La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/02/2021 | FRANCE | N°20LY01215

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre, 25 février 2021, 20LY01215


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Guintoli a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand de condamner l'Etat à lui payer, outre intérêts et capitalisation de ces intérêts, la somme de 8 942 738,37 euros, de laquelle il convient de soustraire celle de 18 000 euros consentie par l'Etat, au titre du règlement du marché portant sur l'exécution de travaux de terrassement, d'assainissement et de réalisation de la couche de forme de la chaussée, dans le cadre de l'opération de mise à deux fois deux voies de la route nat

ionale 7 entre la commune de Saint-Prix et le département de la Loire.

Par u...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Guintoli a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand de condamner l'Etat à lui payer, outre intérêts et capitalisation de ces intérêts, la somme de 8 942 738,37 euros, de laquelle il convient de soustraire celle de 18 000 euros consentie par l'Etat, au titre du règlement du marché portant sur l'exécution de travaux de terrassement, d'assainissement et de réalisation de la couche de forme de la chaussée, dans le cadre de l'opération de mise à deux fois deux voies de la route nationale 7 entre la commune de Saint-Prix et le département de la Loire.

Par un jugement n° 1201429-1301214 du 21 novembre 2014, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté l'ensemble des conclusions à fin d'indemnisation présentées par la société Guintoli, à l'exception de celles relatives aux préjudices liés à l'évolution de l'ouvrage hydraulique n° 7 et à la nature des déblais rocheux au regard d'un contexte pluviométrique défavorable, et a ordonné une expertise avant-dire droit pour permettre d'apprécier les causes, la réalité, l'étendue et le montant des préjudices dont il est demandé réparation.

Par un jugement n° 1301214 du 31 mars 2016, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a, d'une part, condamné l'Etat à verser à la société Guintoli la somme de 5 782 268,94 euros, augmentée des intérêts moratoires à compter du 20 juillet 2011 et leur capitalisation à la date du 20 juillet 2012 puis à chaque échéance annuelle, d'autre part, mis les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 22 149,98 euros, à la charge définitive de l'Etat, et enfin, mis à la charge de celui-ci la somme de 1 500 euros au titre des frais liés au litige.

Par un arrêt n° 16LY01836 du 15 novembre 2018, la cour administrative d'appel de Lyon a, sur appel du ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, d'une part réformé ce jugement en fixant au 22 juillet 2011 la date à laquelle les intérêts moratoires courent et au 30 juillet 2013 celle du début de la capitalisation des intérêts, d'autre part rejeté le surplus des conclusions des parties.

Par une décision n° 427085 du 25 mars 2020, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt du 15 novembre 2018 de la cour administrative de Lyon en tant qu'il a fixé les dates de point de départ des intérêts moratoires et de capitalisation de ceux-ci et renvoyé, dans cette mesure, l'affaire devant la cour qui l'a enregistrée sous le n° 20LY01215.

Procédure devant la cour :

Par deux mémoires enregistrés les 26 mai et 3 juin 2020, le ministre de la transition écologique et solidaire demande à la cour d'annuler le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 31 mars 2016 en tant qu'il a fixé la date à partir de laquelle les intérêts moratoires courent et celle à laquelle la somme des intérêts moratoires est capitalisée.

Il indique s'en remettre aux termes de ses mémoires produits devant la cour et le Conseil d'Etat.

Par un mémoire enregistré 12 mai 2020, la société Guintoli, représentée par Me A..., a déclaré s'en remettre à la décision à intervenir.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code civil ;

- le code des marchés publics ;

- le décret n° 2002-232 du 21 février 2002 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Gayrard, président-assesseur,

- les conclusions de Mme Cottier, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., substituant Me Sinelnikoff, avocat de la société Guintoli.

Considérant ce qui suit :

1. Selon acte d'engagement passé le 15 décembre 2008, l'Etat a confié à la société Guintoli l'exécution de travaux de terrassement, d'assainissement et de réalisation de la couche de forme de la chaussée dans le cadre de l'opération de mise à deux fois deux voies de la route nationale n° 7, entre la commune de Saint-Prix, dans le département de l'Allier, et le département de la Loire. La réception des travaux a été prononcée le 8 mars 2011 avec effet au 16 décembre 2010, avec des réserves levées le 3 août 2012. La société Guintoli a saisi le tribunal administratif de Clermont-Ferrand de deux demandes successives relatives au règlement du marché, l'une en se fondant sur le projet de décompte final qu'elle avait adressé le 20 juin 2011, l'autre contestant le décompte général signé par le maître d'ouvrage le 25 octobre 2012. Par un jugement du 21 novembre 2014, le tribunal a jugé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur la première requête et a ordonné, avant-dire droit, une expertise pour permettre d'apprécier les causes, la réalité, l'étendue et le montant des préjudices dont la société Guintoli demandait réparation en conséquence de l'évolution de l'ouvrage hydraulique n° 7 et de la nature des déblais rocheux au regard d'un contexte pluviométrique défavorable. Après la remise par l'expert de son rapport le 13 octobre 2015, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a, par un jugement du 31 mars 2016, condamné l'Etat à verser à la société Guintoli la somme de 5 782 268,94 euros assortie des intérêts moratoires à compter du 20 juillet 2011, capitalisés à compter du 20 juillet 2012 et a mis à la charge définitive de l'Etat les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 22 149,98 euros. Sur appel du ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, la cour administrative d'appel de Lyon a, par un arrêt du 15 novembre 2018, réformé ce jugement en tant qu'il fixe la date à partir de laquelle les intérêts moratoires courent et celle à laquelle la somme des intérêts moratoires est capitalisée. Par décision n° 427085 du 25 mars 2020, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt du 15 novembre 2018 de la cour administrative de Lyon en tant qu'il a fixé les dates de point de départ des intérêts moratoires et de capitalisation de ceux-ci et renvoyé, dans cette mesure, l'affaire devant la cour.

En ce qui concerne les intérêts moratoires :

2. Aux termes de l'article 98 du code des marchés publics alors applicable : " Le dépassement du délai de paiement ouvre de plein droit et sans autre formalité, pour le titulaire du marché ou le sous-traitant, le bénéfice d'intérêts moratoires, à compter du jour suivant l'expiration du délai ". Aux termes du I de l'article 1er du décret du 21 février 2002 relatif à la mise en oeuvre du délai maximum de paiement dans les marchés publics, applicable au marché litigieux : " pour les marchés de travaux, le point de départ du délai global de paiement du solde est la date de réception du décompte général et définitif par le maître d'ouvrage ". Pour l'application de ces dispositions, lorsqu'un décompte général fait l'objet d'une réclamation par un cocontractant, le délai de paiement du solde doit être regardé comme ne commençant à courir qu'à compter de la réception de cette réclamation par le maître d'ouvrage.

3. Il résulte de l'instruction que le maître d'oeuvre a notifié à la société Guintoli un décompte général le 30 octobre 2012, que la société a contesté par un mémoire en réclamation reçu par le maître d'ouvrage le 11 décembre 2012. La double circonstance que la société a transmis au maître d'oeuvre un premier projet de décompte final par courrier du 20 juin 2011, qui n'a été ni accepté ni rectifié, et que le maître d'oeuvre n'a pas adressé le décompte final dans le délai prévu à l'article 13.42 du cahier des clauses administratives générales, est sans effet sur le point de départ des intérêts moratoires déterminé selon les règles vues au point précédent. Il s'ensuit que le point de départ du délai global de paiement du solde du marché est en l'espèce la date de réception de la réclamation préalable de la société Guintoli, soit le 11 décembre 2012, et les intérêts moratoires ont commencé à courir au lendemain de l'expiration du délai de trente jours imparti au maitre d'ouvrage pour procéder au paiement, soit à partir du 11 janvier 2013. Il ressort des pièces du dossier que la société Guintoli a demandé la capitalisation des intérêts par mémoire enregistré au greffe du tribunal administratif de Clermont-Ferrand le 30 juillet 2013. A cette date, il était du moins d'une année d'intérêts. Il y a lieu, par suite, de ne faire droit à sa demande qu'à compter du 11 janvier 2014, ainsi qu'à chaque échéance annuelle ultérieure.

DÉCIDE :

Article 1er : Les intérêts moratoires sur la somme de 5 782 268,94 euros que l'Etat est condamné à verser à la société Guintoli, en vertu de l'article 1er du jugement n° 1301214 du 31 mars 2016 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand, courent à compter du 11 janvier 2013. Ces intérêts seront capitalisés à la date du 11 janvier 2014, ainsi qu'à chaque échéance annuelle, pour porter elle-même intérêts.

Article 2 : L'article 1er du jugement n° 1301214 du 31 mars 2016 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la ministre de la transition écologique et solidaire et à la société Guintoli.

Délibéré après l'audience du 4 février 2021, à laquelle siégeaient :

M. Pourny, président de chambre,

M. Gayrard, président assesseur,

Mme Caraës, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 février 2021.

N° 20LY01215 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY01215
Date de la décision : 25/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Marchés et contrats administratifs - Exécution financière du contrat - Règlement des marchés.

Marchés et contrats administratifs - Exécution financière du contrat - Intérêts - Point de départ des intérêts.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: M. Jean-Philippe GAYRARD
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : GRANGE MARTIN RAMDENIE et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2021-02-25;20ly01215 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award