article L. 123-12-1 : " Neuf ans au plus après la délibération portant approbation du plan local d'urbanisme, ou la dernière délibération portant révision complète de ce plan, ou la délibération ayant décidé son maintien en vigueur en application du présent article, l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale ou le conseil municipal procède à une analyse des résultats de l'application du plan, au regard des objectifs visés à l'article L. 101-2 et, le cas échéant, aux articles L. 1214-1 et L. 1214-2 du code des transports. / L'analyse des résultats donne lieu à une délibération de ce même organe délibérant ou du conseil municipal sur l'opportunité de réviser ce plan. ".
14. Le rapport de présentation du PLU en litige comprend dans le tome 2 une partie 3 intitulée : " Résumé non technique de la démarche d'évaluation du PLU et choix retenus - Indicateurs de suivi du PLU " où sont précisés quatorze indicateurs, lesquels déclinent chaque thématique structurante du PLU, et qui ont été retenus pour l'évaluation des résultats de l'application de ce plan. Dans ces conditions, alors que les dispositions précitées au point 13 prévoient un vote du conseil municipal neuf ans au plus tard après l'adoption du PLU sur l'analyse des résultats du plan, la circonstance qu'aucune périodicité intermédiaire pour le suivi de ces indicateurs n'ait été définie dans le rapport de présentation ne suffit pas pour considérer que les indicateurs retenus ont été insuffisamment définis.
En ce qui concerne les emplacements réservés :
15. Aux termes de l'article L. 151-41 du code de l'urbanisme, lequel reprend les dispositions de L. 123-1-5 du même code dans sa version antérieure au 1er janvier 2016 : " Le règlement peut délimiter des terrains sur lesquels sont institués : 1° Des emplacements réservés aux voies et ouvrages publics dont il précise la localisation et les caractéristiques ; 2° Des emplacements réservés aux installations d'intérêt général à créer ou à modifier ; (...). ". La création de tels emplacement n'est pas subordonnée à l'existence d'un projet précis et déjà élaboré de voie, d'ouvrage public, d'équipement d'intérêt général ou d'espace vert.
16. En premier lieu, les requérants font valoir que la création de l'emplacement réservé n° 18 n'est pas nécessaire, ni justifié dès lors que le rapport de présentation n'identifie pas de projet d'extension des équipements scolaires à cet endroit. Il ressort toutefois des pièces du dossier que l'emplacement réservé n° 18 institué sur la parcelle cadastrée n° 111 d'une superficie de 1 357 m² et implanté en zone Ue, est destiné à " l'extension des équipements publics scolaires ". Cette destination correspond à celles prévues pour les emplacements réservés. Alors que cet emplacement se situe à proximité immédiate du pôle d'enseignement que constituent l'école maternelle, le lycée professionnel Saint Vincent de Paul, l'espace Omnisports du Salève et l'école maternelle publique Charles Perrault, les circonstances dont les requérants font état ne font pas ressortir que les auteurs du PLU auraient commis une erreur manifeste d'appréciation en décidant sa création.
17. En second lieu, les requérants font valoir que la création de l'emplacement réservé n° 10 sur les parcelles cadastrées Section AC n° 84, 85, 524 et 525 pour agrandir le chemin de Bornants n'est pas justifiée au regard de la lisibilité effective pour la circulation automobile et de l'absence de développement de nouveaux modes de déplacement sur cette voie. Toutefois, alors que l'objectif n° 3 de l'orientation n° 6 du projet d'aménagement et de développement durables prévoit de sécuriser les infrastructures routières existantes tout en permettant la création de cheminements et bandes cyclables, les circonstances dont les requérants fait état ne font pas ressortir que les auteurs du PLU auraient commis une erreur manifeste d'appréciation en décidant la création de cet emplacement.
En ce qui concerne le classement des parcelles des requérants en zone naturelle :
18. M. H... et autres réitèrent en appel sans apporter d'élément nouveau le moyen suivant lequel le classement en zone naturelle des parcelles cadastrées section AC n° 84, 85, 87, 523, 524 et 525, d'une superficie globale supérieure à 8 000 mètres carrés et dont ils sont propriétaires en indivision, est entaché d'erreur manifeste d'appréciation. Il convient d'adopter les motifs retenus à bon droit par le tribunal aux points 14 à 18 du jugement attaqué pour écarter ce moyen.
19. Il résulte de tout ce qui précède que M. H... et autres ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs conclusions à fin d'annulation de la délibération du 9 mars 2017.
Sur les frais d'instance :
20. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que M. H... et autres demandent au titre des frais qu'ils ont exposés soit mise à la charge de la commune, qui n'est pas partie perdante. En application de ces mêmes dispositions, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. H... et autres le versement d'une somme de 2 000 euros à la commune de Collonges-sous-Salève, au titre des frais que la commune a exposés.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. H... et autres est rejetée.
Article 2 : M. H... et autres verseront à la commune de Collonges-sous-Salève la somme globale de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. I... H..., premier requérant désigné, ainsi qu'à la commune de Collonges-sous-Salève.
Délibéré après l'audience du 6 octobre 2020 à laquelle siégeaient :
M. Daniel Josserand-Jaillet, président ;
M. Thierry Besse, président-assesseur ;
Mme F... E..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 9 novembre 2020.
N° 19LY04218
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