Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision implicite par laquelle le ministre des solidarités et de la santé a rejeté sa demande d'autorisation d'exercer la profession de chirurgien pédiatre spécialisé en chirurgie infantile, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 150 000 euros en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi et d'enjoindre au ministre des solidarités et de la santé de lui délivrer l'autorisation d'exercer la profession de chirurgien pédiatre, spécialisé en chirurgie infantile, sous astreinte de 50 euros par jour de retard.
Par un jugement n° 1708462 du 19 septembre 2019, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 27 octobre 2019, M. B..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1708462 du 19 septembre 2019 du tribunal administratif de Lyon ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite par laquelle le ministre des solidarités et de la santé a rejeté sa demande d'autorisation d'exercer la profession de chirurgien pédiatre, spécialisé en chirurgie infantile, présentée en application de l'article L. 4111-2 du code de la santé publique ;
3°) d'annuler les résultats de l'épreuve de vérification des connaissances prévues aux articles L. 4111-2-I et L. 4221-12 du code de la santé publique organisée au titre de la session 2012, s'agissant de la liste C, spécialité chirurgie infantile ;
4°) d'enjoindre au ministre des solidarités et de la santé de lui délivrer l'autorisation sollicitée, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
5°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 150 000 euros au titre du préjudice qu'il estime avoir subi.
Il soutient que :
- la note de 7,40/20 que le jury d'examen lui a attribuée au titre de son parcours professionnel est manifestement sous-évaluée ;
- cette note constitue une discrimination traduisant la volonté du jury de ne pas intégrer des médecins diplômés en dehors de l'Union européenne, au titre de la liste C, dans la spécialité chirurgie infantile ;
- les membres du jury n'ont pas fait preuve d'impartialité en refusant, dans cette spécialité, tout candidat diplômé hors Union européenne ;
- cette discrimination constitue une rupture d'égalité des candidats aux épreuves de vérification des connaissances prévue aux articles L. 4111-2-I et L. 4221-12 du code de la santé publique ;
- il a été maintenu dans un statut précaire qui lui a causé un préjudice évalué à la somme de 150 000 euros.
Par un mémoire en défense enregistré le 17 novembre 2020, le ministre des solidarités et de la santé conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- à titre principal, M. B... n'ayant pas présenté de demande d'autorisation d'exercer la profession de chirurgien pédiatre spécialisé en chirurgie infantile, les conclusions de la requête tendant à l'annulation d'une décision implicite rejetant une telle demande sont, en application de l'article R. 421-1 du code de justice administrative, irrecevables ;
- la demande de M. B... tendant à la contestation des résultats des épreuves organisées au titre de la session 2012 a été présentée tardivement, en dehors d'un délai de recours raisonnable d'un an, tel que défini par la décision du Conseil d'Etat du 13 juillet 2016, n° 387763 ;
- à titre subsidiaire, M. B... ne remplit pas les conditions posées par les dispositions du I de l'article L. 4111-2 du code de la santé publique pour se voir délivrer une autorisation individuelle d'exercice ;
- le requérant ne remplit pas les conditions requises pour se voir accorder une autorisation d'exercice de la profession de médecin dans la spécialité chirurgie infantile de sorte que ses conclusions indemnitaires ne sont pas fondées ; au demeurant, la réussite aux épreuves de vérification des connaissances n'ouvre pas un droit automatique à la délivrance de l'autorisation d'exercice en France.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006 ;
- le décret n° 2012-659 du 4 mai 2012 ;
- l'arrêté du 2 mai 2012 modifiant l'arrêté du 5 mars 2007 modifié fixant les modalités d'organisation des épreuves de vérification des connaissances prévues aux articles L. 4111-2 et L. 4221-12 du code de la santé publique et fixant les modalités de l'épreuve de vérification des connaissances prévue en application de la loi n° 2012-157 du 1er février 2012 relative à l'exercice des professions de médecin, chirurgien-dentiste, pharmacien et sage-femme pour les professionnels titulaires d'un diplôme obtenu dans un Etat non membre de l'Union européenne ;
- l'arrêté du 10 mai 2012 portant ouverture des épreuves de vérification des connaissances mentionnées aux articles L. 4111-2-I et L. 4221-12 du code de la santé publique ainsi que de l'épreuve de vérification des connaissances prévue en application de la loi n° 2012-157 du 1er février 2012 relative à l'exercice des professions de médecin, chirurgien-dentiste, pharmacien et sage-femme pour les professionnels titulaires d'un diplôme obtenu dans un Etat non membre de l'Union européenne (session 2012) ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pin, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme Cottier, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant sénégalais, titulaire d'un diplôme de médecine obtenu dans un Etat non membre de l'Union européenne, s'est inscrit, au titre de la session 2012, à l'épreuve de vérification des connaissances prévue par la loi du 1er février 2012 relative à l'exercice des professions de médecin, chirurgien-dentiste, pharmacien et sage-femme pour les professionnels titulaires d'un diplôme obtenu dans un Etat non membre de l'Union européenne, pour l'exercice de la profession de médecin, spécialité chirurgie infantile. Ayant obtenu une note moyenne de 9,27 sur 20, il a été informé, par un courrier du 17 décembre 2012, que sa candidature n'avait pas été retenue. M. B... a, par un courrier adressé au ministre des solidarités et de la santé le 24 juillet 2017, contesté la note qui lui a été attribuée au titre de l'examen relatif à son parcours professionnel et a demandé à être " titularisé ". M. B... relève appel du jugement du 19 septembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision implicite par laquelle le ministre des solidarités et de la santé a refusé de faire droit à sa demande et, d'autre part, à la condamnation de l'Etat à l'indemniser du préjudice qu'il estime avoir subi. M. B... demande, en outre, l'annulation de l'arrêté du 31 janvier 2013 fixant la liste des praticiens ayant satisfait aux épreuves de vérification des connaissances prévues aux articles L. 4111-2-I et L. 4221-12 du code de la santé publique organisées au titre de la session 2012, en tant qu'il concerne la liste mentionnée à l'article 28 de l'arrêté du 5 mars 2007 (liste C), établie pour la profession de médecin, spécialité chirurgie infantile.
2. Aux termes du IV de l'article 83 de la loi du 21 décembre 2006 de financement de la sécurité sociale pour 2007, dans sa réaction issue de la loi n° 2012-157 du 1er février 2012 relative à l'exercice des professions de médecin, chirurgien-dentiste, pharmacien et sage-femme pour les professionnels titulaires d'un diplôme obtenu dans un Etat non membre de l'Union européenne : " (...) Par exception aux dispositions du sixième alinéa du I de l'article 60 de la loi n° 99-641 du 27 juillet 1999 précitée et aux dispositions du huitième alinéa du I de l'article 69 de la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale, les médecins et les chirurgiens-dentistes titulaires d'un diplôme, certificat ou autre titre obtenu dans un Etat non membre de l'Union européenne ou non partie à l'accord sur l'Espace économique européen et permettant l'exercice de la profession dans le pays d'obtention de ce diplôme, certificat ou titre, recrutés avant le 3 août 2010 dans des conditions fixées par décret dans un établissement public de santé ou un établissement de santé privé d'intérêt collectif, peuvent continuer à exercer leurs fonctions jusqu'au 31 décembre 2016. Les praticiens se présentent à une épreuve de vérification des connaissances, organisée chaque année jusqu'en 2016, dès lors qu'ils justifient : 1° Avoir exercé des fonctions rémunérées pendant au moins deux mois continus entre le 3 août 2010 et le 31 décembre 2011 ; 2° Avoir exercé trois ans en équivalent temps plein dans des conditions fixées par décret à la date de clôture des inscriptions à l'épreuve à laquelle ils se présentent. (...) Les médecins, chirurgiens-dentistes, pharmaciens et sages-femmes ayant satisfait à l'épreuve de vérification des connaissances exercent durant une année probatoire des fonctions rémunérées, dans des conditions fixées par décret, dans un établissement public de santé ou un établissement de santé privé d'intérêt collectif. A l'issue de cette année probatoire, l'autorisation d'exercer leur profession peut leur être délivrée par le ministre chargé de la santé, qui se prononce après avis de la commission mentionnée au I de l'article L. 4111-2 du code de la santé publique ou du Conseil supérieur de la pharmacie. Les fonctions exercées avant la réussite à cette épreuve peuvent être prises en compte après avis de ces mêmes instances, dans des conditions fixées par décret. Les modalités d'organisation de l'épreuve de vérification des connaissances mentionnée au troisième alinéa du présent IV sont fixées par décret ". Aux termes de l'article 5 du décret du 4 mai 2012 portant application de la loi n° 2012-157 du 1er février 2012 relative à l'exercice des professions de médecin, chirurgien-dentiste, pharmacien et sage-femme pour les professionnels titulaires d'un diplôme obtenu dans un Etat non membre de l'Union européenne : " I. _ L'épreuve de vérification des connaissances, prévue au troisième alinéa du IV de l'article 83 de la loi du 21 décembre 2006 susvisée, est organisée chaque année, à compter de 2012 et jusqu'en 2016, par profession, et, s'agissant des professions de médecin, de chirurgien-dentiste et de pharmacien, par spécialité. Un arrêté du ministre chargé de la santé fixe, pour chaque session, les professions et spécialités ouvertes à l'examen. Les candidats ne peuvent se présenter, pour une même session, que pour une seule profession et une seule spécialité. Cette épreuve comporte :1° S'agissant des médecins, des chirurgiens-dentistes et des pharmaciens : a) Un examen sur dossier relatif au parcours professionnel du candidat, portant sur l'activité professionnelle depuis l'obtention du diplôme permettant l'exercice de la profession dans le pays qui l'a délivré ; cet examen est affecté d'un coefficient 1 ; b) Un examen écrit de vérification des connaissances pratiques ; cet examen est affecté d'un coefficient 2. Pour être déclarés admis, les candidats obtiennent une note moyenne d'au moins 10 sur 20. Le jury établit une liste alphabétique des candidats reçus ; (...) ".
3. Aux termes de l'article 25 de l'arrêté du 5 mars 2007 fixant les modalités d'organisation des épreuves de vérification des connaissances prévues aux articles L. 4111-2 I et L. 4221-12 du code de la santé publique, dans sa rédaction alors en vigueur : " En application du IV de l'article 83 de la loi du 21 décembre 2006 modifiée susvisée, une épreuve de vérification des connaissances est organisée chaque année par le Centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière, à compter de 2012 et jusqu'en 2016. Cet examen est réservé aux candidats remplissant les conditions d'exercice prévues au IV de l'article 83 de la loi du 21 décembre 2006 précitée et à l'article 2 du décret du 4 mai 2012 susvisé ". L'article 28 de cet arrêté précise que la liste des candidats admis à concourir au titre de cette épreuve est dénommée " liste C ". En application des dispositions combinées des articles 21 et 26 de ce même arrêté, l'épreuve mentionnée à l'article 25 " fait l'objet d'une double correction indépendante et anonyme. La note qui en résulte est la moyenne arithmétique des deux notes ainsi attribuées. Une troisième correction est effectuée lorsqu'un écart supérieur ou égal à 5 % est constaté entre les deux corrections. Dans ce cas, la note résultant de la troisième correction est retenue. L'anonymat des épreuves écrites est assuré par un système informatisé. La levée de l'anonymat a lieu après la délibération du jury ". Selon l'annexe 1 à l'arrêté du 10 mai 2012 portant ouverture des épreuves de vérification des connaissances mentionnées aux articles L. 4111-2-I et L. 4221-12 du code de la santé publique ainsi que de l'épreuve de vérification des connaissances prévue en application de la loi n° 2012-157 du 1er février 2012 relative à l'exercice des professions de médecin, chirurgien-dentiste, pharmacien et sage-femme pour les professionnels titulaires d'un diplôme obtenu dans un Etat non membre de l'Union européenne (session 2012), le nombre maximum de personnes susceptibles d'être reçues au titre de la profession de médecin, spécialité chirurgie infantile, a été fixé à cinq.
4. Il appartient au juge administratif, dans la conduite de la procédure inquisitoire, de demander aux parties de lui fournir tous les éléments d'appréciation de nature à établir sa conviction. Cette responsabilité doit, dès lors qu'il est soutenu qu'une mesure a pu être empreinte de discrimination, s'exercer en tenant compte des difficultés propres à l'administration de la preuve en ce domaine et des exigences qui s'attachent aux principes à valeur constitutionnelle des droits de la défense et de l'égalité de traitement des personnes. S'il appartient au requérant qui s'estime lésé par une telle mesure de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer une atteinte à ce dernier principe, il incombe au défendeur de produire tous ceux permettant d'établir que la décision attaquée repose sur des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. La conviction du juge se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.
5. En premier lieu, M. B... soutient que la note de 7,40 sur 20 que le jury lui a attribuée au titre de l'examen sur dossier relatif au parcours professionnel, prévu au a) du 1° du I de l'article 5 du décret du 4 mai 2012 précité, n'est pas justifiée au vu de son expérience professionnelle et constitue une discrimination révélant la volonté du jury de ne pas admettre, au titre de la spécialité chirurgie infantile, de médecins diplômés d'Etats non membres de l'Union européenne. Toutefois, il ressort des pièces du dossier, notamment de l'arrêté du 31 janvier 2013, que cinq candidats titulaires de diplômes qui ont été délivrés par des Etats non membres de l'Union européenne et qui ont satisfait aux épreuves de vérification des connaissances au titre de la liste mentionnée à l'article 22 de l'arrêté du 5 mars 2007 (liste A), ont été admis à l'exercice de la profession de médecin, spécialité chirurgie infantile, soit le nombre maximum de personnes susceptibles d'être reçues au titre de cette spécialité, tel qu'il a été fixé à l'annexe 1 de l'arrêté du 10 mai 2012. En se bornant à soutenir qu'aucun candidat n'a été admis dans cette spécialité, au titre de la liste C, pour la session 2012, et à produire des attestations émanant des différents établissements de santé où il a été affecté et relatant sa manière de servir, M. B... n'apporte pas d'éléments susceptibles de faire présumer la discrimination qu'il allègue, ni une atteinte au principe d'égalité de traitement entre les candidats qui se sont présentés au titre d'autres spécialités. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier, pour les mêmes motifs, que le requérant aurait été privé des garanties d'impartialité du jury auxquelles tout candidat a droit. Au demeurant, l'épreuve de vérification des connaissances, qui comporte l'examen sur dossier relatif au parcours professionnel du candidat et l'examen écrit de vérification des connaissances pratiques, fait l'objet d'une anonymisation et d'une double correction dans les conditions précisées à l'article 21 de l'arrêté du 5 mars 2007 et citées au point 3.
6. En second lieu, alors que, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point précédent, M. B... n'établit pas, par les pièces qu'il produit, qu'il aurait été tenu compte de considérations étrangères à ses mérites et à ses aptitudes dans l'attribution de sa note au titre de l'examen sur dossier relatif au parcours professionnel, il n'appartient pas au juge administratif de contrôler l'appréciation faite par le jury d'examen des mérites de chacun des candidats.
7. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée en défense, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le ministre a refusé de l'autoriser à exercer la profession de médecin spécialisé en chirurgie infantile ainsi que, par voie de conséquence et en tout état de cause, ses conclusions indemnitaires. Les conclusions, présentées pour la première fois en appel par M. B... et tendant à l'annulation de l'arrêté du 31 janvier 2013 fixant la liste des praticiens ayant satisfait aux épreuves de vérification des connaissances organisées au titre de la session 2012, en tant qu'il concerne la liste mentionnée à l'article 28 de l'arrêté du 5 mars 2007 (liste C), établie pour la profession de médecin, spécialité chirurgie infantile, ne peuvent qu'être rejetées, sans qu'il soit besoin d'examiner leur recevabilité. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre des solidarités et de la santé.
Délibéré après l'audience du 29 avril 2021, à laquelle siégeaient :
M. Pourny, président de chambre,
M. Gayrard, président assesseur,
M. Pin, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er juin 2021.
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N° 19LY03963