Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. C... H... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 23 septembre 2019 par lequel le maire de commune d'Oullins a autorisé le déplacement du débit de tabac exploité par Mme A....
Par un jugement n° 1908123 du 10 juin 2020, ce tribunal a fait droit à sa demande.
Procédure devant la cour
I. Par une requête et un mémoire enregistrés les 26 juin 2020 et 8 février 2021 sous le n° 20LY01685, le ministre de l'action et des comptes publics demande à la cour d'annuler ce jugement et de rejeter la demande présentée par M. H... devant le tribunal.
Il soutient que :
- l'arrêté du préfet du Rhône du 20 mars 2012 ne concerne pas les débits de tabac et aucun périmètre de protection n'a été institué par la réglementation préfectorale, de sorte que la distance minimale de 150 mètres ne s'imposait pas ;
- les autres moyens soulevés par M. H..., tirés du défaut de motivation, de l'application erronée de l'article 9 du décret du 28 juin 2010, de l'erreur manifeste d'appréciation et de l'impossibilité pour Mme A... de déplacer son débit de tabac au motif qu'elle ne l'exploitait pas ne sont pas fondés ;
- il ne lui appartient pas de supporter le paiement de la somme mise à sa charge par les premiers juges puisque c'est le préfet du Rhône qui doit assurer l'exécution du jugement attaqué.
Par un mémoire en intervention enregistré le 25 septembre 2020, la commune d'Oullins, représentée par Me G..., conclut à l'annulation du jugement attaqué et fait valoir les mêmes moyens que la requête.
Par un mémoire en défense enregistré le 7 janvier 2021, M. H..., représenté par Me J..., conclut au rejet de la requête et à ce soit mise à la charge de l'Etat et de la commune d'Oullins la somme de 2 500 euros chacun au titre des frais du litige.
Il fait valoir que :
- l'intervention présentée par la commune d'Oullins, qui a qualité pour faire appel, présente le caractère d'un appel principal qui est tardif ;
- les moyens d'appel présentés par le ministre de l'action et des comptes publics ne sont pas fondés ;
- les moyens qu'il a soulevés devant le tribunal administratif de Lyon sont fondés ;
- Mme A... n'ayant jamais exploité le fonds de commerce sis 63 rue Pierre Semard, le transfert était impossible.
Un mémoire enregistré le 5 janvier 2021 présenté pour Mme A... n'a pas été communiqué.
II. Par une requête et un mémoire enregistrés les 26 juin 2020 et 8 février 2021 sous le n° 20LY01686, le ministre de l'action et des comptes publics demande à la cour d'ordonner, sur le fondement des articles R. 811-15 et R. 811-17 du code de justice administrative, qu'il soit sursis à l'exécution du jugement n° 1908123 du tribunal administratif de Lyon du 10 juin 2020.
Il soutient que :
- les moyens qu'il soulève dans la requête au fond sont sérieux ;
- les moyens soulevés par M. H... ne sont pas fondés ;
- l'exécution du jugement attaqué risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables puisque l'annulation de l'arrêté du 23 septembre 2019 prive Mme A... des revenus d'activité liés à la vente de produits du tabac, déséquilibre le maillage du réseau et prive l'Etat des taxes qu'il aurait pu percevoir sur la vente de produits par un débit de tabac viable.
Par un mémoire enregistré le 24 septembre 2020, Mme B... A..., représentée par Me E..., conclut aux mêmes fins que la requête.
Elle fait valoir que les moyens soulevés par le ministre dans la requête au fond relatifs à la légalité de l'arrêté du 23 septembre 2019 sont sérieux et l'exécution du jugement attaqué risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables dans la mesure où l'annulation de cet arrêté la prive des revenus liés à la vente de produits du tabac qui représente la partie la plus importante de son activité et déséquilibre le maillage du réseau.
Par un mémoire en défense enregistré le 7 janvier 2021, M. H..., représenté par Me J..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'Etat, de la commune d'Oullins et de Mme A... la somme de 2 500 euros chacun au titre des frais du litige.
Il fait valoir que :
- les moyens soulevés par le ministre de l'action et des comptes publics dans la requête au fond ne sont pas sérieux ;
- les moyens qu'il a soulevés devant le tribunal administratif de Lyon sont fondés ;
- le transfert était impossible car Mme A... n'a jamais exploité le fonds de commerce sis 63 rue Pierre Semard ;
- l'exécution du jugement attaqué ne risque pas d'entraîner des conséquences difficilement réparables.
III. Par une requête enregistrée le 3 août 2020 sous le n° 20LY02187, Mme A..., représentée par Me E..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1908123 du tribunal administratif de Lyon du 10 juin 2020 ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. H... devant le tribunal ;
3°) de mettre à la charge de M. H... la somme de 2 000 euros au titre des frais du litige.
Elle soutient que :
- l'arrêté du 20 mars 2012 organise les nouvelles implantations des seuls débits de boissons et son débit de boissons n'en est pas une ;
- une crèche et des salles de trampoline et de judo ne confèrent pas le caractère de zone protégée ;
- le transfert du bureau de tabac n'avait pas pour effet de déséquilibrer le réseau local existant.
Par un mémoire en défense enregistré le 7 janvier 2021, M. H..., représenté par Me J..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme A... la somme de 2 500 euros au titre des frais du litige.
Il fait valoir que :
- les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés ;
- le transfert était impossible car elle n'a jamais exploité le fonds de commerce sis 63 rue Pierre Semard.
Un mémoire enregistré le 5 janvier 2021 présenté pour Mme A... n'a pas été communiqué.
Vu :
- les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de la santé publique ;
- la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 ;
- le décret n° 2010-720 du 28 juin 2020 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme F...,
- les conclusions de M. I...,
- et les observations de Me E..., représentant Mme A..., et celles de Me D..., représentant la commune d'Oullins.
Considérant ce qui suit :
1. Il y a lieu de joindre, pour qu'il y soit statué par un même arrêt, les requêtes visées ci-dessus qui sont dirigées contre le même jugement et présentent à juger les mêmes questions.
2. Par un arrêté du 23 septembre 2019, le maire de la commune d'Oullins a, au nom de l'Etat, autorisé Mme A... à déplacer dans la commune le débit de tabac, dont la gérance lui a été attribuée le 14 décembre 2018, du 63 rue Pierre Sémard au 84 boulevard Emile Zola dans les locaux du " San-Siro Café " qu'elle exploite à cette adresse. A la demande de M. H..., exploitant d'un débit de tabac situé 14, boulevard Emile Zola à Oullins, le tribunal administratif de Lyon, par un jugement n° 1908123 du 10 juin 2020, a annulé cet arrêté. Le ministre de l'action et des comptes publics d'une part et Mme A... d'autre part, demandent l'annulation de ce jugement par les requêtes n°s 20LY01686 et 20LY02187 et par la requête n° 20LY01686, le ministre demande qu'il soit sursis à son exécution.
Sur les requêtes n°s 20LY01685 et 20LY02187 :
3. Si la commune d'Oullins, dont le maire a pris au nom de l'Etat l'arrêté en litige, était présente dans la cause en première instance, elle n'a pas, contrairement à ce que soutient M. H..., qualité pour faire appel du jugement. Elle peut toutefois présenter des observations à l'appui de la requête, enregistrée sous le n° 20LY01685, du ministre de l'action et des comptes publics.
4. En vertu du 4° de l'article 11 du décret du 28 juin 2010 relatif à l'exercice du monopole de la vente au détail des tabacs manufacturés, les implantations de débits de tabac sont interdites en zone protégée conformément aux dispositions de l'article L. 3335-1 du code de la santé publique. Aux termes de l'article L. 3335-1 du code de la santé publique, dans sa rédaction applicable au litige : " Le représentant de l'Etat dans le département peut prendre des arrêtés pour déterminer sans préjudice des droits acquis, les distances auxquelles les débits de boissons à consommer sur place ne peuvent être établis autour des édifices et des établissements suivants dont l'énumération est limitative : / (...) 4° Etablissements d'instruction publique et établissements scolaires privés ainsi que tous établissements de formation ou de loisirs de la jeunesse (...) ". Aux termes de l'article L. 3512-10 du même code : " L'article L. 3335-1 est applicable aux lieux de vente de tabac manufacturé, sans préjudice des droits acquis. / Par dérogation à l'article L. 3335-1 et sans préjudice des droits acquis, un débit de tabac ne peut être établi autour d'un établissement d'instruction publique, d'un établissement scolaire privé ou d'un établissement de formation ou de loisirs de la jeunesse à une distance inférieure à un seuil fixé par arrêté du représentant de l'Etat dans le département. ".
5. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que le représentant de l'Etat dans le département a, d'une part, la faculté, en application de l'article L. 3335-1 du code de la santé publique, d'interdire l'implantation de débits de boissons dans un périmètre de protection fixé par arrêté autour de divers établissements parmi lesquels ceux d'instruction publique et scolaires privés ainsi que ceux de formation ou de loisirs de la jeunesse et, d'autre part, l'obligation, en application de l'article L. 3512-10 du même code ainsi que de l'article 11 du décret du 28 juin 2010, d'opposer une telle interdiction d'implantation aux débits de tabacs à une distance qu'il détermine. Ces dispositions ne font pas obstacle à ce que l'arrêté pris pour l'application de l'article L. 3335-1 du code de la santé publique et instituant un périmètre de protection opposable aux débits de boissons soit applicable aux débits de tabacs en l'absence d'arrêté spécifique prévoyant un autre périmètre de protection. Il s'ensuit qu'en l'absence d'intervention de l'arrêté préfectoral prévu par les dispositions de l'article L. 3512-10 du code de la santé publique instituant une zone de protection à l'intérieur de laquelle il est interdit d'implanter un commerce de vente au détail de tabac dans le département du Rhône autour des lieux accueillant des mineurs, les transferts de débits de tabac dans ce département sont régis par les dispositions de l'arrêté préfectoral du 6 juillet 2010 modifiés par des arrêtés des 20 mars 2012 et 4 juin 2013 réglementant la police des débits de boissons et restaurants dans le département du Rhône et fixant les périmètres de protection. Dans les communes de plus de 5 000 habitants, le préfet du Rhône a fixé la distance autour des établissements de formation de la jeunesse à 150 mètres. Les appelants ne contestent pas que le local dans lequel Mme A... a été autorisée à déplacer le débit de tabac dont elle la gérante se situe à 63 mètres d'une ludothèque, en méconnaissance de l'article 1er de l'arrêté du 4 juin 2013. Par, suite le maire de la commune d'Oullins n'a pu légalement y autoriser le déplacement litigieux, ainsi que l'a jugé à juste titre le tribunal.
6. Il résulte de ce qui précède que les appelants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté du maire d'Oullins. Les requêtes n°s20LY01685 et 20LY02187 sont donc rejetées.
Sur la requête n° 20LY01686 :
7. Mme A..., bénéficiaire de l'autorisation de transfert litigieuse et qui avait la qualité de défendeur en première instance, a qualité pour demander qu'il soit sursis à l'exécution du jugement attaqué. Par suite, son intervention n'est pas recevable.
8. Le présent arrêt se prononçant sur le bien-fondé de l'appel présenté par le ministre de l'action et des comptes publics contre le jugement n° 1908123 du tribunal administratif de Lyon, les conclusions de la requête n° 20LY01686 tendant à ce qu'il soit sursis à son exécution sont ainsi privées d'objet. Il n'y a pas lieu, par suite, d'y statuer.
Sur les frais du litige :
9. D'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en condamnant l'Etat, partie perdante, à verser à M. H... la somme de 1 400 euros au titre des frais du litige, les premiers juges aient fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative alors même que la formule exécutoire du jugement attaqué comporte de manière erronée la mention du ministre de l'action et des comptes publics en lieu et place du préfet du Rhône qui seul pouvait être chargé de l'exécution de cette décision juridictionnelle, en application de l'article R. 431-10 du code de justice administrative. D'autre part, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge M. H..., qui n'est pas, dans l'instance n° 20LY02187, la partie perdante, la somme que Mme A... demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de laisser à la charge de M. H... les sommes qu'il a exposées à ce même titre dans les présentes instances.
DÉCIDE :
Article 1er : L'intervention de Mme A... au soutien de la requête 20LY01686 n'est pas admise.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 20LY01686.
Article 3 : Les requêtes n°s 20LY01685 et 20LY02187 sont rejetées.
Article 4 : Les conclusions présentées par Mme A... et M. H... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'action et des comptes publics, à Mme B... A... et à M. C... H.... Copie en sera adressée à la commune d'Oullins.
Délibéré après l'audience du 18 mars 2021, à laquelle siégeaient :
M. d'Hervé, président,
Mme F..., président assesseur,
Mme Duguit-Larcher, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 avril 2021.
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N°s 20LY01685, 20LY01686, 20LY02187