Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
La SAS RT International a demandé au tribunal administratif de Lyon la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de la période du 1er avril 2012 au 31 mars 2015.
Par un jugement n° 1707453 du 19 mars 2019, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 20 mai 2019, la SAS RT International, représentée par Me Aujoulat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 19 mars 2019 et de prononcer la décharge en droits et pénalités des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés susvisées ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle est fondée à bénéficier du crédit d'impôt recherche sur le fondement des h) et i) du II de l'article 244 quater B du code général des impôts et, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, au regard des paragraphes n°40 et suivants de la documentation administrative BOI-BIC-RICI-10-10-40 du 12 septembre 2012 ;
- dans le cadre de la précédente vérification de comptabilité, l'administration n'a pas remis en cause le bénéfice de ce crédit d'impôt et ses conditions d'exploitation n'ont pas changé, ce qui constitue une position formelle sur l'éligibilité de la société au crédit impôt recherche au sens de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales.
Par un mémoire, enregistré le 24 décembre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 18 novembre 2020, la clôture d'instruction a été fixée au 18 décembre 2020.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Rémy-Néris, première conseillère,
- et les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. La SAS RT International, qui exerce son activité dans le secteur du textile et de l'habillement, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les déclarations de crédit d'impôt recherche au titre de la période du 1er avril 2012 au 31 mars 2015. A l'issue de cette vérification, l'administration fiscale a remis en cause le bénéfice des crédits d'impôt déclarés et mis à la charge de la société des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercices concernés assorties des intérêts de retard. La SAS RT International relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces cotisations supplémentaires en droits et pénalités.
Sur l'application de la loi fiscale :
2. D'une part, aux termes de l'article 244 quater B du code général des impôts : " I. - Les entreprises industrielles et commerciales ou agricoles imposées d'après leur bénéfice réel (...) peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elles exposent au cours de l'année. (...) / II. - Les dépenses de recherche ouvrant droit au crédit d'impôt sont : (...) h) Les dépenses liées à l'élaboration de nouvelles collections exposées par les entreprises industrielles du secteur textile-habillement-cuir (...) ; i) Les dépenses liées à l'élaboration de nouvelles collections confiée par les entreprises industrielles du secteur textile-habillement-cuir à des stylistes ou bureaux de style agréés selon des modalités définies par décret ;(...) ". En adoptant ces dispositions, le législateur a entendu, par l'octroi d'un avantage fiscal, soutenir l'industrie manufacturière en favorisant les systèmes économiques intégrés qui allient la conception et la fabrication de nouvelles collections. Il en résulte que le bénéfice du crédit d'impôt recherche est ouvert sur le fondement de ces dispositions aux entreprises qui exercent une activité industrielle dans le secteur du textile, de l'habillement et du cuir lorsque les dépenses liées à l'élaboration de nouvelles collections sont exposées en vue d'une production dans le cadre de cette activité. Revêtent un caractère industriel, au sens de ces dispositions, les entreprises du secteur textile-habillement-cuir exerçant une activité de fabrication ou de transformation de biens corporels mobiliers qui nécessite d'importants moyens techniques.
3. En l'espèce, il est constant que la société RT International exerce dans le secteur du textile, de l'habillement et du cuir, une activité de conception et de commercialisation de vêtements pour femmes destinés à la vente en gros et au détail. Si elle conçoit les prototypes de vêtements à confectionner sur ses propres machines et avec des matières premières qu'elle achète, il résulte de l'instruction qu'elle confie intégralement la fabrication et la production des articles qu'elle commercialise à des sous-traitants établis à l'étranger. En effet, compte tenu des faibles quantités de matière première qu'elle justifie avoir acquis pour les exercices en cause pour les besoins de son activité et le faible montant de l'outillage comptabilisé, il ne résulte pas de l'instruction qu'elle mettrait à la disposition de ses sous-traitants les textiles et peaux nécessaires à la confection de ses modèles et qu'elle participerait ainsi à la fabrication de ces derniers, alors qu'elle ne dispose pas des immobilisations matérielles, constituées par les machines et l'outillage, ni du personnel nécessaires à la fabrication industrielle de ses collections. Par suite, la société appelante n'exerçant pas une activité industrielle au sens des dispositions du h) du II de l'article 244 quater B du code général des impôts, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé qu'elle ne pouvait solliciter le bénéfice de ce crédit d'impôt sur le fondement des dispositions précitées.
4. D'autre part, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, et à supposer le moyen soulevé, la société RT International n'est pas davantage fondée, pour le même motif, à se prévaloir des dispositions du i) du II de l'article 244 quater B du code général des impôts, alors qu'elle ne soutient même pas d'ailleurs confier à des prestataires externes l'élaboration de ses nouvelles collections conformément à ces dispositions.
Sur l'interprétation administrative de la loi fiscale :
5. La société RT International se prévaut, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des paragraphes 20 et 30 de l'instruction référencée BOI-BIC-RICI-10-10-40 du 12 septembre 2012 aux termes desquels : " 20 : " Sont seules concernées les entreprises du secteur textile-habillement-cuir qui exercent une activité industrielle. Les activités industrielles s'entendent de celles qui concourent directement à l'élaboration ou à la transformation de biens corporels mobiliers. Ces activités consistent en la transformation de matières premières ou de produits semi-finis en produits fabriqués ; le rôle du matériel ou de l'outillage y est prépondérant. " ; 30 " Ne sont donc pas concernées les entreprises du secteur textile-habillement-cuir qui n'exercent aucune activité de production : cabinets de stylistes, entreprises qui créent de nouvelles collections mais qui concèdent la fabrication à d'autres entreprises... / En revanche, les entreprises industrielles qui sous-traitent leur fabrication à des tiers peuvent bénéficier du crédit d'impôt. Le bénéfice du dispositif ne peut donc être refusé aux entreprises ayant recours à la sous-traitance dès lors qu'elles sont propriétaires de la matière première et qu'elles assurent tous les risques de la fabrication et de la commercialisation. En revanche, les entreprises qui concèdent leur droit de fabrication sont exclues du dispositif. Ces précisions s'appliquent au règlement des litiges en cours. ".
6. Les énonciations de l'instruction fiscale précitée s'appliquent aux entreprises industrielles, dont elles ne donnent pas une définition différente de celle, rappelée au point 2, résultant des dispositions de l'article 244 quater B du code général des impôts. Il résulte de ce qui a été dit au point 3 que la société RT International n'exerce pas avec ses propres moyens de production une activité de transformation de biens corporels mobiliers et ne revêt donc pas un caractère industriel au sens de ces dispositions. Il ne résulte pas de l'instruction qu'elle utilise un outillage dont le rôle est prépondérant. En outre et au surplus, il résulte de l'instruction qu'elle achète des matières premières pour la confection de ses seuls prototypes et que les matières premières, nécessaires à la confection des articles commercialisés, sont achetées directement par les sous-traitants et éventuellement fournies par la société appelante qui les refacture à ces derniers. La SAS RT International n'est donc pas propriétaire des matières premières. Elle n'assure pas davantage tous les risques de fabrication et de commercialisation dès lors notamment que les sous-traitants ont l'obligation d'assurer les marchandises entreposées dans leurs locaux jusqu'au chargement des produits finis et qu'il leur revient de refaire à leur charge les pièces déclarées non conformes par la société RT International. Dès lors, la société RT International n'est pas fondée à invoquer le bénéfice de la doctrine administrative précitée, dans les prévisions de laquelle elle n'entre pas, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.
7. Si la société RT International soutient que l'administration fiscale n'a pas remis en cause, lors d'une précédente vérification de comptabilité, l'éligibilité au crédit d'impôt recherche, elle ne produit aucun élément en attestant. Elle n'est donc pas fondée à se prévaloir à ce titre d'une prise de position formelle sur sa situation au regard de la loi fiscale pour les travaux qu'elle a pu réaliser au cours des exercices en litige au sens de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales.
8. Il résulte de ce qui précède que la SAS RT International n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de la période du 1er avril 2012 au 31 mars 2015. Les conclusions qu'elle présente aux mêmes fins en appel ainsi que ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SAS RT International est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS RT International et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Délibéré après l'audience du 23 septembre 2021 à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme Dèche, présidente assesseure,
Mme Rémy-Néris, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 14 octobre 2021.
3
N° 19LY01889
ar