Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 18 juin 2020 par lequel le préfet de la Savoie a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office.
Par un jugement n° 2004115 du 15 octobre 2020, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 23 novembre 2020, M. B..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 15 octobre 2020 ainsi que l'arrêté du 18 juin 2020 du préfet de la Savoie ;
2°) d'enjoindre à la préfète de la Savoie de lui délivrer un titre de séjour, à défaut de réexaminer sa situation dans le délai de trente jours à compter de la notification du présent arrêt et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement attaqué, insuffisamment motivé, est irrégulier ;
- la commission du titre de séjour n'a pas été consultée en méconnaissance de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision portant refus de séjour méconnaît les articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les articles L. 313-11 7° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision portant refus de séjour méconnaît l'article R. 121-2-1 du même code ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
- cette décision méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense enregistré le 17 juin 2021, le préfet de la Savoie conclut au rejet de la requête. Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative ;
La présidente de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D..., première conseillère ;
Considérant ce qui suit :
1. M. C... B..., ressortissant turc né en 1972, entré pour la dernière fois en France le 10 octobre 2018, relève appel du jugement 15 octobre 2020, par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 juin 2020 par lequel le préfet de la Savoie a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office.
2. En premier lieu, le jugement attaqué, bien qu'il vise le 4° de l'article R. 121-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au lieu du 3° invoqué alors en vigueur, fait état de ce que le requérant ne justifie pas remplir les conditions prévues par ces dispositions pour être admis au séjour et qu'en tout état de cause, sa demande de titre de séjour n'est pas fondée sur ces mêmes dispositions. Ce faisant, les premiers juges ont suffisamment répondu au moyen soulevé en première instance et tiré de ce que le refus de titre de séjour méconnaît les dispositions de l'article R. 121-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le jugement est ainsi suffisamment motivé. Par ailleurs, la contestation de l'appréciation portée par les premiers juges sur l'intensité des attaches privées et familiales que M. B... a conservées sur le territoire relève du bien-fondé et non de la régularité du jugement. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le jugement est irrégulier.
3. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que M. B... a séjourné régulièrement en France entre 1975 et 2006 où il s'est marié et a eu deux enfants de nationalité française et où résident aujourd'hui sa mère et ses frères et soeurs, ces derniers étant aussi de nationalité française. Après son départ pour la Turquie, en 2006, il est demeuré pendant douze ans dans ce pays où il aurait travaillé et où il a engagé une liaison avec une ressortissante belge à compter de l'année 2008 et qui l'a suivie en France. Si M. B... explique que son maintien sur le territoire à l'expiration de son visa touristique à compter de l'année 2018, est motivé par le besoin de se rapprocher de sa famille, notamment ses deux enfants âgés de trente-et-un et vingt-neuf ans à la date de l'arrêté attaqué, et qu'il n'a pu bénéficier auparavant d'un visa pour rentrer en France, il ne justifie toutefois pas de ses démarches infructueuses pour obtenir un visa qu'il aurait entreprises depuis 2008, après la date d'expiration de sa carte de résident, ni, de l'ancrage de ses liens privés et familiaux en France à compter de 2018 par la seule nécessité de revoir ses enfants, dont il admet qu'ils sont venus le visiter en Turquie dans l'intervalle. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le refus de titre de séjour litigieux porte à son droit au respect de sa privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
4. Par ailleurs, il résulte de ce qui a été dit au point 3 que la situation de M. B... ne laisse apparaître aucune circonstance exceptionnelle ni aucune considération humanitaire de nature à justifier son admission exceptionnelle au séjour. Le préfet de la Savoie n'a ainsi pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en refusant sa régularisation sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur.
5. En troisième lieu, il résulte des dispositions des articles L. 312-1 et R. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le préfet est tenu de saisir la commission du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions, prévues notamment à l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions. Ainsi qu'il vient d'être dit, M. B... ne remplit pas les conditions de délivrance d'une carte de séjour posées par les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur. Par suite, le préfet n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de lui refuser la délivrance d'un titre de séjour sur ces fondements.
6. En quatrième et dernier lieu, aux termes de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, tout citoyen de l'Union européenne, tout ressortissant d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse a le droit de séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois s'il satisfait à l'une des conditions suivantes : 1° S'il exerce une activité professionnelle en France ; / 2° S'il dispose pour lui et pour les membres de sa famille tels que visés au 4° de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale, ainsi que d'une assurance maladie ; / (...) ; / 4° S'il est un descendant direct âgé de moins de vingt et un ans ou à charge, ascendant direct à charge, conjoint, ascendant ou descendant direct à charge du conjoint, accompagnant ou rejoignant un ressortissant qui satisfait aux conditions énoncées aux 1° ou 2° ; (...). ". Aux termes de l'article R. 121-2-1 du même code alors en vigueur : " Après un examen de sa situation personnelle, l'autorité administrative peut appliquer les dispositions des articles R. 121-1 et R. 121-2 à tout ressortissant étranger, quelle que soit sa nationalité, ne relevant pas des 4° et 5° de l'article L. 121-1 : 1° Si, dans le pays de provenance, il est membre de famille à charge ou faisant partie du ménage d'un ressortissant mentionné aux 1°, 2° ou 3° de l'article L. 121-1 ; / (...) / 3° S'il atteste de liens privés et familiaux durables, autres que matrimoniaux, avec un ressortissant mentionné aux 1°, 2° ou 3° de l'article L. 121-1. ".
7. M. B... se prévaut de sa relation avec une ressortissante belge pour soutenir que le préfet aurait dû l'admettre au séjour sur le fondement des dispositions précitées au point 6. Toutefois, alors qu'il n'a pas demandé de titre de séjour sur ce fondement, M. B... ne justifie en tout état de cause pas de ce que sa compagne remplit les conditions énoncées par les 1° ou 2° de l'article L. 121-1 précité à la date de l'arrêté attaqué. Au surplus, eu égard à sa situation privée et familiale rappelée au point 3, M. B... ne justifie pas non plus qu'il puisse être admis au séjour en France sur le fondement du 3° de l'article R. 121-2-1 précité.
8. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Savoie.
Délibéré après l'audience du 21 juin 2021 à laquelle siégeaient :
Mme Daniele Déal, présidente ;
M. Thierry Besse, président-assesseur ;
Mme E... D..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 juillet 2021.
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N° 20LY03419