La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/12/2020 | FRANCE | N°18LY04670

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre, 03 décembre 2020, 18LY04670


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. E... C... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la délibération du 18 juillet 2016 du conseil municipal de la commune de Sancé approuvant le projet d'avenant n° 2 à la convention d'exploitation pour la délégation du service public de crémation conclue le 19 décembre 2000 entre la commune et la société centre funéraire C... et autorisant le maire à le signer et l'avenant n° 2 à la convention, ensemble le rejet implicite de son recours gracieux.

Par un jugement n° 1603379 du

19 octobre 2018, le tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par un...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. E... C... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la délibération du 18 juillet 2016 du conseil municipal de la commune de Sancé approuvant le projet d'avenant n° 2 à la convention d'exploitation pour la délégation du service public de crémation conclue le 19 décembre 2000 entre la commune et la société centre funéraire C... et autorisant le maire à le signer et l'avenant n° 2 à la convention, ensemble le rejet implicite de son recours gracieux.

Par un jugement n° 1603379 du 19 octobre 2018, le tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés les 26 décembre 2018 et 21 mai 2019, M. C..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et ces actes ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Sancé la somme de 6 000 euros au titre des frais du litige.

Il soutient que :

- il est recevable à demander l'annulation de la délibération qui est un acte détachable du contrat qu'il peut contester en qualité de tiers au contrat ;

- les conseillers municipaux ne disposaient pas de tous les éléments essentiels de l'avenant à intervenir lors de l'adoption de la délibération, en méconnaissance de l'article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales ;

- la réévaluation des tarifs de la crémation a été décidée en méconnaissance de l'article 36 du décret du 1er février 2016 relatif aux contrats de concession et au mépris des stipulations contractuelles et alors que les travaux en cause n'étaient pas nécessaires ;

- l'avenant n° 2 à la convention n'a pas été valablement signé par M. A... ;

- la prolongation de la durée de la concession porte atteinte à la nature globale du contrat et au principe de libre accès à commande publique, en violation des articles 1er et 55 de l'ordonnance du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession, et méconnaît le II de l'article 6 du décret du 1er février 2016 ; contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, ces dispositions sont applicables ;

- la substitution de cocontractant était impossible au regard du 4° de l'article 36 du décret du 1er février 2016 en l'absence de modification des conditions d'exploitation et de gestion du crématorium ;

- la demande de la société Centre funéraire C... de prolongation de la durée de la convention était irrecevable.

Par un courrier du 23 octobre 2020 les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour est susceptible de se fonder d'office sur le moyen tiré de ce que M. C... n'est pas recevable à former devant le juge du contrat un recours de pleine juridiction contestant la validité de l'avenant n° 2 à la convention d'exploitation du crématorium de Sancé en l'absence d'intérêt lésé de manière directe et certaine.

Par un mémoire en défense et en réponse à ce moyen d'ordre public enregistré le 12 novembre 2020, la commune de Sancé, représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. C... au titre des frais du litige.

Elle fait valoir que :

- la demande présentée devant le tribunal était tardive et M. C... est dépourvu d'une qualité lui donnant intérêt pour agir contre les actes contestés ;

- les moyens qu'il soulève ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 13 novembre 2020, la société Centre funéraire C..., représentée par Me F..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 4 500 euros soit mise à la charge de M. C... au titre des frais du litige.

Elle fait valoir que :

- M. C... n'est pas recevable à demander l'annulation pour excès de pouvoir de la délibération du 18 juillet 2016 ;

- sa demande présentée devant le tribunal était tardive ;

- il ne justifie d'aucun intérêt susceptible d'être lésé par l'avenant litigieux ;

- le moyen tiré de qu'il serait irrégulier en ce qu'il proposerait une méthode de révision du tarif de crémation différente de celle inscrite dans la convention initiale est inopérant ;

- les autres moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés ;

- en tout état de cause l'irrégularité alléguée de la procédure de consultation et l'intérêt général feraient obstacle à l'annulation contentieuse de l'avenant.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- l'ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016 ;

- le décret n° 2016-86 du 1er février 2016 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D...,

- les conclusions de Mme Lesieux, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., représentant la commune de Sancé et celles de Me F..., représentant la société Centre funéraire C....

Considérant ce qui suit :

1. Par une convention de délégation de service public conclue le 19 décembre 2000, la commune de Sancé (Saône-et-Loire) a confié à la société Centre funéraire C..., présidée alors par M. E... C..., pour une durée de trente ans, l'exploitation du crématorium jusque-là exploité personnellement par M. C... dans le cadre d'une convention d'exploitation conclue le 7 juin 1982. Par un avenant n° 1 du 9 juillet 2001, la durée de la convention a été ramenée à vingt ans. Des travaux de mise en conformité de l'installation étant nécessaires, le conseil municipal de Sancé, par une délibération du 18 juillet 2016, a approuvé un projet d'avenant n° 2 et autorisé le maire à le signer. L'avenant n° 2 à la convention, qui prolonge la durée de la délégation de six ans et modifie les tarifs de crémation et la clause de révision de ces tarifs et de la redevance, a été signé le 3 octobre 2016. M. C..., qui a cédé le 1er octobre 2010 les actions qu'il détenait dans la société Centre funéraire C..., a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la délibération du 18 juillet 2016 et l'avenant n° 2 à la convention, ensemble le rejet implicite de son recours gracieux du 11 août 2016.

Sur la régularité du jugement qui rejette les conclusions tendant à l'annulation de la délibération du 18 juillet 2016 :

2. Indépendamment des actions dont disposent les parties à un contrat administratif et des actions ouvertes devant le juge de l'excès de pouvoir contre les clauses réglementaires d'un contrat ou devant le juge du référé contractuel sur le fondement des articles L. 551-13 et suivants du code de justice administrative, tout tiers à un contrat administratif susceptible d'être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou ses clauses est recevable à former devant le juge du contrat un recours de pleine juridiction contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses non réglementaires qui en sont divisibles. La légalité du choix du cocontractant, de la délibération autorisant la conclusion du contrat et de la décision de le signer ne peut être contestée qu'à l'occasion du recours ainsi défini. Il en résulte que des conclusions d'excès de pouvoir d'un tiers contre ces actes détachables du contrat sont irrecevables.

3. Ainsi que l'a jugé à juste titre le tribunal, la demande de M. C... devait être regardée comme tendant, d'une part, à l'annulation pour excès de pouvoir des clauses réglementaires de l'avenant n° 2 au contrat et à l'annulation du contrat lui-même et, d'autre part, de la délibération du 18 juillet 2016 autorisant le maire à le signer. Compte tenu de ce qui a été dit au point 2, si les conclusions d'excès de pouvoir dirigées contre ces clauses réglementaires étaient recevables, les conclusions d'excès de pouvoir dirigées contre l'acte détachable du contrat étaient, en revanche, irrecevables. M. C... n'est dès lors pas fondé à soutenir que c'est à tort qu'elles ont été rejetées comme telles par les premiers juges.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la validité du contrat :

4. Saisi par un tiers dans les conditions définies ci-dessus de conclusions contestant la validité d'un contrat ou de certaines de ses clauses, il appartient au juge du contrat de vérifier que l'auteur du recours autre que le représentant de l'Etat dans le département ou qu'un membre de l'organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné se prévaut d'un intérêt susceptible d'être lésé de façon suffisamment directe et certaine.

5. Si M. C..., né en 1949, se prévaut de sa volonté d'être candidat au futur appel d'offres de la commune de Sancé pour l'attribution de la nouvelle concession d'exploitation du crématorium à l'échéance du contrat en cours jusqu'au 18 décembre 2026 en vertu de l'avenant n° 2 et s'il résulte par ailleurs de l'instruction qu'il n'a pas été intégralement payé par l'acquéreur des actions qu'il détenait jusqu'en 2010 dans la société Centre funéraire C..., la conclusion de l'avenant n° 2 n'a pu léser de façon suffisamment directe et certaine l'intérêt du requérant qui n'est dès lors pas recevable à former devant le juge du contrat un recours de pleine juridiction contestant la validité de l'avenant n° 2 à la convention d'exploitation du crématorium de Sancé. Il n'est dès lors pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté son action en contestation de la validé du contrat.

En ce qui concerne la légalité des clauses réglementaires :

6. Revêtent un caractère réglementaire les clauses d'un contrat qui ont, par elles-mêmes, pour objet l'organisation ou le fonctionnement d'un service public. M. C... demande l'annulation de l'article 3 de l'avenant n° 2 qui modifie la clause d'actualisation des tarifs de crémation.

7. L'article 7 de la convention d'exploitation du crématorium, dans sa rédaction modifiée par l'avenant n° 1 de 2001, stipulait que la formule d'actualisation des tarifs serait révisée tous les cinq ans et au plus tôt au 1er juillet 2005. Pour démontrer l'absence de nécessité des travaux de mise en conformité de l'installation rendue obligatoire par un arrêté du 28 janvier 2010 du ministre chargé de la santé imposant aux installations de crématorium de respecter de nouvelles normes d'émission de polluants contenus dans les gaz rejetés dans l'atmosphère, M. C... soutient qu'en vertu de ces stipulations, la réactualisation de la formule est intervenue en 2010, puis en 2015, le contrat de concession devant prendre fin en 2020, et que les travaux de mise aux normes auraient dû être pris en compte à l'occasion de la réactualisation de 2015. Il produit le rapport d'un laboratoire accrédité réalisé en 2011 dont il ressort cependant que les émissions polluantes du four de crémation du centre funéraire C... respectaient à cette date les seuils transitoires fixés à l'annexe 2 de l'arrêté du 28 janvier 2010. Ce rapport n'est donc pas de nature à établir l'absence de nécessité des travaux de mise en conformité du crématorium, imposés par l'arrêté de 2010 à l'horizon de huit ans. M. C... ne peut utilement invoquer la méconnaissance des dispositions de l'article 36 du décret du 1er février 2016 relatif aux contrats de concession, qui énumèrent les cas dans lesquels un contrat de concession peut être modifié, ni le moyen tiré de ce que l'avenant n° 2 a pour effet de modifier substantiellement la convention d'exploitation, dès lors que ces moyens ont trait à la validité de l'avenant.

8. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées en défense, que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. Sa requête doit être rejetée, y compris les conclusions présentées au titre des frais du litige. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à sa charge les sommes demandées au même titre par la commune de Sancé et la société Centre funéraire C....

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Sancé et la société Centre funéraire C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... C..., à la commune de Sancé et à la société Centre funéraire C... .

Délibéré après l'audience du 19 novembre 2020, à laquelle siégeaient :

2

N° 18LY04670


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18LY04670
Date de la décision : 03/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Marchés et contrats administratifs - Formation des contrats et marchés.

Marchés et contrats administratifs - Règles de procédure contentieuse spéciales - Recevabilité - Recevabilité du recours pour excès de pouvoir en matière contractuelle.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Céline MICHEL
Rapporteur public ?: Mme LESIEUX
Avocat(s) : BRIGNATZ MARIANNE

Origine de la décision
Date de l'import : 18/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2020-12-03;18ly04670 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award