Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 10 février 2020 par lequel le préfet de l'Isère lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'un an.
Par un jugement n° 2001015 du 6 avril 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 7 mai 2020, M. C..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2001015 du 6 avril 2020 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté susmentionné.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier en ce qu'il a méconnu le principe du contradictoire ;
- l'arrêté attaqué est entaché du vice d'incompétence ;
- il porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale ;
- sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public ;
- l'arrêté attaqué porte atteinte aux droits de la défense.
La requête a été communiquée au préfet de l'Isère qui n'a pas produit de mémoire.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Pin, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant algérien né le 25 février 1982, déclare être entré en France au cours de l'année 2004. Par un arrêté du 10 février 2020, le préfet de l'Isère l'a obligé à quitter le territoire français sans lui accorder de délai de départ volontaire, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an. M. C... relève appel du jugement du 6 avril 2020 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Il ne résulte ni des dispositions des articles R. 612-3 et R. 612-6 du code de justice administrative ni d'aucune autre disposition ou principe que le juge serait tenu, à peine d'irrégularité de sa décision, de mettre en demeure les parties qui ne l'ont pas fait de produire un mémoire et de mettre en oeuvre les dispositions de l'article R. 612-6 du code de justice administrative relatives à l'acquiescement aux faits. L'absence de production d'un mémoire en défense par le préfet devant le tribunal ne traduit, par elle-même, une méconnaissance par le tribunal administratif du principe du caractère contradictoire de la procédure. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance du principe du caractère contradictoire de la procédure juridictionnelle en raison de l'absence de production d'un mémoire du préfet de l'Isère en première instance doit être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. En premier lieu, l'arrêté attaqué a été signé par M. Philippe Portal, secrétaire général de la préfecture de l'Isère, qui disposait d'une délégation de signature à cette fin, consentie par arrêté du 26 septembre 2019, régulièrement publiée au recueil des actes administratifs n° 175 du 1er octobre 2019, consultable sur le site Internet de la préfecture. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté manque en fait et doit être écarté.
4. En deuxième lieu, M. C... fait valoir qu'il réside en France depuis 2004, qu'il vit en concubinage avec une compatriote titulaire d'un certificat de résidence valable dix ans depuis 2013, qu'ils ont eu un enfant, né en 2017, que sa compagne est par ailleurs la mère de deux enfants, de nationalité française, nés d'une précédente union, et que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public. Si le requérant doit ainsi être regardé comme invoquant les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, celles-ci ne garantissent pas à l'étranger le droit de choisir le lieu le plus approprié pour développer sa vie privée et familiale. En l'espèce, si M. C... fait valoir qu'il vit en France depuis 2004, les documents qu'il produit n'établissent qu'une présence ponctuelle en France depuis lors. M. C... n'établit pas davantage, par les pièces qu'il verse au débat, l'ancienneté et la réalité de la vie commune avec sa compagne, ni la régularité du séjour de celle-ci en France à la date de la décision contestée, le titre de séjour versé au débat étant valide jusqu'au 28 avril 2018. M. C... ne justifie pas, par ses seules allégations, que le père des enfants de sa compagne, nés en 2006 et 2009, contribuerait à l'éducation de ceux-ci. En outre, l'intéressé avait indiqué en première instance que ces enfants étaient également de nationalité algérienne. Ainsi, rien ne fait obstacle à ce que la vie familiale de M. C... et de sa compagne, de même nationalité et qui n'exerce aucune activité professionnelle, accompagnés de leur enfant commun et des deux premiers enfants de Mme B..., se poursuive ailleurs qu'en France, notamment en Algérie, pays dans lequel M. C... n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales et où il a longtemps vécu. En outre, le préfet a relevé que M. C... avait été interpellé en 2017 pour des faits de vol par effraction et d'usage de faux document administratif, dont le requérant ne conteste pas utilement la matérialité en se bornant à faire valoir que ces faits sont anciens et qu'il est présumé innocent. Ainsi, dans les circonstances de l'espèce, eu égard à la durée et aux conditions de séjour de l'intéressé en France, le préfet en édictant les décisions attaquées n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de M. C... une atteinte disproportionnée au but en vue desquelles elles ont été prises. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
5. En troisième lieu, l'obligation de quitter le territoire français et la mesure d'interdiction de retour sur le territoire pour une durée d'un an, ne font pas, par elles-mêmes, obstacle à ce que M. C... poursuive la procédure judiciaire, dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle était engagée à la date de l'arrêté attaqué, après l'agression dont il a été victime le 30 décembre 2019 et ne le prive pas de son droit d'y défendre ses intérêts, dès lors qu'il peut se faire représenter utilement pour les besoins de cette procédure. Il lui est également loisible de solliciter, si besoin est, l'abrogation de l'interdiction de retour sur le territoire français dont il fait l'objet. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des droits de la défense doit être écarté.
6. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 12 novembre 2020, à laquelle siégeaient :
M. Pourny, président de chambre,
M. Gayrard, président assesseur,
M. Pin, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 décembre 2020.
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N° 20LY01430