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27/01/2022 | FRANCE | N°20LY00403

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre, 27 janvier 2022, 20LY00403


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Les consorts G... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner la communauté de communes du pays du Grésivaudan et son assureur, la compagnie Aréas Dommages, à leur verser diverses sommes et de mettre à leur charge une somme de 15 000 euros au titre des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative.

La caisse locale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants a demandé au même tribunal de condamner la communauté de communes du pays du Gr

sivaudan et son assureur, la compagnie Aréas Dommages, à lui verser la somme de 95 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Les consorts G... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner la communauté de communes du pays du Grésivaudan et son assureur, la compagnie Aréas Dommages, à leur verser diverses sommes et de mettre à leur charge une somme de 15 000 euros au titre des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative.

La caisse locale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants a demandé au même tribunal de condamner la communauté de communes du pays du Grésivaudan et son assureur, la compagnie Aréas Dommages, à lui verser la somme de 95 396,18 euros ainsi que celle de 1 080 euros au titre de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale.

Par un jugement n° 1706630 du 2 décembre 2019, le tribunal administratif de Grenoble a condamné la communauté de communes du pays du Grésivaudan et la compagnie Aréas Dommages à verser la somme de 94 205,04 euros à M. C... G..., celle de 11 927,20 euros à Mme D... G..., celle de 1 245 euros à Mme B... F..., celle de 760 euros à M. E... G... et celle de 95 396,18 euros à la caisse locale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 28 janvier 2020, la compagnie Aréas Dommages, représentée par Me Phelip, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1706630 du 2 décembre 2019 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) de condamner les consorts G... à lui verser la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

* M. G... n'a pas établi la matérialité des faits concernant sa chute ;

* aucun défaut d'entretien normal de l'ouvrage public en cause ne peut être reproché à la communauté de communes du Pays du Grésivaudan ;

* la victime a commis une faute exonératoire ;

* l'évaluation des préjudices de M. G... est excessive s'agissant de frais médicaux futurs, de l'assistance par tierce personne, de frais de déplacement, du déficit fonctionnel temporaire, des souffrances endurées, du préjudice esthétique temporaire ou permanent, du déficit fonctionnel permanent et du préjudice d'agrément ;

* les préjudices des autres membres de la famille G... ne sont pas établis.

Par un mémoire enregistré le 30 novembre 2020, la communauté de communes Le Grésivaudan, représentée par Me Fessler, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1706630 du 2 décembre 2019 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) de rejeter les demandes des consorts G... ou, à titre subsidiaire, de ramener leurs préjudices à de plus justes proportions ;

3°) de condamner les consorts G... à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

* les circonstances exactes de l'accident ne sont pas rapportées ;

* aucun défaut d'entretien normal ne peut lui être reproché ;

* la réglementation en matière d'installations classées pour la protection de l'environnement ou le guide d'aide à l'élaboration et à la rédaction des règlements intérieurs de déchetteries ne sont pas opposables ;

* l'évaluation des préjudices de M. G... est excessive s'agissant des frais médicaux futurs, des frais de déplacement, de l'assistance par tierce personne, du déficit fonctionnel temporaire, des souffrances endurées, du préjudices esthétique temporaire ou permanent, du déficit fonctionnel permanent, du préjudice d'agrément ;

* les préjudices des autres membres de la famille G... ne sont pas établis.

Par deux mémoires, enregistrés le 23 décembre 2020 et le 3 février 2021, M. C... G..., Mme D... G..., Mme B... F... née G... et M. E... G..., représentés par Me Hartemman-De Cicco, concluent au rejet des demandes de la communauté de communes Le Grésivaudan et de la société Aréas Dommages et demandent à la cour de les condamner à leur verser la somme de 15 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les sommes suivantes :

1°) Pour M. C... G... :

* Dépenses de santé actuelles pour 1 223 euros, 618,42 euros et 160 euros

* Frais de déplacement pour 1 597,02 euros

* Honoraires de l'expert pour 1 990 euros

* Frais de tierce personne temporaire pour 1 300 euros

* Coût de travaux pour 2 531,05 euros

* Frais d'huissier pour 300 euros

* Déficit fonctionnel temporaire pour 4 634 et 9 116 euros

* Souffrances endurées pour 35 000 euros

* Préjudice esthétique temporaire pour 3 000 euros

* Dépenses de santé futures pour 1 223 et 1 515,48 euros

* Déficit fonctionnel permanent pour 90 000 euros

* Préjudice d'agrément pour 20 000 euros

* Préjudice esthétique permanent pour 4 000 euros

* Incidence professionnelle pour 23 915,01 euros

* Préjudice sexuel pour 15 000 euros

* Préjudice moral pour 20 000 euros

2°) pour Mme D... G... :

* Préjudice moral pour 20 000 euros

* Frais de déplacement et de téléphone pour 4 354,75 euros

3°) Pour Mme B... G... :

* Frais divers pour 2 083,64 euros

4°) Pour M. E... G... :

* Frais divers pour 3 226,35 euros.

Ils font valoir que :

* les moyens soulevés par la communauté de communes Le Grésivaudan et son assureur, la société Aréas Dommages, ne sont pas fondés ;

* le tribunal administratif de Grenoble n'a pas procédé à une juste appréciation de leurs préjudices et son jugement devra être réformé sur ce point.

Par un mémoire, enregistré le 25 janvier 2021, la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme conclut au rejet des demandes de la communauté de communes Le Grésivaudan et de la société Aréas Dommages et à ce que ces dernières lui versent la somme de 1 098 euros au titre de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale et celle de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens soulevés par la communauté de communes Le Grésivaudan et son assureur, la société Aréas Dommages, ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

* le code de la sécurité sociale ;

* l'arrêté du 26 mars 2012 relatif aux prescriptions générales applicables aux installations classées relevant du régime de l'enregistrement au titre de la rubrique n° 2710-2 (installations de collecte de déchets non dangereux apportés par leur producteur initial) de la nomenclature des installations classées pour la protection de l'environnement ;

* le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

* le rapport de M. Gayrard, président assesseur,

* les conclusions de Mme Cottier, rapporteure publique,

* les observations de Me Barnier, substituant Me Fessler, représentant la communauté de communes Le Grésivaudan ;

* les observations de Me Hartemann-De Cicco, représentant les consorts G... ;

* et les observations de Me Di Curzio, représentant la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme.

Considérant ce qui suit :

1. Le 25 septembre 2014, M. C... G..., né le 23 septembre 1953, a fait une chute depuis une plateforme de déchargement de la déchetterie intercommunale située sur la commune de Crolles et appartenant à la communauté de communes du Pays du Grésivaudan. Par ordonnance du 19 juillet 2016, le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble a désigné un expert qui a remis son rapport le 15 décembre 2016. Après avoir adressé une réclamation préalable du 31 juillet 2017, M. C... G..., Mme D... G..., son épouse, et leurs enfants Mme B... F... et M. E... G..., ont saisi le tribunal administratif de Grenoble de conclusions tendant à la condamnation de la communauté de communes du Pays du Grésivaudan et de son assureur, la société Aréas Dommages, à leur verser respectivement les sommes de 235 899,98, 24 354,75, 2 083,64 et 3 226,35 euros ; la caisse locale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants a demandé la condamnation de l'établissement public et de son assureur à lui verser la somme de 95 396,16 euros, outre l'indemnité forfaitaire de gestion. Par jugement du 2 décembre 2019, dont la société Aréas Dommages et la communauté de communes du Pays de Grésivaudan, désormais dénommée communauté de communes Le Grésivaudan, relèvent appel, le tribunal administratif de Grenoble a condamné cet établissement public et son assureur à verser la somme de 94 205,04 euros à M. C... G..., celle de 11 927,20 euros à Mme D... G..., celle de 1 245 euros à Mme B... F..., celle de 760 euros à M. E... G... et celle de 95 396,18 euros à la caisse locale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants. Les consorts G... présentent des conclusions incidentes tendant à ce que le jugement soit réformé pour accueillir l'intégralité de leurs demandes devant les premiers juges.

Sur la responsabilité :

2. Il appartient à l'usager, victime d'un dommage survenu à l'occasion de l'utilisation d'un ouvrage public, de rapporter la preuve du lien de cause à effet entre l'ouvrage public et le dommage dont il se plaint. La collectivité en charge de l'ouvrage peut s'exonérer de sa responsabilité en rapportant la preuve, soit de l'entretien normal de celui-ci, soit de ce que le dommage est imputable à la faute de la victime, soit encore d'un cas de force majeure.

En ce qui concerne la matérialité des faits et le lien de causalité :

3. Si la communauté de communes Le Grésivaudan et son assureur, la société Aréas Dommages, font valoir qu'en l'absence de témoin oculaire et en raison d'une amnésie rétrograde suite au traumatisme crânien subi par la victime, les circonstances exactes de l'accident ne sont pas connues, il n'est pas sérieusement contesté qu'alors qu'il était en train d'évacuer des déchets verts depuis une plateforme de la déchetterie le 25 septembre 2014 vers dix heures, M. G... a fait une chute de plusieurs mètres entre deux grandes bennes où il a été retrouvé par un agent de la déchetterie avant d'être transporté au centre hospitalier universitaire de Grenoble. Ainsi la matérialité des faits doit être regardée comme suffisamment établie. De même, le lien de causalité entre les préjudices subis par la victime et l'ouvrage public en cause, la déchetterie intercommunale de Crolles, est suffisamment direct et certain.

En ce qui concerne l'entretien normal de l'ouvrage :

4. Aux termes de l'article 27 de l'arrêté du 26 mars 2012 relatif aux prescriptions générales applicables aux installations classées relevant du régime de l'enregistrement au titre de la rubrique n° 2710-2 (installations de collecte de déchets non dangereux apportés par leur producteur initial) de la nomenclature des installations classées pour la protection de l'environnement, applicable à la déchetterie intercommunale en cause : " Prévention des chutes et collisions. Les piétons circulent de manière sécurisée entre chaque zone possible de dépôts de déchets. I. ' Lorsque le quai de déchargement des déchets est en hauteur, un dispositif anti-chute adapté est installé tout le long de la zone de déchargement. Sur les autres parties hautes du site, comme la voie d'accès à la zone de déchargement, un dispositif est mis en place afin d'éviter notamment la chute de véhicules en contre bas. Des panneaux signalant le risque de chutes sont affichés à divers endroits de ces zones. (...) "

5. Il résulte de l'instruction, et notamment d'un procès-verbal de constat d'huissier dressé le 26 novembre 2014 sur ordonnance du président du tribunal de grande instance de Grenoble du 14 novembre précédent, que, d'une part, la plateforme d'où a chu M. G... surplombait une fosse située à près de trois mètres en dessous, dans laquelle se trouvaient des bennes d'une hauteur de 2,675 mètres, espacées d'environ cinquante centimètres, et, d'autre part, que le quai de déchargement pour les usagers comportait sur toute la longueur un muret de 54 cm de haut et de 40 cm de large. Dans cette configuration des lieux, contrairement à ce que soutiennent la communauté de communes Le Grésivaudan et la société Aréas Dommages, le muret bordant la plateforme accessible aux usagers ne peut être regardé comme un dispositif antichute au sens des dispositions précitées au point précédent. En outre, comme l'a exactement retenu le tribunal administratif de Grenoble, la largeur du muret et le positionnement des bennes à environ 30 cm en contrebas constituaient un risque supplémentaire de chute en favorisant la déstabilisation des usagers lors de l'évacuation des déchets importants. De même, l'espacement entre les bennes d'environ cinquante centimètres constituait également un risque d'aggravation d'une chute. Enfin, il n'est pas contesté que le risque de chute n'avait fait l'objet d'aucune signalisation spécifique, alors que les dispositions précitées de l'article 27 de l'arrêté du 26 mars 2012 prévoient une signalisation de ce risque. Dans ces conditions, la communauté de communes Le Grésivaudan n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, de l'entretien normal de l'ouvrage public lui appartenant.

En ce qui concerne la faute de la victime :

6. Contrairement à ce que soutiennent la communauté de communes Le Grésivaudan et la société Aréas Dommages, la seule circonstance que M. G... ait fait une chute dans l'espace entre deux bennes ne saurait suffire, à elle seule, à caractériser une faute de sa part. En l'absence de connaissance des circonstances exactes de l'accident, aucune faute ne peut être reprochée à la victime de nature à exonérer même partiellement la responsabilité de l'établissement public et de son assureur.

7. Il résulte de ce qui précède que la communauté de communes Le Grésivaudan et la société Aréas Dommages ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a retenu leur responsabilité quant aux conséquences dommageables ayant découlé de la chute de M. G... dans la déchetterie intercommunale de Crolles le 25 septembre 2014.

Sur les préjudices :

En ce qui concerne M. C... G... :

S'agissant des préjudices patrimoniaux :

8. En premier lieu, il n'est pas contesté que la caisse locale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants, aux droits de laquelle vient la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme, a exposé des débours au bénéfice de M. G..., en lien avec l'accident dont s'agit, pour un montant de 92 435 euros. Il n'est pas non plus contesté que M. G... a dû exposer un reste à charge concernant des prothèses dentaires pour un montant de 1 223 euros, des lunettes pour 618,42 euros et enfin quatre séances de chiropracteurs pour un montant de 160 euros chacune, soit la somme de 2 001,42 euros. En revanche, c'est par une exacte appréciation des faits que le tribunal administratif de Grenoble a écarté la demande de prise en compte du coût de renouvellement des prothèses dentaires tous les quinze ans dès lors que l'intéressé portait de tels appareillages avant l'accident.

9. En deuxième lieu, M. G... demande le remboursement de divers frais de déplacement. Comme l'a exactement retenu le tribunal administratif de Grenoble, les frais de déplacement exposés par la victime pour se rendre à l'accédit font partie des dépens de l'instance tandis que ceux exposés pour échanger avec son conseil font partie des frais exposés et non compris dans les dépens. De même, le tribunal administratif a écarté à bon escient des frais de déplacement pour se rendre à la clinique Santi à Lyon dès lors que celle-ci n'est pas mentionnée dans l'expertise judiciaire et ne présente donc pas de lien avec les séquelles subies. Par suite, les premiers juges ont fait une exacte appréciation de ce chef de préjudice en allouant la somme de 327,62 euros.

10. En troisième lieu, il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que l'état de santé de M. G... a nécessité pendant trois mois une assistance par tierce personne à hauteur de quatre heures par semaine. En retenant la somme de 676 euros sur la base d'un coût horaire de 13 euros, le tribunal administratif a fait une juste appréciation de ce chef de préjudice, contrairement à ce que soutiennent non seulement les consorts G... mais également la communauté de communes du Pays du Grésivaudan et son assureur.

11. En quatrième lieu, M. G... ayant pris sa retraite le 1er décembre 2014, soit quelques semaines après son accident, ne demande rien au titre d'une perte de gains professionnels, laquelle a été totalement compensée par l'octroi d'indemnités journalières par la caisse locale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants pour un montant de 2 961,18 euros.

12. En dernier lieu, M. G... soutient que l'accident l'a empêché de rénover deux maisons destinées à devenir des gîtes. Il demande à être indemnisé du coût de la main d'œuvre auquel il soutient avoir dû recourir alors qu'il était jusqu'à l'accident en capacité de procéder lui-même aux travaux nécessaires. Toutefois, pour justifier de la réalité de ce préjudice, M. G... produit deux devis établis les 7 novembre 2014 et 31 mai 2017, et non des factures, et une facture émise le 25 septembre 2015 dont il n'établit nullement le lien de causalité avec les séquelles subies. Par suite, ce chef de préjudice ne peut qu'être écarté.

S'agissant des préjudices extrapatrimoniaux :

13. En premier lieu, l'expert a retenu un déficit fonctionnel temporaire total du 25 septembre 2014 au 13 février 2015 comprenant le séjour initial au centre hospitalier universitaire de Grenoble puis sa convalescence en service de soins de suite et de réadaptation, et un déficit fonctionnel partiel à 50 % pour la période à domicile, du 14 février 2015 au 22 août 2016, date de la consolidation de son état de santé. En accordant la somme de 7 500 euros, le tribunal administratif de Grenoble n'a pas fait une évaluation excessive comme le soutiennent la communauté de communes Le Grésivaudan et son assureur, ni insuffisante comme l'opposent les consorts G....

14. En deuxième lieu, l'expert a fixé le déficit fonctionnel permanent à 45 % en raison de troubles neurologiques modérés, de quadrapnosie et d'anosmie, d'une épilepsie traitée, d'une fatigabilité et de difficultés respiratoires. En se bornant à soutenir qu'une telle évaluation serait relativement excessive, l'établissement public et son assureur ne contestent pas sérieusement l'appréciation à laquelle s'est livré le tribunal administratif de Grenoble.

15. En troisième lieu, l'expert a évalué les souffrances endurées par M. G..., du fait de ses multiples fractures, de son traumatisme crânien, d'un coma de dix-huit jours, d'une escarre, de crises d'épilepsie, de soins dentaires et d'une forme de dépression, à quatre sur une échelle de sept. En accordant la somme de 7 500 euros, le tribunal administratif a correctement évalué l'indemnisation de ce chef de préjudice.

16. En quatrième lieu, l'expert a distingué un préjudice esthétique temporaire évalué à quatre sur sept tenant au coma de dix-huit jours et un préjudice permanent estimé à un sur sept, du fait d'une cicatrice liée à une escarre, qui, contrairement à ce que soutiennent la communauté de communes Le Grésivaudan et la société Aréas Dommages, présente un lien suffisant avec l'accident dès lors qu'il a été occasionné au décours de l'hospitalisation qui s'en est suivie. Le tribunal administratif a procédé à une indemnisation globale en accordant la somme de 1 200 euros qui ne parait pas insuffisante, contrairement à ce que soutiennent les consorts G....

17. En cinquième lieu, si M. G... réitère en appel sa demande d'indemnisation de son préjudice d'agrément tenant à ce qu'il aurait renoncé à faire du ski, du patin à glace et de la moto, il n'apporte toujours aucun justificatif en cause d'appel comme devant les premiers juges qui ont pu, à bon droit, écarter ce chef de préjudice.

18. En sixième lieu, M. G... fait valoir un préjudice sexuel alors que l'expert indique dans son rapport : " il est déclaratif. Il n'y a pas de motif anatomique d'altération de la fonction sexuelle ". Dans ces conditions, l'établissement public et son assureur sont fondés à soutenir que ce préjudice doit être écarté.

19. En dernier lieu, M. G... ne peut invoquer un préjudice moral en raison d'un changement de personnalité lié à l'accident, lequel préjudice a été indemnisé dans la cadre du déficit fonctionnel permanent.

20. Il découle des points 8 à 18 que le préjudice de M. C... G... s'établit à la somme de 94 205,04 euros correspondant exactement à la condamnation prononcée par le juge de première instance tandis qu'au vu des points 8 et 11, les droits de la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme, venant aux droits de la caisse locale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants, s'établissent toujours à la somme de 95 396,18 euros. Dans ces conditions, la communauté de communes Le Grésivaudan et la société Aréas Dommages ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble les a condamnées solidairement à verser la somme de 94 205,04 euros à M. C... G... et la somme de 95 396,18 euros à la caisse locale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants.

En ce qui concerne Mme D... G... :

21. D'abord, le tribunal administratif de Grenoble a procédé à une juste appréciation du préjudice moral de Mme G..., en lui allouant la somme de 8 000 euros, compte tenu de la longue période d'hospitalisation et de convalescence de son mari et de son déficit fonctionnel permanent.

22. Ensuite, sur les divers frais dont Mme G... demande le remboursement, le tribunal administratif de Grenoble a pu valablement écarter ceux afférents à des frais postaux ou de télécommunication et faire ainsi une exacte appréciation de son préjudice à ce titre en accordant la somme de 3 927,20 euros.

En ce qui concerne Mme B... G... et M. E... G... :

23. Il n'est pas sérieusement contesté que les préjudices matériels subis par Mme B... G..., fille A... la victime, et de M. E... G..., son fils, peuvent être évalués respectueusement à la somme de 1 245 euros et de 760 euros, tels que retenus par les premiers juges.

24. Il découle des points 8 à 23, qui confirment intégralement l'évaluation des préjudices faite par le tribunal administratif de Grenoble, que les conclusions incidentes présentées par les consorts G... tendant à une majoration des condamnations prononcées doivent être rejetées.

Sur les autres conclusions :

25. Lorsqu'une condamnation du tiers responsable au paiement de l'indemnité forfaitaire a été prononcée par les premiers juges, la caisse ne peut obtenir ensuite qu'un rehaussement du montant de l'indemnité forfaitaire, non une nouvelle condamnation, et seulement si elle obtient une majoration des sommes qui lui sont dues au titre de son action en indemnisation de ses débours. En l'espèce, les droits de la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme restant inchangés par rapport au jugement attaqué, ses conclusions tendant à ce qu'il soit mis à la charge de la communauté de communes Le Grésivaudan une somme de 1 098 euros au titre de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ne peuvent être accueillies.

26. Les dépens d'un montant de 2 564,62 euros sont laissés à la charge définitive de la communauté des communes Le Grésivaudan et de la société Aréas Dommages.

27. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administratives font obstacle à ce que soient mis à la charge des consorts G..., qui ne sont pas les parties perdantes, une quelconque somme au titre des frais exposés par la communauté de communes Le Grésivaudan et par la société Aréas Dommages et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, non plus, de faire droit aux conclusions présentées sur ce même fondement par les consorts G... et la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Aréas Dommages est rejetée.

Article 2 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à M. C... G..., à Mme D... G..., à Mme B... F... née G..., à M. E... G..., à la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme, à la communauté de communes Le Grésivaudan et à la compagnie Aréas Dommages.

Délibéré après l'audience du 6 janvier 2022, à laquelle siégeaient :

* M. Pourny, président de chambre,

* M. Gayrard, président assesseur,

* M. Pin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 janvier 2022.

N° 20LY00403 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY00403
Date de la décision : 27/01/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

67-02-02-02 Travaux publics. - Règles communes à l'ensemble des dommages de travaux publics. - Régime de la responsabilité. - Qualité d'usager.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: M. Jean-Philippe GAYRARD
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : SELURL PHELIP

Origine de la décision
Date de l'import : 01/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-01-27;20ly00403 ?
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